Humeur de Loup du Mardi 19 Novembre 2013: Dé-lire, le délire de Gattaz, patron des très grands patrons Par Bruno Bertez
Donc, dimanche, le patron des très grands patrons est intervenu sur les médias.
Voici l’essentiel. Nous proposerons notre analyse et interprétation dans un second temps.
Pierre Gattaz se dit « contre la chienlit » et exhorte François Hollande à « reprendre la main
(Boursier.com) — Pour le président du Medef, Pierre Gattaz, le redressement de la France passe en priorité par la baisse des charges des entreprises… Invité du ‘Grand rendez-vous Europe 1-I-télé-Le Monde’, le président du Medef s’est dit favorable hier à l’augmentation de la TVA, pour autant qu’elle reste « mesurée » et serve à abaisser le coût du travail en France.
Au-delà des hausses déjà prévues au 1er janvier prochain par le gouvernement (passage du taux de 19,6% à 20% et du taux de 7% à 10%), M. Gattaz a estimé qu’il faudrait parvenir à une baisse massive des charges des entreprises de 50 milliards d’euros. Celle-ci pourrait être réalisée en augmentant la TVA de 3% sur 3 ans, à raison de 1% de hausse par an, selon le président du Medef, ce qui permettrait notamment de basculer le financement de la branche famille de la sécurité sociale (36 milliards d’euros) sur la TVA.
Sur ce sujet de la TVA, le patron du Medef risque cependant de s’attirer les foudres de certains patrons, notamment ceux des PME (hôteliers et restaurateurs, ambulanciers, centres équestres) qui craignent une baisse de leur clientèle et se sentent peu représentés par le Medef, trop focalisé à leurs yeux sur les grandes entreprises.
Le patron du Medef assure que l’organisation patronale offre une « main tendue » à François Hollande et qu’elle n’a pas envie d’ « ajouter la chienlit à la chienlit » sur le front de la grogne sociale qui agite la France. « Nous sommes absolument contre toute destruction (…) Nous sommes contre toute violence », a-t-il dit. « On ne va pas hurler avec les loups. » Il a cependant estimé que le gouvernement devait aussi faire un geste dans le sens de l’apaisement…
Au nom des entrepreneurs, Pierre Gattaz réclame ainsi « un moratoire sur les propositions de loi qui touchent l’entreprise et l’économie », et exhorte François Hollande à « reprendre la main » en définissant « un cap et une vision pour le pays » à travers l’ouverture de chantiers urgents, à commencer par la baisse de la fiscalité sur les entreprises, la baisse des coûts du travail et la simplification des réglementations. « Le gouvernement ne peut pas attendre la croissance comme un pompier attend la pluie pour éteindre un incendie », a-t-il martelé.
Dans ces conditions, Pierre Gattaz ne voit pas la courbe du chômage s’inverser avant la fin de l’année, et prévoit au mieux une inflexion : « non, la courbe du chômage ne s’inversera pas avant la fin de l’année. Il y aura inflexion sans doute mais pas inversion ».
Les propos de Pierre Gattaz interviennent alors que le dernier sondage ‘Ifop-Journal du Dimanche’ a constaté hier une nouvelle chute de la cote de popularité du président de la République. François Hollande ne recueille plus que 20% d’opinions positives (-3 points) et devient le président le moins populaire depuis le début de la Vème république en 1958…
1- Gattaz est contre la chienlit
Traduction, il soutient le gouvernement. Il n’aime pas les manifestations du peuple. Les mécontents, qui ne bénéficient pas de lobbies qui paient les députés et ministres socialistes, n’ont pas le droit d’exprimer leur souffrance et désespoir, le leur, et surtout celui de leurs enfants.
Gattaz ne veut pas ajouter à la chienlit, il se permet des références à la De Gaulle, ce qui est scandaleux pour un homme qui soutient le pacte franco-allemand et le renoncement à la souveraineté. En fait, on le verra plus loin, les connotations de Gattaz et de ses mandants sont celles d’une période où on aimait « l’Ordre ».
2- Gattaz est pour la hausse de la TVA à venir et il veut aller plus loin, il veut 3% de hausse afin de baisser les charges des entreprises.
Traduction en clair, il veut une baisse du pouvoir d’achat des salariés très forte. Il veut baisser les charges des entreprises, or les charges des uns sont les revenus directs et indirects des autres. En fait, faute de pouvoir faire une dévaluation puisque Gattaz est pro-euro, il veut que l’on dévalue le travail des Français. C’est le sens de la hausse de la TVA, puisque celle-ci ne frappe pas les exports. Il veut baisser le niveau de vie des Français, les salaires indirects également, et ce au profit des très grandes entreprises, dont nous vous rappelons au passage qu’il y a très longtemps qu’elles n’embauchent plus. C’est le seul tissu des PME et TPE qui crée des emplois. Sur la question de faire basculer la branche famille de la sécurité sociale sur l’impôt, rien à dire, mais pourquoi ne pas aller plus loin et faire ce qui serait logique, basculer tout ce qui est solidarité et choix politique proprement dit sur l’impôt.
3- Gattaz tend la main à Hollande.
Bien, mais qui a mis Hollande en position de faiblesse? Est-ce le patronat qui lui a fait mettre un genou à terre? Que non, c’est le peuple, le peuple petit et moyen! Et notre Gattaz de tendre la main à Hollande pour l’aider à se relever et se proposer de faire alliance avec lui… pour presser le citron des Français. Nous demandions au début du mandat socialiste, que se passera-t-il avec le patronat, collision ou collusion? Nous avons la réponse: collusion.
4- Gattaz demande une baisse de la fiscalité sur les entreprises, tiens, tiens pourquoi pas!
Mais vous remarquerez qu’il ne demande pas une baisse de la fiscalité sur l’épargne et qu’il a renoncé à conseiller une suppression de l’ISF.
Gattaz, c’est triste à dire, mais c’est le retour à l’idéologie de l’industrialisme, au Saint Simonisme et n’ayons pas peur des mots, c’est la Cagoule des années 30, fascinée par le modèle allemand. Et ce n’est pas un hasard car les mentalités, les circonstances, sont semblables. Le peuple jouit trop, il se vautre dans le laisser-aller, il faut reprendre tout cela en mains au nom de l’idéologie de la production. Le peuple n’est pas là pour jouir, il est là pour produire sous la conduite des élites de Centrale, Polytechnique, de ceux qui savent ce qui est bon… mais bon pour qui ? Ce n’est pas un hasard si ces tendances resurgissent puisque le but, c’est l’alignement sur l’Allemagne, sur son modèle comme dans les années 30. La fascination d’une certaine droite pour l’Allemagne est enracinée dans ses gênes. Le patronat, nous parlons du très grand patronat, en particulier celui des Grandes Ecoles, a toujours eu une fascination pour le Saint-Simonisme et le père Enfantin, les X-Crise, les Coutrot et les Schueller. Il a eu une admiration sans borne, sans limite, pour la politique de l’Allemagne des années 30, quand, sans devises, sans ressources alimentaires, sans matières premières, elle a réussi à mettre sa population au travail pour des salaires de misère, grâce à la terreur nazie, grâce à la complicité du grand patronat et tout cela pour réarmer le Reich. Avec ce patronat, le peuple doit toujours se dévouer pour quelque chose, se sacrifier. Le bonheur, c’est toujours pour les autres, n’est-ce pas !
Oui, il faut refaire un pays compétitif. Oui, il faut faire des réformes. Mais pas n’importe lesquelles.
Voici ce que Gattaz aurait dû demander si…
- Baisse des frais généraux du pays, c’est à dire nettoyer les écuries d’Augias de la fonction publique, des pantouflards de la République et des planqués de tout sorte.
- Baisse de la part de l’Etat dans la dépense nationale à 50% au lieu de 59% pour retourner aux normes de nos compétiteurs.
- Baisse des impôts, recettes fiscales, parafiscales de 5 points de GDP, en attendant de pouvoir faire mieux plus tard.
- Suppression du salaire minimum qui est un avantage aux anciens au détriment des nouveaux venus sur le marché du travail. Si on veut travailler, on doit pouvoir offrir sa force de travail au prix que l’on veut et que l’on juge compatible avec sa dignité
- Restauration de la liberté de gérer pour les chefs d’entreprises, fin des blocages du marché du travail. Retour à l’incitation et à la sanction. Le chef d’entreprise doit pouvoir mettre librement à la porte celui qui ne fait rien ou fait le b…..l dans l’entreprise. On doit pouvoir mettre à la porte celui qui coûte plus à l’entreprise qu’il ne lui rapporte, c’est la vraie logique de l’entreprise, Monsieur Gattaz.
- Entreprendre des actions pour réduire la rente foncière et immobilière, restaurer la fluidité et la liberté sur ces marchés, les réglementations et la collusion sont responsables des prix trop élevés du logement pour les Français. Cela pèse sur la compétitivité.
- Arrêter de taxer l’énergie, et comprendre une fois pour toutes que taxer l’énergie est un surcoût considérable qui pèse sur la compétitivité. Dans la plupart des pays émergents, l’énergie, on la subventionne. Au passage, mettre les écologistes à la porte du gouvernement.
- Faire cesser le scandale agricole qui produit des prix de reproduction de la main d’œuvre, des prix de nourriture trop élevés. Remplacer le système des prix élevés qui bénéficient aux très grandes propriétés par un système d’aide directe aux petits producteurs
- Arrêter de faire payer les médicaments deux à trois fois leur prix par la Sécurité Sociale sous prétexte de préserver l’emploi dans les entreprises pharmaceutiques, réformer le système de distribution de la pharmacie, créer un système test comme celui des Pays-Bas.
- Revoir de fond en comble le welfare qui est devenu un véritable monstre ingérable et trop coûteux pour un pays qui a si peu d’actifs pour entretenir les inactifs.
Voilà quelques pistes pour un patronat qui abandonnerait ses vieilles lunes, ses viles tentations.
BRUNO BERTEZ Le Mardi 19 Novembre 2013
llustrations et mise en page by THE WOLF
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