On oublie le Passif ? : Les actifs des fonds souverains pèsent 4000 milliards de dollars
Les avoirs des entités de Chine, de Norvège et d’Australie ont progressé; les ressources d’autres institutions sont restées stables (Koweït) ou ont reculé (Russie)
Un sommet extraordinaire, vendredi 11 mars, des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne (UE) doit sanctionnerla Libyan Investment Authority (LIA), le fonds souverain libyen, qui détient des participations dans plusieurs grandes sociétés européennes et de substantiels investissements immobiliers. Evalués à 70 milliards de dollars (50 milliards d’euros), les avoirs du gestionnaire de la manne des hydrocarbures, chapeauté par la banque centrale, elle aussi visée par l’action des Vingt-Sept, ont été gonflés par la hausse des prix du pétrole et du rendement des placements financiers.
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C’est d’ailleurs le cas de la majorité des sovereign wealth funds (SWF), à lire une étude publiée, mercredi 9 mars, par le bureau de conseil financier britannique Preqin. Ce cabinet londonien qui fait autorité en matière de fonds souverains évalue leurs avoirs totaux à 4000 milliards de dollars (2900 milliards d’euros) en 2011 contre 3510 milliards en 2010.
Cette augmentation de 11% de leur patrimoine n’est toutefois pas générale. Les actifs des entités de Chine, de Norvège et d’Australie ont fortement progressé; les ressources d’autres institutions sont restées stables (Koweït) ou ont reculé (Russie) en raison de ponctions des gouvernements pour faire face aux dépenses courantes ou réduire le déficit budgétaire.
Dans le monde arabo-musulman, alors que les poids lourds que sont les fonds d’Abu Dhabi et du Qatar ont poursuivi leur ascension, des incertitudes demeurent sur ceux de pays pris dans la tourmente, comme la Libye, Oman, Bahreïn, ou qui pourraient l’être par contagion (Algérie, Arabie saoudite, Dubai), indique Preqin.
Un rôle pivot dans la reprise économique
«A la suite de la stabilisation de la conjoncture économique mondiale, bon nombre de fonds souverains qui avaient gelé ou retardé leurs investissements à la suite de la crise, ont délié les cordons de la bourse», assure Sam Meakin, responsable du rapport Preqin.
Il note que ces fonds conquérants se lancent dans des classes d’actifs plus risquées dans le cadre d’une stratégie de diversification de leur portefeuille qui s’étend bien au-delà des hydrocarbures grâce aux revenus des placements financiers.
A l’image des investisseurs institutionnels, comme les caisses de retraite, les fonds souverains ont aussi un rôle pivot dans la reprise économique en raison de leurs placements à long terme pour les futures générations. Leurs investissements, marqués par la prudence, restent largement dominés par les actions, dont la part augmente, et par les obligations, en léger recul en raison de la crise de certaines dettes souveraines dans la zone euro. La sortie de la récession et le rebond boursier, en particulier des valeurs financières, ont également rempli leurs caisses.
Prisées par le Golfe et l’Asie, les sociétés de capital-investissement, qui prennent des participations dans des entreprises, ont désormais la cote. Tout comme les fonds spéculatifs qui ont attiré l’Autorité monétaire de Hongkong et les fonds souverains australien, singapourien et chinois.
Si l’attrait de l’immobilier souffre de la morosité du secteur et des lourdes pertes causées par la tourmente financière, les grands chantiers d’infrastructure restent populaires. En 2011, 61% des fonds souverains (contre 47% en 2010) investissent dans de grands projets, en particulier dans les transports.
Les aléas politiques brouillent l’horizon
Ainsi, Abu Dhabi Investment Authority (ADIA), le plus gros fonds souverain au monde, a acquis en 2010 des participations dans l’aéroport de Londres-Gatwick et dans le consortium en charge de la ligne ferroviaire à grande vitesse entre Londres et le tunnel sous la Manche.
Pour 2012, l’évolution des avoirs de ces fonds sera tributaire des prix des matières premières et de l’état de la bourse. Les aléas politiques dans le Golfe et en Afrique du Nord brouillent leur horizon.
D’autant que les pétromonarchies sont toujours aussi réticentes à divulguer des détails de l’allocation d’avoirs qui mêlent les richesses de l’Etat et celles de la famille régnante. C’est particulièrement le cas de l’Arabie saoudite, dont le principal fonds souverain – la Saudi Arabia Monetary Authority – sert de banque centrale au premier exportateur mondial de pétrole. Le seul fonds souverain saoudien digne de ce nom, Sanabil al-Saoudia, n’a lui que 5,3 milliards de dollars d’actifs.
Par Marc Roche, Londres /le temps mars2011
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