Le changement de stratégie de l’EI sur Internet
L’organisation Etat islamique a-t-elle décrété un couvre-feu sur les médias sociaux? La campagne sur Internet cet automne est bien différente des précédentes offensives virales de l’organisation, quand des volées de tweets triomphants accompagnaient ses salves de roquettes
L’organisation Etat islamique a-t-elle décrété un couvre-feu sur les médias sociaux, comme jadis on faisait éteindre les lumières à l’approche des bombardiers? Depuis l’automne, l’organisation bat campagne sur Internet, mais en des termes bien différents des précédentes offensives virales de l’organisation, quand des volées de tweets triomphants accompagnaient ses salves de roquettes.
Plus discrets
Avec le déclenchement des frappes de la coalition contre l’EI, il s’agit désormais de prendre des précautions, de s’abstenir de partager des informations pouvant nuire à la sécurité de la «dawla» – «l’Etat» – en donnant trop d’informations aux services de renseignement occidentaux.
Les vidéos, images et même messages écrits qui permettraient de localiser ses unités et infrastructures sont désormais proscrits. «Selfies» intempestifs, combats saisis sur le vif, pick-up lancés sur les routes, et discussions liées sont, si ce n’est pas bannis, du moins rigoureusement encadrés. Une révolution culturelle pour les sympathisants de l’EI habitués à utiliser les réseaux sociaux à haute dose.
«Partisan, ne nous tue pas!» proclame, entre supplique et menace, l’un des visuels les plus diffusés: la paume d’une main ensanglantée. Un deuxième est plus explicite: une fermeture éclair y remplace une bouche.
https://twitter.com/sohaib1_/status/516390016126169088
«L’Etat islamique ne veut pas que ses membres ou sympathisants divulguent quoi que ce soit qui puisse constituer une cible importante pour les forces de la coalition», estime le chercheur Aymenn Jawad Al-Tamimi (Université d’Oxford), qui travaille sur les groupes djihadistes et insurrectionnels sunnites en Irak.
«Il y a une différence entre commenter une bataille des moudjahidin et renseigner l’ennemi sur leurs déplacements», rappelle un membre d’une katiba. Concluant ses considérations tactiques d’un tonitruant: «N’annoncez que nos victoires!»
Des consignes très précises
Des avertissements qui font écho à une précédente bourde de l’organisation cet été: Bellingcat, un collectif d’investigation et de journalisme citoyen, a ainsi pu localiser un centre d’entraînement près de Mossoul (Irak) en se basant sur des photos publiées par le compte de la wilaya de Ninive de l’Etat islamique.
Comment? En utilisant Panoramio, un service d’hébergement de photos qui, à l’aide des métadonnées associées aux images, les place sur une carte, et GoogleMaps.
On ne sait si les Américains, qui n’ont pas dû avoir beaucoup de mal à repérer l’installation par leurs propres moyens, l’ont bombardée. Mais l’affaire sert régulièrement d’exemple.
Eliot Higgins, le fondateur de Bellingcat, rejoint d’ailleurs le point de vue d’Al-Tamimi sur le «timing» du lancement des avertissements djihadistes qui correspond, souligne-t-il, au début des frappes américaines.
Les nouvelles règles, édictées par les autorités de l’Etat islamique (le Comité général) puis détaillées et relayées sur les médias sociaux sont très claires. Il est ainsi interdit de partager des informations sur:
– Les raids aériens de l’ennemi;
– Les déplacements de convois d’une région à l’autre;
– Des opérations en préparation;
– Les techniques de fabrication d’armes;
– La mort au combat d’un dirigeant ou d’un émir avant le communiqué officiel de l’Etat islamique;
– La localisation des casernes;
– Le ralliement au califat d’une personne connue médiatiquement ou d’un groupe particulier avant un communiqué officiel de l’Etat islamique;
– Des images qui permettraient de reconnaître des membres de l’EI et en particulier les combattants étrangers qui l’ont rejoint.
Et les initiateurs de ce tour de vis se sont donné les moyens de le faire savoir. Notamment sur Twitter.
«#CampagneDeDiscrétionMédiatique»: le mot-clé apparaît de façon diffuse en août avant un tir de barrage numérique qui débute le 27 septembre: près de 10 000 tweets en quelques heures. Une première salve suivie de rappels mensuels, relayés par des centaines de sympathisants pour une exposition maximale: la marque de fabrique de l’organisation.
La mobilisation est considérable au regard d’un sujet a priori moins attrayant que la célébration de victoires militaires, comme la marche des troupes du califat sur la capitale irakienne à l’été dernier. L’Etat islamique avait alors atteint un climax de notoriété – 40 000 tweets en à peine 24 heures.
Désertion des cybercafés
Et sur le terrain, l’EI applique ses consignes avec sa brutalité coutumière. Le 24 octobre, un adolescent est crucifié en place publique après avoir pris des photos des installations du groupe à Rakka, en Syrie, où la police islamique multiplie les descentes dans les cybercafés, selon des activistes anti-EI de la ville. Quand elle ne fouille pas les smartphones lors de contrôles inopinés.
Les combattants aussi semblent sous pression. Contacté par le quotidien panarabe Al-Sharq Al-Awsat, le propriétaire d’un Web café dans la région de Hama notait que les membres de l’EI, sa principale clientèle jusque-là, avait subitement déserté les lieux: «Ils passaient des heures à poster des photos et des vidéos prises avec leurs smartphones. Et là, d’un coup, ils ne viennent plus.»
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, l’organisation aurait d’ailleurs exécuté une vingtaine de ses propres combattants pour des faits supposés d’intelligence avec l’ennemi. Dont, au mois un, à Boukamal, relatif à de l’espionnage électronique.
Anonymous Djihad
Outre ces consignes de discrétion, les propagandistes et les militants djihadistes sont de plus en plus soucieux de sécuriser techniquement leur utilisation d’Internet.
Le Monde.fr a pu consulter des dizaines de documents et tutoriaux issus de la galaxie de l’EI régulièrement mis à jour, conseillant, détaillant et mettant à disposition divers outils. Ces conseils sont téléchargeables sur la plateforme JustPaste.it, comme la majorité des communiqués, vidéos et documents de l’Etat islamique.
PAR MADJID ZERROUKY, LE MONDE29/11/2014
A Kobané, les Kurdes repassent à l’attaque
PAR AFP 29/11/2014
Les djihadistes de l’Etat islamique perdent du terrain dans la ville frontière de la Turquie qu’ils avaient ciblée début octobre . L’optimisme a changé de camp
Zerbash attrape son talkie-walkie dans une poche de son gilet et vérifie les positions des autres unités. En face, l’ennemi est à moins de 100 mètres dans les ruines de Kobané, une ville kurde à la frontière turco-syrienne. Deux mois après l’attaque des djihadistes de l’Etat islamique (EI), la bataille tourne à l’avantage des combattants kurdes. Ces derniers, aidés par des troupes de l’Armée syrienne libre (ASL) ainsi que par des peshmergas kurdes d’Irak, sont parvenus à reprendre près de 80% du territoire aux djihadistes. Chaque nuit, la coalition internationale vise les forces de l’EI, permettant aux Kurdes de gagner un peu de terrain le lendemain.
Les combattants kurdes avancent lentement, rue après rue. Un foulard fleuri sur la tête, une kalachnikov à l’épaule. Tous connaissent la ville dans ses moindres recoins. Entre deux rues, ils se baissent et pressent le pas. Les snipers de l’EI sont aux aguets, à quelques centaines de mètres de là. Ils s’enfoncent dans un jardin, passent par un trou et pénètrent dans la cuisine d’une autre maison. De là, les combattants s’installent très vite, prêts au combat. Ils ne sont plus qu’à 50 mètres des positions ennemies.
Zerbash commande l’un des fronts sud de Kobané et a une dizaine d’hommes et de femmes sous ses ordres. Les Unités kurdes de protection sont mixtes, baptisées YPJ pour les femmes et YPG pour les hommes, et combattent ensemble. Ce matin-là, l’assaut est lancé sur plusieurs bâtiments, contrôlés par les hommes en noir de l’EI.
Quand les djihadistes ont débarqué dans Kobané début octobre, tout le monde croyait la ville perdue. Mais le soutien apporté par les armes lourdes des peshmergas d’Irak et surtout les frappes des avions de la coalition ont permis de repousser les assaillants. Près de 2000 djihadistes auraient été tués dans les combats. Depuis plusieurs jours, les routes d’approvisionnement en nourriture et en armes que l’EI utilisait sont quasiment coupées. Les combattants kurdes surveillent leurs déplacements et écoutent leurs communications au moyen des appareils qu’ils ont trouvés dans les décombres. Grâce à quoi ils peuvent informer la coalition des allées et venues de leurs adversaires et adapter leur tactique offensive en fonction d’elles.
Plusieurs fois par semaine, les chefs militaires des YPG et YPJ, de l’ASL et des peshmergas irakiens se réunissent pour élaborer les tactiques. La plupart des rebelles de l’ASL sont arrivés quelques semaines après le début des combats, à la suite d’un accord entre les leaders de l’ASL et ceux de Kobané. Chacun a son rôle. Selon l’arrangement contracté avec les autorités turques pour autoriser le passage des peshmergas, ces derniers sont dotés d’armes lourdes mais doivent rester en soutien sur la deuxième ligne. «Avant, on ne faisait que se défendre, on a dû reculer plusieurs fois, se retirer de la ville en essayant de perdre le minimum de soldats. Mais, depuis début novembre, la situation s’est inversée, on est passé à l’attaque et on a repris une grande partie de la ville», sourit le général kurde Jamil Mazun. Il est optimiste. D’ici à la fin de l’année, l’EI ne sera qu’un mauvais souvenir pour Kobané et ses habitants. «Ensuite, on continuera à les combattre dans le reste du pays s’il le faut. Nous sommes devenus des experts en stratégie de combat contre eux, et même les seuls à pouvoir les vaincre.»
Jamil Mazun ne veut pas dire combien d’hommes et de femmes combattent à Kobané au sein des Unités de protection du peuple kurde. Mais ils seraient près de 4000 selon certains activistes sur place. Partout dans les rues, les civils ont pris les armes pour défendre leur ville. Une ville qui n’est plus que chaos et maisons détruites par la violence des combats. Au milieu de l’ancien marché, un immense trou, rempli de gravats. Quelques matelas éventrés, des bouteilles d’eau en plastique et partout cette odeur de mort qui ne vous quitte pas.
«Les djihadistes de l’EI ont fait exploser dix voitures piégées dans la ville. Le reste des dégâts, ce sont les frappes de la coalition pour les faire reculer.» Fahad, un jeune activiste, montre du doigt les restes d’un bus complètement calciné. Le véhicule piégé a explosé heureusement après que les habitants eurent quitté le quartier. Le bilan aurait pu être terrible, car la déflagration a été si forte qu’aucun immeuble n’a résisté au souffle. Le jeune homme, frêle avec un sourire doux, porte lui aussi une arme. «Mais pas pour attaquer, je suis un civil. Juste pour pouvoir me défendre si jamais l’EI s’approche trop près. Plutôt me donner la mort que de tomber entre leurs mains.»
De son coté l’armée syrienne de Bachar el-Assad a opéré près de 2000 frappes visant 12 provinces depuis le 20 octobre, a affirmé l’Observatoire syrien des droits de l’homme.
Syrie: premiers combats au poste-frontière de Kobané Par ATS 29/11/2014
De violents combats opposaient samedi pour la première fois l’Etat islamique (EI) aux forces kurdes au poste-frontière entre la ville syrienne de Kobané et la Turquie, selon une ONG et un responsable turc. La Turquie a confirmé une attaque à la voiture piégée à Mursitpinar, en face de Kobané, mais selon elle le véhicule ne venait pas de son territoire.
«Les affrontements ont éclaté dans la zone après deux attaques djihadistes à l’aube au poste-frontière séparant la Turquie de Kobané», a indiqué Rami Abdel Rahmane, le directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), une ONG proche de l’opposition syrienne.
Un djihadiste a mené une attaque à la voiture piégée et l’autre avec une ceinture explosive, selon l’ONG. De violents heurts ont alors éclaté avec les YPG, les Unités de protection du peuple kurde, une milice qui défend la troisième ville kurde de Syrie, dont les djihadistes tentent de prendre le contrôle depuis plus de deux mois.
Selon des médias kurdes, le véhicule en cause provenait du côté turc.
«L’EI a mené des attaques à une vingtaine de mètres du poste-frontière (côté syrien)», a indiqué de son côté un responsable turc local. «Deux explosions ont été entendues, il pourrait s’agir d’une attaque-suicide ou d’une attaque à la bombe», a-t-il ajouté.
Ankara confirme
L’état-major de l’armée turque a confirmé cette attaque dans une déclaration citée par les médias. «Le poste-frontière de Mursitpinar a été attaqué par l’EI», a-t-il déclaré. Mais selon lui, «les allégations selon lesquelles le véhicule est passé par la Turquie sont des mensonges. Aucune autorité (turque) ne dispose d’élément permettant d’aller dans ce sens», ont poursuivi les militaires turcs. (ATS)
29/11/2014
Obama revoit sa stratégie anti-Daesh et fait d’Assad sa cible principale
En Syrie, selon la chaîne d’informations CNN qui cite des sources à Washington, « vaincre l’islamisme est impossible alors que le président Assad reste au pouvoir ». Mais dans la suite, Maria Finoshina de RT rapporte que renverser le leader syrien a peut-être toujours été le vrai but de l’Amérique de toute manière. (RT)
http://wikileaksactu.wordpress.com/2014/11/27/obama-revoit-sa-strategie-anti-daesh-et-fait-dassad-sa-cible-principale/
Grande offensive aérienne syrienne sur Al-Raqqa
Publié le 27 novembre 2014
« Nous reviendrons! » C’est pas ses mots que le dernier commandant de la base aérienne d’Al-Raqqa, tombée aux mains des rebelles radicaux avait quitté son quartier général sous un déluge de roquettes et d’obus. La chute de la base aérienne d’Al-Raqqa a coûté la vie à plus de 320 soldats syriens et causé la perte de plus de 17 appareils de combat dont trois chasseurs que l’EIIL a tenté d’utiliser.
Les raids aériens de l’aviation syrienne se sont concentrés sur la périphérie industrielle Nord d’Al-Raqqa où l’organisation de DAECH tente de se constituer une industrie militaire.
Diverses sources dont le très controversé Observatoire syrien des Droits de l’homme (OSDH) basé à Londres ont évoqué la mort de plus de 95 personnes au cours de ces raids.
D’après nos sources, les chasseurs-bombardiers syriens ont utilisé pour la première fois de nouvelles munitions guidées au Laser et ont fait face à des tirs de DCA (canons de 23 et de 30 MM) ainsi qu’à plusieurs salves de missiles Sol-Air de faible portée.
Les frappes ont détruit des anciennes usines d’engrais chimiques et d’ateliers de construction métallique que les combattants de DAECH tentaient de convertir en usines de roquettes ou de missiles.
Sur le plan politique, la rencontre de Poutine avec Al-Mouallem en présence de l’homologue de ce dernier Serguei Lavrov s’est fait à huis clos et rien n’a filtré des discussions entre les deux hommes. Cependant, Damas ne cache pas son souhait de voir Moscou accélérer les livraisons de certains systèmes d’armes et plus particulièrement les missiles SAM de la famille des S-300.
Moscou pour sa part semble contre-attaquer sur tous les fronts et paraît déterminé à soutenir son allié syrien, en guerre contre ses ennemis régionaux, d’autant plus que son principal adversaire, l’Arabie Saoudite, cherche à déséquilibrer les prix du pétrole brut au sein de l’OPEP dans le cadre d’une vieille politique dictée par Washington afin de faire saborder les économies de puissances hostiles ou tout simplement potentiellement rivales.
http://strategika51.wordpress.com/2014/11/27/grande-offensive-aerienne-syrienne-sur-al-raqqa/