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Trappe à Dettes : La dette allemande sera gonflée par les actifs de la Banque HRE

La dette allemande sera gonflée par les actifs de la Banque  HRE

 L’Allemagne a annoncé mercredi qu’elle transfèrerait jusqu’à 210 milliards d’euros d’actifs de l’établissement de crédit nationalisé Hypo Real Estate (HRE)  dans une structure de cantonnement, une décision qui risque de gonfler mécaniquement la dette publique, sans toutefois pénaliser Berlin sur les marchés selon les analystes.

EN COULISSEHypo Real Estate: scandale programmé

La banque allemande Hypo Real Estate, nationalisée en 2009 pour éviter sa faillite, et qui a bénéficié depuis lors de 142 milliards d’euros de garanties publiques, a versé 25 millions d’euros de bonus à des cadres, indique Der Spiegel parrue ce lundi. L’hebdomadaire affirme que ces bonus versés au titre de l’exercice 2009, achevé sur une perte nette de 2,2 milliards d’euros pour l’établissement financier, avaient été réclamés par les cadres qui menaçaient d’une action en justice

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Le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, a salué cette décision de transfert prise par le SoFFin, le fonds national de renflouement des banques.

“C’est une étape fondamentale pour la restructuration de la banque et pour assurer la stabilité financière de l’Allemagne”, a-t-il déclaré dans un communiqué.

Le ministère a expliqué qu’un tel transfert pourrait provoquer une hausse technique de 7,5 à 8,5 points de pourcentage du rapport dette/PIB de l’Allemagne, mais il a ajouté que cet effet purement statistique n’aurait aucune conséquence pour le service de la dette.

Berlin projette un rapport dette/PIB de 78% cette année et de 80% en 2011, sans prendre en compte les actifs de HRE.

Mais d’un point de vue économique, cette transaction est neutre, affirme Thorsten Polleit, économiste de Barclay’s Capital. “Tout le passif de HRE était garanti par l’Etat fédéral; en ce sens, c’était déjà un passif pour l’Allemagne”, dit-il.

HRE, établissement spécialisé dans le crédit immobilier, est la principale victime de la crise financière en Allemagne. Il n’a échappé à la faillite après la chute de Lehman Brothers en 2008 que grâce à un renflouement de plus de 100 milliards d’euros constitué pour une bonne part de garanties de l’Etat.

HRE est actuellement en phase de restructuration et fait usage de la “bad bank” mise sur pied par Berlin, une structure de défaisance pour les actifs pourris des banques allemandes.

Klaus Wiener, directeur général d’AMB Generali Investments, ne pense pas ce que transfert aura des répercussions graves sur les notes de crédit de l’Allemagne.

“Cela dépend du prix qui a été payé pour les actifs; cela pourrait même se traduire par un petit bénéfice pour l’Etat en bout de course”, dit-il. “Et ce même si cela augmente le ratio du déficit cette année”.

source reuters sep10

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Le système est encore fragile. Deux ans après le choc de la faillite de la banque américaine Lehman Brothers, le paysage bancaire allemand, très morcelé, est loin d’avoir terminé sa mue. Les effets conjugués de la reprise économique et des accords Bâle III devraient contribuer à l’accélérer fortement. Et, pendant que l’Etat fédéral joue les pompiers pour secourir les établissements convalescents, un mouvement de fusion, côté public (banques régionales), et d’acquisition, côté privé (Deutsche Bank-Postbank) est amorcé.

 La critique récurrente de certains experts libéraux et étrangers, qui jugent le modèle bancaire allemand trop décentralisé, voire dépassé, a-t-elle fini par porter ? Non, répond Henrik Uterwedde, économiste à l’institut franco-allemand de Ludwigsburg. “(Il) est considéré comme ayant fait ses preuves”, explique-t-il.

Même après le choc de la crise, qui a ébranlé le pays, il y a peu de chances que l’Allemagne remette profondément en cause son système dit des “trois piliers”, qui fait coexister un secteur privé, qui ne contrôle que 42 % du marché, un secteur public très réglementé, composé du réseau des caisses d’épargne et des banques régionales (45 % du marché), et des établissements coopératifs et mutualistes (13 %). Ce système, historique et considéré comme adapté au modèle économique allemand fondé sur le mittelstand – l’entreprise de taille moyenne -, explique pourquoi, outre-Rhin, les banques sont peu rentables et peu capitalisées par rapport aux autres établissements européens.

Une chose est sûre : rien ne sera plus pareil pour les banques régionales, ces fameuses Landesbanken, qui payent encore cher le prix de leur aventurisme financier.

Renfloués à coups de dizaines de milliards d’euros par le contribuable, ces établissements, au nombre de huit, ont perdu de leur crédibilité pour leur goût immodéré des placements risqués à l’étranger et la faiblesse de leurs mécanismes de contrôle. La question de leur utilité, qui avait déjà été soulevée avant la crise, n’est aujourd’hui plus un débat d’experts. “Les banques régionales n’ont pas de modèle économique viable à long terme”, explique Stefan Stein, directeur de l’institut finance et crédit de l’université de la Ruhr.

Dimanche 19 septembre, le ministre de l’économie, Rainer Brüderle, a enfoncé le clou et suggéré de réduire leur nombre à deux, au risque de froisser leurs propriétaires, les caisses d’épargne, et surtout, les fiers Etats régionaux.

Le vent a tourné

Certains établissements ont senti le vent tourner. Avant le sommet qui doit réunir, mardi 28 septembre, les responsables des banques régionales autour du ministre des finances, Wolfgang Schaüble, deux d’en elles, la WestLB (Düsseldorf) et la BayernLB (Munich), ont annoncé vouloir fusionner avant la fin de l’année. Une façon de garder l’initiative pour ces deux banques qui ont amassé le plus d’actifs toxiques. Bruxelles et Berlin ont déjà exprimé leurs réticences quant à la création d’un établissement, qui deviendrait la troisième banque du pays, à partir de ces deux grands corps malades.

Côté privé, le processus de concentration, quoique plus rapide, n’est pas exempt de difficultés. Doter l’Allemagne d’un champion bancaire international, c’est bien l’ambition de Joseph Ackermann, patron de la Deutsche Bank, qui a annoncé, le 13 septembre, vouloir lancer une offre publique d’achat (OPA) sur les 30,6 % de capital flottant de la banque postale, dont elle détient déjà 30 %, acquis en 2008.

Pour la Deutsche Bank, l’objectif de cette opération est d’augmenter ses activités de banque de détail – la banque postale est le premier établissement coté outre-Rhin sur ce plan -, et d’être moins dépendante des fluctuations des marchés. Pour financer l’OPA, elle a effectué une augmentation de capital record de 10,2 milliards d’euros, aussitôt sanctionnée par les marchés. A l’ouverture de la Bourse de Francfort, mercredi, le titre Deutsche Bank cédait 8,35 %, à 41,02 euros. Il avait déjà perdu 4,54 % la veille, après que la banque a averti d’une perte au troisième trimestre.

Quant aux autres banques privées, elles sont loin d’être sorties d’affaire. Si l’Etat fédéral espère pouvoir sortir du capital de la Commerzbank, qui appartient à 25 % au contribuable, d’ici trois à quatre ans, selon les prévisions du ministre de l’économie, il continue à voler au secours de ses établissements en difficulté. Le fonds fédéral de soutien au secteur bancaire (Soffin), a annoncé, mercredi, le versement de 2,08 milliards d’euros supplémentaires de capitaux frais à Hypo Real Estate (HRE), banque nationalisée en 2009 pour éviter la faillite. Cette nouvelle injection de capitaux permettra notamment de financer la “bad bank” créée par HRE pour “parquer” ses actifs à risques.

Cécile Boutelet le monde sep10

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