Financial Times

Financial Times : Le coût et les leçons du sauvetage des banques

Le Financial Times offre un dossier spécial saisissant sur les vrais coûts des programmes d’aide au secteur financier.

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Le dossier, intitulé « World counts true cost of the rescue »(cliquez sur le lien)  , affirme d’emblée que la récente crise financière a consacré la fin de la théorie économique du « marché efficient », qui se base sur des acteurs économiques qui se comportent de façon rationnelle et que les marchés fonctionnent efficacement.

La crise, constate le Financial Times, a permis aux banquiers de se fier aveuglément à leurs modèles mathématiques de prévisions, aux gouvernements et aux régulateurs de croire que les marchés financiers ne pouvaient jamais imploser, ainsi qu’au phénomène de « sous-évaluation planétaire du risque » tel que décrit par Alan Greenspan, l’ex-grand patron de la Réserve fédérale américaine

En un mot, la crise fut propulsée par la cupidité généralisée et le phénomène de la pensée en silo, à une époque où, plus que jamais, les différents acteurs du système financier global sont interconnectés. Sur le front politique, le Financial Times souligne le triomphe de la pensée néolibérale issue des années Thatcher et Reagan : privatisation, déréglementation, abolition des contrôles des échanges, syndicats en crise, célébration de la richesse au détriment de sa juste répartition…

Le Financial Times rappelle aussi que le monde a besoin de réglementer davantage le secteur financier. Une réglementation planétaire pour une industrie désormais planétaire. Mais les gouvernements ne sont pas rendus là. Comment alors forcer les banques à se départir de leur philosophie d’investissement « proche du casino »? Comment les ramener à un rôle de serviteur du système, un rôle utilitaire, basé avant tout sur les dépôts et les prêts individuels et commerciaux? Ce retour aux sources (narrow banking) est-il souhaitable?

D’autant plus que les opérations de sauvetage des banques ont permis de limiter davantage la compétition entre banques et à créer des géants désormais considérés comme impossible de faire faillite (too big to fail). Ce fut donc une erreur de permettre la création de ces géants qui, par leur taille, posent désormais un risque systémique. Le Financial Times cite même le magazine Rolling Stone, qui décrit Goldman Sach comme une « pieuvre vampire couvrant le visage de l’humanité ».

Le Financial Times écrit que le sauvetage du secteur financier a coûté une fortune aux gouvernements. L’attitude récente des banquiers, qui se sont lancés dans une nouvelle orgie de primes faramineuses, laisse présager qu’ils n’ont pas retenu les leçons de la crise. Le journal basé à Londres lance un avertissement : le jugement sera sévère.

Des constats

Le journal dresse plusieurs constats de la crise et de l’opération de sauvetage des banques. Même si elles se font attendre, il subsiste un besoin impérieux de réformes, constatent plusieurs personnalités comme Alan Greenspan et George Soros. (Do not ignore the need for financial reform )(cliquez sur le lien). Car si les marchés ne peuvent reconnaître les bulles, les régulateurs non plus, constate le premier, les gouvernements devront améliorer la réglementation. Ils devront toutefois agir sans trop affecter la profitabilité des banques, qui demeurent un rouage essentiel de l’économie de marché. Un exercice délicat et périlleux sur le plan politique.

Dans un autre texte, « How to rebuild a shamed subject », le Financial Times tente de répondre à une question posée par la reine Élizabeth elle-même : « Pourquoi personne n’a vu venir la crise? » Le journal estime que la science économique « n’a pas plus de vêtements que les autres sciences sociales ».

En d’autres mots, il faudrait reconnaître que les économistes sont, globalement, incapables de prédire l’avenir, car l’économie dépend du comportement humain qui est, par nature, imprévisible. Et le secteur financier devrait également dépendre moins massivement des modèles mathématiques de gestion du risque, qui sont faillibles, eux aussi. Nous avons donc atteint les limites de la microéconomie. En contrepartie, les événements récents ont consacré la valeur de la macroéconomie, un secteur moins populaire avant la crise, qui devrait faire partie du coffre à outils de tout bon décideur politique et économique de haut niveau.

Le dossier spécial consacre aussi beaucoup d’espace à la fin de la période de la guerre froide et de l’ère Thatcher (Cold war victory was a start and an end The closing of the Thatcher era )(cliquez sur le lien). Le premier fait état de la fin du communisme comme alternative au capitalisme, avec la fin de la guerre froide. Mais la crise financière ne représente pas la fin du capitalisme, comme certains le prétendent. Le deuxième texte s’étend sur la fin de l’idéologie néolibérale si chère à la Dame de Fer.

Ses réformes, copiées partout dans le monde, ont mené aux excès des vingt dernières années. Le « thatchérisme » est-il mort? Certains l’affirment. Mais le Financial Times est plus nuancé : les mesures d’urgence adoptées par les gouvernements sont avant tout des… mesures d’urgence. On verra ce que les politiciens feront pour changer le système à long terme. Et les récents événements suggèrent qu’ils ne sont pas pressés.

Un autre article, « The dangers of silo thinking »(cliquez sur le lien) propose de mettre davantage d’importance sur ce que le journal appelle des « traducteurs culturels ». Il faut habiliter certains experts à expliquer le cours des choses aux différentes composantes qui forment les institutions financières. Ce qui permettrait aux investisseurs de mieux comprendre les détails, mais aussi les aspects macro-économiques des sociétés qui les intéressent. Et de mieux en saisir les risques.

Dans une série de quatre textes, le journal s’attarde à ces géants qui sont trop gros pour qu’on leur permette de faire faillite. Le Financial Times estime que ramener les banques à de simples gardiens de dépôts et fournisseurs de prêts ne constitue pas une réponse adéquate aux problèmes qui ont mené à la crise. (Narrow banking alone is not the answer )(cliquez sur le lien). Le monde doit malgré tout vivre avec des intermédiaires qui font massivement usage de produits financiers dérivés. Mais le système financier demeure fragile, et les réformes seront inévitables du côté de l’intermédiation.

Enfin, dans trois textes, « Goldman Sachs should be allowed to fail », « Too big to fail is too dumb to keep » et « A Lehman deal would not have saved us »(cliquez sur le lien), le journal insiste sur les leçons de la crise et sur la nécessité de laisser s’écrouler une institution financière qui aurait pris des risques inconsidérés. Car les régulateurs et les gouvernements doivent avant tout protéger les intérêts du public. Pas ceux des banquiers.

« À la prochaine crise, les citoyens ne vont plus s’attaquer aux politiciens, qui ont dépensé leur argent sans retenue pour sauver les banques du désastre, ni aux banquiers eux-mêmes. Ils vont viser le marché. Ce qui est menacé, désormais, n’est pas le futur du système financier. C’est le capitalisme lui-même », affirme le journal.

Alphaville (le blog du FT) (cliquez sur le lien)s’est intéressé quant à lui à une étude de 350 pages publiée par Barclays sur les banques européennes. Le blog du Financial Times s’est focalisé plus précisément sur le notion de ” Too Big To Fail “ (Tros gros pour tomber en faillite). Une notion assez récente puisqu’en 1990 aucune des 25 plus grosses banques au monde ne dépassait, en termes bilantaires, la taille du produit intérieur brut de son pays d’origine.
Barclays a ainsi identifié une vingtaine de banques ” too big to fail ” parmi lesquelles on trouve KBC et Dexia. La banque anglaise a également calculé l’impact sur l’actuelle capitalisation boursière de chaque établissement d’une augmentation de son ratio de solvabilité pour atteindre la moyenne sectorielle de 8% en 2011.

LE LIEN ALPHAVILLE VERS L’ETUDE DE BARCLAYS : http://ftalphaville.ft.com/blog/2010/01/05/119876/barcap-calculates-the-cost-of-%E2%80%98too-big-too-fail/

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