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Matières Premières/Endowment : Comment atteindre une performance annuelle moyenne de 17% pour le compte de Yale.

David Swensen dirige depuis 1985 les investissements de la fondation («endowment») de l’Université de Yale, soit 17 milliards de dollars. Sa mission: fournir des  ressources à l’institution et préserver les actifs de la fondation sur le  très long terme. Il a accordé une  interview exclusive à l’Agefi en  marge d’une conférence qu’il a donnée mercredi dernier à Genève à l’invitation de la Financière de la Cité.

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Le CIO de l’Université de Yale détaille sa stratégie. Et met en avant la qualité des personnes comme critère d’investissement

Depuis votre entrée en fonction, vous avez dégagé une performance annuelle moyenne de 17% pour le compte de Yale.Comment?

Nous avons adopté une position fondamentalement différente de celle qui dominait dans les années 1990, qui était marquée par une forte proportion d’actions cotées et beaucoup d’obligations. Ayant un horizon d’investissement à très long terme, nous avons quasiment exclu les obligations et très peu investi dans les actions, au profit d’actifs réels comme les matières premières (pétrole, gaz, bois par exemple), l’immobilier, le private equity. Nous avons toujours pratiqué une diversification extrême.

Quel est l’intérêt de détenir des actifs réels?

Ils génèrent des performantes  équivalentes à celle des marchés, mais de façon différente. Parexemple, une inflation non anticipée sera mauvaise pour les actionsmais favorable aux prix de l’énergie. La création de valeur vient donc de différentes sources de performance sur le long terme.

Quelle est l’allocation du portefeuillede l’Université de Yale?

Nous avons environ 30% de private equity (buyouts et venture capital), environ 30% d’actifs réels(immobilier, bois, énergie), environ 20% de hedge funds absolute return, 5% de fixed income, 8%d’actions américaines et 7% d’actionsinternationales.

Les pays émergents: une opportunitépour votre fondation? 

Nous cherchons des opportunités en Chine. La difficulté consiste à identifier des sociétés dont le management s’applique à générer de la performance pour les actionnaires. C’est déjà difficile en Occident,alors en Chine…

(rires)Quels sont vos principaux critères pour sélectionner un investissement dans le private equity?

Un seul critère: la qualité des gens, des dirigeants. Tout vient de là.L’intégrité, l’intelligence, la volonté de travailler dur. De vrais boy scouts, quoi!

Votre allocation, en particulier la faible part en action, évolue-telle avec la conjoncture?

Absolument pas. Nous avons toujours pratiqué de cette façon, quels que soient les marchés.

Vous attendez-vous à une forte inflation à l’avenir et si oui,comment avez-vous décidé de vous protéger?

Il est probable que les programmes de stimulus finissent par déclencher de l’inflation. Il s’agit donc de structurer le portefeuille pour se protéger. C’est délicat car nous ne savons pas d’où viendra l’inflation: d’une nouvelle bulle sur certains actifs? Des matières premières? Nous avons choisid’avoir une exposition considérable aux actifs réels et d’être extrêmement diversifié car nous ne savons pas de quoi l’avenir sera fait.

Vous n’investissez donc pas en fonction du scénario macro qui vous paraît le plus probable?

Non, nous imaginons plusieurs scénarios mais nous n’en privilégions aucun. Nous testons les réactions du portefeuille à ces différentes conjonctures.

Vous parlez de principes très simples. Pourquoi la majorité des investisseurs ne parvient-elle pas à atteindre 17% de performance comme vous alors?

Car les investisseurs ont affaire à des organisations dont le but consiste à faire des bénéfices tout en ayant une responsabilité fiduciaire vis-à-vis de leurs clients.Or dans le conflit d’intérêt qui peut naître de ces objectifs parfois contradictoires, la motivation de réaliser des bénéfices l’emporte souvent. Au détriment de l’investisseur.

Comment sortir de cette logique?

Deux solutions existent. La première passe par une approche très active de l’investissement et s’appuyant sur des ressources de haute qualité, dans le but de battre le marché. La seconde consiste à investir dans des instruments qui répliquent ce que fait le marché, en payant les frais les plus faibles possible.

Le problème est que la plupart des investisseurs se trouvent entre ces deux options : ils paient des commissions élevées pour une performance décevante. Ils tentent de battre le marché de manière trop désinvolte.

Que faut-il pour battre le marché alors?

De l’expertise et du temps. Au lieu de ça, les investisseurs choisissent des produits trop chers et prennent constamment des décisions d’investissement erronées. Comme  acheter au pus haut et vendre au plus bas.

Quel jugement portez-vous sur l’action de Ben Bernanke à la tête de la Réserve fédérale?

Je lui attribue une très bonne note pour la façon dont il a agi.

Les programmes de stimulus publics étaient-ils la seule option possible?

Même si c’est extrêmement difficile,une crise offre toujours des opportunités d’imprimer des changements fondamentaux au système. Nous sommes en train de gâcher cette grande crise, c’est dommage.

EN COMPLEMENT : Les endowments des Universités américaines n’ont pas eu une bonne année 2009 (cliquez sur le lien)

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