Art de la guerre monétaire et économique

Allons à Canossa : Le Vassal européen Orban adoubé par le Néoconservateur Américain Trump

Le Vassal européen  Orban adoubé par le Néoconservateur Américain Trump

Lors de sa visite à la Maison Blanche, le premier ministre Orban s’est fait qualifier par Donald Trump de « controversé », ajoutant : « comme moi-même ! » Trump qui fut malmené par Bush et Obama, et maintenant par « l’Europe » – c’est la même chose – a complimenté Orban sur ses positions souveraines face au dogme des frontières ouvertes, mais il a aussi beaucoup insisté sur l’appartenance à l’Otan de ce pays qui ne joue pas le jeu avec le cartel de Bruxelles.

Autrement dit, Trump a probablement l’intention de racketter la Hongrie en lui vendant des armements créateurs d’emplois aux États-Unis. Orban, finaud, a exprimé sa joie de constater combien la communauté hongroise avait joué un rôle dans la prospérité américaine. Cher Donald, c’est sans doute que les Hongrois américains ont un poids électoral dans ton beau pays !

Nul ne sait encore ce qu’ils se sont dit en privé, sachant que phénomènes migratoires, Turquie en dérive et recomposition du Moyen-Orient constituent tous des facteurs d’une déstabilisation de l’Eurasie. Sans oublier la virulence croissante des confrontations américaines avec les ennemis publics de ces néoconservateurs qui dirigent maintenant la politique étrangère de Washington, Trump ne pouvant qu’y survivre en joignant le chœur des pleureuses, le pied toutefois sur le frein, cependant que l’homme fort du régime américain, le ministre des Affaires étrangères Mike Pompeo, commence à comprendre peut-être que pendant que Washington poursuivait des leurres (l’Iran, la Russie, la déposition attendue de Trump), la Chine, en conflit total avec les États-Unis, est à la limite de devenir le vrai patron du monde. Avec ses technologies mal acquises, sa monnaie délibérément au rabais, et sa gigantesque stratégie coloniale d’implantation de comptoirs – convertibles instantanément en bases militaires – masqués derrière le thème de « route de la soie ».

Ignorant ces considérations somme toute triviales, en frénésie d’”impeachment”, les médias n’ont vu dans la rencontre Trump-Orban, qu’une collusion entre deux autocrates dangereux. La preuve ? Orban a beaucoup insisté sur un triple impératif : « faire face ensemble à l’immigration illégale, au terrorisme, et aider les chrétiens dans le monde », précisant son credo : « du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Bref, une bête noire de Soros en a rencontré une autre.

Trump, qui avait dit lors de sa campagne, que « l’Europe perd sa culture », a insisté sur le contraste entre la Hongrie qui « a fait les bonnes choses » sur l’immigration, et l’Europe « qui a agi différemment ». Résultat pour l’Europe : « on voit tous les problèmes qu’ils ont »
Cela corrige quelque peu l’attitude de l’establishment républicain du Congrès qui a pris la peine de prendre la plume vendredi dernier pour exprimer auprès de Trump leur préoccupation quant à la spirale involutive de la démocratie en Hongrie, et son rapprochement progressif avec la Russie. Cependant que dix parlementaires démocrates avaient demandé à Trump d’annuler sa rencontre avec Orban. Trump rétorquant que ces discussions sont dans la continuité stratégique de celles récemment conduites avec la Slovaquie et la République tchèque.

Certes, mais le point de vue de l’establishment de Washington se résume en une phrase du journaliste Dov S. Zakheim en son réquisitoire dénonçant la rencontre « des deux âmes-sœur »: «Victor Orban ne méritait pas une invitation de la Maison-Blanche »

André Archimbaud

Toujours frondeur, le magazine s’attaque dans son dernier numéro à un sujet mammouth, qui paradoxalement ne retient pas l’attention qu’il mérite: la place du MIC – le complexe militaro-industriel – dans la société américaine. L’article s’ouvre sur la constatation que malgré la hauteur du budget dit de la défense, l’establishment militaire et tout ce qui l’accompagne restent étonnamment invisibles. On voit peu ou pas d’uniformes dans les villes, les bases sont confinées dans des régions reculées, les entreprises actives dans l’armement font profil bas. Bien que sur chaque dollar voté par le Congrès, 53 cents aillent à la sécurité nationale, Démocrates comme Républicains s’intéressent peu à la manière dont le Pentagone dépense ses trillions. Au pays de la libre concurrence et de l’efficience économique, le prix payé par l’Armée de l’Air pour un couvercle de WC a pu passer de 640 $ il y a trois décennies à 10’000 $ en 2018, sans que l’enquête qui l’a révélé ait fait beaucoup de vagues.

En 1983, un jeune analyste auditionné par le Congrès avait déjà diagnostiqué le virus qui ravage le MIC: le coût des armes toujours plus complexes croît beaucoup plus rapidement que le budget global de la défense. Sans parler des nombreux ratés dans le développement de nouveaux types d’armes. En conséquence, les avions, les navires et les tanks ne peuvent pas être remplacés à parité. Raison pour laquelle les forces armées décroissent et prennent de l’âge.

Conclusion surprenante: malgré l’énormité de leur budget militaire, dix fois supérieur à celui de la Russie, les États-Unis ont mal à leur défense. «Si nous arrivons à comprendre que le MIC existe seulement pour se maintenir et entretenir sa croissance, alors la corruption, la mauvaise gestion et les guerres que nous menons, deviennent plus faciles à saisir. On comprend mieux pourquoi, en dépit des prétendues menaces dont on nous met en garde, nous restons mal défendus».

J.-M. Bovy | 17.05.2019

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