Affaire Condamin-Gerbier: Mediapart réplique à Arrêt sur image à propos de L’Agefi Suisse

L’analyse de Arrêt sur image: LISTE DES POLITIQUES FRAUDEURS : CONDAMIN-GERBIER A-T-IL MENTI ? parSébastien Rochat
Différences d’interprétation entre un journal Suisse l’Agefi Suisse et Mediapart
Nouveau rebondissement ou nouvel imbroglio ? Dans une interview au journal suisse l’Agefi Suisse, l’avocat de Pierre Condamin-Gerbier, l’ancien salarié de la banque Reyl qui affirmait depuis des mois que plusieurs responsables politiques français avaient un compte caché en Suisse, assure que cette liste « n’a jamais existé ». Problème : le même jour, Mediapart réalise une autre interview de ce même avocat et décide de ne pas mentionner cette information. Contactés par @si, la journaliste de Mediapart et celui du journal suisse s’expliquent sur ces différences d’interprétation.
Affaire Condamin-Gerbier : La liste de politiciens français détenant des comptes et fonds non déclarés en Suisse n’existait pas !
Condamin-Gerbier a-t-il menti en affirmant qu’il y avait d’autres Cahuzac ? Vendredi 16 août, le journal suisse l’Agefi publie une interview de Me Edmond de Braun, l’avocat de Pierre Condamin-Gerbier. Et le journal tient un scoop : d’après cet avocat, la fameuse liste de politiques français censés posséder des comptes bancaires non déclarés en Suisse… « n’a jamais existé ». « Il a utilisé cet argument pour faire taire les menaces dont il a fait l’objet à l’époque. Cet argument a été formulé dans des circonstances particulières dont je ne peux vous parler, parce qu’elles sont couvertes par le secret de l’instruction. Mais mon client reconnaît maintenant que c’était un moyen de pression très maladroit », affirme Edmond de Braun.
Plus troublant encore : la veille de la publication de l’interview de l’Agefi, Mediapart a publié un article dans lequel ce même avocat dénonce les conditions de détention de Condamin-Gerbier, incarcéré en Suisse depuis le 5 juillet à la suite d’une plainte de la banque Reyl & Cie. Mais dans cet article, à aucun moment l’avocat ne fait mention de la non-existence de la fameuse liste. Or, selon nos informations, les deux entretiens, celui de l’Agefi et celui de Mediapart, ont eu lieu le même jour, à quelques heures d’intervalle.
Comment se fait-il que cet avocat, dont l’identité n’a été révélée que le 6 août dans un document du tribunal pénal fédéral refusant la remise en liberté de Condamin-Gerbier, n’ait pas évoqué la non-existence de cette liste à Mediapart ? Le journal l’Agefi a-t-il travesti les propos de l’avocat ? Dans l’interview de l’Agefi, c’est le journaliste suisse, Sébastien Ruche, qui suggère que cette liste était bidon. Rebondissant sur une phrase de l’avocat assurant que son client n’a jamais menti, le journaliste indique que Condamin-Gerbier « a tout de même affirmé à la commission d’enquête parlementaire française détenir une liste de noms d’hommes politiques ayant des comptes en Suisse. Or cette liste n’existe pas, de toute évidence ». Réponse de l’avocat : « C’est exact, cette liste n’a jamais existé ».
Joint par @si, Sébastien Ruche nous explique que l’avocat de Condamin-Gerbier a bien relu l’interview avant sa publication et n’a pas modifié ce passage. Mais pourquoi Ruche a-t-il sous-entendu de lui-même que cette liste n’existait pas ? « Je me suis beaucoup intéressé à Condamin-Gerbier, c’est un mythomane », estime le journaliste sur la base de plusieurs rencontres avec d’anciens collaborateurs. Le journaliste n’a jamais caché son scepticisme sur Condamin-Gerbier, notamment dans un article publé en avril 2013 et dont le titre donne le ton : « Il parle beaucoup mais ne sait à peu près rien ». Et quand on fait remarquer au journaliste suisse que Mediapart n’a pas relayé l’information de l’Agefi, il s’en étonne peu : « La journaliste soutient la ligne de son boss, Edwy Plenel ». Oui, car dans cette affaire, deux lignes semblent s’affronter : l’Agefi (quotidien de l’Agence économique et financière à Genève) a toujours été très critique à l’égard du banquier suisse. A l’inverse, Mediapart s’est fait le porte-voix de Condamin-Gerbier (jusqu’à organiser une conférence de presse avec des parlementaires pour défendre les lanceurs d’alerte). De là à considérer que le site d’information a sciemment zappé l’information sur la non-existence de cette liste…
LE MÊME JOUR, L’AVOCAT EST PLUS CONFUS AVEC MEDIAPART
Seconde interview du 15 août
Jointe par @si, Agathe Duparc, la journaliste de Mediapart qui s’est entretenue avec Me Edmond de Braun, le 15 août, quelques heures après l’interview du journaliste suisse, nous indique que l’avocat a effectivement évoqué la non-existence de cette liste. « Il n’y a pas eu de listes de noms de politiciens français, il n’a fait qu’essayer par ce biais de contenir les menaces qu’il recevait », a-t-il déclaré à la journaliste. Mais ces propos ne figurent pas dans l’article de Mediapart. Pourquoi ? Parce que l’avocat se serait montré confus et flou par la suite, assure Duparc. Au cours de la discussion, il aurait même demandé à la journaliste ce qu’elle pensait de l’existence ou non de cette fameuse liste. « Il s’est embrouillé », nous assure la journaliste, au point qu’elle lui a demandé à la fin de l’interview quel était précisément le message qu’il souhaitait faire passer. Et l’avocat d’insister sur la situation personnelle de Condamin-Gerbier et ses conditions de détention. Rien sur la non-existence de cette fameuse « liste ».
La journaliste a-t-elle tout de même envisagé d’évoquer dans son article les propos confus de l’avocat sur l’existence ou non de cette liste ? Non. « J’ai l’impression que c’est une stratégie de défense pour le faire sortir de prison », nous explique Duparc. Oui, car si Condamin-Gerbier n’a jamais détenu ni liste ni document, une partie des poursuites de la banque Reyl peuvent tomber. « L’avocat a intérêt à dire qu’il n’a rien car il risque 3 ans de prison », confirme le journaliste suisse. Stratégie de défense ou pas, la journaliste de Mediapart aurait-elle dû mentionner ces propos de l’avocat ? « C’est vrai que j’aurais peut-être pu l’intégrer », reconnait Duparc qui se dit troublée par la différence de ton entre l’interview à l’Agefi et celle que l’avocat a accordée à Mediapart. Pour autant, elle soutient que ce n’est peut-être qu’une question d’interprétation. Car Condamin-Gerbier n’a jamais dit qu’il détenait une liste, terme qu’il avait réfuté devant la commission d’enquête parlementaire sur l’affaire Cahuzac : « En 20 ans d’expérience, j’ai été le témoin direct ou indirect d’un certain nombre de dossiers – j’aime peu la terminologie de liste car s’il s’agit de sortir une feuille A4 avec 15 noms dessus, cela ne vaut que le papier sur lequel c’est imprimé », avait-il déclaré. Pas de feuille A4, pas de liste mais des noms peut-être ? A part la famille Fabius et Renaud Donnedieu de Vabres, aucun nom de politique n’a filtré dans la presse.
« CE QUE CONDAMIN-GERBIER NOUS A DONNÉ N’EST PAS FLOU, MAIS ÇA PREND DU TEMPS DE VÉRIFIER » (ARFI)
Joint par @si, Fabrice Arfi de Mediapart affirme que Condamin-Gerbier lui a donné un peu moins d’une quinzaine de noms de responsables politiques. Avec quel degré de certitude ? « Il nous a raconté dans quelles circonstances il a été témoin direct de certaines choses. C’est un témoin direct d’acte d’évasion fiscale, d’ouverture de compte. Il a dû gérer des dossiers de politiques et il raconte ça de manière très précise » sans pour autant présenter le moindre document. « C’est un témoignage oral », reconnaît Arfi avant d’ajouter : « Ce qu’il nous a donné n’est pas flou, mais ça prend du temps de vérifier ». Et quand on fait remarquer à Fabrice Arfi que la perquisition effectuée chez Reyl à Paris, dans le cadre d’une information judiciaire ouverte par le parquet à la mi-juin, avait permis d’identifier plusieurs comptes détenus par des Français, mais pas de politiques, le journaliste de Mediapart préfère ironiser : « Evidemment qu’il n’y a pas de noms de politiques dans les livres de Reyl à Paris, c’est pour ça que ça existe un tel système, pour que les noms n’apparaissent pas ». Selon lui, les propos confus de l’avocat sont donc à prendre avec prudence. En vacances, ce dernier n’a pas retourné nos appels.
Par Sébastien Rochat le 19/08/2013
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Médiapart (paru le 22 août)
La « liste » Condamin-Gerbier : itinéraire d’une non histoire
21 AOÛT 2013 | PAR FABRICE ARFI ET AGATHE DUPARC
La fameuse « liste » de personnalités françaises détentrices de comptes suisses n’existerait pas, selon des propos prêtés à l’avocat du financier Pierre-Condamin Gerbier, Me Edmond de Braun. La vérité pourrait prêter à sourire si le principal intéressé, témoin clé de l’affaire Cahuzac, n’était pas en prison. Car de « liste », Pierre Condamin-Gerbier n’a en vérité jamais parlé ! « Personne n’en sait rien », convient désormais son avocat.
Un étrange phénomène vient de frapper la France et la Suisse : la fumée sans feu. Ainsi, à en croire Me Edmond de Braun, l’avocat du financier français Pierre Condamin-Gerbier, la « liste » de son client comportant des noms de personnalités françaises détentrices de comptes non déclarés en Suisse « n’a jamais existé ». C’est du moins les propos que lui a attribués, le 16 août dernier, le quotidien suisse Agefi, très proche des milieux financiers et bancaires genevois.
Dans la torpeur du mois d’août, l’ “information” a eu son petit effet : reprises des agences de presse, articles sur les sites de grands journaux, échos dans leurs éditions papier… C’était entendu, ou presque. L’affaire se dégonflait et Pierre Condamin-Gerbier est un mythomane qui a inventé cette histoire de « liste » explosive pour se sauver d’une mauvaise passe personnelle suite à plusieurs déboires professionnels.
La vérité pourrait prêter à sourire si le principal intéressé, témoin clé de l’affaire Cahuzac et lanceur d’alerte sur les pratiques de fraude fiscale du système bancaire suisse auquel il a longtemps appartenu, n’était pas en train de croupir dans une prison genevoise, après une interpellation qui a suscité l’indignation de plusieurs parlementaires français (ici ou là).
Car de « liste », Pierre Condamin-Gerbier n’a en vérité jamais parlé ! Voici ce qu’il déclarait le 3 juillet devant les députés de la commission Cahuzac : « En vingt ans d’expérience, j’ai été le témoin direct ou indirect d’un certain nombre de dossiers. J’aime peu la terminologie de liste car s’il s’agit de sortir une feuille A4 avec quinze noms dessus, cela ne vaut que le papier sur lequel c’est imprimé ». Cette “liste” n’est rien d’autre qu’une bulle médiatique, qui explose aujourd’hui à la face de ceux qui l’ont créée.
Dans un entretien avec Mediapart le 19 août, l’avocat commis d’office de Condamin-Gerbier s’est d’ailleurs montré nettement moins affirmatif que dans son interview à l’Agefi une semaine plus tôt : « J’ai le sentiment que la liste n’existe pas, mais personne n’en sait rien ». « À ma connaissance, personne n’a sorti de liste, ni les journalistes, ni les députés, ni les magistrats. Or tant qu’on n’aura pas démontré que la liste existe, elle n’existera pas », précise Me de Braun, qui parle d’une « situation qui ne peut pas être résolue à ce stade. »
L’avocat ne se prive pas d’ajouter que « c’est un secret de Polichinelle qu’il y avait parmi la classe politique française des gens qui mettaient leur argent en Suisse ». Aurait-il, lui, une “liste” ? Bien sûr que non.
Mais comme nous l’avons déjà raconté à plusieurs reprises, ce « secret de Polichinelle » a été confié par Condamin-Gerbier à Mediapart, ainsi qu’à notre confrère de La Croix, Antoine Peillon, spécialiste des questions de fraude fiscale, à l’occasion d’un long entretien de six heures qui a eu lieu le 29 mai dans les salons privés d’un grand hôtel de Genève.
Oui, le financier français, ancien directeur associé de la banque genevoise Reyl où Jérôme Cahuzac avait déposé certains de ses avoirs occultes, a livré plusieurs noms de personnalités françaises dont il dit avoir été le témoin direct ou indirect de leurs pratiques d’évasion fiscale. Mais toujours pas de liste. « Dans sa longue histoire, il a croisé des noms. Il n’y a pas de liste, il n’y a pas de listing de noms. Pour nous journalistes, ces noms n’existent pas tant qu’il n’y a pas de vérifications », expliquait ainsi le directeur de Mediapart, Edwy Plenel, le 17 juin, sur le plateau de l’émission Mots Croisés (la vidéo peut être vue ici).
« Ni fou, ni mythomane »
En prison depuis le 5 juillet, Pierre Condmain-Gerbier n’est pas détenu pour avoir inventé des faits, mais pour avoir trahi le secret bancaire suisse – qui relève quasiment de la sûreté nationale de l’autre côté des Alpes – en confiant certaines informations sensibles aux autorités d’un pays étranger. C’est ce qui lui vaut d’être poursuivi aujourd’hui pour espionnage économique.
Dans une décision du tribunal pénal fédéral datée du 6 août, on peut par exemple lire que celui qui est parfois surnommé “PCG” a « confirmé aux autorités françaises les noms de certains clients auprès de divers établissements bancaires pour lesquels il travaillait », puis qu’il a fourni certains « éléments de preuves à une partie tiers ».
Pour comprendre le véritable enjeu de ce dossier, la chronologie des faits n’est pas indifférente. C’est seulement trois jours après son audition à Paris devant les juges anti-corruption Renaud Van Ruymbeke et Roger Le Loire, chargés d’une enquête sur le système Reyl, que Pierre Condamin-Gerbier a été interpellé et enfermé en Suisse, sitôt rentré chez lui.
Le financier avait commencé à livrer ses premiers secrets. Devant les deux magistrats, “PCG” avait donné des informations précises sur les activités offshore de l’homme d’affaires français Alexandre Allard en lien avec l’ancien ministre Renaud Donnedieu de Vabres (UMP). Il avait également cité, mais avec plus de prudence, le nom de Laurent Fabius (PS), sa famille pouvant détenir des avoirs non déclarés en Suisse au travers du marché de l’art. Son arrestation subite, qui a eu lieu le lendemain de la publication d’un article de Mediapart sur ses premières confessions judiciaires (article cité par le tribunal pénal fédéral de Genève pour justifier l’incarcération…), a par conséquent empêché la possibilité de toute autre audition.
C’est pour cette raison que Condamin-Gerbier est à l’ombre. Il ne doit plus parler. Pour cause : dans d’autres affaires traitées par la justice française, son témoignage a été pris très au sérieux.
Sans lui, l’affaire Cahuzac n’aurait probablement jamais abouti. Entendu à Annecy début février par un policier de la Division nationale des investigations financières et fiscales (Dniff), “PCG” a permis aux enquêteurs d’établir le rôle crucial du gestionnaire de fortune Hervé Dreyfus au sein de la banque Reyl, comme étant l’un des principaux organisateurs des montages offshore de plusieurs personnalités françaises. Intime de Cécilia Sarkozy et proche de son ancien mari, Hervé Dreyfus fut en effet le chargé d’affaires de Jérôme Cahuzac.
Et dans l’affaire UBS, où il a travaillé une année durant à Genève, Condamin-Gerbier a livré aux douanes judiciaires de précieuses informations sur les mécanismes de fraude fiscale mis en place au sein du géant bancaire, depuis mis en examen comme personne morale par la justice. « Ce n’est ni un fou, ni un mythomane, assure désormais son avocat. Les enquêteurs français l’ont convoqué et en tant que citoyen français, il a répondu. Le fait est qu’il était choqué par une certaine classe politique française et par certaines situations ».
Le 25 février 1967, la plus journaliste des philosophes, Hannah Arendt, avait senti le coup venir dans un article du New Yorker passé à la postérité, Truth and Politics : « Même dans le monde libre, où le gouvernement n’a pas monopolisé le pouvoir de décider ou de dire ce qui est ou n’est pas factuellement, de gigantesques organisations d’intérêts ont généralisé une sorte de mentalité de la raison d’Etat, qui était auparavant limitée au traitement des affaires étrangères et, dans ses pires excès, aux situations de danger clair et actuel ». En Suisse, la raison d’Etat porte un autre nom : le secret bancaire. Après avoir été son salarié, Condamin-Gerbier en est aujourd’hui le prisonnier.
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Affaire Condamin-Gerbier : Mediapart vs Agefi Suisse: le bon côté de l’affaire. Par François Schaller
EN LIEN: Affaire Condamin-Gerbier: Mediapart réplique à Arrêt sur image à propos de L’Agefi Suisse


Ce n’est pas le plus grand enjeu politique de l’année, mais il s’agit quand même d’un pénible feuilleton dans la mesure où il contribue à alimenter en France les éternels clichés malveillants sur la Suisse. Existe-t-il ou non une liste établie par Pierre Condamin-Gerbier (actuellement en détention préventive à Berne) de politiciens français importants détenant des comptes non déclarés en Suisse? Une semaine après l’interview parue dans L’Agefi Suisse, dans laquelle l’avocat du prévenu affirmait que la fameuse liste n’avait jamais existé, le fait semble établi. Comme Condamin-Gerbier l’a d’ailleurs suggéré lors de son audition à l’Assemblée nationale, il aurait simplement communiqué des noms à plusieurs interlocuteurs. Dont le site d’information Mediapart. Mediapart a confirmé qu’aucune liste ne lui avait jamais été transmise. Uniquement des noms et des circonstances. Et par oral. Au début du mois, une communication du Tribunal pénal fédéral a pourtant précisé que Condamin-Gerbier niait avoir communiqué ne serait-ce que des noms. S’il a pu affirmer le contraire, c’était pour se protéger de mystérieuses menaces dont il aurait été victime.
Mediapart, qui a accordé (comme une bonne partie de la classe politique française) un crédit plus instinctif que rationnel à Condamin-Gerbier, se demande à son tour comment retomber sur ses pieds. Il s’en prend à la Suisse, à sa justice. Et bien entendu à L’Agefi Suisse, qui a mis en garde dès le départ sur la crédibilité de l’informateur. «Très proches des milieux financiers et bancaires genevois», nous aurions «prêté», « attribué» des propos à l’avocat («la liste n’a jamais existé»). Propos de l’avocat aussitôt mis en doute par Mediapart (interrogé par le site Arrêt sur image), qui y a vu une stratégie de défense de la part de l’avocat.
En d’autres termes, L’Agefi serait proche de Reyl & Cie à Genève, mais aurait été interviewé l’avocat de celui contre lequel la banque a déposé une plainte pénale. Pour publier un entretien très empathique intitulé «Mon client vit très mal sa détention». Et attribuer à l’avocat des propos qui disculpent en bonne partie son client. Plus emmêlée encore, la position de Mediapart dans un article paru hier: le site affirme qu’il n’a lui-même jamais évoqué de «liste», sachant très bien qu’elle n’avait jamais existé. Alors que la journaliste Agathe Duparc, en général mieux inspirée, expliquait deux jours avant qu’elle avait interrogé l’avocat avec insistance quelques heures après L’Agefi sur l’existence de la liste, ne publiant rien dans Mediapart parce que les réponses ne semblaient pas claires. Pourquoi aurait-elle posé la question si elle savait que cette liste n’avait jamais existé? Et comment, si l’on sait que la liste n’a jamais existé, peut-on parler d’une stratégie de défense de la part de l’avocat? S’agissant de notre propre interview, les choses furent simples et claires: Me Edmond de Braun a pu lire le texte et valider ses réponses avant parution.
A ce stade, notre conviction est qu’il n’y a effectivement jamais eu de liste «physique», et qu’il était sensé de poser la question. Mediapart a peut-être entendu des noms de la bouche de Condamin-Gerbier, et se trouve dans une situation ressemblant beaucoup à ce que les médias connaissent depuis toujours. Des noms leur sont balancés à propos de comportements répréhensibles. «C’est énorme, vous devriez gratter, creuser…», entend-on souvent. Dans neuf cas sur dix, il n’y a rien au bout, ou quelques malentendus. Et lorsqu’il semble y avoir quelque chose, c’est en général invérifiable. Comment Mediapart va s’y prendre pour vérifier que tel ou tel député ou ancien ministre est détenteur de comptes non déclarés? Ses journalistes sont des professionnels engagés qui connaissent très bien le potentiel et les difficultés de ce genre d’exercice. Le site a tout à fait le droit de conserver les noms qui lui ont peut-être été communiqués, et de préciser «qu’il faut du temps pour vérifier». Avant de recevoir un jour une éventuelle pièce à conviction – enregistrement de message téléphonique par exemple – coïncidant avec une identité dont on pensera alors qu’elle a été longuement travaillée. La gloire requiert chance et patience. En attendant, «la liste qui n’a jamais existé mais quand même par oral» tient la République en haleine (le citoyen veut des noms). Elle dissuade surtout les candidats à l’évasion fiscale qui n’auraient toujours pas compris que la Suisse n’est pas une destination raisonnable. C’est le bon côté de l’affaire.
François Schaller L’Agefi Suisse , 22.08.2013
AVEC LES REMERCIEMENTS DE BRUNO BERTEZ
http://agefi.com/topstories/acces-libre/mediapart-contre-agefi-sur-condamin-gerbier-22082013.html
EN LIEN: http://www.economiematin.fr/les-experts/item/5988-affaire-cahuzac-liste-politiques-exil-fiscal
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