Indicateur de Sentiment : Un bon signal d’achat ?
La découverte la plus intéressante de Fisher et Statman est qu’il y a une relation de causalité entre les opinions des investisseurs particuliers et le rendement des marchés. Plus les investisseurs individuels sont optimistes quant au rendement à venir des marchés, moins les rendements de l’indice S&P 500 (leur unité de mesure du rendement du marché) sont bons. Une hausse d’un point de pourcentage dans l’optimisme des investisseurs est suivie, en général, par une légère baisse de rendement de l’indice S&P 500 dans le mois qui suit, de l’ordre de 0,1 point de pourcentage.
PLUS/MOINS DHUMEUR EN SUIVANT :
Le même phénomène s’observe chez les stratèges professionnels de Wall Street : plus ils sont haussiers, moins bon est le rendement de l’indice S&P 500 par la suite. Une hausse d’un point de pourcentage quant à l’optimisme collectif de ces experts est suivie par une baisse de 0,24 points de pourcentage dans le rendement de l’indice S&P 500 au cours du mois suivant.
Toutefois, les éditeurs de lettres financières pourraient faire bande à part car on n’observe pas de relations particulières entre leurs opinions du marché et le rendement de ce marché. Cette constatation de Fisher et Statman va en droite ligne avec les conclusions des études de Solt et Statman (” How useful is the sentiment index “, sept/oct 1988) et Clark et Statman (” Bullish or Bearish “, mai/juin 1998), publiées toutes deux dans le Financial Analysts Journal. Ces recherches, dont les données remontent jusqu’à aussi loin que 1964, montraient qu’il n’y a pas de relations de causalité entre un état particulier de l’opinion collective des éditeurs de lettres financières et les rendements des indices Dow Jones et S&P 500 lors des 4, 26 ou 52 semaines suivantes.
Ainsi, la théorie des opinions contraires s’applique bien dans le cas des grands experts de Wall Street et des investisseurs individuels, alors qu’elle ne semble pas se vérifier auprès de ces semi-professionnels que sont les éditeurs de lettres financières.
L’effet des rendements sur les sentiments
Les marchés financiers constituent un univers assez complexe. Surtout quand on voit que les marchés vont souvent dans la direction contraire de ce que pensent, prévoient ou souhaitent les investisseurs.
Nous avons vu la relation qu’il peut y avoir entre les opinions des investisseurs concernant les tendances du marché et les rendements que donnent le marché par la suite. Or, on peut présumer que la relation de cause à effet a de bonnes chances d’aller dans l’autre sens, c’est-à-dire que les fluctuations du marché ont sans doute un effet sur les sentiments des investisseurs.
Comme d’autres chercheurs l’avaient déjà observé avant eux, Fisher et Statman ont remarqué qu’une croissance d’un point de pourcentage du S&P 500 était suivie par une hausse du sentiment haussier chez les investisseurs individuels.
Chez les éditeurs de lettres financières, on constate qu’une croissance importante du S&P 500 sur 4 semaines est suffisante pour les faire passer du camp des ” bearish ” au camp des ” bullish “. Par contre, une forte hausse de l’indice S&P 500 sur 26 à 52 semaines rend ces semi-professionnels plus nerveux, au point de les faire passer dans le camp de ceux qui pensent qu’une correction du marché est imminente.
Les stratèges des grandes firmes de Wall Street s’en laisseraient moins imposer par le comportement du marché. Une forte hausse ou baisse du S&P 500, sur quelques semaines ou quelques mois, change très peu leurs opinions communes sur les tendances à venir du marché. Seraient-ils plus sages que les autres catégories d’investisseurs? Sans doute. En tout cas, ils semblent se fier sur des indicateurs plus fondamentaux (niveau de productivité des entreprises, taux d’intérêt, cycles économiques, chômage, inflation, etc.) que les mouvements spontanés du marché lui-même afin d’anticiper ce que fera le marché.
La théorie et la pratique
En théorie, les découvertes de Fisher et Statman sont intéressantes, mais en pratique, comment les mettre en application?
Martin Zweig, un des grands spécialistes américains du timing de marché et auteur d’un livre sur sa méthode (en français : Êtes-vous bien sûr d’acheter en bourse au bon moment?), utilise plusieurs indicateurs de sentiments, en plus des indicateurs financiers habituels, pour acheter et vendre ses actions au bon moment.
Il se sert notamment des résultats du sondage hebdomadaire que la firme Investors Intelligence compile une fois par semaine auprès des éditeurs de lettres financières.
RATIO BULL /BEAR pour suivre son évolution / http://www.market-harmonics.com/free-charts/sentiment/investors_intelligence.htm (cliquez sur le lien)
Malgré les observations non concluantes de Fisher et Statman concernant la valeur de ce signal d’achat ou de vente, Zweig estime qu’il faut laisser tomber le sous-groupe de ceux qui sont catalogués comme neutres face au marché, car il comprend des éditeurs qui sont haussiers à long terme mais qui croient à une baisse à court terme, ou d’autres catégories tout aussi vagues. C’est pourquoi, dit-il, le plus simple est d’ignorer la catégorie ” neutre “.
Voilà concrètement comment Zweig procède face à cet indicateur : si, par exemple, 60% des éditeurs de lettres financières sont haussiers, que 20% sont baissiers et qu’un autre 20% est neutre, il ne retient que ceux qui ont exprimé une opinion tranchée, et son calcul est alors de 60% de haussiers sur un total de 80% (60% de haussiers et 20% de baissiers), soit un total de 75% d’éditeurs haussiers.
Zweig ne se fie à cet indicateur que lorsqu’il atteint des niveaux extrêmes. C’est à ce moment que cet indicateur est le plus fiable selon lui. Quand plus de 90% des éditeurs sont haussiers, nous avons atteint un optimisme extrême; quand moins de 40% des éditeurs de lettres financières sont haussiers, nous avons un état de pessimisme extrême.
Dans la 2e édition de son livre publié en 1990, Zweig raconte qu’entre 1965 et 1988, on observe 52 cas où les éditeurs ont fait preuve d’extrême optimisme ou d’extrême pessimisme. Or, le marché n’aurait évolué que trois fois dans le sens que ces ” experts ” avaient anticipé, soit en février 1975, mars 1985 et avril 1986. Les ” prévisions ” des éditeurs de lettres financières affichent un piètre taux de réussite de 6%, ou si vous préférez : un taux d’échec de 94%. À l’opposé, quand les éditeurs manifestent un pessimisme extrême, c’est souvent le bon moment pour acheter nous dit Zweig.
Malgré les conclusions troublantes des recherches de Fisher et Statman, ou de celles de Martin Zweig, investir selon les sentiments des investisseurs, en faisant le contraire de ce qu’ils pensent, est un jeu plutôt compliqué. Ceux qui s’y adonnent ne semblent le faire que lorsque l’état de l’opinion des experts ou des amateurs atteint des niveaux extrêmes d’optimisme ou de pessimisme. Sans doute qu’un ” indice composé ” des sentiments du marché, regroupant l’état de l’opinion des experts comme des petits boursicoteurs, faciliterait la tâche de ceux qui croient à la valeur de ce type d’information. À quand l’indice ” TSE Sentiments “?
André Gosselin analyste et chercheur canadien/ Chronique déja parue dans FandI
EN COMPLEMENT INDISPENSABLE : Indicateur de Marché : le Ratio Put/Call (cliquez sur le lien)
Personnellement, je ne crois pas qu’il ne faut pas s’y fier mais plutot faire attention, avoir l’oeil et essayer de se renseigner par d’autres moyens avant de prendre des decisions. Ce serait beaucoup plus “sage”.