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Iniquité fiscale Par Marie Hélène Miauton

Iniquité fiscale Par Marie Hélène Miauton

Abolir les forfaits fiscaux? Une mauvaise idée, selon Marie-Hélène Miauton

L’initiative «Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires» sera soumise aux Suisses le 30 novembre. Le Conseil des Etats s’est prononcé contre ce texte à une large majorité ainsi que le Conseil national (au départ, 84% des élus jugeaient cette initiative erronée et 78% au vote final). Cela n’a pas empêché Christian Levrat, président du PS, d’affirmer: «Cette situation n’est pas satisfaisante. Elle ne répond pas aux exigences d’équité face à l’impôt sur lesquelles repose notre système fiscal.» C’est vrai, il a raison!

Mais l’équité dépend du point de vue selon lequel on se place. Ainsi, pour les 10% de contribuables qui, souvent, travaillent dur, prennent des risques et supportent de grandes responsabilités, dont les préoccupations professionnelles ne s’arrêtent ni le soir à 18 heures ni le week-end, est-ce vraiment équitable de supporter à eux seuls 80% de la charge fiscale? Non, évidemment! Et tous ceux qui triment sans grand plaisir, chaque jour que Dieu fait, pour gagner leur pain et nourrir leurs enfants, sans bénéficier d’aides sociales ni de subventions, leur situation est-elle équitable face aux 40% de contribuables vaudois qui ne paient pas d’impôts du tout, et aux 33% de Genevois dans le même cas? Et pour des entreprises qui se battent sans cesse contre la concurrence internationale, sans délocaliser et sans baisser les bras, est-ce équitable de voir de nouvelles venues obtenir des conditions plus favorables au titre de la promotion économique? Et quand l’Etat de Vaud impose les successions alors que l’argent patiemment amassé a déjà été fiscalisé, n’est-ce pas une double imposition inique?

Les exemples abondent où les exigences d’équité face à l’impôt que revendiquent le PS ne sont pas remplies, loin s’en faut. Mais, dans tous ces cas, les «lésés» jouent le jeu pour préserver une forme d’intérêt supérieur qui permet de faire tourner le pays: soutenir les plus pauvres, même si certains auraient tout pour s’en sortir… Attirer des entreprises, même si certaines en profitent… Seul le PS ne veut pas admettre que les riches étrangers imposés sur la dépense apportent une manne qui permet de limiter les taux appliqués à tous les autres contribuables suisses. Cet entêtement idéologique s’oppose à un pragmatisme qui ne fait de tort à personne.

En effet, les forfaits fiscaux permettent d’encaisser de l’argent net car ceux qui en bénéficient ne coûtent rien à l’Etat: ils n’ont plus d’enfants scolarisés, ils ne touchent pas d’aides sociales ni n’iront dans des EMS subventionnés, ils investissent plus que tous les autres et font ainsi tourner l’économie locale. Que leur reproche-t-on sinon d’être «nantis»? Les initiants ont beau jeu de prétendre que ces gens ne quitteront pas le pays, alors même que leur statut vient d’être fortement revu à la hausse. Ils oublient que la Belgique, le Portugal, la Grande-Bretagne leur tendent les bras avec des offres encore plus alléchantes que les nôtres. En acceptant ce texte, la Suisse se tirerait une nouvelle balle dans le pied et, sous prétexte de grands sentiments, ferait l’affaire de ses concurrents internationaux.

Source Le Temps 31/10/2014

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/ff24614e-605e-11e4-802c-cf45623830fa/Iniquit%C3%A9_fiscale

Oui, les forfaits fiscaux sont équitables

PAR JEAN ROMAIN/ Le TEMPS 31/10/2014

Le philosophe, essayiste et député Jean Romain prend la défense des forfaits fiscaux d’un point de vue philosophique. Au nom, oui, de l’équité

On ne saurait réduire la justice au seul principe d’égalité. L’égalité est une valeur fondamentale en démocratie mais, à elle seule, elle n’assure pas encore la justice parce que l’égalité est linéaire et qu’elle ne tient pas compte des différences entre les hommes, ni des cas particuliers. Parfois même, il est piquant de constater que la stricte égalité peut se révéler une forme d’injustice comme, par exemple, dans l’éducation de deux enfants très différents: il faut que les parents tiennent compte de ces différences et qu’ils adaptent à l’un et à l’autre enfant le principe d’égalité. Se montrer strictement égal pour ces deux enfants peut entraîner des injustices flagrantes.

Pour que règne la justice, l’égalité est évidemment nécessaire mais elle n’est pas suffisante: il faut lui adjoindre le principe d’équité. L’équitable n’est pas l’égalité selon la loi, mais un correctif du principe d’égalité. La raison en est que l’égalité est toujours quelque chose de général, et qu’il y a des cas d’espèce pour lesquels il est impossible de poser un énoncé général qui s’y applique avec rectitude. L’équité vient donc corriger dans le sens de la justice un excès de simplification dû à l’égalité.

Deux principes concourent pour former l’idée de justice sociale.

Justice = égalité + équité

Définitions:

  1. Le principe d’égalité: il est fondamental que l’égalité règne entre tous, dans l’établissement des droits et des devoirs de base de chacun.
  2. Le principe d’équité: certaines inégalités (par exemple les inégalités de richesse, de force physique, d’autorité) sont justes si, et seulement si elles produisent en compensation des avantages pour chacun, et en particulier pour les membres les plus désavantagés de la société.

Il n’y a pas d’injustice dans le fait qu’un petit nombre obtienne des avantages supérieurs à la moyenne, à condition que soit améliorée par-là la situation des moins favorisés. La justice apparaît donc comme une sorte d’équilibre qui ne nécessite pas une référence à un absolu mathématique (l’égal), mais à un accord entre les membres d’une société pour constituer un système d’obligations, de devoirs et de droits. Il ne s’agit pas d’être juste malgré la société, mais d’être juste dans le cadre d’un contrat social, où les parties s’engagent mutuellement à limiter leur liberté pour augmenter leurs avantages.

Le contrat social

Voici ce qu’entend entreprendre le Contrat social de Rousseau: «Je veux chercher si, dans l’ordre civil, il peut y avoir quelque règle d’administration légitime et sûre, en prenant les hommes tels qu’ils sont, et les lois telles qu’elles peuvent être. Je tâcherai d’allier toujours, dans cette recherche, ce que le droit permet avec ce que l’intérêt prescrit, afin que la justice et l’utilité ne se trouvent point divisées.»

Ceux qui s’engagent dans la coopération sociale doivent fixer de manière contractuelle les principes qui régissent les droits et les devoirs de chacun, et ils doivent les fixer par un acte volontaire en accord avec les buts de la société. Un de ces buts est manifestement la justice. Or, les moins bien lotis et les plus chanceux trouvent chacun dans ce double principe (égalité et équité) leur avantage. En d’autres termes, une marge d’inégalité est parfois nécessaire pour satisfaire le principe d’équité, et accepter cette marge est le prix à payer pour le bien collectif.

Le principe d’équité peut s’énoncer de manière purement rationnelle, celle du donnant-donnant: si j’accepte de réduire ma marge de manœuvre et ma liberté pour augmenter le bien commun de la société à laquelle j’appartiens (ce que font ceux qui paient les impôts au forfait, renoncent à pouvoir travailler et s’acquittent des droits de succession), il n’est pas rationnel que quelqu’un puisse bénéficier des avantages du bien collectif sans avoir lui-même dû réduire sa liberté et sa propre marge de manœuvre (ce que font ceux qui paient leurs impôts selon le barème en vigueur et acceptent, pour certains, de manière inégalitaire le principe du forfait).

Pour faire simple: par le contrat social, les uns paient un forfait et renoncent à certains droits; les autres renoncent de leur côté à exiger la parfaite égalité parce que la société a à y gagner.

L’éthique

L’éthique est la connaissance argumentée qui répond à la question: «Que faut-il faire pour bien faire?» L’époque actuelle, en raison du relativisme culturel qui la domine, est incapable de répondre de manière générale et satisfaisante à cette question (c’est d’ailleurs pourquoi le mot éthique est psalmodié partout de manière incantatoire), alors l’époque se rabat sur une éthique bon marché, celle du «bon sentiment».

On se réfère ainsi à une norme subjective pour décider ce qui est le critère du bien faire et celui du mal faire. Milan Kundera le dit: «Personne n’est plus insensible que les gens sentimentaux.» Les bons sentiments rendent ceux qui les éprouvent certains de leur choix parce que l’éthique sentimentale a ceci d’efficace qu’elle associe rapidement un grand nombre d’adeptes, fédérés par la même émotion. Il existe même des spécialistes capables de susciter le bon sentiment, de l’organiser et de le manipuler. L’ouvrage de référence en matière de psychologie sociale est celui de Gustave Le Bon, Psychologie des foules .

Or, dans le cas qui nous occupe, il faut éviter d’introduire un élément éthique, sujet à controverse parce que trop subjectif, mais seulement un élément rationnel: nous devons être capables d’utiliser les moyens les plus efficaces pour atteindre les fins données par la société.

Une des fins est la justice. C’est la raison pour laquelle le forfait fiscal, tout en étant inégal du point de vue moral, est juste parce qu’il est équitable du point de vue rationnel.

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/74bc325a-604c-11e4-802c-cf45623830fa/Oui_les_forfaits_fiscaux_sont_%C3%A9quitables

2 réponses »

  1. Sans l’ombre d’un doute je préfère l’immigration bénie a l’immigration subie.

    Si le seul plaisir des socialistes prônant « la pauvreté dans l’égalité » est de voir ces gens partir en Belgique, à Londres … Moi pas.

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