La révolte des esclaves Par Beat Kappeler
Comparaison insolite entre la situation des esclaves dans les Caraïbes à l’époque moderne, et celle des jeunes chômeurs du sud de l’Europe
D’abord, les différences sociales ne correspondent pas à l’appartenance à une race précise. Ensuite, le statut des citoyens est républicain. En politique, ils ont les mêmes droits, les différences ne concernent que leur rémunération sur les marchés sur lesquels ils œuvrent. Et ces marchés sont, en principe, ouverts à tous, les couches sociales n’ont pas l’avenir bouché. La mobilité vers le haut et vers le bas est possible. Et finalement, les révoltés qui utiliseraient la force en Occident feraient la même expérience que faisaient les Noirs en Jamaïque après leur révolte victorieuse: il fallait bien travailler aux champs comme avant. Sans l’exportation du sucre vers l’Angleterre, pas de revenu, pas d’outils, pas de vêtements, point d’argent.
Les forces productives de notre société sont encore bien plus imbriquées que jadis. Les gens le savent. Les rôles sont rémunérés différemment, mais ils sont nécessaires: une usine automobile se base sur ses vendeurs, sur ses agents généraux, souvent riches, sur les ingénieurs, sur les financiers, les assureurs, les chaînes de transport, sur la connaissance des sources d’approvisionnement et d’écoulement. C’est pourquoi les laissés-pour-compte ne demandent qu’une chose, que ces chaînons du système fonctionnent mieux, rapportent mieux, embauchent plus. Ils demandent l’intégration dans cette société, non pas sa destruction. Même les dictatures du XXe siècle, en rupture apparente avec tout, ont été «productivistes», ceux de gauche comme ceux de droite promettaient d’actionner mieux les rouages économiques et essayaient de se légitimer ainsi – avec l’insuccès que l’on sait.
Si cependant l’avenir économique paraît bouché à un nombre croissant de citoyens, en Europe du Sud, bientôt, les perceptions pourraient changer. Les programmes d’austérité ne ramèneront pas de solutions rapides, ils dureront une décennie ou plus. Presque une génération de jeunes se sentira sacrifiée, celle des retraités aussi, parce qu’ils perdront une partie de leurs droits. Les réformes visant à redresser la croissance sont douloureuses, avec des effets tardant à se concrétiser, et elles maintiennent l’illusion du rattrapage vers la productivité allemande ou chinoise. Au mieux, l’écart ne se creusera pas plus, et voilà tout. Car l’Allemagne, la Suisse, la Chine ne s’arrêteront pas, et ils ont des rouages de société qui sont bien huilés, à l’opposé des pays du sud européen (et aussi de l’Afrique du Nord).
Ces citoyens autour de la Méditerranée ne feront pas la révolte économique en détruisant les usines et les banques, comme les esclaves détruisaient les plantations. Mais ils voteront autrement, en tant que citoyens républicains. Le danger de décomposition européenne, ou au moins de l’euro, vient dorénavant de la politique, et pas seulement des circuits financiers. Je pense que des partis contestataires surgiront et couperont ce lien monétaire. On verra bien. Pour voir comment une société se fait et se défait (ou presque), le livre de Matthew Parker est très instructif: The Sugar Barons. Family, Corruption, Empire and War (Walker & Co, non traduit). Il montre des sociétés à l’état brut, dans leur naissance par le pouvoir et la force, et dans leur rechute possible dans la force brute et aveugle.
source Le Temps janv12
L’avantage (sic) de l’esclavage, est dans le fait que l’on accorde une valeur ajoutée à l’individu.
Dame, il est “un capital” et à ce titre, il faut le protéger, le soigner et … le faire se reproduire.
Le chômeur ? Ben aucun intérêt, ÇA S’REVENDS MÊME PAS ! Pfiouuuuuuuuu !!!