Etude PEW Research : Les Français s’écartent du nord et se rapprochent du sud ; les divergences avec l’Allemagne s’accroissent fortement Par Bruno Bertez
PEW Research a publié une étude importante sur l’attitude des Européens à l’égard de l’Europe.
Cette étude, de 78 pages, s’intitule “The new sick man of Europe, the European Union”. Autant dire que l’étude n’est guère très optimiste sur l’évolution de l’Europe. En particulier, elle note le soutien de moins en moins important des populations à l’idée européenne. Les tendances dissociatives provoquées, non seulement par la crise, mais encore plus par les remèdes à cette crise, prennent de plus en plus d’ampleur.
Nous vous donnons ci-dessous l’essentiel de ce qui concerne la France.
La partie française s’intitule : « France in free fall », la France en chute libre.
PLUS DE BERTEZ EN SUIVANT:
La crise européenne a miné l’économie française. Maintenant, il est de plus en plus évident que, non seulement elle a détérioré l’économie, mais elle a détérioré le sentiment des Français à l’égard du projet européen. Elle a aussi fortement nui à l’image du leadership politique français.
La France a toujours représenté une sorte de pont entre le nord et le sud. Cependant, historiquement, elle a plutôt été considérée comme économiquement proche de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne. Hybride entre le nord et le sud, les Français évoluent maintenant, selon l’étude, beaucoup plus vers le sud. Ils se rapprochent des Espagnols, des Italiens et des Grecs et s’éloignent des Allemands.
L’enquête de PEW fait ressortir que l’opinion des Français à l’égard de leur économie est très négative. On est dans les plus bas. Seules 9% des personnes interrogées déclarent que l’économie française performe correctement. C’est un effondrement de plus de 21 points par rapport au jugement qui était porté en 2007.
Mais il y a pire. Seuls 11% des Français imaginent que leur économie va s’améliorer au cours des 12 prochains mois, ce qui rend les Français parmi les peuples les plus pessimistes d’Europe. A plus long terme, l’appréciation n’est guère plus encourageante, puisque seuls 9% des personnes interrogées considèrent que leurs enfants auront une meilleure situation qu’eux-mêmes.
La médiocre performance économique au cours des six dernières années a provoqué un accroissement sensible de la population qui souffre du manque des biens et services essentiels. Le nombre de personnes qui déclarent ne pas avoir assez d’argent pour payer l’alimentation et les soins de santé a progressé beaucoup plus en France depuis 2007 que dans n’importe quel autre pays de l’Union Européenne.
Passons maintenant au sentiment européen. Les Français n’ont jamais été très optimistes concernant les bienfaits de l’Europe. En 1991, l’année qui a précédé le marché unique, 44% des Français pensaient que cette intégration serait nuisible à la France. Aujourd’hui, ces doutes se sont transformés en certitude : 77% des Français pensent que l’intégration économique a nui, a sapé, les bases de l’économie française.
En 2004, 69% des Français avaient une opinion positive sur les institutions de Bruxelles. Présentement, seuls 41% ont encore une opinion favorable sur ces institutions. Plus de 50%, 53% des Français, sont tout à fait contre le fait de donner plus de pouvoir aux institutions communautaires. Seuls 40% considèrent qu’il faut prêter assistance financière aux autres pays européens en détresse, alors qu’au début de la crise en 2010, ils étaient 53%. Cependant, note PEW Research, il y a encore 63% de Français qui veulent conserver l’euro et ont peur de retourner au franc.
Toujours selon l’enquête que 80% des Français disent que le chômage est le problème prioritaire. Par comparaison, seuls 28% des Allemands pensent la même chose. Ce qui est assez étonnant, compte tenu de l’intoxication et des manipulations des chiffres d’inflation, c’est que 68% des Français considèrent que l’inflation est un problème majeur. On pourrait penser qu’avec des chiffres minorés par les manipulations et aussi peu représentatifs, l’opinion aurait été différente. Visiblement, les Français font plus attention à la réalité de leurs dépenses qu’aux indices officiels. Par comparaison, seuls 31% des Allemands s’inquiètent de l’inflation.
Pour terminer sur les grands équilibres, 71% des Français se sentent concernés par la dette publique et en sont inquiets. Il n’y a que 37% des Allemands qui partagent cette inquiétude.
Les conclusions que nous tirons de cette étude sont les suivantes :
1) Le pouvoir politique serait malvenu de négliger le sentiment anti-européen qui se répand en France. Le soutien à l’euro, qui parait contradictoire, s’explique aisément par les campagnes de propagande catastrophistes qui sont régulièrement diffusées. Personne n’imagine et ne sait que la France, étant dans une situation moyenne, a la possibilité de sortir de l’euro sans conséquence dramatique. De temps en temps, le fait d’être un élève moyen et médiocre sert à quelque chose. Par ailleurs, il faut noter que le Français a une peur viscérale du changement et de l’aventure et que, indépendamment de toute appréciation raisonnable, la préférence pour le maintien de statu quo s’explique aisément.
2) Il n’y a aucun mandat démocratique pour aller plus loin dans l’intégration européenne. Encore faut-il tenir compte que les chiffres de PEW Reserach sont des chiffres qui s’entendent après une propagande quotidienne des élites et des médias en faveur de l’Europe. Si le débat sur une poursuite de l’intégration européenne s’ouvrait réellement et honnêtement, il est quasi sûr que le pourcentage des gens qui y seraient favorables chuterait nettement.
3) Nous avons souvent relevé le fait que la crise, au lieu de rapprocher les peuples, d’abord les séparait, puis, ensuite, les montait les uns contre les autres. L’enquête de Pew Research fait clairement ressortir les divergences de la France avec l’Allemagne. Les autres parties de l’enquête montrent que le phénomène est généralisé.
D’une façon générale, les leaders, les élites et les médias continuent de peser de tout leur poids en faveur du projet européen et essaient de compenser le déficit démocratique par le mensonge, la propagande et les contrôles. Il apparaît évident, à l’examen de cette enquête, que l’Européen moyen ne suit pas ses leaders et qu’au contraire il s’en écarte de plus en plus. Plus les questions sont précises et plus il s’en écarte.
Un petit complément. PEW Research a demandé la position de chaque population sur la question de l’accroissement des pouvoirs de Bruxelles. La question était : pour résoudre les problèmes économiques européens, êtes-vous pour ou contre le fait de donner plus de pouvoir de décision aux institutions européennes ?
Voici les réponses, elles sont classées du plus favorable au moins favorable :
– Allemagne : 51% pour
– Italie: 49% pour
– Espagne : 47% pour
– France : 47% pour
– Pologne : 38% pour
– Grèce : 31% pour
– Grande-Bretagne : 21%
On notera que, s’agissant de la France, 53% des Français, selon le sondage, se déclarent opposés à donner plus de pouvoir à Bruxelles. La réponse des Allemands favorables à 51% n’est guère étonnante si ce n’est par sa faiblesse, on aurait attendu plus. En effet, comme c’est l’Allemagne qui a le poids le plus important et que cela est perçu comme tel, faire confiance aux institutions européennes paraît justifié.
BRUNO BERTEZ Le Jeudi 16 Mai 2013
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