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Le financement par titrisation en République Populaire de Chine

On avait à peine découvert l’existence de marchés financiers en République Populaire de Chine  (RPC) que nous voici confrontés aux défis d’intégrer la force de frappe de ses nouveaux mastodontes de la finance internationale….

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Bien qu’ayant subi les conséquences commerciales des crises financières chez ses partenaires en 1997-8, la RCP avait alors évité la crise financière. Par contre, en 2007-9, les institutions financières chinoises ont vraisemblablement perdu une centaine de milliards de dollars sur leurs investissements, au sommet de la crête, dans AIG, Fannie Mae, Freddie Mac, Morgan Stanley, Blackstone et Fortis. Sur le plan intérieur, les autorités chinoises ont dû soutenir les établissements en Chine des institutions financières étrangères pour éviter que leur solvabilité soit compromise par un manque de confiance parmi leurs contreparties institutions financières chinoises. Autant le cadre de régulation chinoise doit prévenir l’importation de crises financières étrangères, autant l’intégrité des marchés financiers chinois est devenue un souci global.

Le système financier chinois est-il exposé à des risques comparables à ceux dont les conséquences ont bouleversé le monde en 2007-2009 ?

S’agissant de l’octroi abusif d’hypothèques et autres crédits et de leur titrisation outrancière au regard des risques de défaillances des emprunteurs en tant que facteurs contribuant au déclenchement de la récente crise globale, on peut constater qu’en RPC ces activités demeurent relativement peu développées. Le recours au crédit est une nouvelle expérience pour le peuple chinois et cette habitude se répand graduellement. Certains aspects du cadre réglementaire freinent l’expansion du financement par la titrisation.

Par contre, il n’y a aucun doute quant à la volonté des autorités chinoises de favoriser ces moyens de financement.  

La titrisation

Dès 1996, le gouvernement de Zhuhai a titrisé à l’étranger les recettes d’autoroutes et d’immatriculations de véhicules. En 1997 et 1998, China Ocean Shipping Company a titrisé ses créances-clients.  En 2003-4, des prêts douteux ont été transférés par des banques chinoises à des trusts constitués sous la Trust Law de 2001 dans des opérations initiées par China Huarong Asset Management et Industrial and Commercial Bank of China (ICBC).

Mais, ce n’est qu’en 2005 que la PBOC a promulgué les mesures provisoires pour l’administration de projets pilotes de titrisation de créances (« Administration of Pilot Projects for Securitization of Credit Assets Procedures ») afin d’encadrer deux projets spécifiques initiés par China Construction Bank et China Development Bank. En 2007, Shanghai Pudong Development Bank réussi une opération structurée pour RMB 4,38 milliards en « collataralized loan obligations » (CLOs), une variante plus raffinée des ABSs. A suivi rapidement une opération montée par ICBC pour RMB 4 milliards adossés à 60 prêts accordés à 34 emprunteurs répartis sur quatre provinces.

 D’autre part, des opérations assimilables à de la titrisation sont réalisées en utilisant des sociétés faisant appel public à l’épargne et tombant donc sous l’égide la China Securities and Regulatory Commission (CSRC). China United Telecommunications a innové en utilisant cette structure pour titriser des recettes sur des contrats de location de ce genre en 2005. En 2007, CIBC a réussi une opération portant sur RMB 5,23 milliards en de prêts. En 2008, RMB 1,8 milliards en recettes sur ventes à terme d’automobiles ont été titrisés par GMAC-SAIC et China Construction Bank a réussi une opération de titrisation de prêts bancaires douteux.

Depuis 2008, les PBC, CBRC, CSRC, CIRC annoncent que la titrisation sera utilisée pour financer les travaux de recontrustruction au Sichuan après le tremblement de terre.

La volonté des autorités chinoises de provoquer et de soutenir le développement d’opérations structurées semble réelle et les moyens juridiques suffisent pour assurer la bonne fin, sans être pour autant imperfectibles. Par exemple, il conviendrait d’élargir le champ d’application des dispositions afin d’ouvrir le marché à de nouveaux entrants, initiateurs ou négociateurs d’instruments sur le second marché. Il conviendrait de clarifier le sens attribué à l’expression « créance » qui ne comprend pas clairement des formes de crédits autres que les prêts, que sont les dettes sur cartes de crédit ou les contrats de leasing.

Le 15 juin 2005, la PBOC a stipulé que, pour être admise au marché interbancaire, toute émission de valeurs titrisées (« asset-backed securities – ABSs ») doit correspondre à au moins RMB 500 millions et le montant de chaque tranche doit correspondre à au moins RMB 200 millions.

Les ABSs sont échangés sur le marché interbancaire. Ils font l’objet de rapports d’évaluation (« ratings ») par des cabinets agréés qui se prononcent impartialement et équitablement.

Dans leurs rapports périodiques, les banques commerciales doivent divulguer les résultats de leurs activités de titrisation.

Il est interdit à l’initiateur de toute émission de valeurs mobilières titrisées de les souscrire ou des les échanger.

Le National Inter-bank Lending and Borrowing Centre (NILBC) surveille les échanges sur ce marché.

La China Clearing Corporation (CCC) assure l’exécution de la compensation des ordres au quotidien.

Bref, la titrisation en RPC ne doit pas être considérée comme ayant encore atteint un volume susceptible d’engendrer des risques systémiques.

Conclusion

Malgré toutes les complexités et aussi les conditions défavorables du marché actuel, les autorités chinoises n’ont pas du tout renoncé à l’expansion de la titrisation en tant que moyen de financer le développement. Il importe donc pour les observateurs étrangers de rester attentifs non seulement aux possibilités d’affaires dont les politiques actuelles augurent, mais aussi de rester vigilants quant aux risques du marché financier chinois pour la stabilité financière internationale.

Publié le 01 Décembre 2009 EB

Daniel Arthur Laprès Avocat à la Cour d’Appel de Paris, Barrister et Solicitor, Nouvelle Ecosse, Canada, Conseiller spécial auprès de Kunlun Law Firm, Beijing, Chine

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