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RAPHAËL ENTHOVEN, LE FOSSOYEUR DE LA PENSÉE (Marc Obregon)

RAPHAËL ENTHOVEN, LE FOSSOYEUR DE LA PENSÉE

« Philosophe » en vue de la bien-pensance mais plus à l’aise sur Twitter qu’avec les concepts, Raphaël Enthoven incarne à merveille cette bourgeoisie qui vomit son mépris sur le peuple ordinaire.

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Raphaël Enthoven s’illustre de façon particulièrement dégueulasse dans ce qu’il convient désormais d’appeler l’exercice de l’Anti-France, érigé en art de vivre sous le tout-puissant califat macroniste. Vociférant et déformé par une haine somme tout très peu aristotélicienne, Enthoven fait la tournée des plateaux pour déployer toute son ire contre cette France qu’il abhorre, la France des ronds-points, des barbecues et des Gilets jaunes. Soit la France du peuple. Car c’est sa cible privilégiée, Enthoven, le peuple. Sorte de Pompadour républicaine, poudrée jusqu’à l’os, dégoulinante de rimmel et râpée par les gommages, la marquise se transforme en gorgone dès qu’on brandit la moindre nuance pour contrer son argumentaire, s’empourpre, s’engorge et sombre dans l’invective la plus crasse. Mais d’où lui vient cette colère, cette haine ? Peut-être d’avoir brusquement découvert la vraie France, une force non-contourée par le triangle d’or jacobin – parfaitement circonscrit entre le Flore et le Baron, Enthoven, la France, il ne connaît pas. Il la craint et il la déteste. Son cri de guerre, c’est « mort au peuple », et il l’assène depuis deux ans, manticore miniature hissé sur son perchoir : quand ce n’est pas sur les plateaux des émissions les plus condescendantes du PAF, c’est sur Twitter que le filousophe bave sa haine et déverse des tombereaux d’insultes et d’imprécations. Raphaël Enthoven est aussi philosophe que Cyril Hanouna est politologue. Dans un monde où tout est globalement inversé, soyons certains que celui qui se bombarde « franc-tireur » est à peu près l’inverse.

Et puis, cette passion pour les réseaux sociaux, ces sarcophages de la pensée où tout discours s’éreinte, siloté à jamais, asphyxié par les flatulences de voix bavardes cousues ensembles, couturées sur le fil des méchancetés. On est toujours subjugué lorsque les puissants s’emparent des réseaux sociaux à leur tour. Enthoven, faute de produire du logos, il aime ça, Twitter : il va jusqu’à poster 10 contributions par jour, comme n’importe quel adolescente en pleine poussée d’acné, comme Donald Trump qu’il déteste pourtant du plus profond de son être, comme ce « peuple » qu’il dénonce et qu’il méprise. Mais que combat au juste Enthoven, pourquoi met-il autant d’énergie à condamner, à lancer des anathèmes, quelle est cette république qu’il défend et qui semble se résumer à quelques stimuli démagogiques ? Ce qu’il défend en somme, c’est la France des Boomers, c’est la France qui grasseye sur ses mondanités, sur ses privilèges, c’est la France des Deux-Magots, c’est la France-Inter, c’est à dire la France des intermissions et des passations de pouvoir tout en souplesse, c’est la République oligarchique, mafieuse, liberticide, qui insulte au lieu de proposer (comme le fait Macron) qui condamne au lieu d’inventer (comme le fait Macron) qui éborgne au lieu de discuter (comme le fait Macron). Il y a deux jours, réagissant au vote du premier tour, le personnage aura cette parole infâme, d’une cuistrerie et d’un mépris souverain :

« Je m’étonne qu’un pays encore une fois qui est en bonne santé, qui fonctionne, qui vit, qui repart, qui a de l’influence, qui est en pointe de la lutte contre l’islamisme, dont la bouffe est sublime et dont l’équipe de foot championne du monde, je veux dire, je m’étonne que ce pays-là joue au con à ce point avec son bulletin dans l’urne ».

Plus populiste que le peuple, voilà son vrai visage, le visage de la beauferie, le visage des parvenus décomplexés

Voilà donc à quoi se résume la France pour le brillant philosophe : la « bouffe », le football et la lutte contre les babouchards. Plus populiste que le peuple, voilà son vrai visage, le visage de la beauferie, le visage des parvenus décomplexés. On cherche toujours dans ses paroles quelques miettes de pensée, on cherche du Proclus, on tombe sur du Benzéma, on cherche du Ellul, on choppe du Jean Roucas.

Pauvre philosophie ! Entre le quincaillier Michel Onfray, et cette gravure de mode dans laquelle glaviotent des hémines de fiel, la philosophie française n’est plus ce qu’elle était. Mais au fond, elle est morte depuis longtemps, et c’est sur sa charogne que dansent ces fossoyeurs de la pensée, ces think-tankers de l’Occident. Voilà qui nous rappelle une parole du sublime Paul Nizan, qui formulait déjà à 27 ans son adieu à la philosophie dans Les Chiens de garde, dégoûté par la tournure qu’avait prise la science des sciences : « La philosophie bourgeoise au temps de son adolescence a pris elle-même un parti qui était celui des opprimés, qui était celui de la bourgeoisie opprimée. Tout le malheur vient de la propre distraction de ses représentants : aucun n’a vu se transformer en philosophie des oppresseurs ce qui avait été la philosophie des opprimés ». Presque 100 ans plus tard, rien n’a changé, cette philosophie d’épiciers est devenue une nouvelle cléricature, la plus ignoble de toutes puisqu’elle se présente désormais comme laïque, puisqu’elle se pare des oripeaux du progressisme : c’est cette « philosophie » dont nous subissons encore aujourd’hui l’intarissable nullité.

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