Trois principes très sains régissent les rapports entre certains intérêts économiques et politiques dans le droit américain. La Suisse devrait s’en inspirer
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Trois principes très sains régissent les rapports entre certains intérêts économiques et politiques dans le droit américain. Oublions le domaine des finances et des banques, et regardons ailleurs.
Prenons le cas des émoluments du Parlement
En Suisse, le parlement est en train de s’augmenter considérablement. Il a seul l’autorité de le faire, sauf si un référendum est lancé. Dans ce cas ce serait le peuple. Mais la Constitution américaine tient compte de ce conflit d’intérêts et elle stipule que toute augmentation votée par le parlement pour lui-même ne prendra effet que lors de la législature suivante. Les parlementaires gourmands doivent donc passer devant l’électeur qui a ainsi le dernier mot, même sans référendum.
Cette disposition n’a été ajoutée qu’en 1992 bien qu’elle figurât déjà dans les brouillons constitutionnels dès 1789.
Elle exprime la conception anglo-saxonne selon laquelle les politiciens et les syndicalistes, tout comme les entrepreneurs, maximalisent tout et qu’il faut donc leur opposer des garde-fous d’un ordre juridique supérieur.
La deuxième disposition sort aussi de la révolution américaine et elle pourrait bien servir la Suisse aujourd’hui. C’est le slogan «pas d’imposition sans représentation» lancé lors de l’émeute à Boston en 1773 contre une taxe sur le thé. Le parlement anglais l’avait décidée et les colons américains découvraient qu’ils étaient des sujets sans droits.
Or, notre ministre des Finances, qui n’avait pas obtenu de siège à la conférence du G20 en avril, s’est pourtant hâté de souscrire à la décision prise par ce nouveau gouvernement mondial de relever les crédits du Fonds monétaire international. Une participation suisse de pas moins de 10 milliards de dollars a tout de suite été promise. Son importance dépasse même la quote-part de la Suisse dans le FMI.
S’il avait été appliqué, le principe fondateur des Etats-Unis aurait obligé la Suisse à refuser, à moins d’être admise dorénavant au G20 si elle doit passer à la caisse. «No taxation without representation.» Quelquefois on se demande si nos conseillers fédéraux savent négocier. Car négocier ne veut pas dire céder et payer, mais se rendre incontournable et obtenir quelque chose.
La troisième réforme que l’on devrait reprendre des Etats-Unis est le droit des poursuites. Une entreprise américaine peut invoquer le fameux «chapitre 11» du code des faillites. Celui-ci lui permet de tourner sans interruption. Un juge est nommé comme gestionnaire immédiatement. Il pousse les anciens actionnaires dehors, il contraint les créanciers à des concessions, de même que les syndicats et le personnel.
L’effet de cette intervention rapide et plénipotentiaire a pu être observé lors des faillites récentes des deux géants automobiles américains. Ils tournent toujours, et GM envisage déjà de rembourser les fonds publics reçus lors de la restructuration. Mais. surtout, la plupart des ouvriers gardent leur place de travail, les entreprises restent physiquement intactes et les clients sont servis à nouveau.
Là, je ne comprends pas l’inertie des syndicats européens et suisses. Avant toute manifestation contre la crise, contre des licenciements, contre la finance déboussolée, il faudrait lutter pour cette réforme de fond.
Ces trois règles traduisent une vision sobre de la société, de la politique, des intérêts économiques. Elles sont orientées vers l’avenir, vers l’élimination de tiraillements, de rancunes, de «coûts de transaction», comme dirait l’économiste.
Pour ne pas paraître naïf, je concède volontiers que d’autres lois et procédures américaines convainquent moins. La manie des tribunaux d’accorder des sommes pharamineuses pour tort moral et la participation des avocats dans cette manne sont une gangrène dévorant la bonne foi et la substance économique à la fois.
L’application des lois selon la lettre et non selon l’esprit amène à des lois monstres comme celle sur la santé actuellement devant le Sénat – elle a 2000 pages. La loi suisse sur l’assurance maladie n’a que 60 pages. Notre Code des obligations est un modèle de sobriété. Alors, gardons ce que nous avons et cherchons à nous améliorer là où nous sommes à la traîne
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