Allemagne

Mister Market and Doctor Conjoncture du Samedi 21 Septembre 2013 : Retour sur le « taper », la Fed dans les cordes ou bien encore Bernanke KO debout Par Bruno Bertez

Mister Market and Doctor Conjoncture du Samedi 21 Septembre 2013 : Retour sur le « taper », la Fed dans les cordes ou bien encore Bernanke KO debout Par Bruno Bertez

Notre réaction à chaud sur la décision de la Fed de ne pas procéder à la réduction de ses achats de titres à long terme a été publiée sous le titre « Fed, no Exit, encore une fois. Le bonheur, c’est toujours pour demain ». Cette réaction à chaud débutait par un paradoxe puisque nous disions : « sans surprise, la Fed a reconduit sa politique monétaire ultra-accommodante aux termes de la réunion qui s’est achevée le 18 septembre ».

ben-bernanke

L’ensemble des observateurs a considéré qu’il s’agissait d’une surprise ; une minorité, dans laquelle nous nous rangeons, considèrent que s’il y a eu une surprise, c’est en sens inverse qu’il faut l’entendre. La surprise, c’est que Bernanke n’ait pas annoncé une augmentation du volume de ses achats de titres à long terme.

En toute bonne logique, à la fois la logique absolue et celle de Bernanke, ce qui aurait dû être annoncé, c’est une hausse du montant de ces achats de titres.

Les raisons qui justifient cette affirmation sont les suivantes :

1)      La croissance espérée n’est pas au rendez-vous, la Fed est obligée de réviser en baisse ses prévisions de croissance pour 2013 et 2014

2)      L’inflation, au lieu d’accélérer, se modère.  Tenez-vous bien, on est maintenant sur un rythme annuel de 1,3% alors que l’objectif est à 2,5%. La hausse des prix est maintenant inférieure à ce qu’elle était avant les QE

3)      Le conflit fiscal américain va recommencer avec ses débats politiciens et son cortège d’incertitudes

4)      La situation intérieure américaine commence à se dégrader avec des fissures dans la reprise du secteur du housing et des résultats décevants dans le secteur de la consommation. Tout ceci est lié à la hausse du taux hypothécaire

5)      La situation internationale est très mauvaise ; les capitaux refluent ; les monnaies chutent ; l’activité ralentit. Un cercle vicieux se dessine ; la baisse de la croissance pèse sur les producteurs de matières premières, ce qui en retour ralentit leur propre croissance  et pèse sur la croissance mondiale

6)      La stabilité financière globale est menacée ; le regain de fragilité des émergents incite les banques à se retirer et par conséquent à accentuer leur deleveraging

7)      Au cours des dernières réunions internationales, tous les émergents + certains pays développés ont demandé à la Fed de ne pas prendre de décision qui aggraverait leur situation

8)      L’élection allemande ouvre une nouvelle fenêtre d’incertitude, laquelle, conjuguée à un retrait de la liquidité globale, pourrait déboucher sur un regain des forces de fragmentation.

Vous le voyez, à l’énoncé de toutes ces raisons, si Bernanke était logique avec son analyse, il aurait dû non seulement ne pas envisager de réduire, mais envisager d’augmenter son quota d’achats.

Permalien de l'image intégrée

Si, comme il le dit, il est persuadé que ses QE sont utiles, alors, il aurait dû les amplifier. Il aurait dû les augmenter pour des raisons intérieures puisque la croissance auto-entretenue n’est à nouveau pas au rendez-vous ; il aurait dû les augmenter parce que les forces de déflation reprennent le dessus. Il aurait dû les augmenter pour des raisons internationales puisque le monde global vacille en raison de la déstabilisation des émergents et que l’Europe est encore fragile, menacée par les risques de fragmentation. N’oubliez pas que le dollar est la monnaie de réserve mondiale. N’oubliez pas que le taux des Treasuries  américains à 10 ans sont les taux directeurs mondiaux. N’oubliez pas que l’économie et la finance ne sont que des sous-ensembles d’un ensemble plus vaste qui est l’ensemble géo-politique global.

Un commentateur de la Deustche Bank, pas trop conventionnel, a écrit le 19 : « Le chemin du tapering américain va être rude. Chaque fois qu’on l’évoque,  les marchés se disloquent. On pense que les taux vont monter et que les conditions vont se resserrer ».  Nous pensons comme lui, à savoir que chaque fois que l’on va envisager de retourner en arrière, il y aura des éléments qui se manifesteront ici ou là, voire n’importe où, pour s’opposer aux réductions envisagées.

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le système est un tout et que la modification d’un des éléments du système, comme la réduction des QE, peut avoir des conséquences imprévues, inattendues, à un endroit très éloigné que l’on n’avait absolument pas imaginé. La boucle de feed-back englobe tout. Nous vous rappelons la grande surprise des régulateurs américains lorsqu’ils ont vu à partir du mois de mai s’envoler les taux des Treasuries à 10 ans alors qu’ils étaient persuadés que ces Treasuries allaient continuer de bénéficier du statut de safe-haven et qu’ainsi ils seraient restés à un bas niveau malgré le début du taper.

Click to View

 Le gouvernement américain tout comme la presse et les gourous n’arrivent absolument pas à intégrer dans leur raisonnement le fait que le monde est global. Global non pas géographiquement mais organiquement : tout est lié. Si l’Inde a dû monter ses taux de 0,25 point le 20 Septembre, une nouvelle fois à la surprise générale,  ce n’est pas  simplement en raison de la situation indienne, c’est en raison des réaménagements qui sont en cours dans le portefeuille des actifs financiers internationaux. C’est un exemple parmi d’autres.

La solidarité, nous n’aimons pas ce mot, mais nous le prenons au sens strictement financier d’interconnexion, la solidarité systémique globale est cent fois plus forte que ce que tous ces gens imaginent. Les Etats-Unis ont tout, passez-nous l’expression, « vérolé », tout le monde est touché par le mal, par la mauvaise gestion qui sévit aux Etats-Unis depuis 30 ans. Les émergents ont accumulé 7,5 trillions, nous disons bien trillions, de réserves. Pourquoi pensez-vous qu’ils aient accumulé de telles réserves ? Ce n’est parce que ce sont des génies ou des gens doués, c’est tout simplement parce qu’ils ont profité des erreurs et des faiblesses américaines.  Ces 7,5 trillions proviennent des déficits extérieurs US, proviennent du déferlement des flux de hot money. Ils proviennent aussi de l’effet d’entonnoir. Quand la Fed a gonflé son bilan et inondé le monde de liquidités et mis les taux d’intérêt à zéro, alors les capitaux sont allés à la recherche de rendements et ils sont allés se placer chez les émergents. Les 7,5 trillions de réserves des émergents ne sont pas le résultat de leur force, mais le résultat des faiblesses, des erreurs et du laxisme impérial. Or, ces 7,5 trillions  sont en grande partie investis en titres américains, valeurs du Trésor, valeurs d’Agences du Trésor, valeurs Corporate.  Et c’est ainsi que la boucle se boucle. Ce ne sont donc pas seulement les Etats-Unis qui sont dans l’impasse. Ce ne sont pas seulement les émergents qui sont en difficulté ; c’est l’ensemble du monde global qui est dans les cordes. Tout est devenu ingérable. Voilà la réalité que l’on cache.

The Federal Reserve keeps buying Treasuries and Agency MBS securities, swelling its balance sheet.

frb090913

And US debt to GDP is now at 101.58% (as of Q1 2013).

GFDEGDQ188S_Max_630_378 (2)

La régulation mondiale est un véritable village Potemkine. On construit des édifices de carton-pâte avec l’aide des médias pour dissimuler la réalité d’une situation totalement délabrée. Le drame est que ceux qui sont aux commandes des affaires sont tellement  intoxiqués qu’ils sont victimes de leur propre mirage, qu’ils sont victimes des illusions qu’ils ont eux-mêmes créées.

BRUNO BERTEZ Le Samedi 21 Septembre 2013

llustrations et mise en page by THE WOLF

EN BANDE SON:

   NI PUB, NI SPONSOR, NI SUBVENTION, SEULEMENT VOUS ET NOUS….SOUTENEZ CE BLOG FAITES UN DON

Laisser un commentaire