La guerre commerciale américano-chinoise et le match Apple-Huawei : perdant-perdant ?
Tim Cook, le CEO d’Apple, a déployé beaucoup d’efforts en Chine, mais a-t-il un plan B quand les droits d’importation sur les produits fabriqués en Chine seront bientôt de 25 % ? Et qu’implique la guerre commerciale d’Apple pour la Chine ?
- Le chiffre d’affaires d’Apple en Chine est passé d’environ zéro en 2010 à 52 milliards de dollars en 2018.
- L’action d’Apple a perdu 12 % de sa valeur au mois de mai.
- Lorsque les droits de douane entreront en vigueur, le prix de vente d’un nouvel iPhone augmentera en moyenne de 16 %.
- Citi a réduit de moitié ses prévisions de ventes pour l’iPhone en Chine pour le second semestre de cette année, de 14,5 à 7,2 millions d’unités.
- Selon une étude de la revue japonaise Nikkei Asian Review, 41 des 200 premiers fournisseurs d’Apple sont basés en Chine, contre 37 aux Etats-Unis.
- Apple contribue pour 24 milliards de dollars par an à l’économie chinoise.
- 1,5 million de Chinois sont directement ou indirectement employés par Apple.
- De plus, 2,5 millions d’ingénieurs logiciels chinois développent des applications pour le système d’exploitation iOS.
En bloquant l’accès de Huawei à la technologie américaine, Trump veut jouer sur la dépendance de la société chinoise aux microprocesseurs américains car la Chine ne maîtrise pas les technologies de base de ces composants cruciaux. On peut, en effet, faire de belles constructions avec des Lego® sans pour autant savoir fabriquer les briques.
L’affaire Huawei déstabilise les marchés financiers, fait piquer du nez en Bourse le secteur des semi-conducteurs. Selon Xi Jinping, « ce n’est qu’en possession d’une technologie indépendante que nous pourrons rester invincibles ». Un coup mortel pour Huawei, champion national chinois de 75.000 employés, serait l’arrêt des fournitures par le spécialiste britannique des semi-conducteurs ARM. La Chine disposerait de 400.000 ingénieurs pour rattraper son retard, là où plus de 700.000 seraient nécessaires, au-delà du délai trop long insurmontable de rattrapage, car partant de zéro.
En cas de guerre commerciale totale, la Chine, premier producteur au monde (71 %) et premier raffineur, serait amenée à couper l’approvisionnement des États-Unis en éléments de terres rares. Les terres rares, arme stratégique, sont 17 minéraux utilisés dans la fabrication des téléphones portables, voitures hybrides, armes, téléviseurs à écran plat, aimants, etc. Rappelons que Pékin, en 2010, suite à un différend territorial, avait brutalement interrompu ses exportations de terres rares vers le Japon. Et alors que la Chine brandit la menace d’un arrêt des exportations de terres rares, matériaux stratégiques, le Pentagone veut réduire sa dépendance, ce qui ne sera pas possible avant 2022 !
De son côté, la Chine, en réponse à l’offensive de Trump, va créer aussi une liste noire d’entreprises étrangères non fiables. Par ailleurs, 5.410 produits américains déjà pénalisés, pour une valeur de 60 milliards de dollars, seront taxés, le samedi 1er juin, à hauteur de 10, 20 ou 25 %. Les trois quarts des entreprises américaines en Chine sont déjà pénalisées par les tracasseries chinoises (inspections diverses, arrêt des achats, difficultés des dédouanements, etc.). Plus de 40 % des entreprises américaines envisagent de délocaliser leurs sites en Chine dans les États asiatiques (37 %), au Mexique (11 %), Europe (3,8 %). Moins de 6 % envisagent de transférer leurs usines chinoises aux États-Unis.
Embourbée dans ce bras de fer commercial, la Chine a vu son excédent commercial fondre de plus de moitié entre avril (13,8 milliards de dollars) et mars (32,64 milliards de dollars). Le paradoxe, c’est que l’excédent commercial chinois avec les États-Unis est resté stable, en avril, à 21 milliards de dollars, contre 20,5 milliards en mars. Les importations en Chine en provenance des États-Unis ont, en effet, plongé de 25,7 %, ce dont s’alarment agriculteurs et industriels américains.