Cycle Economique et Financier

Itinéraire d’une crise : De la crise des valeurs « dot.com » à celle des prêts « subprime »

Itinéraire d’une crise :  De la crise des valeurs « dot.com » à celle des prêts « subprime »

Comment une bulle financière peut se muer en bulle immobilière et remettre en cause la stratégie monétaire d’Alan Greenspan.

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La dernière année du XXème siècle va voir se déclencher la dernière grande curée boursière, qui commencera sur les valeurs internet, pour s’étendre ensuite à pratiquement tous les grands indices internationaux. Au menu, le traditionnel crédit facile qui permet à la bulle de se développer dans des proportions grotesques.

Les 10 glorieuses

Entre 1991 et 2000, l’économie américaine va connaître une période de croissance forte et sans inflation, qui entraînera la création de millions d’emplois. Le marché a souvent donné beaucoup de crédit à Alan Greenspan, l’ancien président de Réserve Fédérale, pour avoir maintenu pendant si longtemps des conditions propices à la hausse de l’activité économique. Certains économistes de renom lui reprochent aujourd’hui de ne pas avoir sonné plus tôt la fin de la récréation, et d’avoir permis par son inaction la création d’une bulle financière dont l’explosion continue de se faire sentir aujourd’hui.

Dans la soirée du 5 décembre 1996, Alan Greenspan prononce un discours resté célèbre, dans lequel il évoquait l’ »exubérance irrationnelle » des marchés boursiers. Il liait également la situation de l’époque à la situation japonaise, et soulignait qu’en tant que banquier central, son rôle était de lutter contre la formation des bulles. Le lendemain de ce discours, l’indice Dow Jones clôture en baisse de 1% à 6.381,94 points, tandis que le Nasdaq et le S & P500 terminent la journée respectivement à des niveaux à 1.287,88 et 739,6 points.

Inaction de la Fed

Quatre ans plus tard, au premier trimestre de l’an 2000, l’indice Dow Jones flirtait avec la barre des 12.000 points, l’indice Nasdaq titillait les 5.000 points, et le S & P 500 celle des 1.500 points.

Dans l’intervalle, les grands indices doublent ou quadruplent de valeur. La Fed baisse, dans un premier temps, ses taux jusque 4,75% dans le courant de 1998, avant de les remonter très progressivement. À la fin de l’année 1999, le taux directeur de la Fed n’est toutefois que de 0,25% supérieur à ce qu’il était lorsqu’Alan Greenspan prononça son fameux discours de 1996. « Il n’a pas relevé les taux d’intérêt pour freiner l’enthousiasme du marché. Il a attendu que la bulle éclate, ce qui se produisit en 2000, et ce n’est qu’après coup qu’il a tenté de remettre de l’ordre dans cette pagaille, souligne Paul Krugman (Prix Nobel d’économie en 1998). Pour être juste envers Greenspan, de nombreux économistes des deux bords de l’échiquier politique étaient d’accord avec cette doctrine ». En clair, Greenspan attendait que l’inflation se manifeste avant d’agir.

Dot.com

La composante la plus emblématique de cette bulle fut bien entendu le lancement de nombreuses dot.com. Le « venture capital » était surabondant, et la stratégie de toutes ces sociétés de la nouvelle économie était de prendre des parts de marché en ligne, sans se soucier vraiment de la rentabilité dans un premier temps. Avec beaucoup de moyens, peu de revenus, et une concurrence acharnée entre des sites pratiquement semblables, les marchés se sont toutefois progressivement rendu compte que la nouvelle économie n’était finalement pas si éloignée de l’ancienne et qu’en définitive la capacité d’un groupe à dégager des bénéfices était tout aussi importante.

La plupart des figures emblématiques de l’époque ont aujourd’hui disparu, soit parce qu’elles ont été revendues à un gros acteur, soit parce qu’elles ont été prises dans l’éclatement de la bulle et par le tarissement des sources de financement. Seuls quelques grands noms (Google, Amazon, Ebay, etc) sont parvenus à assurer leur survie.

Mais, comme on l’a vu, la bulle n’était pas seulement une bulle internet. Tous les indices américains avaient doublé de valeur sur une période de 3 ans et même des entreprises traditionnelles se négociaient à des ratios de valorisation historiquement élevés.

Taux plancher

Sans pouvoir parler vraiment de krach boursier, les indices américains vont ensuite perdre entre 40 et 75% en l’espace de trois ans, l’indice Nasdaq étant bien entendu le plus touché avec un plus bas de 1.108 points atteint en octobre 2002. Bien entendu, les faillites de WorldCom, d’Enron, et les attentats sur les tours jumelles à New York ont également eu un impact significatif sur le climat boursier.

C’est dans la foulée de l’éclatement de la bulle boursière que va naître la bulle immobilière. La Réserve Fédérale va en effet adopter une politique très accommodante, les responsables de l’institution craignant de voir l’économie tomber dans une déflation à la japonaise. Les taux d’intérêt vont chuter jusqu’ à 1%, ce qui va entraîner un rebond frénétique de l’activité immobilière. Le mouvement fut alimenté par des créditeurs qui sont devenus très peu regardants quant à la qualité crédit de l’emprunteur. La bulle immobilière va également trouver un terreau fertile dans le développement des produits titrisés. Les indices S & P500 et Dow Jones repasseront leur niveau d’avant crise dans le courant de l’année 2007, avant de replonger rapidement suite à l’éclatement de la seconde bulle. De son côté, l’indice Nasdaq n’est jamais revenu à son niveau du début 2000. Ce qui fait dire à certains économistes que les marchés américains restent encore actuellement dans une tendance baissière delong terme.

L’Echo JUIL10

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Retour sur les grandes crises boursières US 1907 et 1929 (cliquez sur le lien)

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