Humeur de Loup du Mercredi 25 septembre 2013 : Crédibilité, confiance, on s’inquiète pour la FED…Par Bruno Bertez
Nous disons « on » s’inquiète pour la FED pour bien prendre nos distances avec les craintes de certains sur ce sujet. Nous ne craignons rien pour la FED. Ceux qui craignent ou prétendent craindre, ce sont les banquiers, la Deutsche Bank par exemple. Il faut traduire, il faut oser traduire!
La FED fait gagner beaucoup d’argent aux banques et aux hedge funds en « téléphonant » ses décisions par ce qu’elle appelle sa communication, son pilotage. Ici, la communauté spéculative était placée de façon à profiter du « taper », elle jouait une petite, relative, hausse des taux, en particulier sur le segment court. Cette communauté a été prise à contrepied par le non-taper, elle a perdu de l’argent. Elle n’aime pas cela et donc elle dit : « attention nous n’allons plus vous faire confiance, votre crédibilité est en jeu ». Il est évident que c’est du « pipeau », cette communauté est obligée de faire confiance à la FED, elle n’a pas le choix et elle sait qu’elle va se rattraper sur autre chose. La Fed va faire en sorte de lui donner un autre repas gratuit, un autre free lunch, un autre bifteck, comme on dit sur les marchés.
La question de la crédibilité de la Fed se pose autrement, bien plus radicalement. Nous préférons parler de « confiance » d’ailleurs, plutôt que de crédibilité. Et puis les gens en cause ne sont pas, pour nous les banquiers, nous avons dit ci-dessus ce que nous en pensions, non, les gens en cause ce sont le public, les médias. Vous.
Voyons d’abord la définition de la confiance.
« La confiance, c’est un état psychologique qui se caractérise par l’intention d’accepter la vulnérabilité sur la base de croyances optimistes sur les intentions d’autrui ».
Pourquoi les peuples font-ils confiance aux Banquiers Centraux, c’est une question que nous nous sommes souvent posée.
Notre première réponse est que la matière monétaire est opaque, difficile à appréhender et que finalement, face aux mystères de l’argent, les gens baissent les bras, renoncent à comprendre, ils font confiance à ceux qui sont censés savoir. C’est la raison pour laquelle nous disons que ces gens, qui sont censés savoir, se posent comme les grands maîtres d’une religion mystérieuse, celle de l’argent, et que leurs propos sont un peu et même beaucoup, des oracles. L’oracle, vous le savez c’est à la fois la révélation du mystère, mais aussi l’intermédiaire, celui qui révèle le mystère.
En matière monétaire, et c’est le point important, nous sommes dans les vérités révélées, il faudrait même mettre un grand « v ».
Or, si nous sommes dans le domaine des vérités révélées, il n’y a pas de place pour les bavures, les contrepieds, les dissensions. La vérité révélée a quelque chose de sacré, de divin. Le sacré, le divin ne supporte pas la contradiction puisque l’on est dans la Science Totale, dans le Savoir Absolu. Ils, le grand « ils » sont omniscients, ils ne se trompent pas, jamais.
Ce qui s’est passé avec la FED, son pas de clerc, son contrepied, touche non pas au contenu de la parole de la FED, au contenu de la promesse ou prévision, non, cela touche au statut de la parole des Maîtres. Elle cesse d’être divine, sacrée. La bavure joue sur le statut de la parole, et par contre coup sur le statut de celui qui la profère, il est ravalé au rang de simple mortel, faillible, hésitant.
Il chute de son piédestal, il revient parmi nous, donc nous pouvons le critiquer, nous pouvons le ridiculiser, nous pouvons ne plus lui faire confiance, ne plus lui abandonner notre vulnérabilité, nous pouvons reprendre notre destin en mains.
La perte de confiance, dans le cas qui nous occupe, va plus loin, elle est plus radicale car, non seulement, la FED a fait un faux pas, mais en son sein, il y a dissensions. Et cela c’est terrible. Il y a désaccord chez les dieux, chez les oracles! Les Fisher, Dudley, Bullard sont des faux prophètes.
Jeffrey Lacker, le président de la Fed de Richmond qui s’exprimait lors d’une conférence à Stockholm, s’est montré plutôt critique vis-à-vis de la politique monétaire ultra-accommodante de la Fed. Le responsable “dissident” de la Fed pense en effet que les perspectives durables de taux bas fournies par la Banque pourraient à terme affecter la croissance des Etats-Unis. En outre, Lacker pense que la Fed agit trop lentement pour sortir de sa politique très accommodante, ce qui pourrait rendre au final cette sortie plus coûteuse. Lacker craint enfin que cette attitude n’érode la confiance du public dans la Banque centrale…
Nous touchons du doigt le phénomène du Pouvoir. Les Pouvoirs existent parce qu’ils s’octroient, et on leur octroie, un statut qu’ils n’ont pas, leur parole est sacrée, on ne la conteste pas. Du moins pas d’habitude. Et donc on plie la tête, on se plie. Réfléchissez par exemple au scandale qui se manifeste quand un membre du gouvernement émet une parole discordante, on lui dit en mots à peine plus choisis: « Un ministre, cela ferme sa gueule, sinon cela démissionne », ce qui se traduit, il ne faut pas entacher le caractère divin, sacré, non contestable de la parole du Pouvoir. Celui qui ne joue pas le jeu doit être exclu. Chassé du sérail, chassé de l’église. Ce qui tombe du ciel ne peut être contredit, ne peut être qu’Un.
La parole du Maître ne supporte ni contestation, ni dissension. Réfléchissez aussi au poids que vous donnez à ce qui est écrit, à ce qui passe à la télévision, vous verrez que tout cela est un système, un système de domination, fondé non sur la compétence mais sur la mise en scène. Regardez et souriez de l’air respectueux, plein de soumission, que prennent les passe-plats de la télé quand ils osent interroger l’un de ces oracles!
BRUNO BERTEZ Le Mercredi 25 Septembre 2013
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