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Décryptage du système économique global : Géopolitique du libre-échange

Décryptage du système économique global : Géopolitique du libre-échange


Le long cheminement du nouvel ordre mondial

Par Valérie Bugault – le 21 février 2016 /Le Saker Francophone

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Introduction

Le libre-échange est la déclinaison du principe plus vaste de liberté du commerce. Il s’agit donc d’un concept commercial mis en pratique par des entreprises de type capitalistiques.

Sous couvert de liberté du commerce, le libre-échange a pour conséquence la mise en concurrence, au niveau international, de toutes les entreprises du monde. Il en résulte, de façon inéluctable, la disparition des petites et moyennes entreprises au profit des multinationales économiquement plus performantes, en raison non pas de leur efficacité de fonctionnement, mais de leur poids sur les différents marchés. En d’autres termes, le libre-échange favorise concrètement sur toute la planète la prédation économique des agents les plus faibles par les plus gros d’entre eux, c’est-à-dire la concentration des capitaux. En raison de l’extrême prévisibilité de cette conséquence du libre-échange, on peut en déduire qu’elle est, en réalité, l’objectif inavoué du principe en question.

Ainsi, la liberté du commerce via le libre-échange n’a pas pour vocation de servir mais au contraire d’asservir – la concurrence faussée et débridée aidant – les petits commerçants. La liberté du commerce au moyen du libre-échange n’a pas non plus pour vocation de servir les intérêts du citoyen en occasionnant une baisse générale des prix puisque la concentration des capitaux, qui lui est consubstantielle, s’y oppose fondamentalement. La liberté du commerce par le libre-échange ne sert finalement les intérêts que d’un seul maître : la petite caste qui détient les principaux capitaux du monde. Caste qui a consciencieusement organisé, à la faveur de sa mainmise sur l’organisation bancaire – permettant l’organisation et l’entretien de crises bancaires et financières 1 – et commerciales du monde, l’accaparement de la majeure partie des biens matériels de cette planète.

Nous analyserons l’historique du mouvement de libre-échange (I) avant d’examiner en quoi il s’analyse en une négation du concept d’État (II) et quelle méthodologie il suit (III).

I) Historique du libre-échange

Au niveau français :

Le pilier fondateur du libre-échange, qui est aussi le premier acte de son avènement mondial, se situe formellement en 1791 en France, année qui a vu naître à la fois le décret d’Allarde (des 2 et 17 mars 1791) et la loi Le Chapelier (14 juin 1791).

Le décret d’Allarde, officiellement paré des vertus de la liberté, a supprimé les corporations, qui n’étaient rien d’autres que des associations réglementant dans chaque ville les personnes exerçant le même métier. Il s’agissait déjà de la suppression des barrières non tarifaires, c’est-à-dire réglementaires, mais à l’intérieur du territoire français.

La loi Le Chapelier, elle aussi parée des merveilleuses vertus de la liberté, a interdit les organisations ouvrières, notamment les corporations de métiers mais aussi les rassemblements paysans et ouvriers ainsi que le compagnonnage ; elle ne visait en revanche ni les clubs patronaux, ni les trusts et ententes monopolistiques qui ne furent jamais inquiétés.

Les deux nouveautés législatives que sont le décret d’Allarde et la loi Le Chapelier, au tout premier plan des avancées révolutionnaires, sont en réalité le premier pas vers ce que nous appelons aujourd’hui le libre-échange.

Au niveau européen :

S’agissant des institutions européennes, l’idéologie du libre-échange se déroule selon la chronologie suivante :

Le traité de Rome du 25 mars 1957 instituant la CEE : la libre circulation des capitaux, formellement inscrite, n’est pas encore effective.

La directive du Conseil européen dite Delors-Lamy de 1988 prévoit la libéralisation complète du marché des capitaux pour 1990.

Le Traité de Maastricht (1992) puis les articles 32, 45, 49 à 55 et 63 du TFUE 2(liberté de circulation des marchandises, des travailleurs, liberté d’établissement et liberté de circulation des capitaux), issus du traité de Lisbonne – ratifié par la France moyennant une forfaiture politique – terminent au niveau européen le travail commencé en France en 1791 en imposant la liberté totale pour les groupes étrangers de s’installer sans limite sur des territoires européens qui ne protègent plus leurs ressortissants.

Il faut ici remarquer que l’institution européenne, qui a historiquement débuté en 1952 par la création d’un vaste marché du charbon et de l’acier (CECA), se termine par l’avènement d’institutions (Union européenne) à lasolde des multinationales et par la disparition corrélative de la notion d’État en tant qu’entité politique – en raison de la disparition de toute souveraineté étatique; l’État est remplacé par des institutions supra-nationales fondamentalement indépendantes des peuples.

Au niveau international :

Au niveau international, l’année 1947 constitue le second acte, le second pilier fondateur, de la progression technique du libre-échange. Les accords internationaux du GATT mettent en place dès 1947 la matrice d’un commerce international fondé sur le libre-échange. Il aura néanmoins fallu attendre les accords de Marrakech de 1994 pour voir arriver l’OMC, qui instaure véritablement un ordre du libre-échange au niveau international. Il faut noter que la création de ce nouvel ordre international arrive presque en catimini car il résulte d’une simple annexe à l’acte final du Cycle de l’Uruguay.

La mise en œuvre de l’organisation économique mondiale autour du libre-échange avait initialement prévu d’être intégrée aux accords de Bretton Woods 3. Cependant, des désaccords ayant engendré un contre-temps, ce projet commercial de grande ampleur ne vit réellement le jour qu’à l’occasion de la création de l’OMC.

Une fois l’organisation mondiale du commerce (OMC) en place, les accords de libre-échange se sont mis à fleurir un peu partout sur la planète.

Les grands marchés transpacifique et transatlantique :

La réalisation et l’unification des grands marchés transatlantique – dont lesnégociations vont bon train – et trans-pacifique – signé le 4 février 2016 4 – constituera l’ultime étape de l’avènement du commerce comme ordre sociétal supérieur mondial.

Le grand marché transatlantique est matérialisé par divers accords de libre-échanges (TTIP/TAFTA, CETA/AECG, TISA) qui, ajoutés au grand marché trans-pacifique, seront, si la méthode appliquée à la création de l’Union européenne est suivie – ce qui est plus que probable compte tenu du succès rencontré –, le marchepied à l’avènement d’un traité plus vaste instaurant des institutions chargées de réguler le monde.

Du point de vue de la méthode, l’oligarchie prédatrice aura alors, pas à pas, amené les différents pays du monde au Nouvel Ordre Mondial (NOM) tant attendu. La technique utilisée par les partisans et auteurs du mondialisme est toujours la même : faire en sorte que la marche suivante soit rendue nécessaire par celle qui la précède. Il semble superfétatoire de préciser que le NOM est attendu, non pas par les peuples, mais bien par l’oligarchie transnationale d’origine anglo-saxonne 5, oligarchie qui a pris le pouvoir politique en Occident en utilisant méthodiquement la monnaie et le commerce 6, dont le libre échange est la composante essentielle, comme armes de domination politique. L’ordre militaire étatique, les milices privées et les guerres restent soit des moyens de secours, lorsque la domination politique par l’économie a échoué, soit des moyens pour imposer la domination économique à des dirigeants politiques récalcitrants.

Le contexte politique du marché transatlantique : les pouvoirs exécutifs européens contre leurs citoyens

Le Congrès américain avait voté, en juin 2015, des pouvoirs accrus au président Obama afin de lui permettre de conclure rapidement des accords commerciaux avec la région Asie-Pacifique et l’Union européenne ; mission aujourd’hui pleinement accomplie par ce président docile pour ce qui concerne l’Asie-Pacifique.

Concernant le marché transatlantique, les dirigeants français 7 et allemand8 se déclarent très pressés de mettre un terme aux négociations en cours qui n’ont, de leur point de vue, que trop retardé la signature de ce marché. Les dirigeants occidentaux – gouvernements et commission européenne 9 – s’avèrent en effet extrêmement motivés pour arriver le plus tôt possible à l’étape de la signature ; leur objectif ultime 10 étant d’arriver à faire entrer en vigueur ce grand marché sans passer par l’accord des parlements, nationaux et européen, considérés comme trop lents et peu fiables. Signalons en effet qu’en raison d’une mobilisation citoyenne sans précédent, le Parlement européen a déjà reporté son vote sur ce sujet. Jamais la signature d’accords internationaux n’aura autant mobilisé un public très majoritairement hostile à ces traités 11.

II) Le libre-échange est une négation du concept d’État

Attardons-nous un instant sur le contenu modèle des traités de libre-échange instituant ces grands marchés.

Les barrières tarifaires – c’est-à-dire les droits de douane – et non tarifaires – c’est-à-dire toutes les réglementations protectrices des consommateurs et des citoyens – devront céder face à la sacro-sainte loi de l’investissement et des marchés.

Sous l’empire du libre-échange, aucune législation de juste prévention ou de simple précaution ne pourra plus voir le jour car elle constituera un obstacle aux investissements – plus ou moins audacieux – des grands cartels de l’agro-alimentaire et de l’industrie pharmaco-chimique. Concrètement, place doit être au faite au tout transgénique, aux élevages inhumains et intensifs d’animaux mal nourris et gavés d’antibiotiques (farines animales à des ruminants etc.), aux conditions de conservation douteuse des viandes et poissons (poulets chlorés), aux terres agricoles asphyxiées par les engrais et autres pesticides (dont le fameux round-up descendant direct du défoliantagent orange abondamment répandu au Vietnam par les Américains), à l’utilisation d’huiles impropres à la consommation dans la restauration et l’alimentation humaine etc.

Le libre-échange conduit à faire renoncer les États à une partie substantielle de leurs ressources fiscales – et donc de leur capacité budgétaire – ainsi qu’à leur prérogative régalienne d’édicter des règles générales – puisqu’il leur devient interdit d’édicter toute réglementation protectrice de leurs ressortissants. Ce programme est réalisé par les États dans l’objectif de favoriser, sur leurs territoires, l’implantation de multinationales détenues par quelques personnes.

Dans ce contexte, le libre-échange organise le sabordement, par l’État lui-même, du principe politique étatique. L’objectif du libre-échange est, ni plus ni moins, de voir les États supprimer eux-mêmes leur utilité publique ; ultime raffinement de l’oligarchie qui organise le suicide des États par l’anéantissement de leurs prérogatives régaliennes. En effet, une fois acquise la disparition de la fonction protectrice de l’État, son rôle et sa fonction en viennent tout naturellement à pouvoir être mis en cause – en premier lieu par ceux-là même qui ont organisé son affaiblissement. Une expression française reflète parfaitement cette stratégie politique : «Qui veut tuer son chien dit qu’il a la rage.»

Par ailleurs et pour s’assurer du respect des principes proclamés, le modèle des traités de libre-échange organise une clause, dite de règlement des différends, qui sanctionne la non-application par les États desdits principes.

La clause de règlement des différends incluse dans le modèle des traités de libre-échange donne aux multinationales le droit d’attaquer en justice les États qui auront eu l’audace d’édicter des réglementations protectrices dont l’effet secondaire serait de réduire ou annuler l’espoir de gain résultant d’un investissement fait par des multinationales.

A propos de cette clause particulière incluse dans le TTIP : pour faire bonne figure devant la levée de boucliers populaires, Cecilia Malmström, la négociatrice pour l’Union Européenne – commissaire européenne en charge du commerce –, envisage de transformer la cour d’arbitrage initialement prévue pour le règlement des différends en tribunal public. Un tribunal public permanent, payé par les con-tribuables européens, serait donc chargé de punir les États qui auront adopté des réglementations protectrices de leurs ressortissants dont l’effet aura été de réduire l’espoir de gain suscité par un investissement. Voilà l’avancée démocratique proposée par l’UE : remplacer une Cour d’arbitrage rémunérée par les parties en cause – entreprise et État – par un «tribunal d’investissement public» intégralement payé sur financement public – c’est-à-dire intégralement payé par les con-tribuables – pour protéger les investissements privés des multinationales. Belle rhétorique des mondialistes !

Le libre-échange est synonyme de «point de droit autre que celui de faire commerce illimité et sans condition de tout et partout» – produits et organes du corps humain inclus – permettant de facto, en raison de la disparition des contre-pouvoirs, l’empoisonnement de l’air, des sols et des aliments par les pesticides et autres productions du très puissant conglomérat pharmaco-chimique.

Le commerce et le libre-échange ne peuvent exister que débarrassés des barrières chargées de réguler le commerce et d’éviter l’accaparement. Dans ce contexte, les nations et leurs institutions apparaissent comme de potentiels freins à l’expansion du commerce tout azimut. Les États et leurs institutions, derniers remparts des peuples, ont – par la loi du libre-échange – vocation à disparaître du paysage politique qui deviendra vierge de tout corps constitué autre que par et pour servir l’oligarchie, laquelle est déjà officieusement au pouvoir.

La finalité du libre-échange est d’être fatal à la démocratie, à la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes, à la liberté individuelle et à la propriété privée pour tous. C’est l’oligarchie à la manœuvre qui profitera, à la faveur de l’illusion, savamment entretenue, de la liberté du commerce pour tous – les mondialistes sont d’incontestables maîtres en rhétorique – de la disparition des contre-pouvoirs étatiques.

Le libre-échange suppose conceptuellement une prise de pouvoir définitive des corps économiques constitués sur les institutions politiques contrôlées par les citoyens. Il est, en réalité, la mise en œuvre, par les élites capitalistiques, d’un objectif géopolitique de domination politique globale. Autrement dit, le libre-échange, élevé au rang de religion, est utilisé par l’oligarchie comme une arme, redoutablement efficace, de destruction des États, des nations, des peuples et des individus. Il sert en réalité les intérêts de la caste des acteurs dominant l’économie mondiale, dont l’ambition ouverte est d’instaurer une ploutocratie mondiale.

Le pouvoir sans contre-pouvoir, c’est-à-dire le pouvoir absolu, est l’essence même du libre-échange, c’est aussi la définition de la dictature 12. Il en résulte que l’avènement du nouvel ordre mondial (NOM) ne sera rien d’autre que la résurgence au niveau mondial du système féodal : un nouveau système de dépendance et d’asservissement fondé sur la domination monétaire et commerciale, c’est-à-dire le contrôle du monde par les quelques acteurs qui dominent l’économie mondiale.

La liberté révolutionnaire du commerce, faussement proclamée pour tous, a été, est et sera en définitive le plus sûr moyen de tuer la liberté politique, civile et patrimoniale du plus grand nombre.

Une fois la finalité du libre-échange clairement précisée, intéressons-nous à la raison qui a permis l’émergence d’un principe aussi ouvertement scélérat.

III) L’opacité et la corruption comme méthodologie du libre-échange

Le libre-échange est indéfectiblement lié à une utilisation massive, voire institutionnelle de la corruption ; il s’accompagne de la suppression des débats publics et d’une corruption de grande ampleur des décideurs politiques.

Un exemple canadien, bien qu’ancien, est à cet égard parfaitement instructif. Il laisse apparaître sans aucun doute possible que le libre-échange s’accompagne en coulisse, derrière les beaux et lénifiants discours officiels sur la liberté, d’une volonté puissante de domination et d’une corruption généralisée des élites politiques.

L’anecdote particulièrement significative des objectifs réels du libre-échange, a été rapportée par David Orchard dans son ouvrage Hors des griffes de l’aigle. Quatre siècles de résistance canadienne à l’expansionnisme américain, concernant les visées américaines sur l’État canadien.

Dans cet ouvrage, l’auteur cite le rapport au département d’État américain fait le 13 mai 1854 par un certain Isaac Andrews, agent secret des États-Unis d’Amérique : «Dans le but d’aider les mouvements partisans de l’annexion et du libre-échange au Canada, j’ai versé 5 000 dollars à un rédacteur de journal, 5 000 dollars à un procureur général, 5 000 dollars à un inspecteur général et 15 000 dollars à un député de l’assemblée du Nouveau-Brunswick. J’ai pris par conséquent les mesures qu’exigeait la situation au Nouveau-Brunswick afin de modérer l’opposition et de tranquilliser l’opinion publique. J’ai réussi à me rendre à […] avant la fin de la session de l’assemblée législative du Nouveau-Brunswick et ainsi éviter tout débat sur la proposition de traité de libre-échange à l’étude ou sur toute autre mesure législative néfaste. J’ai déversé plus de 100 000 dollars pour convaincre d’éminentes personnalités d’appuyer l’annexion du Canada par les États-Unis ou, sinon, le libre-échange avec les États-Unis. Mais cette somme n’est rien en comparaison des privilèges qui vont être obtenus de façon permanente et du pouvoir et de l’influence que cela donnera à jamais à notre Confédération.»

Le fonctionnement de l’Union européenne, institution fondée par et pour le libre-échange, est une autre illustration de l’utilisation massive, institutionnellement admise, de la corruption des décideurs publics par les firmes multinationales ; cette corruption porte le doux nom anglais de lobbying. En Union européenne, le pouvoir législatif est entre les mains de décideurs non élus, les commissaires européens, adoubés par les pouvoirs exécutifs européens et d’autres institutions comme le CFR qui promeut la consolidation économique du monde en blocs régionaux. La Commission européenne est, par construction, toute acquise à la cause oligarchique.

Plus récemment, les conditions de secret qui entourent la gestation du grand marché transatlantique est une autre manifestation de la vaste entreprise d’opacité, visant à court-circuiter les institutions politiques des États, qui accompagne de façon structurelle le libre-échange. Les élus d’Europe n’ont qu’un accès tardif et réduit aux négociations du grand marché transatlantique, qui ne supportent aucun réel débat public. L’accès aux documents de travail des élus n’est possible que dans des conditions extrêmement surveillées 13. Les parlementaires allemands ayant, sans surprise, davantage accès auxdits documents que les parlementaires des autres États, tout en ayant une interdiction formelle de les photocopier 14.

Conclusion : de la liberté du commerce à la disparition de la civilisation

Le libre-échange organise au niveau mondial un pur schéma de prédation économique qui a tôt fait de se transformer en prédation politique, géopolitique et civilisationnelle. Cette prédation ultime est une conséquence mécanique de la prédation économique qui génère spontanément une énorme concentration de capitaux. Les très grandes entreprises, dirigées par leurs actionnaires majoritaires, prennent le contrôle institutionnel des États au moyen du libre-échange.

Le champ d’action de la liberté totale du commerce, compris comme la domination géopolitique de la caste des grands capitalistes, n’est plus, aujourd’hui, limitée que par les seules connaissances techniques et scientifiques ; elle se développe et progresse à mesure que progressent ces dernières.  Ainsi, alors que la société commerciale permet de faire commerce de tout type de biens, licites ou illicites, elle permet aujourd’hui d’intégrer au commerce non seulement le corps humain mais aussi et surtout les produits et parties de celui-ci, remettant fondamentalement en cause la notion d’intégrité du corps humain. L’objectif à peine inavoué des principaux capitalistes à l’œuvre paraît bien être la possession de l’éternité, qui justifie les énormes capitaux investis – notamment par une entreprise comme Google – dans le projet transhumaniste.

Au-delà de la destruction des États, la liberté totale du commerce a pour conséquence sociologique d’engendrer une déstructuration profonde des sociétés humaines traditionnellement fondées sur un ancrage géographique et sur l’affection filiale et intergénérationnelle. Elle a également pour effet – à moins que ce ne soit un objectif ? – de détruire l’intégrité du corps humains, ravalant l’Homme au rang de bien matériel. Le libre-échange préfigure un monde dans lequel les classes financièrement inférieures seront reléguées au rang de fournisseur de pièces de rechange corporelles pour les plus riches.

Au bout du chemin du libre-échange il y a non seulement la disparition des États nations mais encore, et surtout, l’asservissement généralisé, voire même, un pas plus loin – si l’on en croit les indications du Georgia Guidestones la disparition d’une bonne partie des populations vivant sur terre.

Cette voie, toute tracée pour nous par l’oligarchie à la manœuvre, n’est pas inéluctable. Nous verrons plus tard 15 que ce projet de domination planétaire, entièrement fondé sur la notion d’entreprise, peut être stoppé par une simple appropriation juridique par les États du concept d’entreprise. En d’autres termes, la survie – de la liberté et de l’humanité – suppose que l’entreprise de type capitalistique réintègre le corps social, dont elle a – grosso modo depuis la Révolution française – émergé comme une tumeur cancéreuse sur un organe sain. Un tel retournement des choses aurait pour effet de remettre le fait économique dans le giron du fait politiqueet de rendre à la notion d’État ses lettres de noblesses. Quel État, quel chef d’État, en sera capable ?

Valérie Bugault est Docteur en droit, ancienne avocate fiscaliste, analyste de géopolitique juridique et économique


Notes

  1.  Lire à cet égard les articles à venir sur la géopolitique des banques centrales ainsi que celui qui sera consacré au fonctionnement des banques et des entreprises ↩
  2. Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne ↩
  3. http://lewebpedagogique.com/grunen/accords-de-bretton-woods-22-juillet-1944/ ;http://abc.economie.free.fr/gratuit/brettonwoods.html ↩
  4.  http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/10/05/partenariat-transpacifique-un-accord-entre-les-etats-unis-et-onze-pays_4782836_3234.html ;http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2016/02/04/97002-20160204FILWWW00001-l-accord-de-partenariat-transpacifique-signe.php ↩
  5. Histoire secrète de l’oligarchie anglo-américaine, de Carroll Quigley, publié aux États-Unis en 1981 et traduit en français cette année, avec une préface de Pierre Hillard ↩
  6. Lire nos articles concernant la géopolitique des banques centrales et le fonctionnement des entreprises et des banques ↩
  7.  http://www.euractiv.fr/section/commerce-industrie/news/francois-hollande-veut-accelerer-les-negociations-commerciales-avec-les-etats-unis/ ; http://reporterre.net/La-mobilisation-contre-le-Traite ↩
  8. http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/20150305triba7dc96c4a/ttip-merkel-veut-signer-avec-les-etats-unis-en-2015.html ↩
  9.  http://www.latribune.fr/opinions/blogs/vu-de-bruxelles/cecilia-malmstrom-une-infirmiere-au-chevet-du-ttip-475734.html ↩
  10.  Voir par exemple : https://stoptafta.wordpress.com ↩
  11. http://fr.novopress.info/191459/25-millions-signatures-contre-tafta-poubelle/ ;http://www.marianne.net/susan-george-32-millions-signatures-contre-tafta-c-est-premiere-europe-100237158.html ; http://www.upr.fr/actualite/monde/tafta-l-upr-lance-une-grande-petition-pour-demander-a-francois-hollande-l-organisation-d-un-referendum ; http://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/europe-etats-unis-pourquoi-le-traite-tafta-ne-verra-pas-le-jour-en-2015_1643110.html ↩
  12. La dictature est, selon le dictionnaire Larousse, un «régime politique dans lequel le pouvoir est détenu par une personne ou par un groupe de personnes qui l’exercent sans contrôle, de façon autoritaire». ↩
  13. https://stoptafta.wordpress.com/2016/01/07/acces-des-eurodeputes-aux-documents-de-negociation-sur-le-tafta-ttip/ ; pour l’accès limité aux parlementaires français :http://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/arret-des-negociations-du-tafta-le-double-jeu-de-la-france_1720112.html ↩
  14. http://danielleauroi.fr/?p=10599 ;http://fr.sputniknews.com/opinion/20160127/1021251518/tafta-allemagne-documents-secrets.html ↩
  15. Les articles à suivre concernant la géopolitique de l’entreprise (parties 5 et 6)
    ↩

http://lesakerfrancophone.fr/decryptage-du-systeme-economique-global-27-geopolitique-du-libre-echange

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EN BANDE SON

10 réponses »

  1. Quel État, quel chef d’État, en sera capable ????

    Quand on découvre que Marine le Pen rencontre Ron Paul…. pardon mais ça laisse songeur…

    Pour ce qui concerne cette analyse… je donne un 100/20 bien entendu.

    Comme ça fait longtemps que je mène mes petites enquêtes sur cette main mise sur l’économie en France, je peux vous dire qu’il n’y a pas lieu de se rassurer.

    Comme les cafards, il faudrait un traitement de choc allant de la cave au grenier tellement ils sont partout…

    Ils sont bien entrés dans tous les pans de notre économie… tous sans exception.

    Si vous voulez en tant que PME participer à un salon, ils sont là (Event)
    Si vous voulez du pain, ils sont là.. du fromage ? ils sont là (Lactalis, Nestlé etc)
    Si vous voulez voyager, ils sont là (Club med, chaîne d’hotel Accor etc..)
    Si vous voulez prendre l’avion, ils sont là (SNC Lavallin… )
    Si vous voulez faire du ski, ils sont là aussi… (Rémy Loisir/LABELLEMONTAGNE)
    Bref, si vous voulez un shampoing, vous avez le choix entre Elsève et Elsève (l’oréal)
    Vous voulez un assouplissant pour linge, vous avez le choix entre Soupline et Lenor.
    Vous voulez des crèches pour vos enfants ? ils sont là (Babylou..)
    Vous voulez des cantines pour vos enfants ? pareil ! ils sont là (Elior..)
    Vous ne voulez pas de la fibre, ils sont là de force (SFR-Numéricâble)
    Vous ne voulez pas de Métropole, désolé encore mais ils sont là (BNP Paribas Real Estate, AXA, Crédit Agricole, Bouygues, Vinci etc…)
    Vous voulez vous chauffer, ils sont là (ENGIE)

    Derrière toutes ses marques, vous avez le même… j’ai déjà donné le nom, je ne voudrais pas avoir l’air d’insister… mais c’est un fait.

    Wouala… wouala, l’état d’avancement… reste plus qu’à « Pray for France »… le « day » de la libération la vraie… c’est pas pour demain.

    D’ici là, je me serais tirée de ce pays… j’ai un héritage à cramer.

  2. Quel chef d’Etat en sera capable ?

    Quel peuple en sera capable ?

    A propos de la décadence :

    François Fillon : « La France est dans une situation d’extrême faiblesse parce que nous n’avons pas su enrayer une forme de décadence. »

    http://www.atlantico.fr/decryptage/francois-fillon-france-est-dans-situation-extreme-faiblesse-parce-que-avons-pas-su-enrayer-forme-decadence-2682586.html

    « Une forme de décadence » ? ? ?

    Mais de quand date la décadence de la France ?

    Le début de la décadence, c’est le 19 mai 1974.

    Le 19 mai 1974, le peuple français choisit un chef de l’Etat qui n’a plus comme priorité l’intérêt national.

    Pour la première fois de son histoire, le peuple français choisit un chef de l’Etat qui a comme priorité numéro un : la construction européenne.

    L’élection de Valéry Giscard d’Estaing est un tournant historique : à partir du 19 mai 1974, tous les chefs de l’Etat auront comme priorité numéro un : la construction européenne.

    De même, tous les premiers ministres auront comme priorité numéro un : la construction européenne.

    Exemple : François Fillon.

    – La Convention de Schengen entre en vigueur le 26 mars 1995. A partir de ce jour-là, il n’y a plus de frontières nationales. A la place, il y a un gigantesque espace européen de libre-circulation. François Fillon était à l’époque ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. François Fillon était en faveur de la Convention de Schengen.

    – Dix ans plus tard, le 29 mai 2005, François Fillon vote « oui » au référendum sur le traité établissant une constitution pour l’Europe. Cette constitution européenne était surnommée « la constitution Giscard. »

    – En 2008, le premier ministre François Fillon était en faveur du traité de Lisbonne. Selon Valéry Giscard d’Estaing lui-même, le traité de Lisbonne reprend 98 % de la constitution Giscard. Le premier ministre François Fillon fait adopter le traité de Lisbonne en le faisant voter par le Parlement français, sans le soumettre au référendum.

    Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, François Fillon, Nicolas Sarkozy, François Hollande : tous ces européistes sont les responsables de la décadence de la France.

    Ils ont été au pouvoir, on les a vus à l’oeuvre.

    Conclusion :

    Depuis le 19 mai 1974, le peuple français est le premier responsable de la décadence de la France, car il vote toujours pour des européistes.

    Aujourd’hui, nous avons la décadence de la France, car nous sommes devenus un peuple décadent.

    • Fillon fait des constats sur l’état de la France, mais on n’a pas besoin d’être dans cette clique politicarde pour faire le même constat…

      Même le con de base sait bien que la France coule et qu’aucun d’entre eux n’a réformé le pays dans le sens d’une amélioration de nos finances.

      L’UMP des libéraux ???? mdr… oui, le forfait mobile pour les pauvres à 10 €… et maintenant tous soutiennent le revenu de base… plus collectiviste que ça tu meurs.

      On n’a juste eu un bout de début de programme sensé, et ce fut la loi TEPA qu’on devait à Eric Woerth… mais ça faisait chier cette caste umpiste, alors on a mis un terme à la carrière de ce type en l’envoyant au charbon avec la réforme de la retraite… c’est lui qui a pris les patates chaudes.

      Et l’autre débile mental de Baroin… cette petite tête à claque qui vient encore aujourd’hui minauder devant les français… il veut qu’on lui rafraîchisse la mémoire ??? En 2010, virage totale et une kyrielle de nouvelles taxes… jusqu’au sodas !

      La France est dans la merde depuis le front populaire… puis il se sont rincés pendant les 30 glorieuses, mais comme ça ne suffisait pas, il ne fallait « ni dieu ni maître ».. il devait être « interdit d’interdire »… et voilà le résultat… l’économie décadente, les mœurs décadents et tout est entrain d’imploser… alors on nous refourgue des « nuits debout » pour demander plus de gauche parce que la gabegie, c’est la faute au giga-méga-ultra libéralisme…

      C’est vrai qu’en France, il y a un grand vent de liberté, on le sent bien dans les cheveux… ça décoiffe !

      L’olligarchie n’est pas maquée avec la finance, à 60% de dépenses publiques l’état n’est pas interventionniste… pas de copinage non plus… et pour les mœurs, ma foi… c’est sans commentaire.

      Le plus drôle, c’est quand j’écoutais ce tartuffe de Soral… Ce couillon de marxiste, qui démonte le 1er qui touche à Marx sous prétexte qu’il l’a lu pendant 20 ans et qu’il connait cette idéologie mieux que personne….

      et bien, il finira par dire dans une vidéo, que c’est passé 50 ans, qu’il découvre ce qu’est le libéralisme et admet ENFIN qu’il s’est gouré sur toute la ligne…

      Super !!! mais lui aussi, il a lavé le cerveau à combien de ses fans ???

      Reste à attendre le réveil des autres pseudos intellectuels du Paf…

      http://www.agoravox.tv/actualites/economie/article/soral-reconnait-enfin-les-vertus-33307

      • Mais qui pense que Soral à quelque chose de tant soit peu intéressant à dire ?

        • Pour vous il ne dit pas de chose intéressantes… pour moi non plus d’ailleurs.
          Mais ne vous y trompez pas… les « intellectuels » que vous voyez partout, ils sont assis chacun sur une branche, mais ils ont un tronc commun.
          Soral c’est le marxiste anti-sioniste
          Zemmour, c’est le marxiste anti-islam..
          Onfray, c’est le marxiste libertaire
          Michéa, c’est le marxiste anti-capitaliste..

          et j’en passe…

          Voyez le tronc commun ??? c’est ce tronc là qu’il faut scier.. le reste ce n’est que baragouinage..

          Si les gens cherchaient ce qu’il se cache derrière toutes ces postures, on pourrait commencer à avancer… et on arrêterait de se tromper d’ennemis.

  3. Excellent article qui colle parfaitement aux analyses que fait l’Union Populaire Républicaine depuis presque 10 ans.
    Vous avez raison, ce n’est pas inéluctable, mais encore faut-il que les lecteurs soient informés de l’existence du seul parti politique qui propose de contrer cela.

  4. Analyse éclatante
    « La finalité du libre-échange est d’être fatal à la démocratie, à la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes, à la liberté individuelle et à la propriété privée pour tous. C’est l’oligarchie à la manœuvre qui profitera, à la faveur de l’illusion, savamment entretenue, de la liberté du commerce pour tous – les mondialistes sont d’incontestables maîtres en rhétorique – de la disparition des contre-pouvoirs étatiques. »citation
    « La liberté révolutionnaire du commerce, faussement proclamée pour tous, a été, est et sera en définitive le plus sûr moyen de tuer la liberté politique, civile et patrimoniale du plus grand nombre. »
    « Au-delà de la destruction des États, la liberté totale du commerce a pour conséquence sociologique d’engendrer une déstructuration profonde des sociétés humaines traditionnellement fondées sur un ancrage géographique et sur l’affection filiale et intergénérationnelle. Elle a également pour effet – à moins que ce ne soit un objectif ? – de détruire l’intégrité du corps humains, ravalant l’Homme au rang de bien matériel. Le libre-échange préfigure un monde dans lequel les classes financièrement inférieures seront reléguées au rang de fournisseur de pièces de rechange corporelles pour les plus riches. »
    Je me permet de souligner ces trois passages..alors que la totalité est un condensé de réel.
    Chapeau bas Madame.
    @un citoyen libre
    Désolé, je comprends votre point de vue mais votre parti n’est pas en mesure de rassembler une majorité.
    Par contre vous avez raison il faut informer sans cesse.
    Et le temps nous est compté…
    La seule qui pourrait fédérer(en France)le parti de MLP est divisé, le programme Philippot d’un coté et souverainiste de l’autre Marion Maréchal divise le FN .
    MLP est fatiguéé ..isolée..et elle n’a pas l’envergure nécéssaire pour prendre le pouvoir…
    2017 ou jamais mais qui, je dirais plutot quoi?..

    .

    • Pour 2017 la messe est dite en France car on imagine mal 30% de souverainistes gouverner contre les 70% restant…surtout quand on est sensé représenter la volonté populaire…Cela serait totalement antidémocratique, et les souverainistes sont les derniers défenseurs de la démocratie et de qu’il en reste…

  5. Personnellement je vote pour les prochains icebergs,D’ici 2017 il y en a pas mal qui vont émerger.

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