Art de la guerre monétaire et économique

Jean Pierre Petit : Retour des M&A (I)

Directeur de la recherche économique et de la stratégie d’ Exane-BNP Paribas jusque fin 2008, Il a été auparavant (1995-1999) adjoint au directeur des études économiques de la BNP, adjoint de direction à la Banque de France et consultant pour le Fonds monétaire international (1986-1994). Il est diplômé de Sciences Po Paris, détient une maîtrise en droit et est titulaire d’un DEA d’économie internationale. Jean Pierre Petit est l’auteur de plusieurs ouvrages dont, La finance, autrement (en collaboration, Dalloz, 2005).Aujourd’hui devenu stratégiste de marché indépendant il continue de collaborer  de manière régulière à divers revues et journaux économiques et financiers. Voici le 16ème billet d’une série qui lui est consacrée…

Au niveau mondial, le montant des fusions-acquisitions a chuté de 38% sur les neuf premiers mois de 2009 par rapport à la période équivalente de 2008. Aux Etats- Unis, les opérations en valeur sont retombées sur les niveaux de 2003 et 1995, qui constituent le plancher des deux dernières vagues.

Tout pousse à croire que les conditions sont aujourd’hui réunies pour un puissant redémarrage des opérations.

PLUS DE DETAILS EN SUIVANT :

Si l’on s’appuie sur l’exemple américain, on compte historiquement six grandes vagues de fusions-acquisitions dans l’histoire depuis le début du XXème siècle ;

 1) Celle de 1897-1904 qui vit une vague particulièrement massive (disparition d’un tiers des firmes américaines).

La capitalisation boursière d’United Steel Corporation représentait ainsi plus de 7% du PIB en 1901 ( contre 6,5% par Microsoft en mars 2000) ;

 2) celle de la deuxième moitié des années 20,

mouvement qui s’expliquait en réaction à la législation anti-trust et qui accompagna la bulle actions

; 3) celle de la deuxième moitié des années 60 où les opérations furent principalement conglomérales aux Etats-Unis (General Electric) ;

4) celle de la deuxième moitié des années 80 horizontales et souvent hostiles) ;

5) celle de la deuxième moitié des années 90 qui fut la plus massive au plan mondial ( plus de 10% du PIB mondial en 2000) tout en étant la plus internationale et qui accompagna la bulle actions ;

6) celle enfin de 2004-2007 qui fut moins importante (7,5% du PIB mondial en 2007), mais plus internationale ; 45% des opérations étaient transfrontalières en 2007 contre 35% en 1999 ; surtout elles associaient pour la première fois les pays émergents comme acteurs des opérations (à travers les multinationales émergentes ou les fonds souverains).

On peut donc constater un resserrement des deux dernières vagues et une amplification des mouvements quant aux montants concernés.

C’est la raison pour laquelle le rebond futur ne signifiera pas une nouvelle vague « autonome » de fusions acquisitions. Il s’agira plus fondamentalement de la poursuite d’une logique structurelle entamée depuis les années 90, dont les catalyseurs principaux sont l’innovation technologique (pharmacie, télécoms, software,…), les surcapacités (télécoms, finance, service aux collectivités, métaux et mines,…) et, plus généralement, la mondialisation.

Cette logique avait simplement été interrompue par l’éclatement de la bulle boursière en 2000-2002 et par le grand marché baissier de 2007-2009. Pour le reste, les conditions micro et macro-financières sont favorables à une nouvelle vague d’opérations. Le ratio de fusions en pourcentage du PIB (ou en pourcentage de la capitalisation boursière) aux Etats-Unis est aux niveaux de 1995 et 2004, qui avaient été marqués par une forte accélération de l’activité des fusions- acquisitions.

Les valorisations sont correctes et ne progressent que modérément. Le rebond des profits est, pour le moment assez nettement supérieur a celui d’une récession moyenne d’après guerre. Cela est dû au rebond très fort des profits macroéconomiques financiers qui ont plus que doublé depuis le point bas du quatrième trimestre 2009. La confiance des entreprises industrielles et des consommateurs est fortement remontée dans les deux zones avec un retour à des niveaux « pré Lehman ». Le rendement des actions est revenu à un niveau historiquement élevé tandis que la vague des rachats d’actions s’est arrêtée avec la crise. Les entreprises américaines ont désormais une masse de cash disponible pour l’actionnaire ou pour des acquisitions. L’endettement des entreprises non financières est relativement peu élevé par rapport aux points bas des cycles précédents (2001, 90-91, 80-82, 73-75). Le service de la dette apparaît aussi tout à fait raisonnable rapporté au cash flow: il se situe aux niveaux de 1995 et 2002 qui avaient marqué le début des deux précédentes vagues.

Bref, l’ensemble des conditions semble réuni pour amorcer un nouveau cycle de fusions-acquisitions.

JEAN-PIERRE PETIT  stratégiste de marché nov09

EN COMPLEMENT INDISPENSABLE : Vers une reprise en bonne marche des fusions-acquisitions (cliquez sur le lien)

4 réponses »

  1. Bonjour Lupus,

    Je me permets une question qui n’a pas de rapport avec ce sujet: que pensez-vous du problème soulevé par la volonté de notre état de lever dans les 200 milliards et des menaces à peine voilées de l’Europe et des agences de notations de dégrader la note de notre pays au cas où il le ferait?

    • Bonsoir Dardevil, je pense qu’il est grand temps d’arréter la folie spoliatrice conjuguée à la plus totale des incompétences de nos « chers tètes gouvernantes »pour tenter de les remettre dans le droit chemin…et que toute bonne volontée mème émante d’agence de notation corrompue (par leur clientélisme exacerbée) ou du politburo bruxellois et qui iraient dans ce sens, sont bonnes à prendre…. et à soutenir !!!!

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