Art de la guerre monétaire et économique

Mister Market and Doctor Conjonture : Les caves se rebiffent….

Les caves se rebiffent !

Draghi chauffe les marchés depuis plusieurs semaines, comme les bateleurs chauffent leur salle pour le spectacle. Echaudé par son « bide » de la fin d’année 2015, il a voulu frapper un grand coup, impressioner les marchés/spectateurs et tordre le bras de ses détracteurs.

Par ses annonces,  plus agressives que prévues par le consensus, il a voulu faire étalage de sa puissance: rien ne l’arrête, ni rien ni personne avait-il dit à New York en Décembre. 

25044815194_a674b941c6_c

Ce Jeudi 10 Mars, il a embarqué les places européennes. Pendant quelque temps, les observateurs ont eu l’impression qu’il n ‘y avait plus rien à vendre, il n’y avait que des ordres  d’achat lesquels trouvaient difficilement contrepartie. Les places européennes se sont envolées de plus de 3,5%, ce n’est pas rien pour un grand marché de pays développés!

 


Draghi restera peut être dans  l’histoire comme le spécialiste de l’effet de pauvreté.

L’euro s’est trouvé dévalué de 3%, c’est quand même la  devise d’un bloc économique puissant! Quelques heures plus tard, les indices boursiers européens cloturaient sur des pertes considérables, avec des écarts de 5% en séance tandis que l’euro, lui finissait la journée sur un colossal rebond après une chute initiale.


 

Un sacré contrepied!

Que dire , si ce n’est que loin d’introduire de la sérénité,  de la mesure et de la rationalité dans  les marchés, Draghi les rend fous. Au lieu réduire les risques, la volatilité, il les attise. Draghi a voulu prouver quelque chose, c’est évident et il a pris une claque sans précédent, même celle de la fin 2015 était moins violente. C’est un véritable vote de défiance, voila comment il faut interpreter ce qui s’est passé jeudi .

Les banquiers centraux sont surexposés, ils se mettent en vedette, jouent des one-man shows irresponsables, sans contrôle et sans véritable sanction puisque leurs erreurs sont payées par des tiers, par les opérateurs des marchés.

Ces gens détruisent le système eux qui  sont payés pour en faciliter la marche, le bon fonctionnement, en père de famille disait-on avant. Ils prétendent piloter, naviguer , alors qu’ils ne connaissent ni les cartes ni mêmes les routes.

En fait il n’y a pas de vrai pilote dans les avions des Banques Centrales, ils sont moutonniers, ils font tous la même chose, même quand les situations sont différentes.  Ils font la même chose parce qu’un professeur du MIT leur enseigné la pensée unique.  Ce professeur leur a dit que c’était ce qu’il fallait faire. La  pensée de ces gens  est monolithique, monopolistique. Et le pire c’est qu’ils pensent faux.

EN BANDE SON 

11 réponses »

  1. D’accord avec cette analyse mais je pense que Draghi est tombé dans une embuscade sur l’eurodollar… On lui a montré qui était le vrai patron. Cela démontre des limites du bonhomme. Il a cru qu’il avait le pouvoir de faire baisser l’euro à sa guise or n’importe quel trader d’un niveau correct a compris depuis belle lurette que sur ces niveaux les US ne veulent pas un dollar plus fort, ceci non seulement pour eux mais aussi pour les émergents… le consensus des moutons était bull sur le dollar en début d’année… On ne gagne jamais cette guerre contre les US. Après avoir gagné quelques batailles Draghi s’est cru trop puissant. je pense néanmoins que le contexte est meilleur pour les actions et qu’une fenêtre de hausse s’ouvre. Un euro à 1.15 voire 1.20 n’est pas un problème (on a vécu avec l’euro à 1.60…) mais la baisse du dollar peut en revanche aider les émergents et la remontée du pétrole.

    • Je ne pense pas que l’on puisse être d ‘accord ou pas d’accord; que l’on puisse avoir tort ou raison lorsque l’on se situe dans une perspective de court terme concernant les marchés..

      La seule chose que l’on peut dire à leur sujet est ce que disait l’exceptionnel Charles Rist, « tout ce que je sais, c’est qu’ils varient ». Comme disait un de mes maitres: en Bourse quand on a raison , c’est toujours pour une autre raison que celle que l’on avait anticipé.

      La hausse ou la baisse ne sont pas des phénomènes déterminants au niveau général, elles ne sont importantes qu’en raison des positions spéculatives personnelles.

      Au niveau global, ce qui importe, c’est la volatilité, l’instabilité, l’adéquation des réactions aux objectifs poursuivis par les autorités. Elles essaient de baliser les évolutions, elles n’y parviennent plus.

      Les interventions, cette nuit, de la PBOC ont permis une reprise en mains, et comme la communauté spéculative est globale, cela a fait tache d’huile. Un jour c’est dans un sens, le lendemain c’est dans l’autre; et cela prouve une chose sur laquelle je veux insister, les marchés peu à peu reprennent leur liberté, ils sont moins controlables.

      « Avant, jusqu’en 2014, les marchés lévitaient, ils échappaient à la loi de la pesanteur, on avait détaché l’ombre du corps écrivions nous. Mais maintenant ils ne lévitent plus, ils s’affolent, ils s’agitent de façon désordonnée. Un peu comme l’aiguille d’une boussole qui perd le nord. Ou comme l’anguille prise dans une nasse et qui veut en sortir.

      Cette agitation n’est pas provoquée par une agitation semblable dans la réalité, non le réel est ce qu’il et en ce moment, il ne bouge pas beaucoup; cette agitation est provoquée par les hommes, les humains. Dabord par les animals spirits qui secouent les marchés, ensuite par les actions, les réactions des autorités qui prétendent diriger.

      Nous avons titré hier en commenatire de la nouvelle Draghinade: « les caves se rebiffent ». C’est cela ; les « caves », ce sont bien sûr les marchés, et ils se rebiffent car ils gigottent dans leurs liens, il essaient de se libérer des liens qui gênent leurs mouvements, qui les retiennent prisonniers. Et quand on gigotte, on le fait dans tous les sens. De façon désordonnée, pur gaspillage d’énergie. Le mot cave est riche, il exprime bien ce que nous volOns dire car il suggère des forces sombres, souterraines que l’on s’efforce de maitriser et dissimuler. Il y a une idée d’inconscient des marchés là dedans! Et puis il y la suggestionde la peur.

      Les apprentis sorciers , les dompteurs du cirque des marchés, rêvent depuis longtemps de domestiquer , d’apprivoiser la bête. C’est leur folle ambition depuis des décennies: venir à bout des instincts, des « anima ». C’est l’ambition de tous les chefs, de tous les dirigistes, de tous les socialistes. C’est pour cela qu’ils gaspillent une énergie et des ressources considérables à essayer d’y parvenir. Et d’ailleurs c’est fondamentalement ce qui empêche la croissance, les ressources sont gaspillées pour maitriser, dompter, brider, pas pour aller de l’avant.

      Mais les marchés, masse d’hommes, sont fondamentalement des bêtes sauvages et même si ils donnent l’apparence d’être matés, dans le temps, il y a toujours un moment ou le sauvage reprend le dessus. C’est ainsi que nous interprêtons ce que nous voyons sur les marchés depuis le printemps 2013, puis de façon renforcée depuis juin 2014: les marchés secouent leur joug. Ils ne sont pas encore libérées de leur carcan, mais ils les agitent assez pour gagner plus de liberté dans leurs mouvements, pour retrouver des accès d’autonomie. Ils sortent des canaux, des couloirs dans lesquels on les a maintenus, ils testent la solidité des digues et les fissurent.

      Ce qui s’est passé jeudi 10 Mars sut tous les marchés est le reflet de ce que nous décrivons. Ou plutot l’inverse, ce que nous écrivons est le reflet, la traduction de ce qui s’est passé. Une volatilité extrême, qui touche tout, les actions, les taux, les changes, l’or, le pétrole. Des mouvements désordonnées, d’abord conformes aux attentes, puis opposés à ces attentes, des corrélations directes et inverses qui se resserrent et détendent. Tout cela pour aboutir, en Asie à des marchés épuisés, exténués qui sont mûrs pour se soumettre aux interventions de la PBOC et de la BOJ. Les autorités ont gagné dans la nuit de jeudi à vendredi , elles ont maté la bête, mais ce n’est que partie remise car de plus en plus on voit que le « soft power » ne suffit plus, il faut, pour faire rentrer les bêtes sauvages dans leurs cages, manier le fouet et leur donner beaucoup de nourriture, truffée de tranquilisants.

      Et la nourriture de la bête, c’est du dollar, du dollar bien frais , bien saignant . La liquidité globale baisse dangereusement, cela se sent, cela se voit et la liquidité mondiale « high powered », c’est du dollar, pas du Yen, du Yuan ,ou de l’Euro. Si c’est du Yen ou de l’Euro que l’on donne à la bête, elle se rebiffe: le Yen et l’Euro baissent, le dollar monte, il est plus rare et plus cher, la divergence menace de faire sauter le système en fragilisant les dizaines de trillions de dettes en dollars quasi pourries qui ont été contractées entre 2008 et 2015.

      L’indicateur GLT, Global Liquidity Tracker fabriqué par Bloomberg a une allure effrayante et la volatilité accrue, mesure du risk, oblige à des deleveraging, lesquels contractent la liquidité. .

      Le dollar index est à notre avis le paramètre clef de la situation. Jeudi, le dollar index a bondit, au dessus des 98, c’est à dire qu’il a testé sa résistance supérieure. Il n’a pas pu la franchir et il a rétrogradé. Après son incursion jusque 98,50, il a été barré et s’est replié vers les 96,50; Il est en fait en train de sortir de son canal haussier de moyen terme, le transperçant vers le bas. Le soutien technique est un peu au dessus des 94,50.

      Sa configuration est plutot, au pifomêtre, baissière. ceci voudrait dire que le FOMC qui va débuter sera plutot « dove » que « hawkish ». La probabilité d’une audace de Yellen qui la pousserait à oser monter les taux ici, en mars, est faible. Mais les paris restent ouverts pour Juin et on verra lors du communiqué les indications qui seront fournies. »

      • @ Bruno Bertez. Je suis d’accord avec vous pour dire qu’il faut restez humble et que l’on est jamais sur que son analyse est celle qui justifie la réaction des marchés. Si je comprends le sens de votre commentaire, vous restez haussier sur le dollar et pensez qu’il se raréfie. Je ne partage pas ce point de vue… Vous raisonnez sur des données présentes (différentiel de taux notamment) et oubliez la phase précédente… on vient de 1.60 contre euro… ce que vous voyez est déjà dans les cours depuis longtemps. De surcroit, et d’un point de vue fondamental, la zone euro est globalement excédentaire en terme de balance commerciale ce qui n’est pas le cas des US et le différentiel d’inflation est aussi favorable à l’euro, 2 puissants et indiscutables facteurs structurels… Enfin , il ya ce que je dis dans mon précédent commentaire, à savoir que les US ne se sont JAMAIS accommodé longtemps d’un dollar fort et que ce sont eux qui décident….Force est de constater que les rebonds de l’euro font mal aux shorts depuis maintenant plusieurs mois… Je suis trader et le timing est essentiel. J’ai une devise, « 100 % de ceux qui ont grillé un feu rouge ont eu raison trop tôt ». Ceci dit le long terme vous donnera peut- être raison mais je pense que votre haine de l’euro vous conduit à une analyse erronnée.

        • Le dollar se raréfie, ce n’est pas une opinion, c’est un fait.

          Ce sont des chiffres. La liquidité en dollars calculée par un indicateur synthétique compilé chez Bloomberg ne cesse de baisser, en particulier en Asie et au Moyen-orient ou certaines banques très dépendantes du dollar funding, sont d’ailleurs dégradées par les agences de rating.

          Comment pourrait -il en être autrement pusique les réserves chinoises baissent, les excédents pétroliers baissent, la plupart des émergents tirent sur leurs réserves! La liquidité en dollars sur le dollar funding a pour origine les dépôts des excédents dans les banques internationales , celles-ci voyant les dépôts se réduire ont tendance à déleverager, ce qui crée également moins de dollars. La base du dollar funding se réduit et donc la création/multiplication de dollars par les banques internationales se contracte.

          Nous ne sommes pas dans l’opinion, nous sommes dans les faits. Le fait par ailleurs que la position spéculative longue en dollars soit colossale peut expliquer que l’on oscille dans la marge 94,50/98,50 au DXY, mais c’est un phénomène différent, presque parasite qui n’a rien à voir avec la liquidité globale en dollars dont je parle. C’est un épiphénomène greffé sur le phénomêne principal.

          S’agissant de l’attitude des Etats-Unis, vous avez raison et depuis que Jack Lew est intervenu, signalant que la hausse du dollar de 80 à 100 était excessive, le dollar n’a plus réussi à dépasser les 100. Il faut noter que Jack Lew a été relayé par Yellen qui a repris la même thème en répétant que la hausse du dollar constituait un vent contraire.

          La communauté spéculative s’est portée longue sur le dollar il y a de nombreux mois sur les anticipations suivantes:
          -différentiel de croissance en faveur des USA
          -divergence de politique monétaire prévue
          -inflation frémissante en raison du resserrement du marché du travail

          Les anticipations de la spéculation ont été contrées par le ralentissement US, par la déflation secondaire liée à l’énergie plus forte que prévue, par la modération étonnante des revenus salariaux lesquels défient la loi de Phillips.

          Si, comme certains le pensent aux USA, le ralentissement n’est que temporaire, alors je suis persuadé que l’inflation repassera au dessus des 2% et vous verrez les autorités être moins hostiles à la fermeté du dollar.

          Par ailleurs vous vous trompez totalement, ou vous avez la mémoire courte. J’ai expliqué à l’occasion du premier QE de Draghi que l’euro allait être très sous évalué pour deux raisons,
          (excédents européens récurrents et équation des parités de pouvoir d’achat) et je me souviens avoir affirmé que l’euro était la meilleure monnaie patrimoniale à moyen terme, prédisant une parité d’équilibre de 1,35 contre dollar dans 2/3 ans. Sur le moyen terme, ce n’est pas le trading qui détermine les parités des changes, mais les données comme le PPP, les excédents commerciaux, les taux etc. Selon les modèles les plus performants, sur le long terme, l’Euro et le Franc Suisse sont sous évalués de 10 à 15%.

  2. Non slidescape. il ne faut pas se tromper de niveau d’analyse. Je pense que les marchés vont monter en partie grâce aux mesures de Draghi mais il n’empêche qu’il a été désavoué hier. Selon moi Draghi s’est prostitué et le marché le traite comme tel… il a eu ce qu’il voulait et même au delà mais il lui a dit qu’il le méprisait…

  3. En effet ! il en va des banquiers centraux comme de toutes les autres élites : sortis d’une même école de pensée, ou de faux schismes. Le meilleur d’entre eux, choisi dans et par le cénacle, se retrouve gouverneur ou président, s’entoure de ses condisciples et impose sa religion en tant que pape réputé infaillible. Les véritables dissidents, contestataires ou critiques (au sens positif de la nécessité d’interroger sans cesse la validité du modèle) sont écartés, écrasés. Ainsi les dégâts congénitaux se propagent, s’amplifient jusqu’à la fin.

    Le gros problème avec les banquiers centraux est qu’on ne vote pas pour eux, qu’ils sont inamovibles et qu’on est forcé d’adhérer à leur religion via leur monnaie à cours légal et forcé. Passer de l’une à l’autre des ces monnaies n’est que changer de curé et de paroisse, mais pas d’Eglise, la messe reste la même.

Répondre à brunobertezautresmondesAnnuler la réponse.