Affaire Strauss-Kahn : Un champ de ruines derrière DSK
La presse commente très largement l’affaire Strauss-Kahn, qui a secoué tout le monde ce week-end. Le patron du FMI, à la réputation de séducteur invétéré, va devoir se défendre s’il veut contredire ceux qui ont déjà déclaré sa mort politique. Et ceux qui évoquent, inévitablement, un complot pour éliminer l’adversaire principal de Sarkozy à la présidentielle de 2012¨
Revue de Presse…
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Bien sûr, il nie, plaide non coupable. Et a évidemment droit à la présomption d’innocence. Reste que, de l’incrédulité à la consternation, la Toile – plus de 2700 articles rien qu’en français, au petit matin – et la presse sont sous le choc après l’arrestation du directeur général du FMI Dominique Strauss-Kahn pour agression sexuelle et tentative de viol. Elle s’interroge, dans la foulée, sur les conséquences de ce scandale pour le PS et l’élection présidentielle de 2012, où il partait favori bien que candidat non encore déclaré.
Alors, les métaphores cinématographiques abondent. La Nouvelle République du Centre-Ouest dit par exemple que l’affaire constitue le scénario idéal «d’une très mauvaise série B», tandis que Le Maine-Libre se demande si DSK est «tombé dans un piège, digne d’un improbable thriller hollywoodien». Pour Le Courrier picard, il s’agit aussi d’un «polar de mauvais aloi» qui a abouti au «crash politique» de DSK. Il «savait qu’il était lui-même son plus dangereux ennemi. DSK out, restent un champ de ruines et la primaire, plus que jamais nécessaire», écrit Libération dans son éditorial, avant les 10 pages que le quotidien consacre à «cette scène inédite» touchant un homme politique de haut rang.
Le blog «Great America» du même journal le qualifie de womanizer glouton. Vu des Etats-Unis, l’article cite notamment un confrère du New Yorker et son «billet bien senti»: ces Français, Polanski, DSK, bien tous les mêmes… De même que le Wall Street Journal, qui se gausse allègrement de l’allégeance des médias français vis-à-vis de leurs autorités. Mais cette fois, conclut-il, ils «n’auront plus la possibilité de fermer les yeux». Pour Le Figaro, qu’on ne soupçonnera pas de sympathie pour les socialistes, il est évident que «Dominique Strauss-Kahn ne sera pas le prochain président de la République française». «La gauche voit disparaître le scénario annoncé par les instituts de sondage, qui prédisaient pour DSK une quasi-élection de maréchal au printemps 2012.»
«Le pire, car il faut bien y penser», enchaîne Le Matin de Lausanne, ce serait «un viol bel et bien commis dans une suite de luxe par l’un des dirigeants les plus en vue de la planète. Et pas n’importe lequel: un homme dont on évoque souvent la réputation de dragueur invétéré et de tombeur incontrôlable. Alors, si le DSK d’aujourd’hui est celui de sa propre caricature, un politicien maladivement obsédé par le sexe, un patron qui, il y a deux ans, devait s’excuser d’avoir entretenu des relations avec une subordonnée, si tout cela est vrai, bref, s’il est bien cet homme, Dominique Strauss-Kahn est alors un grand malade. Un malade dont on riait encore en parlant de ses costards et de sa Porsche. Un homme dont on pourrait douter aujourd’hui.»
La Tribune de Genève, Le Soir de Bruxelles et Presse Océan se posent la même question, prélude à une dangereuse théorie du complot: «A qui profite le scandale?» Réponse: «Le principal bénéficiaire de l’élimination probable de DSK s’appelle Nicolas Sarkozy. Le président voit son principal adversaire lesté d’une belle casserole, le PS dans l’embarras et une opinion publique appelée à faire la différence entre un homme de gauche suspecté d’agression sexuelle et… un candidat de droite, futur père de famille présumé, dans le cadre des liens sacrés du mariage», selon le journaliste français. Mais selon le quotidien genevois, «pour autant, il ne roule pas sur un boulevard. Tout d’abord, c’est lui qui a fait nommer DSK à la tête du FMI. L’actuel président porte donc sa part de responsabilité dans cette humiliation que subit la France sur la scène internationale.» «A gauche et à l’extrême droite, pense le journal belge, l’inculpation de Dominique Strauss-Kahn et son possible retrait de la scène politique arrangent beaucoup de monde. Nicolas Sarkozy et Martine Aubry, quant à eux, y ont beaucoup à perdre.»
«On ne fait pas de «peopolitique» sans casser des œufs, ose pour sa part Le Nouvelliste valaisan, qui voit dans tout cela une certaine exemplarité dont l’Helvétie ferait bien de s’inspirer: «Bouquins à sa gloire, mises en scène avec son épouse Anne Sinclair, interviews de complaisance, le patron du FMI paie aujourd’hui la note de l’ultra-notoriété qu’il a voulue et entretenue. D’autres, plus proches de nous, ont adopté la même stratégie et fait le choix de s’exposer dans l’intimité, fragilisant ainsi de facto l’éthique journalistique qui les a jusqu’ici mis à l’abri de publications ravageuses. Lentement, sûrement, des barrières tomberont donc, jusqu’à mettre en difficulté, un jour, bientôt, des DSK suisses.»
Pour Le Courrier de l’Ouest également, «le faux pas» – la même expression, plus nuancée, est utilisée par La Liberté de Fribourg – profite à Nicolas Sarkozy. Mais cette opinion est contestée par La République des Pyrénées, pour laquelle «la mise au ban d’infamie de DSK n’est pas, à ce jour, une excellente nouvelle pour un président français […]. Parce c’est encore un allié utile sur le terrain de la régulation mondiale.» «Dans le camp de Sarkozy, personne ne se réjouit publiquement d’une affaire atteignant aussi l’image de la France», note aussi La Charente libre. «Mais en coulisses, la jubilation n’est pas loin de voir ainsi définitivement écarté le principal concurrent d’un Nicolas Sarkozy qui retrouve quelques raisons d’espérer en sa réélection.» Certains journaux, comme Les Dernières Nouvelles d’Alsace, pour lesquelles la thèse d’un complot ourdi par l’UMP «se répand», estiment que cette «élimination» «n’est ni une mauvaise affaire pour le PS, ni une bonne pour Nicolas Sarkozy. «Il n’y a sans doute rien à regretter de voir DSK s’effacer d’un paysage qui n’a pas fini de se transformer. Cet homme brillant était assurément dangereux pour son camp», selon elles.
Courrier international a fait sa propre revue de presse, qu’il titre: «Strauss-Kahn, c’est fini!» Dans les journaux qu’il cite, on peut notamment lire le portrait du «pervers» brossé par les inimitables New York Post et New York Daily News. «Révélé le 14 mai au soir par le New York Times, le scandale fait la une de tous les sites de presse» du lendemain. Son arrestation «me frappe comme une information à la fois étonnante – et pas totalement surprenante», réagit sur son blog un éditorialiste du Financial Times. «Que les parties génitales étaient son point faible était de notoriété publique», attaque la Süddeutsche Zeitung. Le tabloïd allemand Bild parle déjà de DSK au passé. Et le Handelsblatt dit qu’il «plonge le FMI dans une grave crise», alors que le Guardian, lui, «en est déjà à envisager l’après-DSK»: «Qui pourrait lui succéder au FMI?» s’interroge-t-il, misant sur un candidat venant d’un pays en développement.
Bref, à Washington comme à Paris, l’avenir politique du Français semble bien compromis. D’ailleurs, «la monnaie européenne était en baisse après l’arrestation du directeur général du FMI, au moment où la Grèce attend une nouvelle aide internationale», constate le site Challenges.fr. «No he Kahn’t», titrent enfin de concert The Economist à Londres et El País à Madrid, en référence à des t-shirts à l’effigie de DSK qui commençaient à se vendre des deux côtés de l’Atlantique, avec le slogan «Yes, he Kahn» – jeu de mots sur l’ancien slogan de campagne de Barack Obama «Yes, we can». Rideau?
source AFP mai11
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Des extraits édifiants du rapport du NYPD
Le «pure player» Atlantico publie sur son site un texte présenté comme un extrait en exclusivité des premiers rapports du NYPD.
«A 15h29, une employée de l’Hôtel Sofitel, de sexe féminin, de race noire, âgée de 33 ans, avise la police qu’elle a été victime d’une agression sexuelle. L’agression se serait déroulée dans la chambre 2806 de l’hôtel situé 45 ouest sur la 44e Rue. Lorsque la femme est entrée dans la chambre, l’occupant de la chambre, Dominique Strauss-Kahn, homme blanc de 62 ans, est sorti nu de la salle de bains, a maintenu la femme sur le lit, et a inséré son pénis dans sa bouche. L’homme a ensuite réglé l’hôtel et a pris un avion à JFK, là ou le Port Autority Police Department l’a extrait de l’appareil. Le mis en cause est en garde à vue au Special Victims Units. Le mis en cause est le président (sic) du FMI et allait se présenter comme «Premier ministre» (sic) en France. Le mis en cause n’a pas de statut diplomatique et a déjà été impliqué dans des scandales sexuels antérieurement.»
Le même rapport mentionne que «des griffures ont été constatées sur le torse de l’auteur présumé. Ce dernier a donné son accord pour que des examens complémentaires soient réalisés», toujours selon le texte présenté par Atlantico.
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Ce n’est pas la première fois que DSK agressait les employées du Sofitel»
Le blog du député UMP de Paris Bernard Debré est impitoyable pour DSK, tout comme son interview à lire dans L’Express, dans lequel le médecin pourfendeur du laboratoire Servier il y a quelques mois affirme que le directeur général du FMI avait l’habitude de s’en prendre aux employées de l’hôtel, mais que la direction de l’hôtel gardait le silence sur ses agissements.
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Le seule membre de gouvernement à avoir déchiré ce voile pudique est la ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. Sur Canal Plus, elle a insisté sur la gravité des faits reprochés à DSK: «Il faut redire que les faits sont très graves. En France, on a tendance à traiter ça un peu à la légère. Je fais confiance à la justice américaine. […] C’est tellement français de voir des complots partout. C’est quelque chose, je crois, qui est dans notre culture», a-t-elle déclaré.Pour elle, «en plus de la victime présumée, la femme de chambre, il y a une victime avérée, c’est la France.»
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Nouvelles accusations contre DSK, concernant des événements de 2002
Tristane Banon, une écrivaine et journaliste qui affirme avoir été agressée sexuellement par Dominique Strauss-Kahn en 2002 et n’avait rien dit à l’époque par crainte, mais qui a déjà raconté anonymement son histoire, envisage désormais de porter plainte. Lire ici
Lire aussi le point de vue de Christophe Deloire, le directeur du Centre de formation des journalistes de Paris, et coauteur de «Sexus politicus», ici sur le site du Monde. (Rubrique Web)
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Une juge ordonne l’incarcération de DSK
Une juge new-yorkaise a ordonné l’incarcération de Dominique Strauss-Kahn et refusé de le libérer moyennant une caution d’un million de dollars, deux jours après son arrestation dans une affaire de crime sexuel contre une femme de chambre dans un hôtel de Manhattan.
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