Changes et Devises

La Banque nationale suisse se prépare à « des temps très tourmentés »

La Banque nationale suisse se prépare à « des temps très tourmentés »

L’ombre de la BNS passe sur le taux de change

Infographie. Secousses sur le taux de change

Une brève dépréciation du franc suisse Jeudi fait courir la rumeur d’une intervention massive de la Banque nationale suisse …C’est la première réflexion venue à l’esprit jeudi soir, lorsque les oscilloscopes ont signalé une brusque chute de tension du franc. La Banque nationale suisse devait être en train de procéder à un tir d’artillerie – le chiffre de 50 milliards a circulé – parvenant à refroidir la valeur du franc. Scotchée au seuil de 1,20 franc pour un euro tracé en septembre par la banque centrale, la devise helvétique s’est dépréciée de quelques dixièmes de centimes. Un mouvement minime – le niveau de 1,21 franc pour un euro n’a pas été atteint – mais qui reste le plus important des deux derniers mois.

  

«Personne ne sait ce qui s’est passé, mais une intervention massive reste peu probable», écarte pourtant Peter Rosenstreich. Selon le spécialiste des devises chez Swissquote, «la Banque nationale n’a pas été vue sur le marché, elle n’a fait aucun commentaire et une telle mobilisation de sa part aurait au moins fait bouger le change à 1,21 pour un euro».

 Mystérieux ordre londonien

 Ce dernier doute d’une autre rumeur ayant couru jeudi: Berne veut taxer les dépôts en francs et les rendre moins attractifs. 

La cause serait à chercher du côté d’un gros ordre de vente initié par une institution londonienne. Le nom de JP Morgan a circulé, tout comme le chiffre de 500 millions de francs, invérifiable. L’important reste que beaucoup de monde – ceux estimant que la banque nationale pourrait parvenir à refroidir le franc – se serait engouffré dans la brèche. «Ce décalage a permis de solder des paris dits «short» sur le franc, qui ne rapportaient rien», explique Peter Rosenstreich.

 Au rythme de la Grèce

 Un répit de courte durée. Vendredi, les lignes étaient revenues à leur situation initiale, à 1,2007 franc contre un euro, le taux de change tutoyant le front défendu par la Banque nationale. La dégradation de la situation au niveau européen lui rend la tâche de nouveau difficile. «Les marchés craignent que le plancher fixé soit de plus en plus difficile à défendre, alors que le scénario d’une possible sortie de la Grèce de l’euro prend de l’ampleur», prévient de son côté David Bloom, responsable de la stratégie sur les marchés de devises pour l’ensemble du groupe HSBC. 

Selon lui, l’attention est focalisée sur l’utilisation de nouvelles armes par la Banque nationale. D’où la rumeur, jeudi, d’une taxation des dépôts en francs. «Le marché va rester nerveux jusqu’aux élections grecques [ndlr: 17 juin] et il va falloir vivre avec toutes sortes de rumeurs et de décrochages brutaux», poursuit le spécialiste londonien. Selon lui, le prochain point de fixation sera le point de la banque centrale sur ses réserves, le 7 juin. Ceci donnera une première idée des forces jetées dans la défense du franc. Mais la Banque nationale suisse (BNS) apparaît plus décidée que jamais à défendre le cours plancher de 1,20 franc pour un euro. Et ce même si une bulle se dessine de plus en plus dans l’immobilier, très bas niveau des taux oblige. 

L’aggravation de la situation, en raison de la crise politique en Grèce et de la crise bancaire en Espagne, préoccupe l’institut d’émission. « Nous nous préparons donc à des temps très tourmentés », relève le président de la BNS Thomas Jordan, dans une interview parue dans la « SonntagsZeitung » et relayée dans « Le Matin ». 

Pas de sortie de la Grèce 

« Notre scénario de base prend en compte une période longue de difficultés importantes », explique le successeur de Philipp Hildebrand. Selon lui, la BNS ne table toutefois pas sur une sortie de la Grèce de la zone euro.Reste que la Suisse prend très au sérieux l’impact de l’émergence de nouvelles tensions dans la zone euro. La Confédération et la BNS participent à un groupe de travail, révèle Thomas Jordan, confirmant des propos tenus samedi par le conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann sur les ondes de la radio publique alémanique. Il s’agit d’évaluer l’instauration de mesures préventives qui influenceraient directement l’afflux de capitaux en Suisse, explique Thomas Jordan, afflux qui implique une pression accrue pour maintenir le cours plancher contre l’euro. 

Détermination réaffirmée

A propos du cours plancher, M. Jordan réaffirme sa détermination à le défendre. « Même dans les conditions les plus difficiles, nous continuerons à l’avenir à défendre ce cours et axerons notre politique monétaire sur le maintien ce plancher », déclare M. Jordan. 

Pensée pour aider l’industrie d’exportation, la politique du taux plancher continue à doper les secteurs de la construction et de l’immobilier, parce qu’elle s’accompagne de taux d’intérêt historiquement bas. « Une bulle se dessine de plus en plus », s’inquiète le banquier central, dans un contexte où les hypothèques croissent plus vite que l’ensemble de l’économie. C’est très malsain ».

source Le Temps+Romandie.com mai12

5 réponses »

  1. On peut gagner contre une banque centrale qui veut faire monter sa monnaie mais pas contre une BC qui veut faire baiser la sienne. De plus la BNS est une BC particulièrement crédible. Je pense que ceux qui s’attaquent à elle vont y laisser des plumes. N’oublions pas que 1.20 est déjà un cours très élevé pour le CHF et qui intègre pour partie un scénario noir. Si le scénario de sortie des canards boiteux de la zone euro se concrétisait, on reviendrait immédiatement sur des niveaux de 1.35-1.40. Les allemands ne veulent pas d’un euro faible et les suisses ne veulent pas d’un CHF trop fort…

  2. Le franc suisse est surévalué et … tout le monde en veut.
    Le $ US est sous évalué mais n’intéresse pas plus qu’il faut.
    L’euro est sous évalué mais personne n’en veut !

    Resterait à voir la roupie de Kuala Lumpur. Mais c’est loin hein ?

  3. Antoine vous êtes très fort : si l’euro et le dollar sont tous les 2 sous évalués expliquez moi contre quoi ?

  4. Le puzzle est un peu complexe pour moi, et je n’ai pas 20 ans d’analyses et de réflexions derrière la cravate, et donc je peux me gourer en beauté. Ceci dit:

    J’ai cru comprendre que l’inflation en Suisse est à peu près à zéro, et que dans la zone Euro, elle était proche de 3%. Le 1.20 de 2012 « vaudrait » donc 1.16 en 2013 et 1.13 en 2014 sans l’intervention de BNS.

    Avec l’extrême gauche Grecque qui va « secouer le bananier » (rester dans l’Euro et envoyer paître les banques Allemandes et Françaises), les perspectives américaines qui ne sont pas au mieux (pour ne pas dire cataclysmique), Singapour qui se trouve quand même fort loin et la Suisse qui est tout de même toute proche, il me semble que le CHF devrait retrouver un peu d’intérêt. Et que la BNS va avoir biiiien du mal à défendre sa décision arbitraire avec une réévaluation de facto de 3%…

    Le jour où l’on retrouvera le DM (peut-être pas si lointain), on pourra en reparler, mais d’ici là, vous en trouvez beaucoup des investissements qui rapportent 3% par an (intrinsèquement) et qui sont à peu près sécure (et non imposables) vous?

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