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L’Edito du-Dimanche-21-avril-2013: Le plan secret des maîtres du monde par Bruno Bertez

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L’Edito du-Dimanche-21-avril-2013: Le plan secret des maîtres du monde par Bruno Bertez

Il a fallu longtemps, beaucoup de patience, pour implanter l’idée de la répression financière. C’est maintenant chose faite, tout le monde, y compris le grand public, comprend que la politique des Banques Centrales et des gouvernements est une politique de confiscation. Même les médias les plus bornés comprennent et expliquent à leurs lecteurs que les taux d’intérêt nominaux sont nuls, que les taux réel sont négatifs et, bref, qu’ils s’appauvrissent. Ces médias n’en sont pas encore à montrer que les hausse de taxes, de frais, de commissions, qui touchent toutes les formes de placements, vont dans la même direction: celle de la confiscation du capital. Cela viendra.

    Avec cette prise de conscience, le phénomène discret d’entonnoir se précise et s’amplifie. Qu’est-ce que l’effet d’entonnoir? C’est la canalisation des flux financiers, de l’épargne, vers des réceptacles précis, balisés. Un entonnoir, cela collecte large et cela dirige plus étroit. Ce que l’on voit, maintenant que la répression financière est du domaine public, ce sont des incitations à abandonner  les formes d’épargne qui ne rapportent rien et s’érodent au profit de formes qui ont un rendement positif apparent. C’est la fameuse quête du rendement, the « search for yield », la SFY, qui provoque un flux de sortie des placements sans risque vers les placements à risque, comme les actions à haut rendement, les sociétés immobilières à bons dividendes, les emprunts risqués, high yield, etc.

Une digression s’impose. Dans la première phase de la crise de 2008, il y a eu récession financière, les rendements ont été mis à zéro, mais ce n’était pas dans les mêmes conditions ni pour le même objectif. Il s’agissait de faciliter les refinancements des banques en faillite, de drainer les capitaux au profit des Etats. Le grand entonnoir de début de crise avait pour fonction de diriger les flux au profit des gouvernements pour faciliter leur keynésianisme et leur action de soutien des banques.

Non seulement, il n’était pas conçu comme l’entonnoir actuel, mais il n’était pas perçu comme durable, permanent. Il s’agissait de diriger les flux vers le risk-off, les placements sans risques, ceux qui étaient garantis par les gouvernements. On peut dire que c’est par ce biais que l’on a créé le paradigme du risk-on, risk-off, si utile pendant un certain temps. Car il faut le savoir le RONROFF est une création purement intellectuelle géniale, une fois élaborée, théorisée, il a suffi de quelques semaines de construction de corrélations pour que le paradigme soit implanté et incontournable.

Ce que nous voulons souligner par la digression ci-dessus est que sous la même désignation, effet d’entonnoir ou « search for yield », il y a des réalités et surtout des objectifs différents.
Actuellement, la privation de rendement vise bien sûr encore à financer gratuitement les gouvernements, les banques, les agences publiques, à soutenir la valeur des créances irrécouvrables etc., mais on cherche aussi autre chose. Et cet autre chose commence à émerger dans les médias.

On cherche à reflater la bulle immobilière américaine. Nous avons décrit le phénomène. Il consiste à rafler le parc d’immobilier locatif, lequel offre un rendement de 4 à 5%, de le réhabiliter plus ou moins, de constituer un flux de revenus d’une certaine masse, de le titriser comme au bon vieux temps des années 2006, de le faire « rater » par une agence type Moody’s, puis de le vendre à un gogo-caisse de pension, avide de rendement. On établit une sorte de carry qui va dans le sens souhaité par les apprentis sorciers malhonnêtes des Banques Centrales. On refait les entourloupes de 2006. En plus cynique, plus dangereux.

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Mais la destruction des rendements a aussi un autre objectif, c’est de faire sortir l’argent qui dort. Le but de la manœuvre est d’inquiéter les détenteurs de cash suffisamment pour qu’ils soient placés devant le dilemme de l’érosion de leur épargne inactive ou bien de son utilisation. Ce volet vise à faire sortir l’argent des comptes de dépôt par exemple, soit pour consommation, soit pour acquisition de placements à risques, la SFY. C’est dans cette phase que nous sommes. Ce qui est visé, c’est l’argent qui dort, ce criminel. L’affaire de Chypre n’est ni anecdotique, ni un hasard, elle est objectivement calculée. Avec l’introduction de la menace sur les dépôts en Europe, il s’agissait, cela était clair dans les analyses allemandes, de débusquer l’argent. De le débusquer, de la même façon que l’on agite le grelot, la menace de la lutte contre le secret bancaire tous azimuts. Ce qui est en jeu, c’est la sécurité du cash sous tous ses aspects, à savoir sous la forme de la sécurité des dépôts et de la sécurité de la discrétion. Il faut que le cash bouge, voilà la nouvelle priorité. Si le cash bouge, quoi qu’il fasse, peu importe, il est utile aux maîtres du monde, il va forcement là où il leur est utile, à eux, pas à vous. Il circule, c’est ce qu’il veulent. Pour parler abstraitement, si l’argent bouge, la vitesse de circulation augmente et c’est leur problème, la vitesse de circulation qui ne cesse de baisser. Et qui fait que ce qu’ils « printent » ne sert à rien. Le mythe de la Grande Rotation lancé à grands renforts de propagande en début d’année était un piège, un attrape nigaud afin de canaliser, créer une pompe.

Il fallait faire croire au grand déversement qui allait créer le momentum destiné à séduire les détenteurs d’argent oisif. Heureusement, ce fut un échec lamentable. Preuve qu’ils ne sont pas aussi intelligents qu’ils le croient. L’objectif de toutes les manipulations financières complexes que vous pressentez, sans vraiment les voir et les comprendre, est là. Vous faire faire, avec votre argent, ce qu’ils veulent, ce qu’ils veulent, eux.

Attendez-vous à ce que les menaces sur l’argent oisif s’amplifient. On en parle en Europe, bien sûr, mais aussi au Canada, en Australie et depuis peu aux Etats-Unis. Stein de la FED a récemment confirmé que, dans le cadre de la réglementation Dodd- Franck vous savez ce criminel impuni qui est responsable de la déconfiture des GSE et d’une grande partie de la faillite de l’immobilier populaire, nous disons donc que dans le cadre de cette réglementation, la mise à contribution des investisseurs privés au sauvetage des banques était implicite.

Nous en sommes là, la recherche de rendement, la search for yield est le jeu à la mode et dans l’esprit des kleptos, cette recherche doit : 1 )aider à la reflation 2) débusquer le cash où qu’il soit et le remettre dans les circuits où il leur est utile, là où il circulera, là où il sera taxable.

Nous avons toujours une longueur d’avance dans le décodage de la malfaisance, donc nous allons avancer une nouvelle idée.

Un retour en arrière s’impose, nous nous en excusons. Il est fondamental, il est indispensable, c’est un retour aux sources de la dérégulation mise en place dans les années 80.

La dérégulation pouvait marcher, fonctionner sans risque pour la stabilité financière, si certaines conditions étaient remplies. Les promoteurs de la dérégulation étaient loin d’être stupides, ils étaient super intelligents, super cyniques. Elle pouvait marcher, si comme Greenspan a un jour lâché le morceau, le risque, au lieu d’être concentré, était réparti, disséminé. Nous sommes au cœur du problème, suivez-nous bien.

La dérégulation a consisté à tenter d’accélérer la croissance économique au-delà des normes historiques par l’accélération de la création de crédit. Il y a un lien direct entre la masse de crédit créée dans une économie et son taux de croissance, tout le monde le sait . Mais la création de crédit bute

-1) sur la capacité de prêt des banques, c’est à dire leurs fonds propres

-2) sur l’accumulation du stock de crédit, son empilement, lesquels menacent la solvabilité.

Les dérégulateurs y avaient pensé bien sûr . D’où l’idée de favoriser la formation de banques gigantesques, de géants, de les autoriser à réaliser des opérations de marchés pour améliorer leur rentabilité et leur fonds propres, d’où l’idée de leur permettre d’écrémer la valeur ajoutée du système productif pour fabriquer des fonds propres susceptibles de favoriser le gonflement des prêts. Il s’agissait de permettre au système bancaire de prélever sur le profits du système, donc sur les profits de l’appareil productif, pour se faire des fonds propres, octroyer des prêts et amorcer une pompe infernale et immorale. Car, à y regarder de plus près, il s’agissait de tondre l’ appareil productif et l’épargne de leurs profits légitimes, pour leur recycler sous forme… de dette. On vole les profits légitimes pour faire fonctionner… une pompe de dettes. Avec au passage, non seulement l’enrichissement d’une caste privilégiée, mais en plus et surtout, la constitution d’un Pouvoir. D’une influence.

Tout devait fonctionner à l’optimum grâce au transfert des risques du crédit sur les marchés. Nos dérégulateurs cyniques avaient bien prévu que le gonflement de la masse de crédit dans le système, son triplement en quelques années, allait provoquer des défaillances et de l’insolvabilité dangereuse pour le système. Mais ils avaient pensé à tout: il suffisait de rendre le crédit destructible, dégradable en cas de problème de solvabilité. La fonction de la mise sur le marché, de rendre le crédit marketable, était systémique, il fallait permettre sa destruction en continu, sans rupture, sans crise. Si un titre de crédit se dégrade, alors il suffit de laisser le marché faire son travail, il adapte la valeur de cet asset de crédit au flux des rentrées –amputées- prévisible. La fonction des marchés dans le cadre de la dérégulation est la destruction des valeurs, c’est la fonction schumpetérienne, la destruction créatrice des passifs. Le nom pudique de cette arnaque, c’est « La fameuse dissémination du risque cher à notre ami Greenspan. ». Vous ne vous trompez jamais quand, dans la terminologie pompeuse des faux savants, réels escrocs , vous remplacez « risque », par « pertes ». Quand ils parlent de vous attirer vers le risque, ils pensent vous faire faire des pertes.

Le génie de nos dérégulateurs était colossal, ils avaient trouvé la pierre philosophale, le Graal qui allait permettre la croissance sans limite grâce à la maîtrise du cycle du crédit, la distribution de miettes aux peuples et le sur-enrichissement des élites. Ils avaient trouvé le moyen de pallier l’insolvabilité inhérente à tout gonflement excessif du crédit en balançant le crédit sur les marchés, lesquels marchés en détruisaient l’excès en continu. On avait trouvé le moyen de rendre le fixe, c’est à dire les dettes, variables, c’est à dire biodégradables. Finies les crises, à nous la stabilité financière sans douleur… sauf pour les victimes de la dissémination, c’est à dire… vous.

Nos PHD, super-intelligents, avaient oublié deux choses au moins, peut-être beaucoup plus bien sûr, mais deux au moins.

D’abord, ils avaient oublié la nature humaine, la gloutonnerie, la gourmandise. Au lieu de disséminer le risque, ce qui était vital pour le système, lesbanquiers. l’ont conservé pour eux De plus en plus d’institutions l’ont gardé, elles l’ont stocké dans des véhicules opaques, des SIV, des hors bilans ; ah, l’appât du gain et des bonus! Le système financier est devenu shadow, opaque, ils ont stocké l’eau des égouts au lieu de la balancer, d’en arroser le peuple. Le risque du secteur financier est devenu sans commune mesure avec ses fonds propres, sa liquidité, son mismatch de durée.

Ensuite, nos génies ne peuvent pas penser à tout, la fonction crée quelquefois des organes et des processus non prévus. En se développant, le shadow banking system a eu besoin d’utiliser pour le refinancement de gros et le refinancement en général, les créances, les assets titrisés empaquetés,  étiquetés faussement triple A. Il les a donnés en collatéral et, quand le pot aux roses de la pourriture sous-jacente a été révélé, c’est toute la pyramide qui s’est écroulée, tout le système qui a dégringolé en chaîne.

Même quand on est malin, intelligent, équipé, on ne peut penser à tout, la vie est créatrice, elle dépasse et déborde le capacités d’imagination.

Revenons à nos moutons, aux « sheoples » que l’on veut tondre. Nous affirmons que le sens profond de la mise en place du grand entonnoir, de la ZIRP, la politique de taux zéro, que la volonté de débusquer l’argent qui dort, de le forcer à acquérir du papier, n’importe quel papier, c’est de réparer l’erreur de la dérégulation. C’est de faire maintenant ce qui a été raté, oublié, la grande dissémination.

Vous avez remarqué que le système bancaire stocke tout ce qu’il reçoit. Il le met en lieu sûr. En réserve chez les Banques Centrales, bien au chaud. Il ne le met pas dans le circuit. Il fuit radicalement le risque. Mais vous, on veut vous forcer à mettre votre épargne, vos économies, votre sécurité, dans le circuit du risque, le circuit des pertes futures programmées. Ce que l’on fait maintenant, vous forcer à chercher un rendement de plus en plus maigre, de plus en plus hypothétique, de plus en problématique, a un objectif et un seul vraiment fondamental: vous faire endosser les pertes que l’on voulait vous faire endosser avant 2008. On veut vous faire supporter le fameux risque que les gloutons ont gardé pour eux. Vous faire supporter le poids des erreurs du marché des repos, les erreurs du shadow banking system. On parle souvent de façon académique du mispricing du risk, le risque n’est pas à son prix, il est trop bon marché. Si le risque est trop bon marché, la demande pour le risque est trop forte. Et c’est là, dans ce tunnel, que l’on veut que vous vous engouffriez. La manipulation du prix du risque est complémentaire de la manipulation des taux d’intérêt.

Vous croyez que votre capital, votre épargne, sont rognés par les taux d’intérêt nuls, par les taux négatifs, par les taxes, les frais, les commissions, attendez un peu que le grand râteau passe.
Faites un effort, un tout petit effort d’imagination. Que vaudra votre titre obligataire, votre titre que vous avez acheté au pair ou plus, sur la base d’un rendement de 1,5% lorsque les taux seront revenus au niveau normal de 5%? presque rien! Que vaudra votre obligation qui rapporte 1,5% lorsqu’ils auront réussi à embarquer l’inflation à 6%, ce qui est le minimum pour sortir de la crise? Absolument rien!

La dévalorisation de votre capital va être radicale. Elle est programmée. Elle est voulue, c’est cela la sortie de la crise. C’est:

-1) le grand entonnoir qui vous force à surpayer des actifs qui rapportent de moins en moins

-2) l’accélération de l’inflation comme ce que fait le Japon le préfigure

-3) la proclamation du danger inflationniste qui donnera l’alibi de monter les taux –pour le bien commun n’est-ce pas-, montée des taux qui détruira tout ce que vous avez acheté, surpayé, à la faveur de la search for yield.

Ainsi, sera réalisé le grand transfert, le grand ratissage a posteriori, celui qui devait être fait dans les années 2008 et qui n’a pas eu lieu. L’erreur de la dérégulation aura été réparée. Les moutons qui devaient être tondus, le seront avec quelques années de retard. Le système ainsi complété pourra repartir. Vous comprenez maintenant pourquoi ils n’ont pas voulu faire de vraies réformes et changer de système. Il y a eu une erreur, une bavure, l’expérience a permis de la réparer.

Que vaudra la nouvelle jambe de la reflation en cours, reflation bien avancée en Asie, à mi-chemin aux USA, cette seconde jambe qui a mis en place un gigantesque carry sur l’immobilier locatif?
Pas grand chose. Le carry, s’il est fait avec un coût de l’argent actuel tout compris de 3,5%, est juste rentable, la marge sur loyers est de 1%, quand l’argent vaudra 6%, sa valeur deviendra négative puisque le flux des recettes ne compensera plus les coûts de refinancement. Là aussi, la pompe, la grande tonte est en place.

En résumé, l’érosion du capital privé par les rendements nuls ou négatifs, par les taxes, par les frais, n’est rien, c’est le hors d’œuvre des géants, l’appetizer des ogres. Leur plat de résistance, c’est la destruction inéluctable, programmée du capital par le search for yield, l’accélération de l’inflation, la hausse des taux.

Nous prenons les paris: ce que vous achetez maintenant à 100 pour avoir un rendement de 2% vaudra moins de 40 dans 5 ans. C’est le modèle, le « pattern » de toute crise. On piège, on déprécie, on ramasse.

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 21 Avril 2013

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