Plombées par l’immobiler les Banques espagnoles affichent un niveau record des créances douteuses
Après la Grèce et le Portugal, re-voici venu le tour de l’Espagne … Selon des chiffres publiés lundi par la Banque d’Espagne, le taux de créances douteuses des établissements financiers ibériques, indicateur permettant d’appréhender leur vulnérabilité, a de nouveau progressé en février dernier. Sa valeur affiche ainsi désormais un niveau inégalé depuis septembre 1995 à 6,19%.
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Les créances douteuses des établissements bancaires espagnoles s’élevaient ainsi à 112,458 milliards d’euros en février, correspondant à 6,19% du total de créances contre 6,06% en janvier et 5,81% en décembre. Précisons que ce taux n’était que de 4,98% en octobre 2009, mais l’année 2010 lui aura été fatale. Ainsi, en août 2010, le taux de créances douteuses avait connu une forte détérioration, s’affichant avec 5,61% à plus haut depuis février 1996.
En octobre 2010, l’agence de notation Moody’s avait estimé pour sa part que les saisies massives d’hypothèques opérées par les banques espagnoles aggravaient les pertes des établissements. Pour appuyer ses propos, Moody’s avait par ailleurs indiqué que le nombre de saisies d’hypothèques présentées devant la justice avait augmenté de 126% en 2008 par rapport à l’année précédente, et de 59% en 2009. «Moody’s pense que le nombre élevé de saisies d’hypothèques qui ont été présentées à la justice espagnole depuis 2007 sous-estime le nombre de propriétés dont des entités financières espagnoles ont repris possession», avait déclaré à cette date le vice-président de Moody’s, Alberto Barbachano, auteur de ce rapport. Chaque saisie d’hypothèque pourrait concerner plusieurs biens immobiliers, indiquait par ailleurs M. Barbachano, lequel observait également que les prêteurs d’hypothèques étaient devenus plus à même d’accepter la propriété du débiteur comme moyen de paiement.
Ce nouveau chiffre est publié alors que la Banque d’Espagne a approuvé jeudi des plans de recapitalisation pour les caisses d’épargne en difficultés, qui prévoient, selon la presse espagnole, l’intervention du fonds public Frob pour un montant d’au moins 6 milliards d’euros. Les plans de recapitalisation ont été présentés par les 13 établissements financiers, dont neuf caisses d’épargne, pour satisfaire aux critères plus stricts de solidité financière imposés par le gouvernement. La Banque d’Espagne n’a pas détaillé les plans des caisses, ne faisant que mentionner la demande d’investissement public de 2,8 mds EUR faite par la caisse la plus mal en point, Caja Mediterraneo (CAM). D’après le journal Expansion, les établissements secourus seront CAM, Catalunya Caixa (pour 1,718 milliard d’euros), Novacaixagalicia (de 1,622 à 1,972 milliard) et éventuellement Unnim en cas d’échec d’un projet de fusion (pour 568 millions).
Les caisses d’épargne, considérées comme le maillon faible du système financier en raison d’une forte exposition au secteur immobilier sinistré depuis l’éclatement de la bulle, ont jusqu’au 30 septembre pour respecter les nouveaux minimums de solvabilité requis. Après une première vague de fusions et restructurations en 2010, Madrid a décidé en début d’année d’accentuer l’assainissement de ce secteur, dans l’espoir de renforcer la confiance des marchés envers la solidité financière du pays
La situation des établissements bancaires espagnols reste une source d’inquiétudes pour les investisseurs internationaux, car en dehors des conséquences de l’éclatement de la bulle immobilière fin 2008, la récession qu’a traversé le pays et le renchérissement du coût du crédit ces derniers mois s’avèrent nettement préoccupants.
Sources : AFP, AWP/Elisabeth Studer Le Blog Finance
EN COMPLEMENT : Banques : pourquoi l’Espagne signe la fin de la récréation
La récréation est terminée pour les Espagnols. C’est même le ministre des Finances qui a sifflé la fin de la récré. Je ne parle pas du boom immobilier : il suffit de se rendre à la Costa Del Sol pour voir des carcasses d’immeubles non terminés et donc vides d’habitants. On évoque souvent le chiffre d’un million de logements vides sur la côte espagnole. Je ne parle pas non plus du taux de chômage de 20 % en moyenne pour le pays. Là encore, il suffit de parler avec les habitants pour prendre l’ampleur de cette crise.
Non, ce à quoi, je fais allusion, c’est la rémunération des livrets d’épargne en Espagne. Comme les banques espagnoles ont du mal à se refinancer sur les marchés financiers, elles se livrent une bataille féroce pour attirer chez elles les déposants. Ces banques proposent ainsi des taux d’intérêt très alléchants, flirtant le plus souvent avec les 4% !
Le pire, c’est que, parmi les banques qui offrent les meilleurs taux, certaines n’ont survécu que grâce à l’argent public. Autrement dit, cette guerre des dépôts peut s’apparenter à une sorte de «suicide collectif». En effet, la plupart de ces banques sont mal en point : offrir des taux plus élevés que ceux du marché rogne encore plus sur leurs marges. En clair, il s’agit vraiment d’une guerre des taux suicidaire.
C’est pourquoi le ministre des Finance et la banque centrale d’Espagne ont sifflé la fin de la récréation. Pour le faire, elles imposent aux banques qui veulent offrir un taux d’intérêt supérieur au marché à mettre encore plus d’argent dans un fonds de garantie. Une manière de freiner cette guerre des dépôts.
Lorsqu’on sait, par exemple, que le taux hypothécaire moyen est vendu à 2,76 %, ces mêmes banques ne peuvent se permettre de rémunérer en même temps les dépôts avec du 4 %, sauf, bien entendu, si elles s’arrangent pour vendre à leurs clients d’autres produits bancaires plus lucratifs.
En attendant, la situation dégradée des banques espagnoles a suscité l’intérêt de la Chine. Des pourparlers sont en cours avec le gouvernement espagnol pour voir comment l’Empire du milieu pourrait investir ses réserves de change dans le capital des banques espagnoles. Pour le moment rien n’a filtré de ces négociations. Normal : vendre une partie de l’épargne espagnole à une puissance étrangère n’a rien de glorieux.
Amid Faljaoui, à Malaga/trends avril11
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