A Chaud!!!!!

L’Edito du Dimanche 30 Juin 2013: Attention, la chasse aux gogos est ouverte! par Bruno Bertez

L’Edito du Dimanche 30 Juin 2013:  Attention, la chasse aux gogos est ouverte! par Bruno Bertez

Tout au long de ces dernières semaines, notre objectif a été de vous convaincre que nous étions en train d’aborder une nouvelle phase de la crise, nous l’avons appelée, pour simplifier, la phase II. On aurait pu l’appeler phase III ou phase IV car, depuis 2008, la crise peut être découpée en diverses tranches. Ici, nous disons phase II car nous voulons prendre de la hauteur et marquer une réelle coupure. Il y a eu un « Avant » et nous avons considéré ces dernières semaines qu’il y avait donc maintenant ce que nous appelons un « Après ». L’Avant, c’est la montée ; l’Après, c’est la descente. L’Avant, c’est la période où on a traité la crise et où on a eu l’illusion que les diagnostics et les remèdes étaient bons; l’Après commence quand le doute s’instille, quand les marchés ne réagissent plus comme prévu. L’Après commence quand on a l’impression que les maîtres du monde perdent le contrôle de la situation.

      Dans ce cheminement, nous avons mis plusieurs petits cailloux blancs. Par exemple, lorsque Bernanke a, pour la première fois, attiré l’attention sur les risques spéculatifs excessifs que prenaient les marchés. Nous avons écrit :  « attention le rouge est mis ». Nous avons aussi mis d’autres cailloux blancs lorsque nous avons signalé qu’au moins quatre gouverneurs de la Fed, dont le plus intelligent d’entre eux, Jeremy Stein, étaient hostiles à la poursuite des politiques non conventionnelles. Autre caillou blanc,nous avons souligné que les divergences sur l’arrêt, la réduction, la poursuite des QE, tenaient à la question de l’évolution des taux d’intérêt longs. Si on arrête les QE trop tard, on prend le risque d’une hausse brutale des taux d’intérêt et des spreads, ce qui met en l’air tout le complexe du risque, mais surtout tout le système bancaire et shadow bancaire mondial que l’on a eu tant de difficultés à préserver.

Plus près, notre dernier caillou blanc était un article qui tournait autour de « l’impasse et de l’échec de Bernanke ». Nous y sommes. Nous sommes dans cette période où l’idée de l’impasse et la crainte de l’échec pénètrent les esprits.

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Vous avez dû remarquer la quasi panique qui a saisi les responsables de la conduite des affaires mondiales, nous voulons parler des Banquiers Centraux quand, au cours de la deuxième quinzaine de juin, les marchés ont commencé à décrocher. Ils ont tout de suite compris que l’on était bien au-delà d’une correction technique car tout s’est mis à l’unisson. Non seulement, ce sont les cours des véhicules du complexe du risque qui ont chuté, mais également les paramètres techniques fondamentaux, tels que les moyennes mobiles longues. Non seulement ce sont les cours qui ont chuté, mais il y a eu des sorties considérables de capitaux des véhicules collectifs tels que les ETF engagés sur les parties les plus fragiles des complexes du risque. Non seulement il y a eu des flux de capitaux très négatifs qui ont délaissé ces véhicules, mais il y a eu des débuts de dislocation des marchés sous-jacents, insuffisance flagrante de liquidité. Non seulement il y a eu tout ce que nous avons dit, mais il y a eu grippage des marchés et de l’accès aux marchés pour les nouvelles émissions. Tout ceci mis bout à bout indique qu’il y a quelque chose de changé au royaume de la finance. 

Nous étions à quelques jours des inventaires trimestriels et semestriels. Ces inventaires sont très importants car ils gouvernent, ils mettent le doigt sur la performance de la clientèle. De mauvais inventaires provoquent des appréciations négatives, des changements de sentiment. Il y a risque de boule de neige. Vous comprenez, dans ce cadre, pourquoi la panique a saisi les gouverneurs de la Fed et pourquoi ils n’ont eu de cesse de marteler avec leurs vassaux des autres Banques Centrales : « mais non, la période des liquidités abondantes et des taux zéro n’est pas terminée ». Mais non, nous ne retirons pas le fameux « bol de punch » auquel vous tenez tant. Vous allez pouvoir continuer à vous enivrer. Votre distillerie va pouvoir continuer à s’alimenter. Il n’est pas encore temps de craindre la gueule de bois.

Ce n’est pas ce que l’on appelle « le tapering » qui est la cause de la dislocation en cours des marchés de risk-on, Emergents, Commodities, Crédit, Junk ;  non, c’est ce que l’on cherche et va continuer de chercher à vous faire croire. Ce qui est la cause pour une raison, pas encore très claire, c’est la fuite devant le risque. Pourquoi? Est-ce parce que le temps est venu de la prise de conscience que les Banques Centrales ne contrôlent pas la situation? Est-ce parce que ce sont les derniers mois de Bernanke ? Est-ce que c’est à cause de la situation terrible de la Chine avec des autorités qui sont déboussolées et jouent avec le feu? Est-ce que c’est tout simplement parce que l’on a touché les limites des artifices et de la crédulité?

Au fond, on en revient, sous l’apparente diversité des causes possibles, à ceci: le risk-on a été maintenu artificiellement par le biais de l’accroissement considérable de ce que l’on peut appeler le risque de marché global, lequel a doublé en quelques années et l’assureur de ce risque global est perçu comme ne pouvant plus garantir réellement ce risque.

Pour simplifier et ne pas rentrer dans les détails techniques, disons que la valeur de marché du complexe du  risque depuis 2002 a progressé de plus de 100% tandis que l’économie réelle sous-jacente qui est censée soutenir et supporter ce risque n’a progressé que de 50%. Une pause est intervenue au début des années de crise. Elle a stabilisé le ratio.

Les mesures prises par les autorités monétaires pour reflater le complexe du risque ont provoqué une hypertrophie de celui-ci et une ré-accélération de sa masse totale.

Il vient un moment, comme cela s’est passé dans les subprimes, où l’on veut croire qu’un assureur peut couvrir la montée des risques.

Il vient un moment aussi où cette croyance s’effondre et où l’on se rend compte que l’assureur est un mythe et qu’il n’a pas réellement les moyens de tenir ses promesses.

Nous insistons, cette appréciation sur la disproportion entre la croissance du risque et l’évolution du réel sous-jacent, reste primaire, nous ne tenons absolument pas compte de ce qui s’est passé sur les dérivés. Nous ne les faisons pas entrer dans notre raisonnement. Nous n’incluons pas le risque de gel ou de cassure dans la chaîne des contre-parties. Voilà pour simplifier le fond de notre pensée lorsque nous épinglons la phase actuelle sous le nom de phase II. 

En résumé, la « solution » a été de multiplier par deux le risque global de ce que nous appelons le marché global, le système tient ou tenait sur une pointe instable et un coup de vent -lequel, on ne sait pas bien- est en train de faire tanguer l’édifice, alors que l’assureur n’a plus les fonds propres, nous disons bien « fonds propres », pour honorer les garanties qu’il a données. Les fonds propres de l’assureur, c’est une notion complexe qui va bien au-delà des fonds propres de la Fed mais qui les englobe, qui englobe la confiance qu’on lui porte, sa crédibilité, les théories sur lesquelles elle s’appuie, son diagnostic de base etc. etc.

Nous pensons que l’on entre vraiment dans une phase dangereuse et surtout cynique.

Le système financier mondial est totalement chargé de risk-on, sous toutes les formes, et vient de prendre des claques énormes. Commodities, pétrole, or, emprunts émergents, crédit émergent, actions émergentes, High Yield,  nous le répétons, les pertes sont gigantesques. Il faut tenir les marchés pour éviter la boule de neige et surtout tenter de refiler le risque au public et à ses institutions. Il faut disséminer ce fameux risque trop concentré donc, absolument, influencer, mentir, remettre une couche sur le monde de carton pâte, le village Potemkine mondial que les soi-disant responsables ont construit depuis 2009. Ne soyez pas naïfs, soyez méfiants, ne faites pas partie des gogos.

Nous clôturerons sur une suggestion que nous considérons comme vraiment audacieuse. Nous en prenons la responsabilité et nous vous laissons le soin d’y réfléchir par vous-mêmes. Nous avons été frappés par la généralisation du thème « prélèvements sur les dépôts bancaires », sur les money market funds, donc prélèvements sur tous ceux qui refusent de se laisser appâter par le risque. Nous émettons donc l’hypothèse suivante : si la chasse aux gogos ne donne pas les résultats escomptés, si le gogo refuse de mordre à l’hameçon du risque et de servir de déversoir au trop plein du système bancaire, c’est alors que l’on passera à la phase III celle du prélèvement autoritaire.

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 30 Juin 2013

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5 réponses »

  1. Quand on joue à pile ou face et qu’il n’y a QUE deux faces alors qu’on n’ a
    que deux piles dans notre jeu, l’important … l’important, L’IMPORTANT ?

    C’EST DE VISER LA TRANCHE !

    Les deux pieds bien écartés en marchant entre les rayures du tigre … tandis qu’il dort ?
    Chuttttt. Silence ! PA ALLER MISSIÉ ! TOI TE TAIRE ! TOI ….. CHUTTTTTTT …..

    Vite, vite, un tunnel, le port et CAP AU LARGE MATELOT !

    Brave petite taupe va !

    Pfiouuuuuuuuuuuu !!!

    P.S. MERCI ENCORE à Bruno Bertez pour ces éclairages destinés à ce que TOUT LE MONDE
    comprenne bien. Les simplifications (lumineuses) utilisés allant EXCLUSIVEMENT dans ce sens
    j’en suis certain.

  2. « Nous pensons que l’on entre vraiment dans une phase dangereuse et surtout cynique. »

    C’est ça la phrase clé, mais vous n’osez pas aller plus loin.

    Le prélèvement autoritaire… oui… mais d’une part il existe déjà (inflation) et d’autre part… il ne suffirait pas à résoudre les problèmes sous-jacents.

    Bref, c’est peut-être la phase III, mais c’est la suivante qui sera le véritable game changer.

    « Evenement négatif exogène d’envergure ».

    Voilà ce le Système devra créer, faciliter ou générer.

    C’est désormais inévitable.

    En langage courant, on peut appeler ça : conflit, guerre, conflagration, violence.

    Un reset économique ainsi qu’une absolution pour le passé et un blanc-seing à nos politiciens (responsables et coupables)… C’est le 3 en un !

    Très concrètement : si conflit au MO, l’Iran bloque Ormuz où passe 30 % du pétrole mondial, explosion du prix…

    Alors, il sera facile pour Obama, Hollande, Van Rompuy… de nous prendre à témoin : « oui l’économie s’écroule, mais c’est la faute du pétrole. Faites moi confiance, en me soutenant on va régler le problème ».

    Le 3 en un !

    Les années passent (2008 ! Bientôt 5 ans !)… et cet «  »Evenement négatif exogène d’envergure » devient de plus en plus nécessaire.

    Nous en avons tous besoin, collectivement.

    C’est désormais inévitable. Les seules variables sont la timeline, les moyens et l’amplitude.

    • Seul les politiciens et les banquiers, voire l’industrie militaire a besoin d’une telle méthode, pas les peuples. Mais il y a de forte chance que cela finisse comme cela.

  3. Dans la zone euro (ZE17), le taux de chômage corrigé des variations saisonnières s’est établi à 12,1% en mai 2013, en hausse par rapport au taux de 12,0% relevé en avril.

    Aujourd’hui, il y a deux Europe :

    – l’Europe des pays périphériques : ces pays sont en faillite. Le chômage atteint des niveaux catastrophiques ;

    – l’Europe des pays du nord : ces pays sont en train de sortir de la crise.

    Ces deux Europe s’éloignent l’une de l’autre de plus en plus vite.

    Zone euro : chômage pour le mois de mai 2013 :

    1- Médaille d’or : Espagne. 26,9 % de chômage.

    2- Médaille d’argent : Grèce. 26,8 % de chômage.

    3- Médaille de bronze : Portugal. 17,6 % de chômage.

    4- Chypre : 16,3 % de chômage.

    5- Irlande : 13,6 % de chômage.

    6- Italie : 12,2 % de chômage.

    Ces six Etats européens périphériques s’enfoncent dans la crise de plus en plus profondément. Leur situation devient désespérée.

    Et les pays qui ont le moins de chômage ?

    Pays-Bas : 6,6 % de chômage.

    Luxembourg : 5,7 % de chômage.

    Allemagne : 5,3 % de chômage.

    Autriche : 4,7 % de chômage.

    http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/3-01072013-BP/FR/3-01072013-BP-FR.PDF

    Chômage des jeunes de moins de 25 ans :

    Grèce : 59,2 % de chômage des jeunes de moins de 25 ans.

    Espagne : 56,5 % de chômage des jeunes.

    Portugal : 42,1 % de chômage des jeunes.

    Italie : 38,5 %.

    Slovaquie : 34,6 %.

    Irlande : 26,3 %.

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