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L’Edito du Dimanche 25 Janvier 2015: A propos du dispositif de Draghi: l’espoir n’est pas une stratégie Par Bruno Bertez

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L’Edito du Dimanche 25 Janvier 2015: A propos du dispositif de Draghi: l’espoir n’est pas une stratégie Par Bruno Bertez 

Nous ne nous préoccuperons pas de la tarte à la crème que constitue la menace de déflation. Cet épouvantail a pour fonction de faire peur, une peur incontrôlée, vague, afin de trouver prétexte et excuse à continuer le travail commencé en 2008 et 2009: faire gagner de l’argent aux Banques, aux Banquiers, aux Hedge Funds, bref à toute la Communauté Spéculative Mondiale. 

Nous sommes dans le Grand Projet, celui qui consiste à faire payer la crise par ceux qui n’en sont pas responsables, les populations, les 99%. Accessoirement, il s’agit de flatter les gouvernements, surtout les socialistes, en facilitant le financement de leurs dépenses par la monétisation des dettes souveraines. Au passage, nous  relevons à quel point l’intoxication est forte, nous nous ‘exprimons comme si il y avait, au pouvoir en Europe, autre chose que des gouvernements socialistes. 

Le TLTRO, l’OMT des années passées ont fait l’essentiel, ils ont fait baisser les taux des emprunts souverains au niveau de quasi zéro. Maintenant, on finit le boulot comme on dit, en permettant aux spéculateurs de sortir en concrétisant leurs plus-values. 

On fait d’une pierre trois coups: 

 Bref on enrichit les uns, on finance les copains  et on appauvrit les autres, ceux qui n’ont pas grand-chose. 

Au passage on fait faire un grand pas en avant au socialisme Européen et à la dé-souverainisation puisque le remède présenté comme miracle est un remède commun, lointain de type socialiste. Celui qui donne tout devient le Maître et ici le Maître est Européen. Cela se grave dans l’inconscient collectif, croyez-le. On est encore et toujours dans le Socialisme Fabien , le socialisme par le haut. 

La réaction Allemande sous cet aspect souveraineté a quelque chose de pitoyable. La presse s’est montée violente, mais à côté de la plaque en qualifiant les initiatives d’immorales ou illégales. Le pire est la déclaration de Merkel qui implore : « surtout je vous en prie, ne me faites pas perdre la face, dites bien que vous vous engagez à faire mes réformes » ! Quant à la pantalonnade du Parlement Néerlandais qui, la veille du QE a …. voté contre, que dire ? Si ce n’est que ces gens sont des guignols. C’est là où on voit à quel point la Com. est trompeuse en Europe, il y a une Com. à usage domestique et une Com. à usage extérieur.

 

Si on en croit le Verbatim de Draghi, «  les achats de titres à long terme sont effectués contre de la monnaie banque centrale qui peut être utilisée par le système financier pour acheter d’autres assets ou accorder des crédits ; ainsi nous rendons l’accès au crédit moins cher pour les entreprises et les ménages…. ceci va soutenir l’investissement et la consommation et contribuer à ramener l’inflation sur la voie des 2% ». 

C’est ce que nous appelons un espoir et non pas une stratégie, car il n’y aucun lien mécanique qui garantit l’enchaînement que décrit Draghi. La monnaie Banque Centrale va d’abord servir à rembourser les dettes contractées par la communauté spéculative pour ses achats de dettes souveraines décotées effectués à la mi-2012. En effet, il y avait peu de vrai argent dans ces achats, il s’agissait surtout de leverage. Ensuite les simulations bancaires de bon niveau montrent que par la structure financière européenne, les déchets sur les montants seront très importants, on estime que les déchets seront tels que le QE européen n’aura une efficacité que d’un cinquième, 20%  de celle du QE américain. Mais surtout il y a erreur totale et fatale sur la soi-disant efficacité magique des QE américains, en réalité, ce n’est pas la magie financière qui a joué, mais les  trillions de crédit fédéral qui ont été créés au cours de la période. C’est la grande découverte de Lauwrence Summers. C’est par ce biais que la transmission a joué, le système Américain a produit, grâce au crédit fédéral les 3 trillions nécessaires au soutien de la conjoncture. Et il l’a fait grâce à l’importance structurelle du logement. En fait, en Grande Bretagne et aux USA, le secteur du logement est en prise directe sur l’économie, ce qui n’est pas le cas en Europe, et c’est par ce canal que s’est en bonne partie effectuée la transmission des 3 trillions. Et puis il y a eu le crédit dit étudiant. C’est quand on a commencé à monétiser le logement par les achats colossaux des firmes financières, quand on en a fait des produits financiers de rendement que la situation s’est dégelée ! La relance de la spéculation immobilière par le locatif de rendement leveragé a été l’une des clefs. Le succès des QE n’est qu’apparent, c’est ce que l’on peut appeler une construction parallèle.

 

Si on mène une étude sérieuse comme cela a été fait aux Etats-Unis, on ne voit aucun chemin par lequel la magie des QE opère en elle-même, d’ailleurs vous avez remarqué plus personne ne parle du fameux effet de richesse ou de son chiffrage. La Fed de San Francisco a montré que l’impact était dérisoire. Non l’efficacité des QE  est réelle quand le « gap » fiscal se charge d’injecter l’argent dans l’économie réelle, c’est là, dans ce « gap » fiscal que gisent les effets sur les dépenses, les revenus et la demande de crédit. C’est parce que les USA ont entretenu un « gap » fiscal colossal que le financement de ce « gap » par la monétisation a été efficace. Il faut les deux, le « gap » fiscal et son financement monétaire. Or en Europe, pas question d’accroître le « gap » fiscal, les pays du Nord n’en veulent pas et les autres, qui n’ont aucune analyse théorique, ne voient pas la contradiction entre d’un côté se donner les moyens de monétiser la dette et de l’autre le fait de ne pas utiliser ces moyens pour accroître le « gap » fiscal et créer de la demande et des revenus. 

La réflexion théorique a d’ailleurs largement progressé sur ces questions et c’est parce l’Europe est toujours en retard, à la remorque, que les avancées de la pensée ne sont pas prises en compte. Ainsi on s’achemine vers de nouvelles propositions qui tournent autour du vrai « hélicoptère money », c’est à dire autour de la question de savoir si la solution ne serait pas de distribuer 500 ou 1000 à  chaque ménage, conformément à l’analyse originale de Bernanke appliquée au Japon. Ce qui compte, ce n’est pas l’incantation financière et l’enrichissement des ultra-riches, mais la dépense de la population. Et dans cette voie on sort de l’incantation et de l’immoralité pour entrer dans l’efficacité. 

Une des propositions les plus élaborées, sinon intelligente est celle de Buiter, un bon, un très bon. Buiter propose une version équilibrée d’Helicopter money ». il suggère d’augmenter la taille de la monétisation des dettes publiques et de s’en servir pour procéder à des rabais fiscaux, donner des chèques aux contribuables, puis de s’en servir pour financer des travaux d’infrastructures utiles, productifs sur le long terme, puis un troisième tiers serait utilisé pour des dépenses destinées à améliorer la compétitivité des systèmes de production. Là, on sort de la magie et on rentre dans le solide.

 

La politique actuelle, magique dans son essence consiste à faire un détour scandaleux qui consiste à enrichir les riches en espérant qu’il y aura des retombées. Hélas de retombées il n’y aura pas, les riches, dans le climat de déliquescence actuel de l’Europe, votent avec leurs pieds, ils exportent les capitaux, comme le montre l’effondrement de l’euro, qui est quand même le prix du travail des européens cristallisé.

 

La solution, ce n’est pas, au passage,  l’avilissement du change, la perte de pouvoir d’achat des Européens, mais l’inverse, la hausse de leur pouvoir d’achat international pour qu’ils  puissent investir, acheter des équipements, des savoirs,  et faire baisser le coût de reproduction de la main d’œuvre domestique. Mais cela, c’est du bon sens, cela ne les effleure même pas. C’est pourtant le secret, le vrai secret du miracle de long terme de l’Allemagne. 

S’agissant de l’Allemagne, nous prétendons que les pestiférés ont du souci à se faire. Au lieu d’aller dans le sens du renforcement des liens entre les pays du Nord et les autres, le QE de Draghi prend acte de la refragmentation Européenne et de la re-domestication des dettes. Chacun pour soi.

 

Il n’y a pour ainsi dire pas de mutualisation, pas de mise en commun des risques et c’est cela qui important. La mutualisation ne concerne que 1/11e % de l’enveloppe, autant dire quasi rien. Les nations individuelles Eurozone conservent 760  milliards d’exposition ! Chaque pays supporte son risque et ses futures pertes, ceux qui rêvaient de tondre les Allemands en sont pour leurs illusions « l’Allemagne ne paiera pas, » elle n’augmente pas son risque sur l’Europe. Pire elle suggère que le risque de pertes et de faillites existe, ce qui est venimeux. 

Si nous nous craignions d’être trop audacieux, nous dirions que la victoire de Draghi est en réalité un échec, Draghi a posé le jalon d’un processus de break-up de l’eurozone monétaire. Notre pronostic sera vérifié, si à l’occasion d’une dégradation de la situation, les spreads des emprunts souverains à 10 ans  recommencent à s’élargir au lieu de se comprimer. Nous l’avons dit, malgré les bas niveaux absolus, les spreads mesurent les divergences systémiques Européennes. 

S’agissant de l’euro, nous considérons que c’est le meilleur investissement à horizon de 5 à 6 ans et nous incitons ceux qui raisonnent dans une optique familiale, il y en a encore, à ne pas vendre et au contraire à acheter de l’euro, il va remonter et s’apprécier. En terme de parité de pouvoir d’achat composée avec les parités de taux d’intérêt, les modèles les plus performants montrent que l’euro est très sous-évalué contre le dollar. La parité de long terme devrait osciller autour des 1,35 dollars pour un euro. Symétriquement, les actions européennes sont surévaluées avec un multiple qui approche les 20. Cela ne signifie pas qu’il faut les vendre, cela signifie que sur ces niveaux, dans 5 ans vous vous apercevrez que vous n’avez rien gagné !

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 25 Janvier 2015 

illustrations et mise en page by THE WOLF

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