Bernanke et Greenspan armes de destruction massive de l’économie américaine par Jeremy Grantham
Le capitalisme a été bien plus manipulé par les initiatives des deux derniers patrons républicains de la Fed que par toutes les autres tentatives prises ensemble. Et leur politique monétaire a été extrêmement destructive pour l’économie
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J’ai toujours éprouvé de la sympathie pour la théorie de l’effet d’éviction selon laquelle les mérites d’une augmentation des dépenses de l’Etat sont effacés par une diminution équivalente des dépenses du secteur privé. Mais c’est un argument académique et, même s’il contient une part de vérité, il reflète une tendance récente en matière économique: insister sur les suppositions et passer comme chat sur braise sur le sens commun et le monde réel. Cet effet d’éviction a été baptisé «équivalence ricardienne» d’après l’économiste David Ricardo
Pour rendre justice à ce dernier, les statistiques gouvernementales n’existaient pas à l’époque et tout était théorique. Un même groupe, relativement restreint, de contribuables détenait la majeure partie des obligations. On comprend dès lors comment David Ricardo a pu tirer ses conclusions. Aujourd’hui, quand un gouvernement embauche une personne, ce n’est plus du tout la même chose que quand une entreprise embauche la même personne. Car, si cette personne n’est pas engagée, le gouvernement assume tous les coûts liés au chômage, alors que l’entreprise privée n’en paie aucun. Ces coûts ne comprennent pas seulement les prestations sociales, les bons alimentaires et la perte fiscale au niveau national et local. Ils incluent également les coûts à long terme pour la société, avec des chômeurs qui perdent leurs compétences et deviennent de moins en moins employables.
Pour les emplois faiblement rémunérés, le total de ces coûts correspond à un tiers, voire à la moitié, des coûts générés par leur embauche. Dans cette situation, il n’y a pas d’équivalence. Un travailleur engagé représente tout simplement une meilleure affaire pour l’Etat qu’un chômeur. Une alternative plus capitaliste serait d’offrir, sous forme de subside, tout ou partie de l’épargne réalisée par le gouvernement aux employeurs qui engagent des travailleurs peu qualifiés. Cette alternative a été tentée et, en période de chômage sévère, elle semble avoir porté ses fruits.
Les dettes futures ne sont que du papier; les jobs utiles actuellement sont réels. Comment peut-on prétendre qu’on se porte mieux lorsque des chômeurs désireux de travailler restent sur le carreau, désœuvrés et déprimés, tandis que leurs compétences se détériorent? Avec des infrastructures terriblement délabrées et un besoin désespéré de progrès en matière d’efficience énergétique, il existe sans aucun doute une vaste réserve potentielle d’améliorations sociétales en attente de réalisation, d’une part, et une armée de chômeurs non frictionnels prêts à se mettre au travail, de l’autre.
Permettez-moi de formuler une remarque à l’intention de ceux qui condamnent toute forme d’ingérence gouvernementale: le capitalisme a été bien plus manipulé, et bien plus dangereusement, par les deux derniers patrons républicains de la Fed que par toutes les autres tentatives prises ensemble. Il est naïf, voire à la mode, de mettre tous nos problèmes sur le dos d’une administration actuelle plutôt boiteuse.

Elle a hérité d’un gâteau déjà cuit, ou plutôt à moitié cuit, et les maîtres pâtissiers ont été le précédent et l’actuel président de la Fed, et l’apprenti pâtissier a été Hank Paulson avec sa crise des «subprime» «contenue». Aidés par Timothy Geithner à la Fed de New York, ils n’ont absolument rien fait pendant deux ans, avant de préparer le terrain pour un renflouement d’une ampleur dont ni les démocrates ni les républicains n’avaient jamais rêvé! Et de toutes les nombreuses erreurs de l’administration actuelle, les pires sont directement liées à ce fiasco: le choix inexplicable de Timothy Geithner, présent sur la scène du crime à New York et dont les empreintes digitales se trouvaient sur l’arme du meurtre; et le renouvellement du mandat de… gulps… Ben Bernanke, qui a essuyé le feu parfaitement justifié de la critique républicaine.
Une petite lueur d’espoir subsiste. Janet Yellen, la vice-présidente récemment désignée de la Fed, vient de déclarer: «Evidemment, les bulles spéculatives doivent être prises au sérieux!» Rajoutant: «Il est probable qu’une politique monétaire accommodante provoque le développement du levier et d’une prise de risque excessive.» Un début prometteur. Naturellement, ces sentiments sont contraires à la politique souvent réitérée d’Alan Greenspan et de son acolyte en chef Ben Bernanke. Peut-être Janet Yellen sera-t-elle capable d’insuffler un peu de bon sens dans le cerveau de son patron.
En encourageant délibérément l’éclosion de bulles spéculatives avant de les négliger complètement et de les laisser exploser, on a créé la pire récession domestique et globale depuis 1932. Cela a généré un chômage structurel incompressible. Avec un Congrès dans l’impasse, il s’agit d’une situation presque impossible, mais qui, comme de coutume, sera associée à l’actuelle administration et qui, par conséquent, coûtera cher aux prochaines élections.
Puisqu’il est d’usage dans notre société de se faire pardonner après avoir causé du chagrin, permettez-moi de vous présenter mes excuses, en lieu et place de la Fed, pour le caractère extraordinairement destructif de sa politique durant ces 15 dernières années. Car, en guise d’excuses, Ben Bernanke a proclamé en janvier 2010 devant l’Association américaine d’économie, que la politique monétaire de la Fed durant la période entre 2000 et 2008 avait été appropriée et qu’elle n’avait pas connu d’échec majeur digne d’être mentionné, comme de manquer complètement la bulle immobilière. Cette obstination face à l’évidence est le fait des tenants de l’efficience des marchés. Et elle est très impolie.
Jeremy Grantham stratège et cofondateur de la firme GMO Investments janv11
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Supprimez les banques centrales!
Un courant de pensée libéral de plus en plus écouté veut mettre fin au monopole des instituts d’émission
Un sondage Bloomberg du début décembre indique que 16% des Américains sont favorables à l’abolition de la Réserve fédérale. Le malaise est réel dans le public. On reproche aux banques centrales de manipuler la monnaie et les taux pour adoucir les cycles économiques et ainsi de créer de fausses et perverses incitations qui aboutissent en crises généralisées. On montre du doigt l’explosion de leur bilan, les achats massifs par la BCE d’obligations gouvernementales des pays européens périphériques. Les craintes d’une perte d’indépendance face aux politiques sont logiquement renforcées.
L’émergence d’un mouvement appelant à la suppression des banques centrales n’est donc pas surprenante. L’idée est reprise aujourd’hui par le Tea Party et l’un de ses leaders, Ron Paul, qui vient de publier «End the Fed». En Suisse, le banquier Karl Reichmuth, lauréat du prix Röpke 2010 du «Liberales Institut», soutient depuis longtemps un système de concurrence dans la production de monnaie. «Faire de l’économie, c’est avoir un choix. C’est vrai partout sauf pour la monnaie», déclarait-il début décembre à Zurich.

La thèse n’est pas nouvelle. L’école autrichienne du libéralisme, sous la conduite de Ludwig von Mises, dans son livre sur la monnaie en 1912, a voulu «privatiser la production de monnaie». En 1977, Hayek déclarait que «si nous voulons une monnaie digne de ce nom, celle-ci ne viendra pas des hommes de l’Etat». Hayek et von Mises veulent redonner au taux d’intérêt le rôle central de signal que joue le prix de l’argent dans une économie.
En abaissant artificiellement les taux, les banques centrales poussent les entreprises à investir. «Le résultat final est que les producteurs auront consommé des ressources pour produire dans l’avenir des biens pour lesquels il n’existait pas de demande durable», écrit Gary Wolfram dans la National Review.
La situation actuelle du système monétaire basé sur les institutions que sont le monopole des banques centrales et le papier-monnaie a été mise en place par les gouvernements depuis plus d’un siècle. Ce sont eux qui en sont les premiers bénéficiaires, selon Jörg Guido Hülsmann (L’éthique de la production de monnaie, 2010). Cette critique aux banques centrales a été largement documentée, de Pierre Leconte (Les faux-monnayeurs, 2008), à Pascal Salin (Revenir au capitalisme pour éviter les crises, 2010).
Retour à un étalon or
La solution «autrichienne», c’est «la banque libre» («free banking»). Le terme est né en 1984 avec l’ouvrage de Lawrence White. La «banque libre» signifie d’abord la fin du monopole des banques centrales sur l’émission de monnaie. Elles pourraient émettre de la monnaie mais en situation de concurrence. L’idée est intellectuellement attractive, mais elle n’est pas gratuite. Elle nécessite l’accélération du remboursement des crédits et du désendettement.
«Le coût du processus serait élevé en termes de croissance», selon Thorsten Polleit, chef économiste à Barclays Capital et auteur réputé de l’école autrichienne. Ce désendettement empêcherait d’ailleurs les gouvernements de continuer à vivre à crédit. La banque libre conduit donc à une réduction de la taille de l’Etat, ce qui se traduit forcément par une levée de boucliers au sein des politiciens.
Une large majorité des défenseurs de cette réforme privilégie un retour à un étalon or. Ce système éliminerait le problème de risque systémique, selon Thorsten Polleit. Les faillites de banques ne conduiraient plus à une réduction de la masse monétaire. Et les contribuables ne seraient plus appelés à la rescousse.
Mais le «free banking» ne passe pas absolument par un retour à l’or. Certes la thèse est extrêmement minoritaire. Mais il y a trois ans, aucun journal grand public n’en aurait parlé. D’ailleurs George Selgin, professeur à l’université de Géorgie, a offert une interview sur ce sujet sur le site internet de la Fed de Richmond…
par Emmanuel Garessus/ le temps janv11
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Le vrai rôle des banques centrales
Il n’y a pas d’autre solution pour sortir de la crise actuelle que de laisser le « grand ajustement » se produire
Ludwig von Mises, l’un des plus clairvoyants économistes du XXe siècle, a écrit dans son principal ouvrage, L’action humaine (gratuitement disponible en français sur le site internet d’Hervé de Quengo):
«Il faudra bien que l’on comprenne que les tentatives d’abaisser artificiellement, par l’extension du crédit, le taux d’intérêt qui se forme librement sur le marché ne peuvent aboutir qu’à des résultats provisoires et que la reprise des affaires, qui intervient au début, sera forcément suivie d’une rechute profonde, laquelle se traduira par une stagnation complète de l’activité industrielle et commerciale… Un boom d’expansion du crédit doit inévitablement conduire à un processus que le discours commun appelle dépression… La dépression n’étant en fait qu’un processus de réajustement, de remise en ligne des activités de production avec l’état réel des données du marché… Toute tentative de substituer des moyens fiduciaires à des biens capitaux inexistants est vouée à l’échec… Il n’y a aucun moyen de soutenir un boom économique résultant d’une expansion à crédit. L’alternative est ou bien d’aboutir à une crise plus tôt par arrêt volontaire de la création monétaire, ou bien plus tard avec l’effondrement de la monnaie qui est en cause.»
Voilà exactement pourquoi les USA et l’Europe sont entrés dans une dépression économique, que tous les Quantitative Easing sont incapables d’enrayer mais ne font qu’aggraver, parce que le «boom économique résultant d’une expansion du crédit» que les banques centrales ont organisé ne pouvait pas finir autrement. Contrairement aux délires keynésiens qui continuent de faire des ravages, la dette est partout et toujours l’antichambre de la faillite.
Et Von Mises d’ajouter: «Le boom ne peut durer qu’aussi longtemps que l’expansion du crédit continue à un rythme toujours accéléré. Le boom prend fin aussitôt que des quantités supplémentaires de moyens fiduciaires ne sont plus jetées sur le marché de l’emprunt. Mais il ne pourrait pas durer éternellement, même si l’inflation et l’expansion du crédit devaient se poursuivre sans fin. Il rencontrerait alors les barrières qui empêchent l’expansion infinie du crédit de circulation. Il conduirait à l’explosion du boom et à l’effondrement du système monétaire tout entier… Si l’expansion du crédit n’est pas arrêtée à temps, le boom se transforme en un boom explosif, la fuite vers les valeurs réelles commence et la valeur de la monnaie s’effondre… Cependant, en règle générale, les banques (centrales) n’ont pas poussé les choses aux extrêmes dans le passé. Elles se sont alarmées à un moment où la catastrophe finale était encore loin… Le résultat de l’expansion du crédit est un appauvrissement général.»
Ayant compris cela, on admettra une fois pour toutes que les banquiers centraux du XXe et du XXIe siècle, les plus grands faux-monnayeurs de l’histoire, pas plus que les Etats, n’ont rigoureusement aucun moyen pour éviter la dépression hyperinflationniste et l’écroulement de la valeur de toutes les monnaies fiduciaires de papier les unes après les autres qui précédera, coïncidera avec, ou suivra la chute des actifs de papier (actions et obligations), basés sur une pyramide de dettes gagées sur le néant qui a commencé à s’écrouler en Occident. Ecroulement qu’aucune mesure keynésienne ne pourra stopper mais seulement repousser pour quelque temps, tout en aggravant son issue finale du fait même des manipulations supplémentaires employées pour retarder l’inéluctable.
Alors qu’il n’y a pas d’autre solution pour sortir de la crise actuelle que de laisser le «grand ajustement» se produire, lequel peut seul conduire, à l’issue d’un pénible processus de «destruction créatrice» (selon la formule de Joseph Schumpeter), à une authentique reprise économique durable parce qu’auto-entretenue par les forces du marché libre. Au lieu de cela, les banquiers centraux US et européens se sont engagés dans la monétisation généralisée des dettes publiques et privées à un niveau jamais atteint dans l’histoire qui conduira à notre ruine collective. Voilà pourquoi acheter des métaux précieux est le seul moyen de se protéger contre la dépression hyperinflationniste que les banques centrales mettent en œuvre.
Par Pierre Leconte Gérant de fortune auprès de Fuchs & Associés Finance (Suisse) SA, gérant du Fuchs & Associates (Long + Short) Precious Metals Investment Fund, président du Forum monétaire de Genève, site: www.forum-monetaire.com janv11
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La Fed peut-elle faire faillite ? par Michel Santi
L’impensable pourrait-il se produire? La vénérable et toute puissante Réserve Fédérale américaine est-elle susceptible de devenir insolvable?
La maîtresse absolue de la politique monétaire US scrutée religieusement par investisseurs, analystes mais également par ses consœurs les autres banques centrales, cette Fed qui s’est révélée championne absolue de la planche à billets à la faveur de la crise financière et qui a raflé pour 2’000 milliards de titres adossés à des hypothèques afin de maintenir sous contrôle les coûts de financement immobiliers peut-elle faire banqueroute?
De fait, cette stratégie très peu orthodoxe lui a permis de réaliser en 2010 des profits estimés à 74.4 milliards de dollars par le Département de la Trésorerie même si l’expansion hyperbolique de son bilan (via ces acquisitions d’obligations en tous genres) l’exposent à des pertes potentielles dont l’ampleur pourrait remettre en cause son indépendance et, bien-sûr, sa crédibilité.
Son Président, Ben Bernanke, minimise certes les risques considérables constitués par des engagements de son établissement qui sont près de dépasser ses actifs. Néanmoins, une remontée des taux d’intérêts dans une conjoncture d’économie à la croissance faible représenterait le scénario quasi cauchemardesque craint tout à la fois par les responsables de la Réserve Fédérale que par le Gouvernement US. A l’évidence, Bernanke tente-t-il de dédramatiser en évoquant (la semaine dernière face au Congrès) le « pire des scénario » – « worst-case scenario » – qui se résumerait, selon lui, à ce que la Trésorerie ne reçoive plus de dividendes de la part de la Fed « pendant quelques années » si « les taux d’intérêts devaient monter de manière significative »… En effet, la Réserve Fédérale distribue-t-elle régulièrement ses surplus à la Trésorerie de son pays. Pour autant, un raffermissement inopportun des taux survenus dans un contexte de croissance molle impliquerait des pertes non négligeables sur son immense portefeuille obligataire qui contraindrait alors l’Etat américain à la recapitaliser!
Ce « bail-out » en bonne et due forme – qui ne doit absolument pas être exclu – serait la « réponse du berger à la bergère » et constituerait dès lors l’ironie suprême car, comme on le sait, c’est la Fed qui s’est employée activement jusque là à sauver les établissements financiers de son pays… Pourtant, la stratégie de sortie des baisses de taux quantitatives qui consisterait non seulement à interrompre ces achats d’obligations mais également à les revendre progressivement pourrait s’avérer désastreuse pour la Fed si elle était concomitante à un raffermissement des taux d’intérêts. Cette conjonction résulterait en fait en une faillite – théorique certes – de la Réserve Fédérale US qui devrait alors encaisser des pertes colossales car, par définition, les prix des obligations baissent quand leur rendement ou quand les taux évoluent en sens inverse!
C’est ainsi que ses avoirs actuels de l’ordre de 1’000 milliards de dollars en Bons du Trésor lui feraient subir une perte de 100 milliards si leur valeur devait se déprécier de 10%.
Par ailleurs, des calculs de Reuters ont récemment conclu que chaque point de base de fluctuation de marché adverse totaliserait une perte de 65 millions de dollars sur son portefeuille en Bons du Trésor à 5 et à 6 ans. Toujours selon les extrapolations de cet analyste de Reuters, la Fed serait aujourd’hui perdante de 2’300 milliards de dollars sur ses seules acquisitions obligataires contractées depuis le 23 Novembre dernier.
Certes, la capacité thaumaturgique de la Fed à imprimer de la monnaie écarte d’emblée le spectre de sa faillite … à condition que le billet vert demeure la monnaie de réserve mondiale, que ses Bons du Trésor fassent toujours l’objet d’une certaine ferveur de la part de l’épargne mondiale et que l’inflation soit plus ou moins maîtrisée…
http://www.gestionsuisse.com/2011/la-fed-peut-elle-faire-faillite/#more-1914
Michel Santi gestionsuisse.com 16/1/2011
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