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L’Edito du Dimanche 6 Juillet 2014: Tentative de lecture de la crise (2ème Partie) Par Bruno Bertez

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L’Edito du Dimanche 6 Juillet 2014: Tentative de lecture de la crise (2ème Partie) Par Bruno Bertez

EN LIEN:  L’Edito du Samedi 28 Juin 2014: Tentative de lecture de la crise (1ere Partie) Par Bruno Bertez

Le traitement de 2008/2009 était un pansement d’urgence. On l’a mis et on a bien fait. Personne ne pouvait souhaiter le chaos, mais il fallait aller plus loin et, une fois l’hémorragie stoppée, il fallait reprendre le fil de l’histoire ; il fallait passer à une seconde phase, la phase curative. Ne pas passer à la phase 2, ce fut l’erreur de Geithner. Il est parti de l’idée qu’il ne fallait toucher à rien, ne prendre aucun risque, il fallait payer, arroser, solvabiliser, distribuer de l’argent court, distribuer de l’argent long, en veux-tu en voilà.  

Geithner le dit lui-même, il ne connaît rien à la finance et surtout rien à la discipline essentielle en finance : l’histoire financière. C’était à l’époque, et cela n’a pas beaucoup changé maintenant, un petit gamin timide face aux « nobles » des temps modernes, les banquiers. C’était et c’est encore un roturier face à la noblesse. Un roturier influençable bourré de complexe, conscient de son infériorité. La caractéristique majeure de la personnalité tourne autour de ce nœud que l’on appelle complexe d’infériorité.  

La phase 2 aurait consisté à frapper du poing sur la table et à dire, maintenant je prends les choses en mains. Le bide de sa première intervention publique au cours de laquelle il a annoncé, trop vaguement, les grandes lignes de son plan, ce bide a certainement joué un rôle très important dans la suite des événements. En fait, c’est à partir de ce moment que le couple Geithner/Obama est devenu un couple de pantins dans les mains des banquiers. En passant, nous considérons qu’on ne s’est pas assez interrogé sur la relation entre Obama et Geithner. Pourquoi Obama a-t-il choisi Geithner ? Nous soutenons que c’est parce que ces deux hommes présentent des similitudes, le même complexe du roturier face à la noblesse

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Cette phase 2 aurait consisté à mettre les banquiers autour d’une table et à leur dire fermement : « Messieurs, vous avez commis des crimes, mais nous vous avons sauvés; maintenant que les risques de chaos sont écartés, il faut percer l’abcès. Il faut résorber l’excès de crédit que vous avez créé. Il faut éliminer le crédit non-solvable, fictif, qui s’est insinué dans toute l’économie américaine. Il faut établir un chiffre. S’il y a 30% de crédit en trop, nous retiendrons le chiffre de 30% ; s’il y a 40% de crédit en trop, nous retiendrons le chiffre de 40%. Il faut que ce crédit fictif excédentaire soit résorbé. Nous allons l’évaluer et ensuite nous fixerons ensemble les normes des haircuts, les normes de restructurations, les normes de moratoire, les normes de conversion. Une fois que tout ceci aura été fait, nous aurons rendu le crédit supportable par l’économie. Chacun de vous devra s’y conformer. En attendant, nous vous adossons au crédit de l’Etat et au crédit de la Fed. Temporairement, considérez-vous comme quasi-nationalisés ».  Au lieu de cela, qu’a fait notre petit garçon timide ? Il  a accepté la vérité des comptes des banques, que l’on fabrique de fausses comptabilités, en clair, il a accepté que l’on supprime la norme FASB157. 

Même pas une tape sur la main, même pas un haircut, les banques ont fait leur plein. Personne ne devait aller en prison. Le jour de la décision sur la norme FASB157, le marché de Wall Street a touché son plus bas, c’était en mars 2009. Depuis, Wall Street monte sans arrêt. C’est l’une des hausses les plus longues et les plus enrichissantes de l’histoire.

 

Au lieu de traiter la crise de façon maîtrisée, on a donné aux banques les moyens de s’installer dans la fraude comptable et les moyens de redresser leur situation progressivement sur le dos du public.  Il apparaît clairement, à la lecture de l’histoire, que la pseudo-solution à la crise a reposé, au-delà de l’intervention d’urgence bien sûr, sur l’institutionnalisation du mensonge. Mais il faut aller plus loin car il y a eu un autre ressort, c’est le bluff. Ainsi, avec la complicité des médias et la connivence du cartel des banquiers et avec l’accord de Sheila Blair, on a réussi à faire croire que la FDIC, avec ses quelques dizaines de milliards, allait pouvoir garantir l’ensemble des banques ! Une cinquantaine de milliards en garantie de plusieurs trillions. Un troisième élément est venu s’ajouter au mensonge et au bluff, c’est la technique boursière : on a organisé le plus grand étranglement de vendeurs à découvert de l’histoire. Ce n’est pas « The Big Short » de Michaël Lewis, c’est: « The big killing of the shorts ».

 

L’histoire enseigne que de tous temps, il y a eu des crises de surendettement. De tous temps, on a reconnu que beaucoup de prêts ne pouvaient être honorés dans leurs termes d’origine et on a procédé à des moratoires, à des restructurations ou à des jubilés. C’est la première fois dans l’histoire que l’on pose comme principe, que l’on décrète, que les banques constituent une pièce critique du système, une  pièce privilégiée. C’est l’acte fondateur d’un nouveau système, le système kleptocratique.  Le crédit est reparti aux Etats-Unis. De plus belle. Dans tous ses excès et perversions. C’est à nouveau la grande régalade. La confiture, ils en ont plein les doigts.     Au premier trimestre, la dette non financière a grimpé au rythme de 5%. Les emprunts des sociétés ont galopé au rythme de 9%. Le crédit consommation s’envole au rythme de 6,6%. Le Federal Reserve Credit fait un bond de 935 milliards sur un an à 4,2 trillions soit la bagatelle de 28%. On est à +52% depuis le début 2013. Les réserves internationales progressent de 7,1% année sur année ; en 2 ans, elles ont inflaté de 1,5 trillion. La dette fédérale américaine donne le la, au lieu de tempérer l’ensemble, elle le magnifie. On est sur des rythmes supérieurs à 6%. Nous vous rappelons que la dette fédérale a progressé de 150% en 6 ans, c’est à dire de plus de 10 trillions.  

Si les marchés montent, c’est en grande partie parce que les banques centrales continuent d’injecter des liquidités.

Tout cela est largement supérieur à tout ce qui peut servir de référence pour calculer des ratios de solvabilité autres que bidons. Tout excède la création de richesses. Tout excède les cash-flows prévisibles. Tout excède l’évolution réelle des revenus.   L’expérience de John Law continue de plus belle : on inflate des assets, on crée du crédit adossé à ses assets, le crédit gonfle la valeur des collatéraux, l’inflation des collatéraux permet de créer encore plus de crédit. Peu importe la réalité des flux de revenus et des flux de rentabilité, on a découvert le mouvement perpétuel.   En ces temps difficiles, la fortune des ménages a été inflatée de 1,5 trillion au premier trimestre pour atteindre la somme astronomique de 96 trillions. Au cours des 4 dernières années, la fortune apparente des ménages a fait un bond de 50%, ce qui représente un accroissement de 27 trillions. La fortune que les ménages croient posséder a atteint le chiffre inimaginable de 480% du GDP alors qu’au plus fort de la bulle Nasdaq, elle n’avait réussi qu’à 440% du GDP.   The Big One est devant nous, pas derrière. Dans un mois, dans un an, dans 10 ans, peu importe à l’échelle de l’Histoire. Ce qui compte, c’est la certitude. En attendant, beaucoup de choses auront changé, et pas dans la bonne direction,  pour le monde global. Ne nous en veuillez pas de nos convictions pessimistes. Il y a suffisamment d’optimistes et de complaisants pour compenser nos influences négatives.    

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 6 Juillet 2014

illustrations et mise en page by THE WOLF

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