Commentaire de Marché

Mister Market and Doctor Conjoncture du Vendredi 23 Avril 2015: L’amateurisme et l’incohérence des responsables européens augmentent les risques sur les marchés Par Bruno Bertez

Mister Market and Doctor Conjoncture du Vendredi 23 Avril 2015:  L’amateurisme et l’incohérence des responsables européens augmentent les risques sur les marchés Par Bruno Bertez

L’une des idées à la mode, en matière d’investissement international, est l’arbitrage en faveur des valeurs européennes. Les multiples cours bénéfice sont en effet moins élevés qu’aux Etats-Unis et, par ailleurs, la Banque Centrale Européenne entame un processus de Quantitative Easing alors que la Réserve Fédérale américaine termine le sien.

Nous ne contestons pas l’écart de valorisation dont bénéficient les valeurs européennes en regard des valeurs américaines. En revanche, nous contestons l’analyse qui voudrait qu’il y ait tendance à l’égalisation. Il n’y a pas que la cherté qui importe en matière d’investissement, il y a également le facteur risque. Selon nous, pour des raisons structurelles et systémiques, les actions européennes justifient une prime de risque supérieure à celle que l’on doit attribuer aux actions américaines.

Il y a beaucoup de raisons qui justifient cette appréciation. Il y a, en particulier, des raisons très fondamentales qui tiennent au fait que les Etats-Unis connaissent mieux le système économique dans lequel ils opèrent, puisque ce sont eux qui l’imposent au monde. Leurs instituions sont plus solides. Leurs sociétés plus stables. Le socialisme y progresse certes, mais il est à un stade moins avancé qu’en Europe. Et puis surtout, le risque politique y est bien moindre. Toutes ces choses sont connues et nous les avons déjà développées : le système américain est solide et il va le rester même s’il se détériore peu à peu.

L’Europe est engagée dans un processus d’imitation. Cela ne fait aucun doute, l’influence américaine y gagne sans cesse du terrain. On le voit en politique étrangère. On le voit en matière de gestion économique et on le constate de plus en plus dans le domaine monétaire et bancaire.

  FINANCISM

Ainsi, Draghi a fait évoluer la pratique de la BCE en marche accélérée vers la pratique de la Réserve Fédérale. Il a renié l’orthodoxie bancaire et monétaire allemande pour adopter les pratiques américaines. De ceci témoignent les multiples opérations non conventionnelles qu’il a réalisées à ce jour. De ceci témoigne le lancement du Quantitative Easing. De ceci témoigne l’introduction d’une politique de communication ouverte, sinon transparente. On commence même à voir poindre une ébauche de pilotage des marchés.

Le processus est net. Personne ne peut contester le diagnostic. La Banque Centrale Européenne tend peu à peu à devenir une succursale de la Réserve Fédérale américaine.

La question n’est absolument pas dans ce papier de contester le bien-fondé de cette évolution. Nos lecteurs réguliers savent que nous sommes contre. Nous sommes contre cette dérive. Nous sommes pour le Traditional Central Banking avec des règles. Avec une philosophie et des principes. Nous sommes contre l’arbitraire des banquiers centraux. Mais là n’est pas la question. Ce que nous voulons faire ressortir, c’est que nous sommes en transition. Et que dans les transitions coexistent à la fois des pratiques anciennes et des pratiques nouvelles. Et c’est ce qui constitue le danger des transitions. Surtout lorsqu’elles sont effectuées par des gens qui ne comprennent pas bien ce qu’ils font et qui n’ont pas bien compris les subtilités des modèles qu’ils imitaient.

La politique monétaire conduite par la Fed repose sur une symbiose profonde, sur une alliance très serrée, à la fois culturelle et personnelle, entre d’un côté la Fed et ses gouverneurs ; les grandes banques ; les marchés. C’est l’originalité du système américain que cette symbiose. Elle rend le pilotage efficace et réduit les risques de choc. Elle repose sur la cohérence de l’action des différents participants. Aux Etats-Unis, on a parfaitement compris l’importance des marchés et le risque qu’ils font courir au système économique en cas de choc.

Permalien de l'image intégrée

En Europe, la prise de conscience n’a pas encore eu lieu. L’incohérence règne en maitre entre certaines initiatives de la BCE qui vont dans le sens de la réduction des risques et d’autres initiatives qui, elles, vont dans le sen de l’augmentation des mêmes risques. La BCE, d’une certaine façon, est à la fois pompier et incendiaire faute de bien comprendre les subtilités de la régulation et du pilotage des marchés. C’est une question qui va au-delà de l’académisme, elle tient au recrutement du personnel.

Mais il y a plus, car il y a incohérence majeure au sein du conseil des gouverneurs européens. Nous irions même plus loin, il y a incompatibilité. Certes, Draghi réussit à l’emporter au niveau des décisions, mais il ne réussit pas à empêcher les divergences et les contradictions et encore moins les critiques lors de l’expression des points de vue individuels. Il n’est pas le cocher de l’attelage. Il essaie simplement d’en être l’arbitre. L’arbitre avec voix prépondérante.

Mais il y a plus encore car, au-delà de cette incohérence au sein du conseil des gouverneurs, il y a les débats et les conflits entre d’un côté la BCE, le système des banques centrales nationales, et les systèmes politiques nationaux. Tout ce beau monde tire de son côté à hue et à dia. Les initiatives des uns et des autres sont rarement compatibles entre elles. Ils se disent, ils se contredisent, ils se combattent. Tout ceci s’explique aisément non seulement par l’absence d’unité politique européenne, mais en plus, par l’’absence de consensus sur l’essentiel au sein de chaque pays.

images

Pour résumer notre propos en un seul mot volontairement désobligeant, nous dirions que le système européen, malgré sa transition vers les pratiques du maitre américain, est une pétaudière.

Pourquoi choisissons-nous d’examiner cette question en cette période ? Tout simplement parce que nous sommes au lendemain d’une initiative majeure très risquée comme le lancement du Quantitative Easing de Draghi et qu’en même temps, nous sommes à la veille de décisions elles-aussi tout aussi majeures face à la situation grecque.

Permalien de l'image intégrée

Les risques sont colossaux. D’un côté, on a fait monter les marchés de façon artificielle et donc fragile par le Quantitative Easing ; de l’autre, on les soumet à une épreuve véritablement fondamentale pour l’unité européenne, pour la stabilité de l’euro, pour la sérénité des marchés.

Les investisseurs, jusqu’à ces derniers temps, n’avaient véritablement pas pris conscience du facteur risque européen. Avec le pourrissement de la situation grecque et l’approche des échéances, ils commencent à l’apprécier. Les marchés sont hésitants. Ils sont vulnérables. En cas de choc, la résistance serait difficile à organiser.

BRUNO BERTEZ Le 24 Avril 2015 

illustrations et mise en page by THE WOLF

EN BANDE SON : 

NI PUB, NI SPONSOR, NI SUBVENTION, SEULEMENT VOUS ET NOUS….SOUTENEZ CE BLOG FAITES UN DON

Image d’aperçu


En savoir plus sur Le blog A Lupus un regard hagard sur Lécocomics et ses finances

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

3 réponses »

  1. D’accord sur l’essentiel mais les américains aussi peuvent copier les européens en matière de communication. A titre d’exemple, les conférences de presse post metting existaient à la BCE bien avant d’être adoptées par la FED.

    J’aime

  2. ne sous-estimons pas le risque fed qui a trop fait monter le SP

    Jim Rickards @JamesGRickards · 9 h il y a 9 heures
    The #FlashCrash case is 5 yrs old. Why bring it now? It suggests regulators fear the worst & are trying to change behavior or deflect blame.

    cette arrestation est un signal donné à GS JPM.. ne faites ni chasse aux stops car nous fed ne voulons pas que vous REdeclenchiez marchés baissiers MAINTENANT (pendant le QE europe à mon avis)

    gag: Jim Rickards @JamesGRickards · 4 h il y a 4 heures
    The #CFTC has determined that #Starbucks systems crashed because one guy ordered a billion lattes 5 cents below the market.

    J’aime

    • ce que j’ai dit la semaine derniere la FED ne toléra pas un flash crash ou un krach type 1987 avant cet été

      1987 est un krach d’insider ou chantage à l’assouplissement monétaire (suffit de voir le graph : on récupère tout en 1an)
      c’est un hold up

      la Fed ne tolèra pas:
      car la macro US est au milieu d’un gué le plus pourri qu’il puisse être
      car si le qe bce foire alors l’us part avec

      J’aime

Laisser un commentaire