1984

Après coup…. Erdogagne sur tous les plans… Les US sont-ils en train de perdre la main au Moyen-Orient au profit des Russes …mais surtout des Islamistes ! 5 ème colonne en Europe (Avec Note Du Lupus)

Après coup

18 Juillet 2016 , Rédigé par Observatus geopoliticus Chronique di Grand Jeu

Après coup

Le petit führer d’Ankara est en train de nous refaire le coup de l’incendie du Reichstag en 1933 avec Fethullah Gülen dans le rôle de Lubbe. Les historiens sont divisés sur l’implication du jeune communiste vrai-faux pyromane tout comme les observateurs le sont sur celle du prédicateur et intellectuel sunnito-soufi, bête noire du sultan.

Il n’y a en réalité peut-être pas de fumée sans feu et les gulenistes pourraient y être pour un petit quelque chose, sans forcément que leur source d’inspiration soit au courant. Comme chaque année, sont décidées au mois d’août les promotions ou rétrogradations des officiers de l’armée turque, et chacun s’attendait à une nouvelle purge contre les militaires soupçonnés de proximité avec Gulen. Ceux-ci ont peut-être tout simplement pris les devants dans une tentative de la dernière chance.

Mais beaucoup de choses restent quand même curieuses… Pourquoi les putschistes ont-ils déclenché les opérations un vendredi soir alors que tout le monde est dans la rue (la nuit aurait été une meilleure option) ? Pourquoi n’ont-ils pas visé l’entourage du sultan et se sont-ils contentés de garder des ponts ? Pourquoi, chose très intéressante et passée inaperçue, n’ont-ils pas abattu l’avion d’Erdogan alors que deux F16 aux mains des rebelles en avaient la possibilité directe ? Comme le dit une source militaire interrogée, « c’est un mystère ».

Après coup

Qu’il ait appris le coup à l’avance et ait décidé d’en profiter ou qu’il l’ait orchestré lui-même, le sultan a lancé l’une des plus grandes chasses aux sorcières de l’histoire turque. Militaires, juges ou simples intellectuels critiques : tout y passe. 8 700 policiers mis à pied, 30 gouverneurs et 50 hauts fonctionnaires limogés, 6 000 militaires et 755 juges placés en détention, 103 généraux et amiraux en garde à vue et interrogés, le propre conseiller militaire présidentiel arrêté… Une véritable Nuit des longs couteaux. A tel point que la pourtant munichoise UE pense (et le dit) que les listes de suspects étaient déjà prêtes, préméditées.

Pour bien faire, Erdogan demande à ses SA supporters de rester dans la rue, en théorie pour « mettre en échec une nouvelle tentative de putsch », en réalité pour faire peser la pression de la rue et instaurer un climat de peur. On ne sait pas vers quel iceberg se dirige le Titanic turc, mais il y va à pleine vapeur ! C’était prévisible.

Après coup

Et maintenant place aux deux grands. On note tout de suite un gros froid avec les Etats-Unis et un net réchauffement des relations avec la Russie.

Dès samedi, la base otanienne d’Incirlik, d’où décollent les avions américains, avait été interdite d’accès et privée d’électricité. L’on pouvait se dire qu’il s’agissait seulement du contrecoup (admirez le jeu de mot) : effectivement, plusieurs officiers supposés putschistes y ont ensuite été arrêtés, y compris le propre commandant de la base ! Depuis, les opérations semblent avoir repris. Mais cet épisode laissait un goût étrange dans la bouche : des officiers, partisans supposés de l’opposant n°1 à Erdogan en exil aux Etats-Unis, arrêtés sur une base utilisée par ces mêmes Etats-Unis. Choderlos de Laclos aurait parlé de liaisons dangereuses…

De fait, la suite n’allait pas tarder. Le Premier ministre turc a éructé sans le nommer contre l’Etat qui abritait le « terroriste Gulen », allant même jusqu’à parler de « pays ennemi » ; le sultan s’est montré moins vif mais a sommé les Etats-Unis de l’extrader. Quant à l’intéressé, vieux et malade, il a répliqué qu’Erdogan lui-même était derrière la vraie-fausse tentative de coup d’Etat et l’a comparé à Hitler. Après le soutien des Américains aux Kurdes syriens, voilà un nouveau sujet de tension entre les deux « alliés » de l’OTAN dont les relations virent à l’iceberg pour reprendre l’amusante expression de RT. Certaines voix en Turquie, comme le ministre du travail, vont même jusqu’à insinuer que Washington est derrière la tentative de putsch.

Kerry s’est vu obligé de nier toute implication US, affirmant même que les Etats-Unis n’avaient aucune idée de ce qui allait advenir – ce qui est difficile à croire : soit la NSA est totalement inefficace, soit il ment (pas impossible : il se peut que les Américains savaient, ont laissé faire et voulu voir venir). Kerry a également a prévenu d’une « possible dégradation des relations » si la Turquie continue ses « accusations gratuites », appelé le régime à la restreinte et a calmement demandé des preuves de l’implication de Gulen. Pan, dans les dents.

Car il n’est pas sûr du tout que le führerinho d’Ankara ait vraiment envie de voir sa némésis extradée. Depuis toutes ces années, Ankara a accusé Gulen d’être derrière tous les mauvais coups, a hoqueté contre le pays qui l’accueille mais n’a curieusement jamais formalisé une seule demande d’extradition ! Pour Erdogan, le vieux clerc est bien plus utile en exil, accusé de tous les maux, bouc-émissaire perpétuel, Goldstein des temps modernes sur lequel se déversent régulièrement les deux minutes de la haine (ceux qui ont lu l’indépassable 1984 comprendront).

Si les Américains sont sur le reculoir – notons au passage ce commentaire désabusé d’un ancien ponte de la CIA pour qui Obama a totalement perdu le contrôle sur le Moyen-Orient -, Moscou en profite, assez cyniquement d’ailleurs. Une fois n’est pas coutume, les Etats-Unis sont plutôt du bon côté de la barrière morale et les Russes du mauvais.

Poutine a condamné le coup et offert ses condoléances lors d’une conversation téléphonique avec le sultan. Les Russes, au contraire des Américains, l’ont-ils prévenu de ce qui se tramait ? Les S400 ont-ils eu un rôle dans les événements (leur portée radar atteint Ankara) ? Nous ne le saurons sans doute jamais. Toujours est-il que les Turcs se montrent soudain bien mielleux, témoin cette nouvelle étonnante : l’un des pilotes qui avaient abattu le sukhoi 24 en novembre est un putschiste et sera évidemment puni. Hop la, le hasard fait décidément bien les choses…

En fait, pour le Kremlin, les enjeux dépassent la seule Turquie et je ne parle pas de gaz ici (peu de chance de voir ressurgir le Turk Stream en l’état actuel des choses, le sultan est trop imprévisible). Il convient de lier la réaction russe au putsch à ce qui se passe en Syrie. Partout les loyalistes avancent, et plus précisément à Alep. La route Al Castello dont nous avons parlé maintes fois, est maintenant semble-t-il totalement coupée et les djihadistes « modérés » sont pris au piège, tandis que l’aviation russe s’en donne à coeur joie à Idlib. La Turquie est soudain totalement muette.

Paris vaut bien une messe… Alep aussi.

Coup d’état en Turquie: une ère nouvelle pour le Moyen-Orient ?

Quel que soit le commanditaire du coup d’état, les changements qui s’annoncent en Turquie vont bouleverser la donne au Moyen-Orient. Erdogan et son premier ministre ont entamé deux processus qui vont être lourds de conséquence.

Avant même la reprise en main de la situation, le ton des autorités turques vis-à-vis des Etats-Unis a complètement changé, et était même menaçant. Erdogan exige l’extradition de Gullen, une extradition qu’il a peu de chances d’obtenir, et il le sait. Ce qui signifie une rupture en cours.

Dans le même temps, le premier ministre turc Binali Yildirim parle du rétablissement de la peine de mort en Turquie. Erdogan a confirmé son intention d’examiner la question. La peine de mort avait été abolie en Turquie depuis 2002 pour lui permettre d’espérer entrer dans l’UE. La décision d’Erdogan de la rétablir signifie qu’il veut tourner le dos à l’UE. Deuxième rupture. La Turquie veut-elle larguer les amarres ? Les évènements avant la tentative du coup d’état semblaient aller dans ce sens: réconciliation avec la Russie, annonce d’un possible dialogue avec la Syrie, attitude déjà différente des dirigeants turcs vis-à-vis de Bachar Al Assad…

Cette tentative de coup d’état ne pouvait donc qu’avoir lieu, soit commanditée par les Etats-Unis/OTAN comme l’affirme l’ex-émir du Qatar, Hamad ben Khalifa Al-Thani, qui accuse également Ryad, soit planifiée par Erdogan lui-même comme l’affirment déjà certains journaux américains, relayés en France par Le Monde (les complotistes changent de camp). Le plus cocasse, c’est que cette deuxième hypothèse est tout à fait plausible. Erdogan avait besoin de se sortir d’un piège où il s’était fait enfermer, et ce coup d’état tombe vraiment à pic.

Quoi qu’il en soit, qu’il soit l’instigateur du coup d’état ou pas, Erdogan exploitera la situation au maximum. L’évolution des évènements en Turquie pour les jours prochains sera d’une importance capitale pour le Moyen-Orient, et aussi pour le monde, y compris pour Daesh et l’OTAN.

Avic – Réseau International

http://reseauinternational.net/coup-detat-en-turquie-une-ere-nouvelle-pour-le-moyen-orient/

Erdogan est-il renforcé par ce coup d’Etat? Son projet de système présidentiel fort a-t-il une chance d’aboutir? A l’inverse, l’armée peut-elle encore jouer le rôle de contre-pouvoir?

Tout comme il n’a cessé récemment de chercher un répit sur la scène internationale en se reniant, Erdogan a obtenu un sursis qui ne lui était pas acquis avant cet ersatz de mutinerie. Pour gagner, l’armée devait obtenir le consentement des classes éclairées, de l’opposition de gauche et de la mouvance kurde, lesquelles ne pouvaient que le lui refuser de par le fait qu’elles avaient été les grandes perdantes des précédentes dictatures militaires. Significativement, les partis kémaliste et kurde se sont immédiatement déclarés loyalistes au regard du gouvernement en place.

Plus largement, est-ce le triomphe de l’islam politique? Le «modèle turc» est-il exportable?

C’est bien parce que, à la suite de Byzance, la Turquie est un Orient/Occident que nous sommes illusionnés sur la réussite de son «islam politique». Celui-ci a été précisément contre-balancé jusqu’ici par une nette européanisation des moeurs et des intelligences, d’ailleurs antérieure au kémalisme qui en a freiné les pires excès et la pente para-totalitaire. Le temps allant, ce modèle mixte est en train de s’éroder sous l’effet d’une lente mais sûre raréfaction des forces vitales et contestataires de la société civile , dont les intellectuels exilés et les journalistes embastillés. Paradoxalement, en réprimant ce psychodrame de putsch, la Turquie a fait un pas de plus vers la dictature. Et vers l’isolement. Toujours plus étrangère au Vieux Continent, elle ne saurait exporter son modèle à ses limes arabes, historiquement réfractaires à l’emprise turque, culturellement moins enclines à l’hybridation et d’ores et déjà sujettes à des modèles autrement plus radicaux – donc jugés sur place, en vertu de ce renversement de perspectives propre au fondamentalisme, plus «avancés».

Quelles sont les conséquences pour l’Europe? La victoire des militaires laïques aurait-elle été préférable?

Soumises à la politique gribouille de Merkel, prise entre angélisme moral, souci démographique et calcul politicien, Bruxelles a remis les clés de l’Europe à Erdogan: acquitter son racket sur les migrants est un leurre car, la levée des visas aidant, il lui suffira de les naturaliser massivement pour qu’ils accèdent à une libre circulation qu’il était présumé limiter. Il y a tout lieu également, de s’inquiéter de la solidité future de l’OTAN si l’alliance dite «atlantique» devait compter dans ses rangs une armée turque dorénavant islamisée à rebours de sa tradition première. Mais il y a plus grave: c’est démoraliser les élites qui, contre l’islamisme, font le choix de l’universel que de les trahir en donnant un brevet renouvelé de démocratie à Erdogan. Il semble que ni Obama, ni Hollande n’aient retiré un quelconque enseignement de leurs erreurs récentes sur l’Égypte ou présentes sur l’Arabie Saoudite. Notre attentisme est criminel: au lieu de résoudre le chaos croissant là-bas, il en sème des prodromes ici. Dans tous les cas, ce sont les peuples qui, partout, paient la note de cet aveuglement volontaire.

http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2016/07/18/31002-20160718ARTFIG00241-jean-francois-colosimo-la-turquie-a-fait-un-pas-de-plus-vers-la-dictature-islamiste.php

9 réponses »

  1. « Cette tentative de coup d’état ne pouvait donc qu’avoir lieu, soit commanditée par les Etats-Unis/OTAN comme l’affirme l’ex-émir du Qatar, Hamad ben Khalifa Al-Thani »

    « Fort de ce constat il reviendrait à L’Europe de contenir les forces islamiques dans et en dehors de leurs territoires (5ème colonne)… »

    =>>
    July 15, 2016 1:29 pm
    Qatari royal family boosts stake in Deutsche Bank
    James Shotter in Frankfurt

    • MSCI TURKEY meme pattern que la bourse avant le brexit, (ndlr mais en plus voyant)

      à partir du 8/7 un soulevement de 5% jusqu’au 14/7 hors d’un range de 2mois (lui m^me de 5%)

      Donc un soulevement de 5% en 1semaine hors d’un range de 5% de 2mois

      aujourd’hui on est en bas du range depuis 2mois

      (blackrock dit d’acheter…lol)

  2. si j’ai shorté deux jours avant le brexit (horodaté ici et sur un autre site) c’est parce que je sentais que des grosses mains savaient que le brexit pouvait sortir:
    il fallait impérativement entourer le marché au cas ou (le faire monter 1semaine avant) (d’ailleurs pour la suite c’est pas bon lol)

    rien à gagner/perdre à la hausse en cas de non brexit
    tout à la baisse sinon

    le graph des turcs a EXACTEMENT la même tronche

  3. « L’ennemi de mon ennemi est mon ami » Je pense que l’OTAN était en sous main dans cette tentative de coup d’état foireuse, les Russes étant au courant pas besoin d’avoir fait de grandes écoles pour comprendre la suite.
    La Russie n’a toujours pas digéré ce qui c’est passé en Ukraine ainsi que la trahison de l’Europe en particulier la France et l’Allemagne.
    Si on comprend l’histoire de la Russie et l’extension de l’OTAN vers sa proche frontière avec la possibilité de frappe nucléaire tactique en quelques minutes sur son complexe militaire nucléaire de l’Oural alors nous avons toute les raisons de monde de penser que ce ne soit que le début de l’affrontement avec une redistribution des cartes et surtout des joueurs assis à la table… vue ce qu’est devenu l’Europe, nous nous regarderons passer les trains…

  4. Après quelques jours de recul sur le mini-putsch qui a entrainé une riposte pour le moins disproportionnée pour Erdogan, le grand ami des européistes, il semble assez évident que la répression contre les putschistes a été bien mieux préparé que le putsch lui-même, ce qui semble indiquer qu’Erdogan savait à l’avance ce qui allait se produire. Je ne pense pas qu’Erdogan ait organisé le coup d’état, je pense qu’il savait et qu’il l’a laissé se préparer en préparant la riposte. En quelques jours, il a évincé des milliers d’opposants.
    On sent les européens plus hésitants depuis sur la conduite à tenir contre lui.
    Dans un face-à-face avec Moscovici, Dupont-Aignan avait comparé la montée d’Erdogan avec celle d’Hitler et avait stigmatisé la passivité du gouvernement socialiste français de l’époque, celui de Daladier qui disait qu’Hitler n’était pas dangereux comme les socialistes disent la même chose pour Erdogan aujourd’hui.
    Mais dans les années 30, Hitler n’avait pas encore pris la dimension du personnage qui envoya dans les camps quelques années plus tard des millions de personnes, c’était au début qu’il fallait l’arrêter comme c’est maintenant qu’il faut stopper le tyran ottoman avant qu’il prenne une autre dimension.
    Il semblerait que la gauche mondialiste ai bien du mal a critiquer un régime dès lors qu’il est musulman.
    Obama a été un des rares à soutenir Erdogan, n’hésitant pas à le qualifier de grand démocrate.
    Les journalistes de la bobocratie mondiale présentent Trump comme une menace mondiale, pourtant il n’a jamais soutenu aucune dictature islamique comme Obama.
    Il y a vraiment quelque chose de pourri dans cette société mondialiste, une odeur nauséabonde qui rappelle celle des poubelles d’où sont issues les idées gauchistes.

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