Art de la guerre monétaire et économique

McCarthy mon Amour : Intel chasse l’Autre…

De la liste noire aux puces bleues : comment “l’ennemi intérieur” sert de marchepied à une nationalisation-lite d’Intel


1) L’allumette : un scoop… et +15% en deux jours

Il a suffi d’une dépêche pour que Wall Street voie soudain des drapeaux américains flotter au-dessus des salles blanches d’Intel : Bloomberg révèle que la Maison Blanche discute d’une entrée au capital du fondeur, possiblement en s’appuyant (au moins en partie) sur l’arsenal du CHIPS & Science Act. Le titre galope aussitôt ; Reuters note ~+4–5% sur la séance, puis encore une jambe de hausse ; MarketWatch/Seeking Alpha parlent au final de meilleure semaine en 25 ans (≈ +23,6%) — ce qui, selon les points bas/hauts retenus, flirte bien avec ~+15% sur deux jours.

Traduction marché : Washington n’apporte pas seulement des subventions ; il met sur la table une option politique — un “backstop” souverain pour la relance d’Intel Foundry.


2) De McCarthy à McCart()y : l’éternel “ennemi intérieur”

Années 1950 : McCarthy brandit des listes ; Hollywood retient son souffle, Elia Kazan reste dans les mémoires. 2025 : ce ne sont plus des scénaristes qu’on suspecte, mais des CEO “pas assez patriotes”. La méthode, elle, n’a pas vieilli : on pointe l’adversaire supposé (affinités étrangères, “faible” souveraineté) pour reconfigurer le pouvoir sans OPA. On ne “prend” pas Intel ; on l’arrime.

Cette fois, la cible n’est pas un studio, mais la dernière grande fab US de pointe. Et le script mêle sécurité nationale, guerre techno avec la Chine et dépendance à TSMC.


3) Nationalisation qui ne dit pas son nom : le mode d’emploi

Le CHIPS Act est conçu pour subventions, prêts, crédits d’impôt (ITC 25%) — pas pour acheter des actions ordinaires. Mais il existe des raccourcis juridiques et annexes :

  • Warrants / équité conditionnelle (capturer l’upside si la relance marche).
  • SPV du Trésor / DPA Title III pour co-détenir des actifs (fabs, IP process) plutôt que la holding cotée.
  • “Golden share” restreinte (droit spécial sur ventes d’actifs critiques).
  • Commande publique & contrôles export pour orienter les flux (clients, priorités DoD).

Oui, il y a des garde-fous (anti-buybacks, “guardrails” anti-chine), mais ils sont compatibles avec un montage à la TARP version industrie : on adosse l’argent public à un droit économique plutôt qu’à un simple chèque.


4) Pourquoi l’exécutif aime ce plan (et pourquoi les traders l’achètent)

  • Souveraineté des puces : sécuriser une capacité domestique face au risque Taïwan.
  • Effet de levier : la présence de l’État rassure fournisseurs & financeurs ; pousse les fabless US à réserver du volume chez Intel (au besoin, à coups de tarifs/réglementation, murmurent certains).
  • Récupération de valeur : via warrants/royalties, le contribuable capte une part de la remontée.
  • Signal : la Pax techno n’est plus un slogan ; c’est un tableau de bord et un ticket d’entrée.

5) Le bémol des pros : “on ne grave pas des nœuds avec un communiqué”

Des analystes (Bernstein, Seaport, etc.) refroidissent l’enthousiasme : sans rattrapage technique crédible (nœuds, clients foundry, ramp Ohio), on risque surtout de brûler de l’argent public. Le marché paie la politique ; la physique (du process) demandera du temps.


6) “McCarthy mon amour” : satire d’une mécanique bien huilée

Acte I — La suspicion. On brandit la souveraineté, on soupçonne des “mauvaises affinités”.
Acte II — La corde CHIPS. Subventions, ITC, DPA, SPV : la boite à outils s’ouvre, les règles s’ajustent.
Acte III — L’embrassade froide. Pas d’OPA : participation conditionnelle, droits spéciaux, commandes orientées.
Acte IV — Le rappel au réel. Si les nœuds process ne tiennent pas, la “nationalisation-lite” n’est qu’un cache-misère coûteux. : hier on demandait « Nommeras-tu des noms ? ».
Aujourd’hui on suggère : « Signeras-tu ces warrants ? »
Le rideau tombe ; les fabs doivent tourner.


7) Ce qu’il faut surveiller maintenant

  1. Le format exact de l’intervention (actions préférentielles ? warrants ? SPV d’actifs ?).
  2. Les contreparties publiées (jalons techniques, priorités DoD, clauses anti-buybacks étendues).
  3. La réaction des alliés / clients (UE, Japon, Corée ; NVIDIA/AMD/Apple/Qualcomm) à une Intel au teint étatique.
  4. Le cours : après l’ivresse Bloomberg/Reuters, le marché exigera des preuves au microscope (rendement, yields, calendrier Ohio).

Verdict

L’angle “McCarthy mon amour” explique la grammaire du moment : transformer la peur de l’ennemi intérieur en tuyauterie juridique-financière qui arrime un champion national — sans prononcer le mot interdit : nationalisation.
Est-ce habile ? Oui.
Suffisant ? Non, si l’ingénierie ne suit pas.
Sur une salle blanche, les slogans ne gravent rien : seules les couches atomiques le font. Et elles, hélas pour la communication, ne lisent pas Bloomberg.

Citations

« En politique comme en amour, il faut toujours un ennemi commun pour sceller l’union. »

« Les procès d’intention sont souvent plus rentables que les procès réels. »

« La paranoïa est un moteur puissant : elle consomme peu et tourne à vide. »

« Un McCarthy sommeille en chaque homme fort — il suffit d’un micro et d’une liste. »

« L’ennemi de l’Amérique est partout… sauf sur Wall Street. »

« Le soupçon, c’est la monnaie forte des empires inquiets. »

« Le meilleur moyen de nationaliser, c’est de diaboliser d’abord. »

« Le patriotisme industriel : quand l’amour du drapeau se mesure en parts de marché. »

« Dans la chasse aux sorcières, l’important n’est pas de trouver la sorcière, mais de garder la chasse ouverte. »

« Les rumeurs sont les IPO de la peur : tout le monde veut souscrire. »

« Si vous ne pouvez pas battre votre adversaire, accusez-le d’être un agent étranger. »

« L’idéologie est souvent un masque à oxygène pour les manœuvres économiques. »

« Les patriotes se comptent désormais en pourcentage du capital détenu par l’État. »

Playlists

🎵 MC Carthy Mon Amour – Techno-Patriot Act Edition

  1. Talking Heads – “Life During Wartime”
    Pour l’ambiance surveillance permanente et parano douce.
  2. Depeche Mode – “Everything Counts”
    Dans le capitalisme de marché… et surtout dans le socialisme de marché.
  3. Rage Against The Machine – “Testify”
    Quand l’État et l’industrie parlent d’une seule voix.
  4. Nine Inch Nails – “The Hand That Feeds”
    Pour illustrer les deals qu’on critique… tout en y mordant dedans.
  5. Pink Floyd – “Welcome to the Machine”
    Parfait pour l’OPA rampante.
  6. The Clash – “Clampdown”
    Le contrôle comme nouvel horizon industriel.
  7. Muse – “Uprising”
    Parce que toute prise de contrôle se vend comme une révolte salvatrice.
  8. David Bowie – “I’m Afraid of Americans”
    Un clin d’œil ironique à la Pax Americana version high-tech.
  9. Public Enemy – “Fight the Power”
    Pour la posture “anti-système”… au service du système.
  10. Kraftwerk – “Computer World”
    Le mariage parfait entre silicium et géopolitique.

🎵 MC Carthy Mon Amour – Rally & Propaganda Mix

(Rock US vintage + martial/électro)

  1. Creedence Clearwater Revival – “Fortunate Son”
    L’hymne ironique pour dénoncer le patriotisme sélectif.
  2. Bruce Springsteen – “Born in the U.S.A.” (version live rugueuse)
    Souvent mal comprise… mais parfaite pour un meeting à l’américaine.
  3. Neil Young – “Rockin’ in the Free World”
    Liberté version Wall Street et Silicon Valley.
  4. Johnny Cash – “God’s Gonna Cut You Down”
    Pour l’implacable mécanique du destin industriel.
  5. Tom Petty – “I Won’t Back Down”
    Mantra parfait pour un président décidé à tout absorber.
  6. Metallica – “Don’t Tread on Me”
    Slogan Gadsden transformé en riff métallique.
  7. Rammstein – “Amerika”
    L’ironie crue de l’empire chantée en allemand.
  8. AC/DC – “Moneytalks”
    Parce que derrière tout socialisme de marché, il y a une caisse enregistreuse.
  9. The Rolling Stones – “Sympathy for the Devil”
    Clin d’œil à l’ingénierie politico-financière.
  10. Hans Zimmer – “Mombasa” (Inception OST)
    Parfait pour la tension techno-militaire d’un rachat stratégique.
  11. The White Stripes – “Seven Nation Army”
    Pour l’image martiale et inarrêtable de la prise de contrôle.
  12. John Philip Sousa – “The Stars and Stripes Forever” (version orchestre militaire)
    Clôture ironique : le socialisme de marché en fanfare.
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