Art de la guerre monétaire et économique

Géopolitique: Syrie/ L’escalade ?

Syrie: L’escalade ?

7 Novembre 2015 , Rédigé par Observatus geopoliticus Chronique du Grand Jeu

L'escalade ?

L’on parle moins de la Syrie depuis quelques jours. Il faut pourtant se méfier de l’eau qui dort… Deux nouvelles, passées à peu près inaperçues, sont potentiellement explosives et susceptibles de provoquer une dangereuse escalade moyen-orientale. Nous n’avons jamais sur ce blog joué la carte du sensationnalisme, qui cadre mal avec l’analyse géopolitique. Pourtant, ce qui est en train de se passer donne des signaux peu rassurants.

La bande saoudo-turco-américaine a décidé d’augmenter les envois d’armement à destination des terroristes « modérés » syriens. Nous nous demandions il y a trois semaines à quoi jouaient les Etats-Unis. Réponse : au pompier-pyromane. Que faisait donc Kerry à Vienne il y a quelques jours ? Plus grave : il est maintenant question de fournir à des « rebelles sélectionnés » (LOL) des armes anti-aériennes, évidemment dirigées contre les avions russes. Quand on sait que les quelques groupes rebelles modérés qui restent encore en Syrie se font piquer leur armement par Al Qaeda ou l’EI, quand ils ne passent carrément pas avec armes et bagages dans les groupes islamistes, cela n’augure rien de bon…

Réponse du berger à la bergère ? Un avion russe a défié l’interdiction de survol du Yémen décrétée par la coalition saoudienne pour se poser sur l’aéroport de Sanaa, la capitale aux mains des rebelles chiites houthis. Officiellement, il est chargé d’aide humanitaire, mais on a vu dans le Donbass et en Syrie ce que peut être l’aide humanitaire russe. Quelques missiles anti-aériens – tiens tiens, les mêmes que ceux que Riyad veut donner aux rebelles syriens – sont si vite cachés parmi les caisses de médicaments… Pour chaque avion russe abattu en Syrie, un avion saoudien abattu au Yémen ?

Aucun des deux camps ne veut désormais reculer et chacun est prêt à répondre du tac au tac. A ce petit jeu dangereux, Poutine a plus d’atouts que ses adversaires, pouvant franchir le Rubicon et armer les Kurdes contre les Turcs ou apporter une véritable aide militaire aux Houthis. Mais les derniers développements ne sont guère pour rassurer, que ce soit au Moyen-Orient ou à l’échelle mondiale. Et ce qui se passe en mer de Chine méridionale ne viendra pas le contredire. Aux dernières nouvelles, un sous-marin chinois a suivi pendant des heures un porte-avion US…

Les trois Grands ont passé la vitesse supérieure, les Etats-Unis pour tenter d’enrayer leur déclin, la Russie et la Chine pour l’accélérer. A Washington, la possibilité certes virtuelle d’une troisième guerre mondiale – contre la Russie ou la Chine, ou les deux – n’est d’ailleurs plus tout à fait taboue.

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http://www.chroniquesdugrandjeu.com/2015/11/moyen-orient-l-escalade.html

Moscou ou la technique du rhinocéros

3 Novembre 2015 , Rédigé par Observatus geopoliticus

Faire la guerre pour dicter la paix. Cette maxime très XVIIème siècle est constitutive de la politique que Vladimir Poutine, westphalien dans l’âme, applique à la Syrie. Autant l’âme russe peut connaître de violentes sautes d’humeur quand il s’agit d’art, de révolution ou de fête, autant la pensée russe en matière de stratégie extérieure fait penser au rhinocéros, avançant lentement mais fermement, inexorablement, et finissant par mettre tout le monde d’accord.

La Syrie est un cas d’école. Que disait Moscou avant l’intervention ? Nous allons repousser les terroristes, rétablir le gouvernement légal et sauvegarder l’intégrité de la Syrie tout en favorisant un consensus national. Petit à petit, les pièces se mettent en place et c’est exactement ce à quoi nous commençons à assister, à la virgule près. Quel changement par rapport aux simagrées occidentales où les effets de communication font maintenant office de politique…

Les groupes djihadistes, petits chéris de l’Occident pétromonarchisé, sont clairement sur le reculoir, comme le montre leur nouvelle tactique : enfermer des prisonniers dans des cages comme boucliers humains afin de dissuader les bombardements soutenant l’avancée des forces loyalistes. Ne cherchez évidemment pas l’info dans notre presse démocratique… Tandis que le rythme des frappes russes s’accélère, la bataille d’Alep est engagée où les forces syro-hezbollahi-iraniennes sont en train de diviser les positions rebelles :

Moscou ou la technique du rhinocéros

On n’insiste pas assez sur le terrible revers que constituerait la perte d’Alep pour les « terroristes modérés » (© CIA). Une fois les grandes villes de la Syrie utile contrôlées par le régime, et ça en prend le chemin, la guerre totale contre l’EI pourra être engagée.

Parallèlement, Moscou saucissonne l’opposition à Assad. L’état-major russe a mené 24 raids sur des sites terroristes indiqués par des groupes anti-régime. Sont-ce les quelques rares bataillons modérés encore présents sur le terrain ou l’opposition en exil ? Peu importe au fond. Ils seront inclus dans le dialogue de réconciliation nationale sous les auspices de Moscou. Laissons la parole au général Kartapolo, de l’état-major : « Malgré leur lutte depuis quatre ans contre le gouvernement, ces groupes patriotiques sont prêts à faire passer leurs ambitions politiques après la nécessité de préserver l’intégrité et l’unité de la Syrie face à l’Etat Islamique et autres organisations terroristes. Nous espérons que cela sera un vecteur pour le règlement du conflit syrien ».

De même, des représentants de la Coalition Nationale Syrienne, si chère aux Occidentaux mais à peu près inexistante sur le terrain, ont été invités en Russie pour des discussions, peut-être même avec des envoyés de Damas. Moscou prend peu de risque si Assad « négocie » avec ce mouvement virtuel sans aucun pouvoir, mais cela apporte une caution au consensus national que Poutine prépare pour la Syrie.

Tout comme Moscou ne prend pas de risque en répétant jusqu’à plus soif que le futur d’Assad doit être décidé par et seulement par les Syriens, notamment au moyen d’élections. L’Occident pétromonarchisé a bien été obligé d’accepter l’idée lors des pourparlers de Vienne même si ça le gêne terriblement, la probabilité d’une victoire d’Assad étant relativement élevée. Pendant que Paris, Washington et Londres sont en retard d’une guerre, les Russes concoctent déjà l’après-conflit…

Et en passant, ils en profitent bien entendu pour détacher les pays de la région de Washington ou renforcer leurs alliances. L’Irak est maintenant à peu près dans leur poche, Moscou ayant d’ailleurs insisté pour que les diplomates irakiens soient présent à Vienne. De même pour l’Egypte. La Jordanie a retourné son keffieh à la vitesse du vent. Quant aux relations avec l’Iran, qui prend d’ailleurs de plus en plus d’assurance vis-à-vis de l’Arabie bensaoudite, elles confinent à l’idylle.

Un rhinocéros qui dit ce qu’il fait et fait ce qu’il dit, qui avance inexorablement, sans grandes annonces mais d’un pas sûr. D’accord ou pas, Américains, Saoudiens, Turcs, Français et Qataris vont devoir s’y plier…

Conflit au Moyen-Orient: la guerre bactériologique et chimique

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Faisant face à d’énormes difficultés depuis le commencement des frappes aériennes russes en Syrie le 30 septembre 2015, des groupes d’assaut relevant de Daech et des autres groupes de la rébellion en Syrie et en Irak utilisent désormais des gaz de combat mais également des bactéries pathogènes dont celle du Vibrio Cholerae.

L’usage d’armes chimiques dans la région n’est pas nouveau. Le 16 mars 1988, en pleine guerre Irak-Iran,  l’aviation irakienne avait utilisé des gaz de combat livrés avec l’aide de Washington contre des rebelles kurdes à Halabja. Si à l’époque, ce bombardement chimique avait provoqué un véritable tollé international, grandement exploité par les médias, il n’en est tout autrement aujourd’hui: Daech et la rébellion dite « modérée » utilisent ouvertement du gaz sarin, de l’Ypérite (gaz moutarde) et des germes sans la moindre condamnation de ce que l’on appelle la communauté internationale.

En Irak, Daech procède systématiquement à la contamination de points d’eau et de barrages hydrauliques avec des agents pathogènes génétiquement modifiés ou particulièrement résistants aux traitements conventionnels.

Une épidémie de Choléra fait actuellement rage au Nord de l’Irak mais également en Syrie et la Sud de la Turquie. La situation est loin d’être maîtrisée et des observateurs avisés n’écartent plus la survenue d’une épidémie régionale.

Des officiels irakiens tentent d’alerter le monde sur la gravité de la situation mais leurs appels sont pour l’instant confinés. Aucun média international et encore moins ceux des puissances atlantistes et arabes soutenant les forces radicales au Moyen-Orient n’évoque ce nouvel aspect-fort inquiétant, de la guerre en cours.

La Russie a promis de livrer plus de 1000 tenues de protection NBC (Nuclear, Biological, Chemical) à l’armée irakienne dans le cadre d’Accords bilatéraux mais les besoins des militaires irakiens en la matière risquent d’augmenter très rapidement si Daech continue à se procurer des armes bactériologiques et chimiques auprès de tierces parties dont l’objectif et de faire perdurer le chaos dans la région.

Des centaines d’unités de protection NBC sont actuellement livrés par la Russie à quelques régiments de l’armée syrienne dont ceux de la Garde Républicaine.

A Homs, une province du centre de la Syrie où l’armée syrienne, soutenue par l’aviation russe, tente de contrôler afin de désenclaver le littoral méditérranéen et reprendre les voix de communications entre le Sud et le Nord de la Syrie, des groupes d’assaut appartenant à Daech mais également au Front Ennosra et d’autres groupes « modérés » utilisent de plus en plus de gaz de combat pour stopper l’avancée des troupes syriennes et les milices de la défense populaire.

Au moins trois unités de l’infanterie mécanisée syrienne ont rapporté avoir été confrontées à des gaz de combat durant la seule semaine écoulée. Signe qui ne trompe pas, quelques unités du Hezbollah engagées dans des combats sur l’axe Homs-Alep commencent à s’équiper de tenues de protection NBC.

Officiellement, Damas ne dispose plus d’un arsenal chimique. Ce dernier, démantelé en 2014 suite à des menaces de guerre totale de la part des Etats-Unis, a longtemps été considéré comme la principale arme de dissuasion stratégique asymétrique face au très imposant arsenal thermonucléaire et bactériologique d’Israël avec lequel la Syrie est techiquement en guerre depuis des décennies.

En Iran, les officiels iraniens demeurent grandement préoccupés par la survenue subite d’une épidémie,notamment dans les provinces occidentales et l’industrie pharmaceutique iranienne, grandement perturbée par les sanctions internationales imposées par Washington à cause du programme nucléaire iranien, concentre depuis quelque temps une grande partie de ses efforts sur les traitements anti-infectieux.

Ce qui demeure étrange est le silence des médias à ce sujet. C’est à peine si on évoque l’épidémie du Choléra sévissant en Irak septentrional menaçant de déborder sur tous les pays de la région. Par contre pas un traître mot sur l’usage par les rebelles syriens et irakiens, « modérés » inclus,  d’armes chimiques dans des combats contre les armées régulières.

Il semble évident que  Daech et ses sponsors n’hésiteraient aucunement à utiliser des armes de destruction massive contre des zones densément peuplées pour jeter l’effroi et stopper les contre-offensives du camp adverse en cours. Des opérations spéciales menées par l’armée russe auraient entre autres visé un centre d’entraînement de la rébellion « modérée » où on tentait de produire des bombes « sales » (radio-actives) à partir de composants de contrebande en provenance de pays du voisinage.

La guerre au Moyen-Orient risque encore de perdurer. Si la stratégie russe s’avère rationnelle et intrinsèquement cohérente, l’entêtement irrationnel des pays soutenant la rébellion et par dessus tout le jusqu’au boutisme de pays comme l’Arabie Saoudite, Israël, le Qatar et la Turquie laissent entrevoir un intérêt marqué moins par l’extension du domaine du conflit mais son aggravation. Jusqu’à quel niveau? Tout l’art des états-majors à Moscou ou à Washington sera de savoir le  maintenir en deçà d’un certain seuil limite. Un exercice que certains analystes assimilent à une sorte de convergence sur un statu quo. Mais que l’on s’y trompe pas un instant: la moindre faille sera exploitée par les deux protagonistes pour achever une victoire, même à la Pyrrhus…

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https://strategika51.wordpress.com/2015/11/08/conflit-au-moyen-orient-la-guerre-bacteriologique-et-chimique/

EN BANDE SON : 

4 réponses »

  1. Excellentissime revue mais terriblement inquiétante,
    autre nouvelle allant dans le même sens, le 6 novembre un robot explosif téléopéré commandé a distance non réutilisable a été trouvé auprès du gazoduc Nord Stream près de l’ile Suédoise de Gotland en mer Baltique !…. (sputnik)
    L’identité du propriétaire (sic…) n’a pas été établie…. Qui bono ?
    Qui peut donc bien avoir intérêt a faire sauter le gazoduc de Gazprom qui alimente l’Europe avec un robot militaire que seuls quelques rares pays possèdent ????
    Le suspense est insoutenable…
    Après les explosions en Chine et sur un gazoduc a Moscou cet été dans le fleuve, j’ai bien une idée mais on va m’accuser de theorie du complot….
    Tout cela sent bien mauvais.

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