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Irlande : la facture totale du sauvetage des banques atteint 90 milliards de francs suisses, soit 55% du PIB. C’est un des plans de sauvetage bancaire les plus chers de l’histoire

Irlande : la facture totale du sauvetage des banques atteint 90 milliards de francs suisses, soit 55% du PIB. C’est un des plans de sauvetage bancaire les plus chers de l’histoire

L’Irlande nationalise ses banques et  Dublin va injecter 24 milliards d’euros dans son secteur bancaire

L’Irlande a terminé ce jeudi la complète nationalisation de son secteur bancaire. Forcé par le plan de sauvetage de l’Union européenne et du Fonds monétaire international de réaliser de nouveaux stress-tests de ses banques, le pays en a publié les résultats: il faut injecter 24 milliards d’euros supplémentaires pour recapitaliser les établissements financiers. 

Les banques irlandaises étant incapables de lever ces nouveaux fonds, l’argent viendra du gouvernement. Cela signifie donc que les deux dernières banques qui avaient échappé au contrôle de l’Etat (Irish Life & Permanent et Bank of Ireland) vont être nationalisées. Si elles restent cotées en bourse, l’Etat en possédera plus de 50%. Les quatre autres avaient déjà été nationalisées. Trois ans après le début de la crise, le gouvernement irlandais se retrouve donc au contrôle de l’ensemble des six banques irlandaises.

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 Le chiffre de 31 milliards de francs est cependant un demi-soulagement: il ne dépasse pas la somme maximum de 45 milliards francs qui était prévue pour les banques lors du plan de sauvetage. Il n’en est pas moins inquiétant: seuls 13 milliards devaient être initialement débloqués, le reste étant en principe des réserves. Avec ces nouveaux stress-tests, la facture totale du sauvetage des banques atteint 90 milliards de francs, soit 55% du PIB. «C’est un des plans de sauvetage bancaire les plus chers de l’histoire», reconnaît Patrick Honohan, le gouverneur de la banque centrale d’Irlande. 

Dernier point: le gouvernement a décidé de ne pas demander aux détenteurs d’obligations «seniors» des banques de partager les pertes. Après avoir hésité, il a visiblement jugé que le risque de provoquer une panique était trop fort.

Deux banques sont fermées et toutes doivent réduire leur taille

En annonçant ce jeudi une cinquième recapitalisation de ses banques en moins de trois ans, portant la facture totale à 90 milliards de francs, le gouvernement irlandais a aussi tenté de tirer un trait final derrière cette crise. Pour cela, en échange de l’injection d’argent, il met en place une profonde restructuration du secteur bancaire. De six établissements qui existaient il y a deux ans, il n’en restera que trois. 

La première étape de cette restructuration avait été décidée à la fin de l’année dernière: les deux banques les plus touchées par la crise, Anglo-Irish Bank et Irish Nationwide Building Society (INBS), sont progressivement en train d’être fermées. Entièrement nationalisées, elles ont reçu l’ordre en février de transférer leurs dépôts: ceux d’Anglo-Irish vont à Allied Irish Bank, tandis que ceux d’INBS passent à Irish Life & Permanent. 

Ce jeudi, le gouvernement a ordonné une deuxième étape. Il entend reconstruire le secteur bancaire irlandais autour de deux piliers. Le premier est Bank of Ireland, qui est restée une banque réputée solide, malgré sa nationalisation à plus de 50%. Le second est la surprise de l’annonce de ce jeudi: une fusion entre Allied Irish Bank, la deuxième banque du pays, et EBS Building Society, la cinquième banque. Le gouvernement peut facilement imposer cela: EBS est entièrement nationalisée, et AIB lui appartient à 93% (un chiffre qui va augmenter à quasiment 100% avec le renflouement décidé ce jeudi). 

Activités à céder 

A ces deux piliers s’ajoutera un dernier petit établissement: Irish Life & Permanent. Celui-ci était le seul qui avait réussi jusqu’à ce jeudi à éviter toute injection de capital du gouvernement. Mais il a finalement dû accepter 5 milliards de francs, ce qui fait passer l’Etat à plus de 50% de participation. 

A cette restructuration s’ajoute une condition essentielle: ces nouveaux établissements doivent suivre une vaste cure d’amaigrissement. Les banques devront se recentrer sur l’Irlande, et fortement réduire leur taille: elles devront fermer ou vendre pour 63 milliards d’euros d’actifs d’ici à 2013. Chacune devra créer une «mauvaise banque», où seront réunis les actifs les plus toxiques. Quitte parfois à vendre les bijoux de famille. Irish Life & Permanent devra par exemple vendre sa division d’assurance vie, un secteur dont il est pourtant le leader irlandais. Les autres banques sont aussi priées de céder leurs activités à l’étranger.Ce qui mène à un paradoxe: pour faire face à la crise, les banques irlandaises se recentrent sur la partie la moins rentable de leur activité 

Reste à savoir si cette nouvelle recapitalisation permettra enfin de tirer un trait sur la crise.

On peut, par exemple, se demander si un test de résistance faisant l’hypothèse d’une perte de seulement 6,7% sur les portefeuilles de prêts hypothécaires est vraiment aussi prudent que l’affirme la banque centrale. Mais si cette dernière a raison, cette nouvelle rallonge devrait permettre au grandes banques irlandaises de conserver un ratio de fonds propres durs « core Tier 1 » supérieur à 6% dans un scénario économique plus rude que celui prévu par les tests de résistance que doivent passer les banques européennes, et dans le même temps d’abaisser leur ratio prêts sur dépôts de 180% à 122,5%. 

Inévitablement, le fardeau supplémentaire que ces injections de capitaux vont faire peser sur les épaules du contribuable va raviver encore le débat pour savoir s’il ne faudrait pas faire payer un peu les détenteurs d’obligations senior, qui tirent une nouvelle fois leur épingle du jeu. 

Mais c’est une polémique stérile. Le véritable point crucial de la catastrophe bancaire irlandaise est que la Banque centrale européenne, par le biais de ses propres facilités et de celles de la banque centrale irlandaise, fournit à présent environ 188 milliards d’euros de liquidités au système bancaire irlandais, ce qui équivaut à 120% du PIB. Si les détenteurs d’obligations semblent s’en sortir indemnes, leur dette n’a pas disparu mais a seulement pris une autre forme. Tôt ou tard, un défaut semble inévitable.Il ne s’agit pas de décider s’il faut infliger des pertes aux créanciers, mais simplement à quelles classes d’actifs appliquer une décote, et quand. Les autorités de la zone euro ne semblent pas pressées de prendre cette décision. Tant qu’elles ne l’auront pas fait, l’Irlande restera dans les limbes économiques. 

Par Eric Albert Londres/le temps avril11

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