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Michel Juvet : Bouchons bancaires

La réglementation bancaire, c’est comme la gestion de la circulation en ville: des feux rouges au mauvais endroit, des bouchons, des flux qui se réorganisent et des automobilistes qui utilisent d’autres chemins… entraînant d’autres bouchons…

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Les bonnes idées pour cadrer les risques bancaires émergent progressivement. Elles se concentrent sur les postes clés des bilans. A l’actif, on recherche une plus grande sécurité: plus de liquidités, moins d’investissements à risque et plus de prêts traditionnels. Simple et efficace.

Au passif, l’enjeu est plus complexe. D’abord les fonds propres minimaux devront être plus élevés. HSBC n’a pas eu les mêmes problèmes qu’UBS malgré des dépréciations d’actifs équivalentes grâce à une entrée dans la crise avec le double de fonds propres. En outre, le financement auprès d’autres banques sera limité, pour réduire les effets de contagion à l’ensemble du système. Peut-être qu’une taxe sur la valeur des dettes bancaires (hors dépôts des particuliers) sera instaurée et financera un fonds qui absorberait des pertes et garantirait une partie des dépôts interbancaires. La crise de 1929 avait engendré la garantie des dépôts des épargnants, la crise de 2008 générerait ainsi son équivalent pour les dépôts interbanques.

Ces mesures réduiront la taille des banques, leurs rendements sur fonds propres, leurs bénéfices et pourraient les ramener aux années 1970 ou 1980… lorsque leur poids dans les indices boursiers était deux fois moins élevé qu’aujourd’hui. Seront-elles pour autant plus «au service de l’économie»? Dans le passé, chaque fois que les banques ont dû réduire la voilure, les prêts aux particuliers ou aux entreprises n’ont pas immédiatement décollé. D’ailleurs, les banques européennes se conforment déjà à la future réglementation: elles réduisent leur prise de risques et investissent dans des titres sûrs… les obligations étatiques: plus de 300 milliards d’euros achetés en 2009, autant qu’entre 2000 et 2005!

Les banques ne servent donc pas encore la fameuse «économie réelle», mais plutôt les Etats qui les critiquent et s’endettent! Les banques centrales, qui reprêtent aux banques à des taux planchers leur propre argent déposé chez elles en toute sécurité, n’y sont pas étrangères. Elles devront bien inverser la tendance un jour, pour ne pas créer un nouveau monstre.

La réglementation bancaire, c’est comme la gestion de la circulation en ville: des feux rouges au mauvais endroit, des bouchons, des flux qui se réorganisent et des automobilistes qui utilisent d’autres chemins… entraînant d’autres bouchons…

PS: Que se passerait-il si les banques suisses perdaient leurs clients européens et vendaient les 125 milliards de francs de dettes étatiques européennes détenues par leurs clients?

*Bordier et Cie.FEV10

Prévisions hebdo / SEMAINE 6

La montée des rendements obligataires sur les débiteurs grecs, espagnols ou portugais a entraîné une baisse mécanique des évaluations des actions sur ces pays, et une contagion sur toutes les places boursières. La Grèce se traite aujourd’hui avec des évaluations concurrentielles par rapport aux autres pays européens. Quant aux autres marchés, la baisse des cours les rend à nouveau attractifs. Les prochaines semaines resteront néanmoins chahutées, en fonction des possibilités de refi nancement offertes par les marchés à l’état grec. Une intervention du FMI entraînerait un plan d’austérité qui rétablirait la confiance sur les valeurs financières, mais qui serait très négatif pour les valeurs locales de consommation.

BILLET PRECEDENT : Michel Juvet : Lettre de réflexion prospective pour 2010 (cliquez sur le lien)

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