Carmignac Gestion

Les meilleurs Gérants de la bourse selon le classement Challenge/Citywire

Plutôt que de classer les fonds, Challenges innove en notant les gérants. Surperformance à long terme et risque maîtrisé ont été les deux critères pour établir ce palmarès.

Quand la crise survient, c’est aux hommes qu’on se fie. Et pas aux machines. En termes de gestion financière, les investisseurs délaissent les équations moulinées par les ordinateurs des salles de marché pour retrouver le bon sens des professionnels expérimentés. Le premier palmarès des gourous de Challenges, établi avec la société britannique Citywire, porte non sur des produits, mais sur des hommes et des femmes en prenant en compte, sur une période de cinq ans, leur performance et aussi leur degré de prise de risques.

 Ceux qui connaissent le milieu ne seront guère surpris de trouver en tête Tom Dobell, le gestionnaire star de M&G, filiale de l’assureur britannique Prudential. Quant au podium français, il est composé d’Edouard Carmignac (Carmignac Gestion), François Mouté (Neufl ize Private Assets) et Eric Michelet (Gefip), qui cumulent à eux trois presque un siècle d’expérience.

Bien sûr, aucun d’eux n’apparaît dans la catégorie des grandes figures de l’histoire économique, comme John Maynard Keynes, qui, avec son Chest Fund, a affiché une performance annuelle moyenne de 13,2 % entre 1928 et 1945, contre un recul de 0,5 % pour le Stock Exchange. Ce ne sont pas non plus des oracles, comme peuvent l’être l’immensément riche Warren Buffett ou Peter Lynch, gérant-vedette du fonds Magellan et auteur d’une bible de l’investissement. Les gourous de Challenges rechignent à donner des conseils et à faire la leçon. Leur loi, c’est celle du marché. Ils le scrutent sans cesse, sont tous les jours sur le front et doivent rendre des comptes à leurs clients qui attendent, bien sûr, un maximum de performance, pour un minimum de risques. Battre le marché, ces cinq dernières années, relève d’une forme d’exploit. Sur la période, l’indice CAC 40 a légèrement baissé, et affiche quelques dangereuses cabrioles. En face, nos meilleurs gérants en actions, comme Joëlle Morlet-Selmer et Christian Cambier, dépassent les 40 %, grâce à une belle constance dans la performance en période de hausse et à une formidable résistance à la tempête financière déclenchée par la crise des subprimes, la plus importante depuis 1929.

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Rare surperformance

Leur résultat est d’autant plus méritoire que ceux qui font systématiquement mieux sur le long terme que le marché forment une infime minorité. Créer de « l’alpha » – jargon des professionnels pour désigner la surperformance d’un gestionnaire -, c’est un peu la quête du Graal. Nombre d’études démontrent que, sur longue période, l’alpha est toujours négatif ou neutre.

Oliver Scaillet, professeur à HEC Genève, Laurent Barras, de l’Imperial College de Londres, et Russ Wermers, de l’université du Maryland, ont ainsi démontré, en étudiant plus de 2000 fonds entre 1975 et 2006, que seuls 0,6 % des gérants avaient battu le marché, frais de gestion et de transactions inclus. « Contre près de 6 % il y a trente ans », précise Olivier Scaillet. Sur une période moyenne de cinq ans, ces chercheurs ont démontré que ceux qui battaient le marché ne représentaient que 2,4 % du total. Cette étude renforce donc, a priori, le camp des partisans d’une gestion dite « passive », qui se contente de reproduire un indice boursier, face à des gérants actifs, qui ont comme ambition – illusoire apparemment – de battre le marché. Une passivité qui hérisse le poil de nos gourous. « Où est la valeur ajoutée d’un fonds indiciel ? » s’interroge un de nos meilleurs gérants.

La valeur ajoutée de la gestion active (cliquez sur le lien)

Gestion de Portefeuille : L’art de battre le marché / La gestion active restera….(cliquez sur le lien)
Comment Edouard Carmignac, Thierry Flecchia ou Romain Burnand réussissent-ils à faire du 70 à 80 % sur cinq ans ?

Pas de formule magique ou de pierre philosophale, juste un peu de discipline. Ces gestionnaires d’exception ont quelques règles d’or communes. Et s’y tiennent.

D’abord un certain dédain pour les indices. « Si vous commencez à regarder leur composition et leur comportement, alors vous êtes tétanisé », résume Joëlle Morlet-Selmer, gérante à Mandarine Gestion. Ensuite l’envie du contact direct. « Voir les chefs d’entreprise comprendre leur business et leurs projets, c’est ma conception de l’investissement », s’enthousiasme Nicolas Walewski, fondateur d’Alken. C’est aussi le point de vue de Lucile Loquès, de Covéa, qui avoue rencontrer plusieurs dizaines de chefs d’entreprise à chacun de ses deux voyages annuels aux Etats-Unis. Leur objectif ? La recherche de la bonne idée, 24 heures sur 24. « Parfois, je me lève en pleine nuit pour la noter », reconnaît Thierry Flecchia.
Qu’ils soient incollables sur le marché britannique, comme Tom Dobell ; fins connaisseurs du marché américain, comme François Mouté ; ou inconditionnels des marchés émergents, comme Edouard Carmignac, la plupart affichent une force de conviction en béton armé. Même si cela peut leur coûter cher à court terme, ils tiennent bon. Adeptes du stock-picking (sélection des titres en raison de leurs qualités intrinsèques, plutôt que dans le cadre d’une allocation par secteur ou par nature de risque), ils vont aussi souvent à contresens du sentiment du marché sur une valeur. Pour reprendre le terme anglais, ce sont des contrarians, qui s’entichent d’entreprises sous-cotées et boudées à tort par la majorité de leurs collègues. Ils vont aussi à l’encontre de quelques idées reçues, comme celle qui consiste à croire qu’en diversifiant le risque on le réduit. Celui qui a de la conviction assume et avance avec un portefeuille concentré. « Trop de lignes dans un fonds peut nuire gravement à sa performance ! » tranche Christian Cambier.

Erreur interdite

Bien sûr, cette stratégie peut coûter cher en cas de mauvaise pioche. Souvent à la tête de petites boutiques, comme Romain Burnand (Moneta) ou Nicolas Walewski (Alken), nos gérants n’ont pas droit à l’erreur trop longtemps. A l’inverse des poids lourds de l’industrie financière, qui disposent d’un marketing bien rodé pour attirer le client, leur succès commercial repose sur la persistance de leur performance.

 Visionner le diaporama des 15 meilleurs gérants français (cliquez sur le lien)

EN COMPLEMENT : 

Les pays émergents, un pari de longue date

Les prévisions des trois premiers gérants français

«Vous n’avez pas trouvé les perdreaux de l’année. » Lorsqu’on appelle Eric Michelet, le directeur général de Gefip, pour lui annoncer qu’il fait partie des trois meilleurs gérants français avec Edouard Carmignac et François Mouté, il part d’un grand rire. Ces trois-là connaissent sur le bout des doigts les marchés et leur métier. Ils ont en commun un certain recul, le contact facile et une épaisseur de cuir qui leur a permis de « délivrer » au fi l des ans des performances exceptionnelles. Faussement modestes, toujours portés vers les performances à venir, les voilà réunis à Challenges, le 12 mars au matin. Quand on leur explique le principe du palmarès Challenges Citywire et sa méthodologie, ils rient sous cape. « Vous savez, s’amuse l’un d’eux, l’un de mes maîtres en finance disait que quand on a enfin trouvé le meilleur gérant on a déjà un pied dans la tombe et que le gérant en question est lui-même presque dans la boîte… »
Ils ont traversé bien des bulles et des crises. « Ces dix dernières années, on a subi deux krachs majeurs. Il faut remonter aux années 1930 pour trouver pire », souligne Eric Michelet, qui a calculé que l’indice mondial des actions, libellé en euros, a perdu 40 % en dix ans. Bien sûr, il y a déjà eu des moments difficiles sur le moyen terme, comme la période 1966-1982, où le marché des actions était au purgatoire. « Mais à l’époque on était reparti avec les mêmes pays, les mêmes entreprises et les mêmes marchés, alors qu’aujourd’hui la sortie de crise se fait avec d’autres », explique François Mouté. Les autres ? Les pays émergents, bien sûr, sur lesquels les trois gérants-vedettes misent depuis des années.

« Cela fait déjà dix ans que j’investis sur la Chine, l’Inde et le Brésil », explique ainsi Edouard Carmignac, qui doit une grande partie de sa réussite à ces paris. Eric Michelet se rappelle avoir misé dès la fi n des années 1980 sur la privatisation du téléphone au Mexique. Ces placements longtemps jugés exotiques sont aujourd’hui devenus la norme dans les stratégies de gestion des grandes maisons. « Les gérants français ont longtemps eu une vision rétrécie et occidentale du monde, analyse François Mouté. Or nos économies sont plombées pour de bon, il faut aller voir ailleurs. » Le tout est d’y aller au bon moment et de savoir tenir le cap. D’avoir encore et toujours de la conviction. « On l’a un peu oublié, mais les années 1990 ont été douloureuses sur ces marchés, se rappelle Eric Michelet. Les pays émergents d’Asie, par exemple, ont été ravagés par une crise financière en 1997, mais ils sont sortis renforcés de deux ans de purge avec des économies assainies et de la forte croissance. »

Piège obligataire

Le genre de potion que les trois financiers aimeraient bien voir appliquer aujourd’hui par les Etats occidentaux. Sans trop y croire. Car leur défiance envers les gouvernements de ces pays, criblés de dettes, est forte, et aucun de ces professionnels ne conseille de placer son argent dans des emprunts publics. « Nous préférons les bilans des entreprises à ceux des Etats », résume Eric Michelet. Edouard Carmignac et François Mouté sont à l’unisson et conseillent aujourd’hui d’acheter plutôt des actions que des obligations, de l’immobilier ou du monétaire. En effet, « le contexte actuel d’aversion au risque et d’absence d’inflation est passager», souligne Edouard Carmignac, qui n’est pas loin de considérer, comme François Mouté, que les obligations sont un piège. Eric Michelet, calculette en main, évalue à 9 % annuels la rentabilité potentielle du placement en actions, contre 3 à 3,5 % pour les investissements adossés à des emprunts d’Etat comme l’assurance-vie en euros, placement favori des épargnants français : « C’est pourquoi imaginer garantir sa retraite dans vingt-cinq ans avec ce genre de produit est tout simplement dramatique.»

Alors que faire ? « S’intéresser aux classes d’actifs qui sont attelées aux nouveaux moteurs de la croissance mondiale », répond François Mouté, qui n’a aucune appétence pour le CAC 40 et recommande des valeurs cotées à New York, comme le producteur américain de potasse Mosaic et les pétrolières spécialisées dans l’extraction. Quant à Edouard Carmignac, au-delà de ses 65 % investis dans les pays émergents, les matières premières et l’énergie, il s’est gardé un volant de 20 % pour Wall Street et de 5 % pour « quelques valeurs européennes à bonne visibilité comme Roche, Nestlé ou Unilever ». Eric Michelet surpondère aussi les émergents et le marché américain, et rechigne à avoir des « paris marqués » sur les valeurs. Surtout en Europe. Il consent tout de même à livrer quelques noms d’entreprises cotées à Paris qui lui paraissent pouvoir bénéficier de l’émergence du Nouveau Monde. Parmi elles, Bureau Veritas, CFAO (une « pépite africaine » ) et, dans le CAC 40, Michelin et Saint-Gobain.

Avenir doré

Voilà pour la stratégie offensive, celle qui vise à profiter, selon Edouard Carmignac, « du changement de leadership mondial ». Reste la stratégie défensive. Celle qui consiste à se prémunir à la fois contre un éventuel retour de l’inflation et contre le « cancer » qui mine la signature souveraine de nombreux pays européens. « J’ai un peu changé d’optique depuis le début de l’année, explique Edouard Carmignac. Je crois désormais que la reprise ne sera pas très vaillante, y compris aux Etats-Unis, que les taux vont rester très bas, que le débat sur l’inflation va se matérialiser et que les liquidités vont rester abondantes. » Le patron de Carmignac Gestion avoue donc s’être remis depuis quelques semaines à acheter de l’or.

Carmignac Gestion : Lettre mensuelle mars 2010 (cliquez sur le lien)

L’éternelle relique barbare est de retour ! François Mouté n’exclut pas de voir le cours de l’once multiplié par quatre, à 4 000 dollars… Et les allocations d’actifs de nos trois gérants stars font la part belle au métal jaune. « Je suis à 17 % », lâche Michelet. François Mouté, lui, est à 40 % et rappelle que sont cotées à Paris quelques belles mines, comme Barrick Gold ou Newmont. Edouard Carmignac cite de son côté BHP Billiton et Xstrata.

Les trois meilleurs gérants sont des spéculateurs. Ils vendent l’Occident – et l’Europe en particulier – pour acheter le Nouveau Monde, l’or et les ressources naturelles, qui se raréfient. Alors que les grandes démocraties et leurs opinions publiques s’insurgent contre la dictature des marchés et de la spéculation, ils assument. Les marchés appuient là où cela fait mal, c’est tout. 

Le meilleur en Europe

Tom Dobell M&G Recovery Fund

Gérant depuis mars 2000 de M&G Recovery Fund, navire amiral de la société de gestion M&G (groupe Prudential), ce diplômé en agriculture semble s’être égaré dans le monde de la finance. Installé à plus d’une heure de Londres dans une ferme peuplée d’une centaine de vaches, il prend le train pour se rendre à son bureau et note ses rendez-vous sur un agenda papier. Moins speed que la majorité de ses camarades de la City, Tom Dobell est le seul à avoir battu l’indice Footsie sur dix ans. Ce terrien connaît sur le bout des doigts les 2 500 valeurs cotées à Londres et sait y faire son marché avec le bon timing et un appétit prononcé pour les sociétés en retournement : leurs dirigeants savent qu’ils n’ont pas intérêt à trahir sa confiance. Car la sanction est alors immédiate et sans appel. Dobell ne se revendique pas comme gérant « activiste », mais il sait défendre ses intérêts. Mécontent de la proposition de rachat de British Energy par EDF, le gérant star, qui en détenait 7 %, est parvenu fin 2008 à faire relever le prix d’OPA.

Jean-Pierre de la Roque challenge avril10

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