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L’Italie sème la panique dans la zone euro

L’Italie sème la panique dans la zone euro

Le plan de redressement des finances publiques n’est pas jugé crédible. Un sauvetage européen évoqué

Après, la Grèce, l’Irlande et le Portugal, l’Italie? L’écroulement de la bourse de Milan lundi (–3,96%) ainsi que de la hausse record du taux de rendement sur les obligations italiennes à dix ans (5,2%), montre l’inquiétude du marché. L’aide internationale était intervenue dans les trois pays dès que le taux de rendement avait atteint les 7%. Dès lors, les spéculations ont commencé sur la nécessité de doubler le capital du Fonds européen de stabilisation financière à 1500 milliards d’euros pour venir en aide à l’Italie. Une perspective qui n’a pas manqué de provoquer des secousses dans l’ensemble de la zone euro.

Source Wall Street Journal

Pourquoi l’Italie? C’est la troisième économie de la zone euro, derrière l’Allemagne et la France et parmi les plus fragiles. Son déficit budgétaire s’élève à 4,5%, l’un des plus bas dans la zone euro, mais sa dette dépasse les 120% de son PIB. Deux agences de notation, Moody’s (Aa2) et Standard & Poor’s (A +), sont aux aguets, prêtes à abaisser sa note. Dans un tel cas, l’Italie serait candidate à un plan de sauvetage. Le 30 mai, le gouvernement a certes présenté un plan de redressement des finances publiques, visant à économiser 40 milliards d’euros en 2013 et 2014. A la fin de cette période, le budget devrait, espère-t-il, trouver son équilibre budgétaire.

Ce plan n’est toutefois pas jugé crédible par le marché. D’autant plus que les tensions politiques entre le premier ministre Silvio Berlusconi et son ministre des Finances Giulio Tremonti, rajoutent aux incertitudes économiques. La situation est si tendue que le président italien Giorgio Napolitano a dû intervenir et plaidé pour la cohésion nationale.

La crise italienne ne pouvait pas laisser la zone euro indifférente. Raison pour laquelle la chancelière allemande Angela Merkel a jugé opportun de téléphoner dimanche à son homologue italien lui demandant d’adopter un «budget répondant à des exigences d’économies et de consolidation».

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Les places boursières ont dévissé lundi, certaines de près de 3%. Le secteur bancaire a été le plus malmené. En Italie, Unicredit cédait près de 3%, après une chute de 20% sur les cinq dernières séances.

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Autre conséquence: les investisseurs ont renchéri sur le taux du rendement des obligations. Celui des titres espagnols sur 10 ans a dépassé les 6%, du jamais vu depuis 1997.

Tension générale

 Taux longs, taux courts, CDS: la tension s’invite à tous les étages. Toute la périphérie déguste, et, bien que les taux belges ne s’emballent pas réellement, force est de constater qu’ils évoluent dans la même direction que les « pays fragiles » de la zone euro. Le spread entre le rendement du Bund allemand et celui de l’OLO belge a atteint le record de 145 points de base.

Selon certains banquiers, l’économie italienne se trouverait dans une situation critique si les taux longs atteignaient la fourchette de 5,5 à 5,7%. Or, ce lundi, les taux à 10 ans italiens dépassent les 5,4%, un bond de 12 points de base par rapport à vendredi. Il s’agit d’un record depuis la création de la zone euro. Très symptomatique de l’inquiétude des investisseurs, les taux courts (à deux ans) se tendent davantage que les taux longs. Ils se sont envolés de 24 points de base pour atteindre 3,7 %. Le marché craint donc des problèmes de remboursement de la dette italienne à courte échéance.

Les autres pays périphériques de la zone euro ne sont pas épargnés. Les taux longs espagnols approchent ainsi les 5,8%, également un record, tandis que les taux courts s’envolent de plus de 20 points de base à 3,8%. Les CDS à cinq ans sont également au plus haut, à 338 points de base.

Même constat pour les taux longs des obligations grecques, qui tournent autour de 16,2%. Aujourd’hui, l’investisseur doit débourser 2.300.000 euros par an pour assurer 10 millions d’euros de dette grecque…

D’ailleurs, le prix des CDS à cinq ans (credit default swaps) sur la dette italienne, l’assurance qui permet de se couvrir contre un défaut de l’émetteur, a touché, lui aussi, un record, à 279 points de base. Concrètement, pour assurer 10 millions d’euros d’obligations italiennes contre un défaut, l’investisseur doit débourser, annuellement, 279.000 euros pendant cinq ans.

Dans son rapport trimestriel, la société CMA a listé les 10 pays les plus risqués à la date du 30 juin. Sans surprise, la Grèce arrive largement en tête avec un CDS à 2.100 points de base (pdb) et une probabilité de faire défaut sur sa dette estimée à 80%. Les choses se sont empirées depuis. Son CDS s’élève aujourd’hui, 11 juillet, à 2.300 points de base avec une probabilité de défaut de 85,6%!

Pour le Portugal qui arrivait en troisième position le 30 juin, la situation s’est également dégradée avec un CDS à 1.127 pdb (798 fin juin) et une probabilité de défaut de 62,2% (47,6%).

source CMA

CDS Top Risky

Parmi les pays les plus stables, financièrement parlant, on retrouve le même tiercé de tête (européen) qu’il y a trois mois : la Norvège, la Suède et la Finlande.

Pas de solution cet été

«Nous avons observé des tensions dans différents pays, peut-être en Italie plus qu’ailleurs», a déclaré le ministre belge des Finances Didier Reynders, peu avant une réunion lundi à Bruxelles de l’Union monétaire consacrée à la crise grecque. «On est devant quelque chose qui est beaucoup plus gros que le seul cas grec et qui concerne la stabilité de l’ensemble de la zone euro», a renchéri la ministre espagnole des Finances Elena Salgado. Réponse de son homologue grec Evangelos Venizelos: «Les Européens doivent mettre fin aux atermoiements sur les moyens de faire face à une crise qui dure depuis plus d’un an et demi. Nous avons besoin d’un message fort et clair, non seulement pour la Grèce, mais pour la zone euro.» La réunion d’hier portait sur une deuxième aide pouvant aller jusqu’à 110 milliards d’euros à la Grèce. Mais selon diverses sources, aucune solution n’est à attendre cet été.

La crise grecque et le risque de contagion ont fait plonger l’euro à son plus bas historique lundi face au franc suisse. En fin de journée lundi, il s’échangeait à 1,17 franc, après avoir atteint 1,16 franc en milieu de journée. Il était à 1,33 franc un an plus tôt.

Par Ram Etwareea/Le temps juil11+ Isabelle Dykmans-Stephan Wuille/lecho juil11

EN COMPLEMENT Quel sera le prochain pays de la zone euro à basculer? PAR Richard Barley, Wall Street Journal

Depuis deux ans, l’Espagne semblait le pays le plus fragile après la Grèce, l’Irlande et le Portugal. Mais l’attention des investisseurs se tourne désormais vers l’Italie. L’écart entre les taux d’intérêt de la dette espagnole et italienne s’est réduit de moitié depuis le début de l’année, alors que les investisseurs s’interrogent de plus en plus sur la situation financière de l’Italie et sur sa capacité à rembourser.

Les deux pays rencontrent des difficultés différentes. L’Espagne a enregistré un déficit public élevé de 9,2% du produit intérieur brut en 2010 et se trouve dans l’obligation de restructurer ses caisses d’épargne. Mais son ratio d’endettement public par rapport au PIB est plus faible que la moyenne de la zone euro, et sa croissance a commencé à repartir.

L’Italie, au contraire, affiche un déficit relativement faible de 4,6% du PIB et n’est pas contrainte de soutenir ses banques. Seulement, sa croissance est quasi nulle depuis une dizaine d’années et son endettement public a atteint 119% de son PIB en 2010, en deuxième position seulement derrière la Grèce.

Dans l’immédiat, les marchés s’inquiètent de la situation en Espagne compte tenu des incertitudes autour du déficit et du système bancaire du pays. Le rendement des emprunts d’Etat espagnols à dix ans atteint 5,64%, soit 2,71 points de pourcentage de plus que les Bunds allemands de même maturité, considérés comme des valeurs refuges; celui des obligations italiennes est supérieur de 2,36 points de pourcentage au rendement des Bunds. Les taux plus faibles de la dette italienne reflètent également sa plus grande liquidité: la taille du marché obligataire italien, estimée à 1.600 milliards d’euros, est trois fois plus importante que celle du marché espagnol.

Cependant, si l’Espagne a pris des mesures décisives cette année, les difficultés à long terme de l’Italie deviennent plus visibles: le pays a un problème de croissance chronique et sa dette devrait rester nettement supérieure à 100% de son PIB pendant des années. Le service de la dette italienne représentera plus de 10% des recettes publiques cette année, contre 6% pour l’Espagne, selon Moody’s.

L’écart de taux entre les deux pays pourrait se réduire davantage si les investisseurs se mettent à dénouer leurs positions longues. La dette italienne n’a rapporté que 0,5% cette année contre 2,1% pour l’espagnole, d’après Bank of America-Merrill Lynch. Cette situation met la patience des investisseurs à l’épreuve à un moment où l’Italie doit lever environ la moitié de la totalité de ses besoins de financements cette année, estimés à 222 milliards d’euros. En comparaison, il ne reste à l’Espagne qu’à lever 40 milliards d’euros supplémentaires.

Les responsables de la zone euro doivent absolument tenir compte de ces éléments, car toute perte de confiance dans l’Italie ne manquerait pas de fragiliser l’ensemble de la région.

1 réponse »

  1. Merci pour ce tour d’horizon pour mieux comprendre. Merci du temps consacré pour informer. C’est assez terrifiant. Nous ne sommes hélas pas à Eurodisney mais en Eurozone…

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