A PROPOS PAR BRUNO BERTEZ
Lisez ce texte de Stephen Roach , en son temps c’était un super – gourou ; éxilé en Asie , on l’entend moins , mais il continue pour l’essentiel de penser juste, bien entendu avec ses mots , son code à lui.
La mise en évidence de la responsabilité de la FED est opportune , l’égoïsme impérial atteint des sommets . C’est le moment que choisissent les illettrés français pour se solidariser , plus étroitement que jamais, de la politique et géopolitique impériale.
Lisez ce texte en vous reportant à notre dernier article sur la dislocation des Reflets;
Nous sommes radicaux dans nos analyses , ceci tient à notre totale indépendance, mais il faut reconnaitre que Roach est courageux, alors qu’il gagne sa vie dans le cadre bancaire.
Bonne lecture.
L’économie mondiale est peut-être en train d’amorcer une nouvelle étape de la crise. Encore une fois, la Réserve fédérale américaine est au cœur de la tempête. À mesure que la Fed tente dudit assouplissement monétaire (l’assouplissement monétaire) – sa politique inédite d’achats massifs de titres à long terme, bon nombre d’économies émergentes en plein essor se retrouvent subitement dans un étau. Les marchés des devises et les bourses en Inde et en Indonésie piquent du nez, avec les dommages collatéraux évidents au Brésil, en Afrique du Sud et en Turquie.
To taper or not to taper, that is the question … facing the FOMC.La Fed fait valoir son innocence ; la même position absurde qu’elle a prise dans les soubresauts de la grande crise de 2008 à 2009, lorsqu’elle a continué son accommodement monétaire excessif qui n’avait rien à voir avec les bulles spéculatives dans les marchés immobiliers et des créances hypothécaires qui ont presque entraîné le monde dans un gouffre financier. Elle reste campée dans son déni. Nonobstant la suppression des taux d’intérêt que l’assouplissement monétaire a imposés aux pays développés depuis 2009, les économies émergentes n’auraient pas été inondées par les capitaux à court terme « volatiles » en quête de rendement.Comme dans le milieu des années 2000, la liste des coupables est, cette fois encore, plutôt longue. La Fed n’est certes pas la seule à adopter des techniques d’assouplissement monétaire. Qui plus est, les économies en développement mentionnées ci-dessus ont toutes une chose en commun : d’importants déficits extérieurs courants.
Selon le Fonds monétaire international, le déficit extérieur de l’Inde, par exemple, devrait se situer en moyenne à 5 % du PIB de 2012 à 2013, comparé à 2,8 % de 2008 à 2011. De même, la balance extérieure déficitaire de l’Indonésie était de 3 % du PIB de 2012 à 2013, ce qui représente une détérioration encore plus marquée, car les surplus se situaient en moyenne à 0,7 % du PIB de 2008 à 2011. Les mêmes tendances ont été observées au Brésil, en Afrique du Sud et en Turquie.
Un important déficit de la balance extérieure est un symptôme classique d’une économie proche d’une crise qui vit au-dessus de ses moyens, où l’investissement dépasse l’épargne. La seule manière de soutenir la croissance économique devant un tel déséquilibre est d’emprunter des excédents d’épargne de l’étranger.
C’est ici que l’assouplissement monétaire entre en jeu. Cette mesure assurerait un surplus de capital provenant d’investisseurs à la chasse au rendement dans des pays développés, permettant ainsi aux économies émergentes de rester sur des trajectoires à croissance élevée. L’étude du FMI estime que les entrées de capitaux cumulés dans les marchés émergents sont proches de 4 billions $ depuis le début de l’assouplissement monétaire en 2009. Les rentrées de fonds ont bercé les pays des marchés émergents, envoûtés par le chant des sirènes d’un raccourci vers une croissance économique rapide. Ils se sont mis à croire que leurs déséquilibres pouvaient se perpétuer, leur permettant d’éviter la discipline nécessaire pour mettre leurs économies sur des parcours plus stables et plus durables.
C’est une caractéristique intrinsèque de l’économie mondiale moderne. Plutôt que de reconnaître le ralentissement économique que signalent les déficits extérieurs, en acceptant un peu moins de croissance immédiate pour obtenir une croissance plus soutenue à long terme – les politiciens et les décideurs s’engagent dans des stratagèmes de croissance risquée qui ont des effets contre-productifs.
C’est ce qui s’est passé dans l’Asie en développement, et non seulement dans l’Inde et l’Indonésie d’aujourd’hui, mais aussi dans les années 1990, alors que des déficits extérieurs en forte hausse amenaient des signes avant-coureurs de la crise financière douloureuse de 1997 à 1998. Mais ce fut également le cas dans le monde développé.
L’énorme déficit extérieur courant des États-Unis du milieu des années 2000 était, en réalité, un avertissement criant des distorsions créées par un déplacement vers l’épargne dépendante de titres dans une période où des bulles spéculatives dangereuses étaient en train de se former dans les marchés des titres et du crédit. La crise de la dette souveraine de l’Europe est une conséquence des disparités marquées entre les économies périphériques grevées par des déficits extérieurs démesurés – particulièrement la Grèce, le Portugal et l’Espagne – et des pays centraux comme l’Allemagne, dotés d’importants surplus.
Les banques centrales ont utilisé toutes les ruses possibles pour contourner ces problèmes. Sous la gouverne de Ben Bernanke et de son prédécesseur, Alan Greenspan, la Fed voyait d’un bon œil les bulles des marchés des actifs et du crédit, les traitant comme de nouvelles sources de croissance économique. Bernanke est même allé jusqu’à avancer que les retombées de croissance de l’assouplissement monétaire seraient plus suffisantes pour compenser les fluctuations déstabilisantes causées par l’entrée et l’exode de capitaux spéculatifs des économies émergentes. Or l’absence de telles retombées de croissance dans une économie américaine encore tiède a démasqué l’assouplissement monétaire comme rien de plus qu’une martingale pour obtenir des rendements supérieurs.
La stratégie de sortie de l’assouplissement monétaire, si la Fed finit par trouver le courage d’arrêter les machines, ne ferait rien d’autre que de rapatrier les surplus de liquidités des marchés en développement présentant de meilleurs rendements vers les marchés développés. À l’heure actuelle, la Fed laisse entendre que la première phase de la sortie, à savoir la modération de l’assouplissement monétaire, a déjà été escomptée par les marchés financiers qui s’attendaient déjà à une réduction de création monétaire et à des hausses éventuelles des taux d’intérêt dans le monde développé.
Peu importe les promesses de la Fed voulant que de tels changements se feront au compte-gouttes, il est peu probable qu’elle décide de déclencher des hausses substantielles des taux directeurs avant 2014 ou 2015. Comme l’indique la hausse de 1,1 point de pourcentage des rendements de bons du Trésor à 10 ans de la dernière année, les marchés ont la curieuse manie d’actualiser très rapidement des évènements qui se déroulent à un rythme glacial.
Par le truchement de ce mécanisme d’actualisation, l’arbitrage des rendements compensés pour le risque a maintenant commencé à délaisser les titres des marchés émergents. Il n’est donc pas étonnant que les économies qui connaissent un déficit extérieur courant soient les premières à subir la pression. Subitement, leurs déséquilibres entre l’épargne et l’investissement deviennent plus difficiles à financer dans un régime monétaire sans assouplissement, un résultat qui a déjà commencé à laminer les monnaies de l’Inde, de l’Indonésie, du Brésil et de la Turquie.
En conséquence, ces pays se sont empêtrés dans les rets de mesures à prendre : les stratégies orthodoxes de défense contre la chute des devises entraînent généralement des hausses des taux d’intérêt – une option peu alléchante pour les économies émergentes qui connaissent un fléchissement de leur croissance économique.
Où cela nous mènera, personne ne le sait. C’était le cas dans l’Asie de la fin des années 1990, comme ce l’était aux États-Unis en 2009. Mais, avec plus de douze crises majeures ayant frappé l’économie mondiale depuis le début des années 1980, le message est clair : les déséquilibres ne peuvent durer éternellement, en dépit de tous les efforts des banques centrales pour en éviter les conséquences.
Les économies en développement subissent de plein fouet le moment décisif de la Fed. Elles ont commis la faute de ne pas régler leurs propres déséquilibres pendant la période d’effervescence de l’assouplissement monétaire. Et la Fed est tout aussi coupable, sinon plus, pour avoir concocté en premier lieu cette expérience ratée de politique monétaire.
Source Project Syndicate sep13
Traduit de l’anglais par Pierre Castegnier
Lisez ce texte de Stephen Roach , en son temps c’était un super – gourou ; éxilé en Asie , on l’entend moins , mais il continue pour l’essentiel de penser juste, bien entendu avec ses mots , son code à lui.
La mise en évidence de la responsabilité de la FED est opportune , l’égoïsme impérial atteint des sommets . C’est le moment que choisissent les illettrés français pour se solidariser , plus étroitement que jamais, de la politique et géopolitique impériale.
Lisez ce texte en vous reportant à notre dernier article sur la dislocation des Reflets;
Nous sommes radicaux dans nos analyses , ceci tient à notre totale indépendance, mais il faut reconnaitre que Roach est courageux, alors qu’il gagne sa vie dans le cadre bancaire.
Bonne lecture..