De Harley-Davidson à Sony, la crise japonaise touche tous les secteurs
La catastrophe japonaise n’affecte de loin pas que le high-tech. Les effets devraient se faire sentir jusqu’à la fin de l’année

De Milwaukee à Dallas, en passant par Londres et Tokyo, les conséquences des catastrophes japonaises s’étendent jour après jour. Immédiatement après le 11 mars, les prix de certains types de mémoires électroniques s’étaient envolés. Désormais, la fermeture de dizaines d’usines au nord-est de l’Archipel commence à avoir des répercussions sur d’autres secteurs que celui du multimédia. Les présentations des résultats du premier trimestre sont l’occasion, pour plusieurs sociétés, d’estimer l’impact de ces catastrophes sur leurs activités.
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A Milwaukee, Harley-Davidson a fait ses comptes: la firme ne vendra cette année plus 221 000 à 228 000 motos comme prévu, mais 215 000 à 228 000, a-t-elle averti dans la nuit de mardi à mercredi. En cause, le risque de manquer, durant le trimestre en cours, de certains équipements pour l’affichage de radios sur écran. Du coup, Harley-Davidson tente actuellement de contacter d’autres fournisseurs hors du Japon, mais «chaque fois que vous changez d’équipementiers ou que vous avez de nouvelles pièces, il faut beaucoup de temps pour les tester», a averti Keith Wandell, directeur de la société. Conséquence, la marge brute, prévue avant la catastrophe entre 34 et 35%, se situera plutôt entre 33,5 et 35% cette année, a averti la firme de Milwaukee.
Le secteur automobile souffre plus fortement des événements japonais. Selon Citigroup, Toyota devrait ainsi voir son bénéfice opérationnel réduit à néant lors de son exercice annuel 2011-2012, alors que le chiffre de 10,1 milliards de dollars était prévu avant le 11 mars. Si Honda subira de son côté une baisse de deux tiers de son bénéfice opérationnel, à 3,3 milliards de dollars, les chiffres communiqués mercredi par le numéro un mondial sont éloquents: Toyota s’attend à ne pas pouvoir produire 500 000 voitures en 2011, alors qu’au total un volume de 7,7 millions de véhicules était prévu. Les usines japonaises ne sont de loin pas les seules affectées: du 21 avril au 3 juin, le constructeur devra réduire de 30 à 50% sa production en Chine, alors que des arrêts partiels sont aussi prévus en Angleterre, en France, en Turquie, en Pologne et aux Etats-Unis. Toyota affirme avoir des problèmes pour se procurer au total 150 pièces différentes, des composants électroniques à certaines matières plastiques.
De son côté, Fiat prévoit de devoir réduire sa production en Europe de 50 000 à 100 000 unités en 2011.
Sans surprise, ce sont aussi les fabricants de téléphones qui sont affectés par certaines pénuries. Ainsi, Sony Ericsson, basé à Londres, s’attend à un trimestre en cours difficile. «L’effet a été marginal sur le premier trimestre, mais il sera plus important lors du second», expliquait mardi Bert Nordberg, directeur de la coentreprise. «Il y a une pénurie de composants concernant les batteries, les écrans et certaines cartes de circuits imprimés», a-t-il précisé lors de la présentation des résultats trimestriels. Trois modèles phares de smartphones seront produits en plus petite quantité.
Basé à Dallas, Texas Instrument affirmait lundi qu’il avait de la peine à se procurer des «wafers» (galettes de semi-conducteurs) et que plusieurs de ses clients japonais n’avaient pas encore rouvert leurs usines. Apple, qui publie ses résultats trimestriels dans la nuit de mercredi à jeudi, devrait donner des indications sur ses éventuels problèmes.
De son côté, Toshiba tente de rebondir. La firme japonaise a présenté mercredi des téléviseurs équipés de batteries, capables de fonctionner durant trois heures lors de coupures de courant. Toshiba a aussi promis le lancement de modèles moins gourmands en énergie.
Par Anouch Seydtaghia/le temps avril11
EN COMPLEMENT : Le séisme du 11 mars dernier a fortement touché les fournisseurs de pièces détachées dans le nord-est de l’archipel. Conséquence: la production des principaux constructeurs d’automobiles japonais a chuté de plus de moitié en mars, selon des statistiques publiées lundi
En mars, le premier constructeur mondial, Toyota, a sorti de ses chaînes 129 491 véhicules au Japon, soit 62,7% de moins que l’an passé à la même époque. La production de son concurrent Nissan a dans le même temps accusé un plongeon de 52,4% dans l’archipel, à 47 590 unités, et Honda n’a assemblé que 34 754 véhicules au Japon, soit 62,9% de véhicules de moins sur un an.
Les constructeurs d’automobiles japonais souffrent d’une pénurie de pièces détachées qui les oblige à ralentir la cadence ou à stopper leurs chaînes dans l’ensemble de l’archipel, en raison du séisme de magnitude 9 et du tsunami géant du 11 mars qui ont endommagé ou détruit les usines de leurs fournisseurs dans la région du Tohoku (nord-est).
Les fabricants subissent les restrictions de courant dans le nord-est et dans la région de la mégapole tokyoïte, à cause des dégâts subis par les centrales nucléaires et thermiques. Ils sont aussi pénalisés par les perturbations prolongées des transports consécutives à la catastrophe.
Les autres firmes d’automobiles nippones ont aussi été touchées en mars, Mitsubishi Motors, Suzuki, Mazda et Fuji Heavy Industries (voitures Subaru) voyant leur production fondre d’un quart aux deux tiers.
Cadences réduites
La production à l’étranger des constructeurs japonais a évolué de façon variable mais les conséquences de la catastrophe sur l’assemblage des véhicules hors du Japon risquent de se faire sentir en avril: plusieurs constructeurs ont décidé de réduire les cadences ou de fermer certaines usines en Amérique, en Europe ou en Chine pendant plusieurs jours, faute de pièces détachées en provenance du Japon.
Dans l’archipel, la production est en outre loin d’avoir repris à un rythme normal, Toyota, Honda et Nissan ne produisant toujours fin avril que 50% des volumes prévus avant le séisme.
Les constructeurs se sont d’autant plus vite retrouvés à court de composants qu’ils fonctionnent d’habitude en flux tendu, limitant au minimum leur stock de pièces détachées. Le retour à un rythme normal de production nécessitera des semaines, car les ateliers de nombre d’équipementiers du Tohoku ont été complètement détruits par la catastrophe. Changer de fournisseur est en outre ardu pour un constructeur, compte tenu de la complexité que représentent la conception, le test et la production de chaque composant.
source ats avril11