Changes et Devises

Commentaire : Grèce, Europe et effet domino / Jeu et compromis sans solution

Après des semaines d’attentisme et de vagues promesses, l’Europe semblait, enfin, avoir pris conscience de l’importance des déboires financiers de la Grèce et du danger de contagion à d’autres pays de la zone euro. La montagne a finalement accouché d’une souris et la lueur d’espoir s’est révélé un leurre…

PLUS DE TRAPPE A DETTES EN SUIVANT :

FMI à la sauce européenne ?

Embarrassée par la possible intervention du FMI dans un de ses pays membres, la zone euro évoque la création d’un Fonds monétaire européen (FME) destiné à aider les pays qui en auraient besoin. En échange, ceux-ci auraient l’obligation de prendre les mesures budgétaires nécessaires et de réduire leur dette. Pour Berlin, qui défend le projet, il s’agirait surtout de donner à la zone euro les moyens de contraindre ses membres à respecter leurs engagements. Plus qu’un outil d’aide, Berlin y voit un outil de surveillance pour éviter le dérapage des comptes publics, outil qui ne coûterait du reste pas grand-chose au contribuable allemand puisque, parmi les pistes évoquées, le fonds serait alimenté par les pays ne respectant pas le Pacte de stabilité et de croissance. Une façon, en somme, de punir les mauvais élèves et de récompenser les bons.

Reste qu’une telle institution pourrait obliger à modifier le traité de Lisbonne, modification qui serait plus que probablement soumise à un référendum dans certains pays. Une perspective qui n’enchante guère l’Union européenne déjà échaudée par les difficultés pour faire approuve…r le traité de Lisbonne…

Agence de notation européenne ?

Le président de l’Ecofin Jean-Claude Juncker a également évoqué la création d’une agence européenne de notation, sous l’égide de la Banque centrale européenne (BCE).

Pareille agence serait assurément utile quand on sait que les agences de notation existantes ont octroyé à tout va des notes AAA à des actifs financiers qui se sont ensuite avérés toxiques.En agissant de la sorte, elles ont encouragé les investisseurs à se ruer sur ces actifs financiers,avec les conséquences dramatiques qu’on connaît. Une attitude peut-être liée aussi, inconsciemment, au modèle de fonctionnement des agences de notation qui, rémunérées par l’émetteur de titres qu’elles doivent noter, peuvent être tentées d’attribuer de bonnes notes pour garder leurs meilleurs clients.

Un collatéral source de dégât ?

Autre problème majeur pour l’Europe : pour que des actifs financiers soient acceptés comme collatéraux pour obtenir des financements de la BCE, ces actifs devront, à partir du1er janvier 2011, être assortis d’une note A- ou mieux. Or, seul Moody’s attribue encore à la dette grecque une note lui permettant de remplir ce critère. Concrètement, l’Europe donne donc à Moody’s, agence anglo-saxonne, le droit de décider si, oui ou non, la BCE acceptera la dette grecque en tant que collatéral.

Une situation d’autant plus délicate qu’une baisse de la note grecque signifierait des difficultés accrues pour le financement de la dette du pays et de ses banques.

Premier test de réalité cette semaine avec une tentative du gouvernement grec pour emprunter sur les marchés.

Le package annoncé est en effet conditionnel et ne sera mis en place qu’en cas de« difficultés très sérieuses ». Le fait d’avoir accepté l’implication du FMI demeure étrange compte tenu des réticences exprimées auparavant. D’ailleurs, une interprétation cynique consisterait à dire que la France et l’Allemagne ont voulu se protéger des critiques politiques dans leur pays pour avoir « sauvé » un membre de la zone euro et créé de facto un précédent aux conséquences fâcheuses  en termes d’aléa moral. En cas d’intervention , il s’agira du premier programme du FMI qui n’intégrera pas d’ajustement significatif du taux de change…

Plus fondamentalement, le problème grec est donc loin d’être résolu, car on n’offre à la Grèce aucun moyen de s’en sortir:

Pas de dévaluation, pas de renégociation de sa dette, pas de crédit relais à taux favorable! L’ajustement ne peut donc se faire que par une baisse des salaires aux conséquences sociales déstabilisantes

En effet dans la zone euro, le seul moyen d’améliorer la compétitivité sans recourir à la dévaluation passe par une austérité budgétaire, qui pénaliserait l’activité et déflaterait les prix domestiques par rapport aux partenaires commerciaux.

 Les marchés ont raison d’être rassurés par l’implication du FMI, mais ils mesureront bientôt l’étendue de l’ajustement économique douloureux que cela impliquera…..

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