Site icon Le blog A Lupus un regard hagard sur Lécocomics et ses finances

L’Edito du Mardi 9 Septembre 2014 : Françaises, Français, François, encore un effort ! Par Bruno Bertez

Publicités

L’Edito du Mardi 9 Septembre 2014 : Françaises, Français, François, encore un effort ! Par Bruno Bertez

Les élèves socialistes ont raté leur année scolaire 2013/2014. Pour le repêchage de la rentrée, il faut qu’ils fassent leurs devoirs de cohérence.

Le gouvernement français considère que la croissance de l’économie est une priorité. Il ne vient à l’idée de personne de contester cette priorité.

Il en a fait son crédo et on le comprend, même si on ne partage pas ses illusions. La croissance est considérée comme la panacée, ce qui est, notons-le, le reproche fait par les Allemands: ils arguent que cette croissance, dans l’esprit des responsables français, sert surtout à masquer l’inertie et le manque de courage. L’appel à la croissance est une sorte d’incantation magique, censée produire de l’emploi, donc réduire le fameux chômage sur lequel butent les promesses. Le président français a établi des liens entre son rejet, son impopularité, la poursuite de la hausse du chômage et  l’absence de croissance économique. Nous n’avons pas choisi, à ce stade, de critiquer ces liens et les conceptions qui les sous-tendent.

Hollande établit par ailleurs un lien entre l’insuffisance de la demande en Europe et la stagnation, ce qui le conduit à réclamer une politique de stimulation dans l’Union Européenne.

Hollande établit complémentairement un lien entre le coût élevé du travail et la compétitivité et donc les marges des entreprises, ce qui le conduit à défendre la Pacte de Responsabilité malgré son impopularité. A noter qu’il n’ose pas expliciter son raisonnement qui n’est rien d’autre que le fameux théorème de Helmut Schmidt, les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain et les emplois d’après-demain. Il ne peut le dire clairement pour trois raisons:

–              il ne peut prononcer le mot sacré, le mot « profit »

–              il court-circuite la phase « investissement » et croit que l’on peut passer directement du cash-flow à l’embauche.

–              le processus, s’il était détaillé, apparaîtrait comme trop long et il n’a pas le temps.

La situation de surendettement réelle ou supposée conduit à vouloir au niveau européen et français, à vouloir, en même temps, pratiquer un rééquilibrage budgétaire et fiscal, ce qui, qu’on le veuille ou non, équivaut à une relative politique dite d’austérité.

En termes simples, la conjonction des souhaits de croissance et des contraintes d’austérité apparaît comme contradictoire, elle équivaut à vouloir appuyer sur le frein et sur l’accélérateur du moteur économique en même temps.

Bien entendu, comme toutes les contradictions, celle-ci se dépasse dans un sens favorable au progrès:

–              on peut imaginer de réorienter la production vers la demande étrangère pour suppléer la modération de la demande domestique.

–              on peut surtout imaginer de réorienter les ressources vers l’investissement porteur d’avenir.

Bref, on peut substituer les demandes d’investissement et d’exportation à la consommation domestique publique et privée.

Compte tenu du diagnostic d’insuffisance de compétitivité, il est nécessaire d’opérer un virage économique et social significatif, il faut stabiliser les coûts de production, modérer la consommation, réduire les dépenses non productives, augmenter la part de l’investissement productif de biens et services exportables.

Bref, il faut changer en quelque sorte de modèle de développement français. Abandonner le modèle de développement fondé sur la distribution  de pouvoir d’achat que l’on n’a pas, arrêter de détourner les ressources de l’épargne et  de l’investissement vers la consommation par la redistribution tous azimuts, et bien sûr, créer les conditions favorables à l’investissement, l’innovation, l’emploi dynamique des ressources. En un mot comme en cent, si on veut tout cela, il faut en accepter le logique, la cohérence, et faire en sorte que les incitations, les préférences économiques des agents acteurs de l’économie, aillent dans cette direction. Après tout, il n’est de richesse que d’hommes et malgré les robots et l’Etat, l’économie productive n’est faite que par les hommes. Ce sont eux qui travaillent, épargnent, investissent, innovent.

Notre analyse serrée, quotidienne, des actions du gouvernement, de ses déclarations, nous dit que la cohérence a encore beaucoup de progrès à faire.

D’abord, peut-être gagnerait-on à réfléchir et à expliciter, pour soi, à usage gouvernemental, la chaîne des liens qui conduit à la croissance car, sans expliciter ces liens de causalité, on risque de tomber dans le piège de croire au miracle. Si un seul chaînon manque, il faut compenser son absence par l’incantation ce qui n’est pas très productif.

Ensuite, il faudrait avoir le courage de l’expliquer, sinon au peuple, du moins aux corps intermédiaires, ne serait-ce que pour être compris et ne pas être critiqué à mauvais escient par ceux qui seront déçus par le choix de ce nouveau modèle de développement et d’être au contraire approuvé par ceux qui le soutiennent. Il faut expliciter, non seulement l’objectif du virage, mais le choix du chemin, du parcours.

Enfin, il faut en voir les implications sociales et politiques. Elles sont incontournables, car l’économie produit la société tout en étant produite par elle. Un modèle de développement, c’est un ordre social. Surtout quand il passe par une réallocation des ressources, d’une part, et des incitations,  d’autre part. Le type de société n’est pas indifférent: on ne peut donner la priorité à l’investissement, la compétitivité, l’excellence en un mot et continuer de se faire l’apôtre d’une société à plat, non hiérarchisée, égalitaire.

Il faut choisir et accepter l’ordre social qui va avec chaque modèle. Les Chinois ont, par exemple réussi à mettre en place les conditions d’une croissance forte parce qu’ils ont accepté, en même temps, la production d’une société très inégalitaire. Un modèle de développement produit un ordre social et des Valeurs. Pire, c’est une révolution culturelle qu’il faut envisager. Qui ne voit que si les théories socialistes et keynésiennes étaient vraies, il suffirait, pour augmenter notre prospérité, de travailler de plus en plus lentement et à la limite de ne plus travailler du tout. Il faut oser le dire, il faut mettre au rencart les vieilles lunes. Toutes ces théories oublient, c’est à dire occultent volontairement, le fait central: le détour de l’investissement est le socle du progrès économique.

Dans le processus d’investissement, l’épargne est cruciale. Il faut retarder une fraction de la consommation pour pouvoir investir, c’est incontournable. Ce n’est pas une loi économique, c’est une loi de la vie. Pour passer de l’économie de cueillette ou de chasse, il faut d’abord prendre le temps, faire l’effort de travailler à fabriquer des outils et des armes. Donc différer la consommation. Et la complexification apparente de nos systèmes n’invalide pas cette nécessité.

Le report de la consommation est au cœur même du processus de croissance, c’est lui qui permet la constitution du stock de capital, matériel et non matériel, physique et intellectuel, etc. La constitution d’un stock ou l’augmentation d’un stock de capital physique, intellectuel, commercial, d’un capital de savoir-faire, tout cela est long, complexe. Il faut ce que nous appelons « un détour » avant de prétendre à la production, à la croissance et la compétitivité.

Au cours de ce détour, l’épargne s’accumule. L’autre nom de cette accumulation, c’est Le Capital.

Nous avons mis des lettres capitales pour bien marquer le changement de statut qui se produit au passage. L’épargne, d’accord, c’est bien, mais Le Capital, c’est mal. L’épargne, dans nos systèmes, subit une transformation magique, une véritable transmutation, comme en alchimie, dès lors qu’elle franchit le seuil de la politique, elle devient autre chose, ou plutôt deux autres choses:

–               petite, c’est une vache à lait qu’il faut spolier et exploiter.

–               importante, c’est un monstre qu’il faut combattre et affamer.

Un  système qui marche, c’est pourtant un système où l’épargne joue son rôle de financement des investissements, c’est un système où, si on a un objectif de croissance et de prospérité, on reconnait qu’elle doit être rémunérée et encouragée. Ce n’est peut-être ni populaire, ni politiquement correct, mais l’épargne, pour réaliser sa fonction économique, a besoin de pouvoir prélever sa rémunération en échange de sa constitution, puis de son affectation plus ou moins utile socialement.

La transmutation sociale et politique qui transforme l’épargne souhaitable en ennemi ou vache à lait est lourde de conséquence. Décourager l’accumulation domestique tout en maintenant un objectif de croissance est contradictoire, sauf à accepter deux autres modes de financement des investissements:

–              le financement par le système bancaire et donc le renforcement d’un système ploutocratique fragile.

–              le financement par le capital étranger, les pays arabes, les Japonais, le grand capital anglo-saxon, celui que, dans les temps troublés, on appelle sulfureusement le capital apatride.

Nous soutenons que le choix d’un redressement de la France passe par la cohérence des moyens mis en œuvre et que, pour l’instant, cette cohérence fait défaut car elle manque d’un élément essentiel, une reconnaissance du rôle central de l’épargne et du capital…en particulier, dans le processus de croissance….

  

 BRUNO BERTEZ Le Mardi 9 Septembre 2014

illustrations et mise en page by THE WOLF

EN BANDE SON :  

NI PUB, NI SPONSOR, NI SUBVENTION, SEULEMENT VOUS ET NOUS….SOUTENEZ CE BLOG FAITES UN DON

Quitter la version mobile