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Le plus grand hedge fund du monde va mal

Le plus grand hedge fund du monde va mal

Man Group a perdu un quart de sa valeur en une seule séance. Et le pire pourrait être à venir.

Journée cauchemardesque pour Man Group (MG) mercredi, qui a rappelé les semaines suivant la chute de Lehman Brothers, à l’automne 2008. En perdant un quart de sa valeur boursière (-24,87%, à 180 pence), le plus gros hedge fund du monde a enregistré sa pire performance quotidienne depuis le 6 novembre 2008. Dans la matinée, il avait annoncé que ses actifs sous gestion avaient baissé de 8,5% entre juin et septembre, de 71 à 65 milliards. Cet effondrement boursier annule en quelques heures la reprise amorcée après le plus bas atteint le 9 août dernier. Et Man Group se réoriente clairement vers le niveau plancher atteint à la fin de l’hiver 2009.

Les mésaventures de MG induisent l’idée que les investisseurs ne pourront pas forcément trouver refuge dans les hedge funds dans cette période de crise.

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 La capitalisation boursière (4,5 milliards de livres) est plus de trois fois inférieure au plus haut atteint à l’été 2007. Autrement dit, MG ne s’est jamais remis de la crise financière. Et avec une fonte de 39% de sa valeur boursière depuis le début de l’année, le pire semble encore à venir. Les profits semestriels ont également chuté (de 180 à 145 millions de dollars), alors que les frais de gestion sont passés de 234 millions à 200 millions. « L’extrême volatilité des marchés ces derniers mois a créé des conditions de performances difficiles entre les classes d’actifs », s’est expliqué le directeur général Peter Clarke. « Le sentiment est clairement au marasme. Une grande partie de ce qui va se produire à partir de maintenant sera dicté par les marchés au sens large. »

Les difficultés de Man Group sont à l’image de celle de l’ensemble de l’industrie des hedge funds, après un été pauvre et la tentation des investisseurs de concrétiser en cash leurs portefeuilles. Un autre gestionnaire de fonds britannique, Aberdeen Asset Management, vient d’ailleurs d’annoncer une moins-value de 2,2 milliards de livres dans ses circuits.

Les mésaventures de MG induisent l’idée que les investisseurs ne pourront pas forcément trouver refuge dans les hedge funds dans cette période de crise de l’eurozone.

Un vétéran

Fondé en 1783 par un fabricant de tonneaux, James Man, Man group donne le « la » de l’industrie, en Europe en tout cas. Ses actifs sont majoritairement européens (56%), puis asiatiques (25%), américains (10%) et Moyen-orientaux — africains (9%). Avec des bureaux dans seize pays, il compte un millier de clients institutionnels (publics et privés) parmi lesquels on trouve des fonds de pension, des compagnies d’assurance, des banques, des gérants d’actifs, des fonds souverains. Autant de ramifications qui le rendent ultrasensible à la volatilité.

D’autant que les dernières décisions n’ont pas forcément été les plus judicieuses. À Mayfair, ce quartier de Londres qui est devenu le repaire des fonds d’investissements, chacun s’interroge aujourd’hui sur la pertinence du rachat audacieux de GLG Partners en mai dernier, pour 1,6 milliard de dollars. Le but était d’accroître la présence en Asie et de limiter la dépendance dans le programme algorithmique AHL, qui représente un tiers des fonds gérés. Mais c’est précisément GLG qui a constitué la principale plaie de cet été…

– 29 septembre 2011 par Johann Harscoët, à Londres/L’Echo

EN COMPLEMENT : Pas d’amélioration en vue pour Man

Quand la peur gagne les marchés, les actionnaires de Man Group  courent aux abris. L’action de la société de gestion alternative britannique a plongé de 25% mercredi, après l’annonce d’une baisse de 6 milliards de dollars en trois mois de ses actifs sous gestion, soit plus de 8%. Et les actionnaires ont raison de se préparer à d’autres mauvaises nouvelles.

La principale source de problèmes de Man est GLG, le gestionnaire de fonds spéculatifs new-yorkais qu’il a racheté l’an dernier pour 1,6 milliard de dollars dans le but de diversifier sa gamme de produits et d’être moins dépendant de son principal fonds, AHL. Les fonds alternatifs et « long-only » de GLG ont été à l’origine de la majeure partie des 2,6 milliards de dollars de retraits nets enregistrés par Man au dernier trimestre. Ce dernier a indiqué que les retraits s’étaient accélérés en septembre.

Certains à la City de Londres continuent malgré tout de croire que les actifs sous gestion de Man vont rapidement se redresser, grâce à une plus grande stabilité du marché et à l’intérêt croissant des investisseurs pour le fonds AHL dans des pays comme le Japon. Malgré les retraits de fonds au trimestre dernier, Credit Suisse prévoit que les actifs sous gestion de Man atteindront 67 milliards de dollars à la fin de l’année et 78 milliards de dollars en 2012, contre 65 milliards de dollars aujourd’hui.

Cela semble peu probable. Il est vrai que la performance du fonds AHL – dont on estime qu’il génère les deux tiers des bénéfices du groupe – s’améliore. AHL a gagné 0,2% depuis le début de l’année – contre une perte de 1,2% pour un fonds spéculatif type- et il n’est plus que 5% en dessous du point à partir duquel il recommencera à toucher des commissions de performance. Mais ces commissions de performance sont le principal moteur des bénéfices de Man, et nécessitent que les clients maintiennent leurs placements. En 2008, les investisseurs paniqués ont retiré des capitaux alors même que AHL était cette année-là l’un des 20 fonds affichant les meilleures performances.

Fait inquiétant, les intentions des investisseurs de retirer de l’argent de fonds spéculatifs ont été en constante augmentation dans le secteur depuis trois mois, selon les données de l’administrateur de fonds GlobeOp Financial Services.

Même après la chute de son cours de Bourse mercredi, l’action Man se négocie encore 11,9 fois le bénéfice attendu en 2012, d’après les dernières prévisions de Credit Suisse, ce qui n’est pas particulièrement bon marché. Les bénéfices actuels ne couvrent même pas la distribution prévue d’un acompte sur dividende de 9,5 cents, ce qui laisse penser que contrairement à ce que prétendent les inconditionnels de Man, le rendement de 6% du titre n’est peut-être pas un plancher.

Man Group risque de connaître d’autres journées noires.

-Hester Plumridge, wall street journal sep11

(Version française Agnès Adourian)


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