Le Temps

Matières Premières : Entretien avec Evy Hambro, gérant du fonds BlackRock World Mining

«L’offre de métaux tardera à s’adapter à la remontée des prix»

Evy Hambro, gérant du fonds BlackRock World Mining, pense que l’environnement est favorable aux sociétés minières. La demande est de retour, tandis que de nombreux projets d’investissement ont été repoussés en raison de la crise financière. Conséquence, les prix des métaux de base est appelé à rester soutenu.

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Le spectre de la dépression s’est éloigné en 2009. Des produits de base, comme le cuivre, le zinc, l’aluminium, le minerai de fer ou l’acier, ont vu leur prix prendre l’ascenseur. Evy Hambro, gérant du fonds BlackRock World Mining, explique les perspectives.

Le Temps: Le rebond des valeurs minières est-il durable?

Evy Hambro: Le terme de «rebond» est parfaitement approprié, car la chute des titres, provoquée par la crise financière, avait conduit à une situation anormale où les sociétés minières voyaient leurs actifs être valorisés en dessous de leurs coûts de remplacement. La remontée subséquente des cours a permis de corriger cette anomalie.

Quant aux perspectives du secteur, elles sont meilleures qu’il y a un an. Les profits opérationnels des compagnies sont bons et nous pensons que, sur les niveaux actuels, les prix des produits de base resteront bien soutenus.

– Pourtant, de nombreuses compagnies minières ont dû revoir à la baisse la taille de leurs projets durant la crise…

– C’est vrai, il reste encore beaucoup de sociétés qui ont renoncé, dans l’immédiat, à développer certains de leurs projets. Au plus fort de la crise, dans un environnement difficile pour trouver du financement, il fallait bien qu’elles reportent leurs nouveaux investissements afin de préserver la solidité de leur bilan. Aujourd’hui, nombre de sociétés demeurent encore très conservatrices et évitent de construire de nouvelles mines.

– N’est-ce pas une mauvaise nouvelle en soi?

– Non, au contraire. La fermeture de mines existantes au cours des douze derniers mois, ainsi que l’annulation de nouveaux projets de production, signifie que l’offre de nombreux produits de base est limitée. Avec aujourd’hui le retour en force de la demande, ce manque d’investissement du côté de l’offre soutient les prix.

– C’est ce qui explique l’envolée du cuivre, dont le prix a plus que doublé depuis octobre 2008?

– En partie, oui. Les contraintes du côté de l’offre ont certainement créé un peu de rareté qui met le prix du métal sous pression. Cela dit, le cuivre est très utilisé dans la construction et les installations énergétiques. Son prix est, par conséquent, très lié à l’évolution de la demande, en particulier celle du secteur de la construction en Chine. En fin de compte, le prix actuel du cuivre, environ 7 dollars le kilo, nous paraît plus proche de son niveau de long terme qu’il ne l’était à l’automne 2008.

– Les théories avançant que le pétrole, le gaz et certains métaux sont en train d’atteindre leurs pics de production sont très à la mode. Que pensez-vous de ces craintes de pénurie?

Les pics de production seront toujours fonction du prix du sous-jacent. Si les réserves de pétrole diminuent, le prix de l’or noir augmentera et rendra rentable l’exploitation des sables bitumineux, ce qui aura pour effet d’augmenter la production et d’éviter la pénurie.

En fin de compte, c’est le retour sur investissement qui détermine le niveau de production. Ce phénomène avait aussi été observé dans le gaz. Lorsque le prix de ce dernier s’est accru, d’autres technologies ont été utilisées pour étendre la production, notamment la fracturation de la roche qui libère du gaz non conventionnel. Ce type de technique n’est, cependant, rentable qu’en cas de prix élevé. D’ailleurs, il est également possible, comme cela s’est déjà produit aux Etats-Unis, que l’arrivée sur le marché de nouvelles quantités produites fasse chuter le prix du gaz et mette en difficulté les entreprises qui exploitent cette technique.

Les pics de production sont souvent des phénomènes passagers qui résultent de la difficulté d’ajuster l’offre rapidement face à un mouvement brusque de la demande. La mise en place d’une nouvelle mine nécessite, en effet, plusieurs années.

– Pourquoi le fonds investit-il dans les valeurs minières et pas directement dans les produits de base?

– Nous ne pouvons pas le faire car le fonds est régi par les directives européennes UCITS. C’est un choix délibéré car l’expertise de l’équipe de gestion se situe avant tout sur la sélection de compagnies du domaine des ressources naturelles. L’équipe n’est pas composée uniquement de financiers, mais aussi de géologues, de géophysiciens et d’ingénieurs, qui visitent les mines et rencontrent les dirigeants des sociétés.

– La position principale de votre fonds est la société Rio Tinto. Focalisez-vous votre stratégie d’investissement sur les grosses capitalisations boursières?

– Non, pas vraiment. Nous gérons notre fonds un peu comme d’autres préparent une pâtisserie, c’est-à-dire en incorporant des ingrédients variés. Rio Tinto, à l’instar d’autres grandes compagnies du secteur, offre au fond une exposition à l’évolution des prix de divers produits de base à un niveau de risque acceptable. Mais, nous misons également sur des sociétés plus risquées dont le potentiel de croissance est plus élevé. Les firmes que nous évitons sont celles dont l’activité principale est l’exploration.
 

 

BlackRock Global Funds – World Mining Fund

ISIN: LU0075056555

Gestionnaire: BlackRock, Londres

Domicile: Luxembourg

Date de création: 24 mars 1997

Monnaie de référence: USD

Actifs du fonds: USD 13,9 milliards

Pol. de distribution: capitalisation

Performance annualisée sur 5 ans en USD: 17,9%

VNI: USD 63,24

Commission de gestion: 1,75%

Frais de souscription: max 5%

Principales positions: Rio Tinto (10,2%), BHP Billiton (9,5%), Vale (8,9%), Xstrata (6,0%), Impala (5,0%), Teck (4,9%), Freeport-McMoran C&G (4,0%), Anglo American (3,4%), Minas Buenaventura (3,0%), Newcrest Mining (3,0%)

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