Les hedge Funds (fonds alternatifs) permettent-ils de s’enrichir ou d’enrichir ?
John Paulson, David Shaw, George Soros… Les gérants de Hedge Funds (fonds alternatifs) sont les stars des marchés financiers. Ils interviennent souvent en spéculation pour profiter des distorsions du marché que leur intervention permet souvent de combler. Souvent, leurs plaquettes en papier glacé annoncent des rentabilités moyennes de l’ordre de 7%. Mais ont-ils enrichi leurs clients, se demande The Economist ?
Le livre de Simon Lack, « The Hedge Fund Mirage: The Illusion of Big Money and Why It’s Too Good to Be True » (Le mirage des Hedge Funds : l’illusion du jackpot et pourquoi c’est trop beau pour être vrai », tente de répondre à cette question. Lack a passé plusieurs années à éplucher les rendements des hedge funds chez JP Morgan.
Il explique que les meilleurs gérants attirent les capitaux des investisseurs, et ce faisant, ils augmentent l’assiette de calcul des rendements (le dénominateur du taux de rendement), ce qui leur permet de mieux amortir les pertes. Au cours d’une mauvaise année, ils peuvent effectuer des pertes supérieures aux gains réalisés sur les années précédentes. Mais comme la capitalisation du fonds se poursuit tout au long de l’année, le rendement d’un investisseur unitaire peut être plus faible que le rendement moyen du fonds.
PLUS /MOINS DE HEDGE FUND EN SUIVANT :
De 1998 à 2003, les hedge funds ont indiqué avoir rapporté des bénéfices compris dans une vaste fourchette entre 5% en 2002 et 27% en 1999. Mais la capitalisation de 1999 n’avait rien à voir avec ce qu’elle a atteint 4 ans plus tard. En 2000, elle n’était que de 200 milliards de dollars. Mais les performances miraculeuses des bonnes années ont attiré les « institutionnels », c’est-à-dire les autres fonds (OPCVM), et les associations caritatives, notamment, dotés de très grosses sommes à investir, à un moment où ils ne savaient plus sur quoi investir après l’éclatement de la bulle internet en 2000. De ce fait, au début de l’année 2008, les montants confiés avaient atteint 2000 milliards de dollars.
Mais 2008 fut l’année de la crise financière, une « annus horribilis » pour le secteur des hedge funds, qui déplorèrent une perte moyenne de 23%. Cependant, en termes de liquidité, les pertes enregistrées pour cette seule année représentèrent plus du double des actifs confiés en 2000, lorsque les performances étaient encore bonnes. Lack estime même que les pertes réalisées au cours de l’année 2008 annulent tous les gains réalisés sur les années précédentes.
Malgré les rebonds des marchés sur les années 2009 et 2010, les investisseurs sont encore en perte, alors que les gérants ont empoché 100 milliards de commissions de gestion entre 2008 et 2010 (ils avaient déjà gagné 379 milliards de dollars entre 1998 et 2010). La conclusion de Lack, c’est qu’il est difficile de trouver des clients que les hedge funds aient réellement enrichis. Pire, depuis 1998, le rendement réel n’a été que de 2,1% par an, la moitié de ce que les investisseurs auraient gagné avec des bons du Trésor totalement dépourvus de risque !
Source The Economist/Express.be janv12
EN COMPLEMENT : Les fonds de Jabre Capital Partners ont perdu jusqu’à 27% l’an dernier
Trop de risques pris durant la très fluctuante année 2011
Une année à oublier pour la figure en vue des «hedge funds» genevois. Certains fonds de placement de la société de Philippe Jabre – qui gère environ 3 milliards pour ses clients – ont en effet perdu plus du quart de l’argent qui leur était confié en 2011.
C’est le cas du «Global Balanced», l’un des plus importants véhicules de Jabre Capital Partners, parti écumer les marchés boursiers il y a douze mois avec, à son bord, 1,8 milliard de dollars. Il ne lui en restait que 700 millions en fin d’année, révèle le bilan confidentiel réalisé par une banque anglo-saxonne sur un demi-millier de fonds alternatifs. La faute aux 27% perdus dans la tempête des marchés, mais aussi aux retraits de ses souscripteurs.
«Dislocation» des marchés
En comparaison, les fonds spéculatifs – toutes catégories confondues – ont fait perdre, en moyenne, 4% à leurs clients en 2011, selon le bureau Eurekahedge. Les marchés boursiers ont, eux, cédé 10%. Dans l’entourage de Philippe Jabre, on rappelle que «ce même fonds Global balanced avait gagné 20% en 2007, 2% l’année suivante, 45% en 2009 et près de 4% en 2010».
Pourquoi un tel revers en 2011? Inutile de demander à la concurrence. «Parler de Philippe? Désolé, Genève est une petite ville», raccroche un ex-collaborateur, passé à son compte. De rares commentaires font deviner des pertes sur des paris massifs, amplifiées par celles sur les «protections» censées en limiter l’impact. Plusieurs centaines de millions auraient été emportés dans des paris sur le Japon; après le tsunami… mais avant la catastrophe nucléaire. «Idéalement, lorsqu’au deuxième semestre nos analyses ont détecté une décélération économique pouvant entraîner une baisse des marchés, nous aurions dû réaliser nos investissements, au lieu de couvrir le risque avec des futures», admet un proche de Philippe Jabre.
Moins 14% sur les «convertibles»
Les fonds dédiés aux emprunts «obligataires convertibles» – la spécialité du patron – ont perdu 14% l’an dernier. Ces deux produits phares, dont l’un est géré pour la banque Pictet, avaient entamé l’année avec 2 milliards de dollars en soute.
Le produit s’en sortant le mieux en 2011 reste celui dit «Event driven», qui essaie d’anticiper les fluctuations d’entreprises susceptibles d’être rachetées ou restructurées: gérant aujourd’hui moins d’une centaine de millions, ce véhicule a limité ses pertes à 2,6% l’an dernier.
Par Pierre-Alexandre Sallier/le temps janv12
Au grand jeu de “trompe couillon” les hedge fund ne sont certes pas les derniers !