Art de la guerre monétaire et économique

Matières Premières : Ruée sur les terres rares du Kazakhstan

Ruée sur les terres rares du Kazakhstan

L’ex-république soviétique pourrait combler une partie de la demande mondiale suite aux quotas que Pékin s’est imposés sur ses exportations de ces minerais stratégiques

EXPORTATIONS CHINOISES TERRES RARES

Source Wall Street Journal  

Il aura fallu attendre 2011 pour que trois pays, Japon, Russie et France, signent avec le Kazakhstan des accords de partenariat sur ses terres rares. Pourtant, dès 2005, Pékin avait limité ses propres exportations, suscitant la panique chez les acteurs de la révolution numérique, les producteurs de moteurs électriques ou de turbines d’éoliennes en mal de ces matières premières vitales pour leurs produits. Le sous-sol kazakh, qui contient du pétrole en plus de toute la table de Mendeleïev, recèlerait des terres rares en grande quantité, et pourrait ainsi répondre à la demande.

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 «Il n’y a pas beaucoup de pays qui peuvent prendre le relais de la Chine dans les terres rares. Il y a l’Australie, les Etats-Unis… et le Kazakhstan», estime Christophe-Alexandre Paillard, coordonnateur en 2011 d’un numéro de la revue Géoéconomie sur les minerais stratégiques. «Nous avons une idée imprécise du potentiel du Kazakhstan, mais nous disposons de quelques occurrences. Notamment le fait qu’il y existe des terres rares associées au minerai d’uranium», confie Bruno Martel-Jantin, du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), un établissement public français. C’est donc via la filière nucléaire, Areva étant très implanté au Kazakhstan, nouveau n° 1 des pays producteurs d’uranium, que Paris s’est lancé à la conquête des «terres rares» de la steppe kazakhe.

Le 19 septembre 2011, le BRGM signait un accord de partenariat stratégique avec KazAtomProm, l’entreprise nucléaire kazakhe. Les Français embrayaient le pas des Japonais – Sumitomo et bientôt Toshiba – et des Russes. Et ce n’est que le 8 février dernier que les Allemands y sont allés de leur signature d’un accord leur donnant un meilleur accès aux terres rares de l’immense république d’Asie centrale. «Nous avons pris la mesure du problème très tard. C’est pourquoi nous n’arrivons que maintenant au Kazakhstan. En 2006, j’ai écrit mon premier rapport pour tirer la sonnette d’alarme, la pénurie de ces minerais s’annonçant. Mais nos politiques n’ont pas saisi l’importance du sujet», déplore Christophe-Alexandre Paillard.

Astana prévoit dès 2012 de produire 1500 tonnes de ces terres, avec Sumitomo, pour une demande mondiale de l’ordre de 50 000 tonnes. Des terres moins rares du fait de leur quantité que de la difficulté de les exploiter, puisqu’elles ne sont présentes qu’en d’infimes pourcentages dans la roche mère. Le fait que ces terres soient associées au minerai d’uranium au Kazakhstan est un avantage précieux dans le contexte actuel. «Une mine demande entre dix et quinze ans entre le moment où un gisement est identifié et la production. Comme au Kazakhstan il existe déjà des infrastructures de production, le pays pourrait assez rapidement jouer un rôle important sur le marché», souligne Didier Julienne, stratège en ressources naturelles.

«La conception de notre projet est terminée, nous en sommes au stade de la signature d’accord entre les industriels français et KazAtomProm sur la propriété intellectuelle liée à d’éventuelles découvertes», explique Bruno Martel-Jantin. Le BRGM joue un rôle catalyseur dans le partenariat avec les Kazakhs, au sein d’un Laboratoire franco-kazakh sur les terres et métaux rares, rassemblant partenaires scientifiques et industriels, comme Rhodia, Eramet et Areva. Mais les choses marquent le pas en ce moment, Areva étant empêtré dans l’affaire de l’acquisition d’UraMin en plus de difficultés financières.

Par Régis Genté Tbilissi/le temps mars12

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