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Editorial dans un fauteuil, la guerre, la Grèce, le Doubs, Macron et DSK Par Bruno Bertez

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Editorial dans un fauteuil, la guerre, la Grèce, le Doubs, Macron et DSK  Par Bruno Bertez 

Prenez ce texte pour ce qu’il est, une sorte de causerie au coin du feu. Peut-être un peu décousue, mais en apparence seulement. Elle tente en effet de brosser les éléments essentiels qui dessinent  notre environnement en s’appuyant sur les nouvelles et sur l’actualité vue par les chaînes de télévision. Un fil conducteur cependant traverse cette causerie: il y a des invariants qui varient, il y a des choses qui changent, l’histoire est à nouveau en marche. L’histoire est à nouveau en marche sur le plan mondial, mais aussi maintenant sur le plan européen.

Il y a deux ou trois ans, nous avons pris le risque d’un titre emphatique voire pompeux : « History is again on the move ». Ce titre reprenait le fameux constat d’Arnold  Toynbee, l’Histoire est à nouveau en marche. Donc, à cette époque, considérant les tensions géopolitiques et la multiplication des conflits, nous avons pensé qu’une longue période de calme se terminait. Après un long sommeil, l’histoire se réveillait. Plus personne n’en doute maintenant, puisque nous avons une prolifération de conflits, tous plus sanglants et plus barbares les uns que les autres. Le Moyen-Orient se recompose sous nos yeux. Nous assistons au retour de la guerre froide qui est train de passer au tiède ; nous voyons les fissures dans l’ordre international se creuser. Les deux décennies marquées par les dividendes de la paix après la chute du Mur de Berlin, ces deux décennies caractérisées par un gigantesque phénomène de mondialisation et d’unification du monde, ont cédé la place à une refragmentation du monde, à la balkanisation et aux affrontements. La guerre redevient possible. Affirmer cela, c’est être inconscient de ce qui se passe, car, en fait, la guerre est déjà là. Le fait qu’elle soit lointaine et que ce soit nos avions et nos drones qui la portent au loin ne change rien à l’affaire. La guerre est là.

A ceux qui en doutent et qui croiraient qu’elle n’est qu’à nos portes, nous conseillons d’ouvrir les yeux. Qu’est-ce que le terrorisme qui nous frappe, chez nous, si ce n’est une partie intégrante des conflits qui opposent à la fois des camps à l’intérieur de l’islam et ces camps aux occidentaux qui se mêlent d’y intervenir. Bien entendu, il faut occulter cette réalité, considérer que les Coulibaly et autres sont des terroristes, des barbares, des détraqués, et il faut leur nier le statut de combattants. L’appellation « terroriste » est une commodité pour les bonnes consciences occidentales: elle leur permet de couper le lien entre ce qui se passe, la terreur dans nos pays, et ce qui se passe ailleurs, sur les multiples théâtres d’opérations que sont l’Irak, la Syrie, la Libye, le Yémen, etc. L’affaire Coulibaly vient pourtant de démontrer le lien qu’il y avait entre les réseaux qui ont permis l’exfiltration de sa compagne à la frontière turque et les combattants islamistes, là-bas sur le terrain des opérations. Rien que cela, largement occulté, révèle l’unité profonde des théâtres guerriers: d’un côté, un combat ouvert et barbare, de l’autre, des combats limités, mais non moins barbares. C’est ce que nous avons souvent qualifié d’unité profonde de la guerre dissymétrique. D’un côté, une guerre qui présente toutes les caractéristiques des vraies guerres ouvertes et, de l’autre, une réponse qui tient compte de la disproportion des forces, qui tient compte de l’inégalité des armements, mais qui la compense par la peur, l’angoisse, c’est à dire la terreur. Bien entendu, nous ne soutenons pas que l’un justifie l’autre ou que l’autre justifie l’un. Et nous ne renvoyons pas les belligérants dos à dos. Non, nous voulons simplement montrer que tout est lié. Seule la propagande des pays occidentaux en empêche la prise de conscience. 

Nous pourrions faire le même développement sur l’autre grand conflit en cours, le conflit ukrainien, et montrer qu’en réalité, c’est l’ordre du monde issu de Yalta, puis de la chute du mur de Berlin qui est en train de s’effondrer. Nous pourrions même montrer, et Gorbatchev l’a rappelé récemment lors d’un discours en Allemagne, que c’est même la page de la coexistence pacifique que l’on est en train de tourner. Et oui, ce n’est pas parce que vos médias à courte vue refusent d’appeler un chat un chat, que les chats ne sont plus des chats. Dans son discours absolument remarquable de hauteur de vue, Gorbatchev dit ce que l’on n’ose pas dire dans le camp atlantiste, la coexistence pacifique sur laquelle nous avons vécu pendant des décennies, est en train de  vaciller. Elle ne vole pas encore en éclats malgré les provocations ukrainiennes et l’inconscience des Européens, mais tout peut arriver. Car, rendez-vous compte, en Ukraine, on en est à parler d’une mobilisation de 100.000 hommes. Qui croit, dans ces conditions, que le conflit puisse rester limité?

Mais là n’est pas notre vrai propos. Nous avons fait cette longue introduction pour montrer que, quelquefois, une succession d’éléments disparates cache une évolution fondamentale, profonde, qui en fait, mérite le nom de rupture. Il y a une rupture en cours de l’ordre mondial.

History is again on the move.

Nous regardons tranquillement BFMTV et nous voyons là aussi par le tout petit bout de la lorgnette une succession d’éléments disparates, apparemment sans lien entre eux. Et d’un seul coup, la similitude entre ce qui se passe à l’extérieur et que nous venons de survoler, et ce qui se passe à l’intérieur de l’Europe, nous apparaît. En Europe aussi, nous proposons de dire : l’histoire est à nouveau en marche.

Les solutions à la crise mises en place sous la conduite des Anglo-saxons ont échoué. Les citoyens et les médias n’en ont pas encore pris conscience, mais les idées suivent leur cours et on voit bien que tout cela converge. Tout ce que l’on a fait, eh bien, cela ne marche pas. Dans le pays le plus favorisé, c’est à dire les Etats-Unis, la reprise est médiocre, languissante. Tout juste une petite embellie cyclique qui ne parvient même pas à refaire la moitié du chemin que l’on a descendu depuis 2008. Après des trillions de prises de risques financiers et monétaires, le redressement est à peine de la moitié de ce qu’il a été dans les périodes précédentes. La moitié des créations d’emplois, quasi-stagnation des revenus réels gagnés, quasi-stagnation des investissements productifs, mais en revanche, accroissement formidable des inégalités et la misère gagne inexorablement.

En Europe, les choses sont plus nettes. Non seulement il n’y a pas de reprise, mais le chômage touche 12%  de la population. Et près d’un tiers des jeunes sont sans véritable emploi. Nous disons un tiers car nous ne tenons pas compte des petits boulots et des parkings à chômeurs. Dans ces conditions, la situation sociale et politique revient sur le devant de la scène. Les consensus se fracassent. Les peuples se rebellent. Cela est particulièrement net dans les pays du sud.

Le long épisode social-démocrate favorisé par les fausses alternances entre le centre-droit et le centre-gauche vient de trébucher. Il a trébuché sur un tout petit pays : la Grèce.

La mystification du centre-droit et du centre-gauche qui ont pillé la Grèce tout au long de ces dernières années au profit du secteur bancaire et pour la satisfaction des européistes forcenés vient d’être découverte. Tsipras et son parti d’extrême-gauche Syriza viennent de remporter les élections et ils ont osé s’allier aux nationaux de l’extrême-droite afin de former un gouvernement. C’est la première grande tentative qui est faite afin de briser le monopole social-démocrate qui a confisqué les voix des citoyens européens. Quoi qu’en pense Merkel et quoi qu’en pense Hollande qui soutient Tsipras, tout en ayant la plus grande convergence avec Merkel (!), quoi qu’en pensent ces gens, plus rien ne sera comme avant. Car l’affaire grecque va durer longtemps et elle va agir comme un révélateur sur la situation des autres pays européens, ceux du sud en particulier, qui ont des configurations qui, sans être semblables, présentent des caractères communs. La crise, l’austérité imposée, les réformes, tout cela a favorisé la réémergence de formations politiques nouvelles qui incarnent une opposition radicale.

L’année 2015 va être riche en consultations électorales et ce sera certainement, pour l’establishment social-démocrate de droite et de gauche, une année difficile.

Toujours regardant BFMTV, nous entendons les commentaires convenus sur l’élection du Doubs. Et là encore, les rapprochements s’imposent. Vous avez, d’un côté, une élimination du candidat UMP, le social-démocrate de droite qui n’a pas réussi à se présenter comme une véritable alternative. Vous avez, de l’autre, un socialiste héritier de l’ancien ministre Moscovici, devenu Commissaire, Moscovici, social-démocrate de gauche. Et qui vient en tête, largement, sans contestation avec un tiers des voix, c’est le Front National de Marine Le Pen. Cela ne fait pas « tilt » dans votre tête ? Vous ne voyez pas ce qui est en train de se dessiner, de se préfigurer ? Alors, insistons un peu, forçons le trait. Vous avez d’un côté un appel à l’unité républicaine, il est lancé par Valls et certains leaders de l’UMP. La convergence social-démocrate, bonnet blanc, blanc bonnet, se donne quand même clairement à voir. Ils veulent battre ou faire battre le Front National de Marine Le Pen. Un tiers des Français du Doubs seraient-ils non républicains ? Seraient-ils tous fascistes, racistes, antisémites ? La voix d’un tiers des Français  ne porte-t-elle aucun message ? Bien sûr que si. Il y a un tiers des électeurs qui refusent lors d’un premier tour, c’est à dire lorsqu’ils ont  le choix, lorsqu’ils peuvent voter clairement en leur  âme et conscience sans se laisser influencer par les magouilles politiques, il y a un tiers de ces électeurs qui disent non à la voie social-démocrate de la gauche et de la droite réunies, cette voie qui est celle de l’affaissement du pays, de la perte de souveraineté, de la régression sociale, de la chute du niveau de vie et de la perte d’identité. L’appel républicain est mystifiant. Qu’est-ce qui vaut le plus ? Un système républicain au nom duquel on appelle les gens à se sacrifier et à se renier, ou un appel démocratique qui considère que le peuple est souverain et qu’il a le droit de s’exprimer en son âme, en sa conscience, en sa morale et en ses intérêts. L’appel républicain est une façon de dire que le message démocratique, on n’en veut pas. On ne veut pas entendre ce que disent les électeurs, voilà le sens profond de la situation dans le Doubs. Voilà le sens profond des commentaires des politiciens et, bien entendu, le sens profond de la propagande des médias. L’histoire est en marche, on conteste la solution sociale-démocrate et son expression politique.

Toujours devant notre télévision et notre fameuse chaîne BFMTV, nous voyons que Macron va porter plainte pour menaces de mort qu’il aurait reçues de la part de certaines personnes appartenant aux professions juridiques, lesquelles personnes se considèrent comme victimes de sa réforme.

 

Là, ce qui est cause, c’est le réformisme social-démocrate bien évidemment. Ce réformisme social-démocrate est la clé de leur tentative de gestion de crise. Il complète la rigueur, la régression sociale et la baisse du niveau de vie, ce qui a déjà été fait au cours des deux années précédentes. En quoi consistent les réformes dont on nous parle? Elles s’analysent comme une volonté de détruire des fonds de commerce, de briser des monopoles et des statuts, une tentative donc d’euthanasier le capital historique dont bénéficient certaines professions et ainsi baisser à la fois leurs rémunérations et leurs fortunes patrimoniales. Qu’est-ce que ces réformes. C’est tout simplement un ensemble de mesures qui vont détruire les acquis d’un certain nombre de professions et ainsi faire baisser leurs droits de prélèvements sur la richesse nationale. Toutes ces professions vont rétrograder, leur statut social va évidemment se trouver dévalorisé et les ressources qui seront ainsi libérées, à quoi vont-ils servir ? Elles vont être remises dans le grand pot commun, non pas national, mais européen, ce grand pot qui sert avant tout à faire bouillir la marmite des banques et des marchés, à consolider la finance spéculative, à enrichir plus encore les très grandes entreprises multinationales et les ultra-riches. Des ressources vont être libérées par la destruction des uns et elles vont donc être disponibles pour servir l’inflation bullaire des autres.

L’histoire est en marche, le réformisme est contesté. 

J’en viens au dernier  thème de notre actualité de BFMTV.  Ce jour, on ne nous abreuve plus des exploits des Experts au Qatar, les médias ont fait leur devoir, ils ont assuré la pub de l’Emir du Qatar et l’image de l’Emirat. Ils n’ont plus qu’à aller encaisser leurs chèques, mission accomplie. Mais dans cette actualité, il y a encore, devinez quoi, devinez qui, il y a DSK. C’était le jour de sa comparution pour faits de proxénétisme aggravé devant le Tribunal correctionnel. Une sale affaire qui touche comme on dit le beau monde.

DSK, nous vous le rappelons, c’était l’ancien candidat social-démocrate de gauche donné favori à la Présidence de la République. DSK, coqueluche des grands groupes financiers, des grands groupes de service public et des grands groupes fournisseurs d’armement, qui  tous ont  été ses bailleurs de fonds. DSK, figure internationale et mondiale. Le chantre d’un monde ouvert, sans frontières, qui porte bien haut l’étendard de la finance.  Ce monde contesté par les Grecs. DSK incarne le dernier volet de la voie social-démocrate, il est l’emblème aussi bien du centre-gauche que du centre-droit. Il est  l’avant-garde de ce dernier volet qui fait partie intégrante du projet social-démocrate, celui de la diversion maximale, c’est celui de la permissivité des mœurs.

DSK est jugé. Une affaire de vice pervers, une affaire de prostitution, une affaire de trafic d’influence. Personne n’ose aller au-delà du fait divers et mettre en cause une société, un régime, une classe politique.  On rabat, on rabaisse, on minimise. Rien de tout cela ne serait symbolique, expression de l’état de la société, de son délabrement moral, social et  politique?  Allons! DSK sera-t-il condamné, osera-t-on défier les lobbies, les ultra-riches, les ultra-puissants?

Si cela se faisait, alors là, History, l’Histoire serait vraiment en marche!

BRUNO BERTEZ Le Mardi 3 Février 2015 

illustrations et mise en page by THE WOLF

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